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30/12/2014 | FRANCE | N°361842

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème ssr, 30 décembre 2014, 361842


Vu le pourvoi, enregistré le 10 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre délégué, chargé du budget ; il demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 10VE01167,10VE01909 du 3 juillet 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles, après avoir annulé l'article 3 du jugement n° 0704632,0808091 du tribunal administratif de Montreuil du 11 février 2010, d'une part, a rejeté le recours qu'il a avait formé contre celui-ci, d'autre part, sur l'appel interjeté par la Versorgungswerk der Zahnärztekammer aus Berlin (VZB), a acc

ordé à celle-ci la restitution du solde de la retenue à la source ...

Vu le pourvoi, enregistré le 10 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre délégué, chargé du budget ; il demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 10VE01167,10VE01909 du 3 juillet 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles, après avoir annulé l'article 3 du jugement n° 0704632,0808091 du tribunal administratif de Montreuil du 11 février 2010, d'une part, a rejeté le recours qu'il a avait formé contre celui-ci, d'autre part, sur l'appel interjeté par la Versorgungswerk der Zahnärztekammer aus Berlin (VZB), a accordé à celle-ci la restitution du solde de la retenue à la source ayant grevé les dividendes de source française qui lui ont été versés en 2003 et 2004, enfin, a rejeté le surplus des conclusions de sa requête d'appel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne ;

Vu la convention entre la République française et la République fédérale d'Allemagne en vue d'éviter les doubles impositions et d'établir des règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune du 21 juillet 1959 modifiée ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu les arrêts de la Cour de justice des Communautés européennes du 14 septembre 2006, Centro di musicologia Walter Stauffer (aff. C 386/04) et du 27 janvier 2009 Hein Persche (aff. 318/07);

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Japiot, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la Versorgungswerk der Zahnarztekammer aus Berlin ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la Versorgungswerk der Zahnärztekammer aus Berlin (VZB), caisse de retraite des dentistes du Land de Berlin, a perçu, en 2003 et 2004, des dividendes de source française qui ont été soumis à une retenue à la source de 25%, en application des dispositions combinées du 2 de l'article 119 bis et du 1 de l'article 187 du code général des impôts ; qu'elle en a demandé la restitution partielle en se prévalant du taux réduit de 15 % prévu à l'article 9 de la convention fiscale franco-allemande du 21 juillet 1959 ; qu'après le rejet de sa réclamation, elle en a demandé le remboursement total sur le fondement des libertés de circulation garanties par le traité instituant la Communauté européenne ; que cette seconde demande a également été rejetée ; que, par un jugement en date du 11 février 2010, le tribunal administratif de Montreuil a accordé à la VZB la restitution partielle de la retenue à la source en retenant l'application du taux réduit de 15 % ; que le ministre délégué, chargé du budget, se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 3 juillet 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles, après avoir annulé l'article 3 de ce jugement, a, d'une part, rejeté le recours formé contre celui-ci par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, et, d'autre part, sur l'appel interjeté par la VZB, a accordé à celle-ci, sur le fondement de la liberté de circulation des capitaux, la restitution du solde de la retenue à la source ayant grevé les dividendes de source française qui lui ont été versés en 2003 et 2004 ;

2. Considérant qu'aux termes du 2 de l'article 119 bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " 2. Les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187-1 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France. (...) " ; qu'en vertu des dispositions du 1 de l'article 187 du même code, le taux de la retenue à la source est fixé, sauf pour les exceptions qu'il énumère, à 25 % des revenus concernés ; qu'aux termes du 5 de l'article 206 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " (...) les associations et collectivités non soumis à l'impôt sur les sociétés en vertu d'une autre disposition sont assujettis audit impôt en raison : / (...) c. Des revenus de capitaux mobiliers dont ils disposent, à l'exception des dividendes des sociétés françaises, lorsque ces revenus n'entrent pas dans le champ d'application de la retenue à la source visée à l'article 119 bis (...) " ; qu'en vertu du 5° bis du 1 de l'article 207, les organismes sans but lucratif mentionnés au 1° du 7 de l'article 261 sont exonérés d'impôt sur les sociétés pour les opérations à raison desquelles ils sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'aux termes des stipulations du 1 de l'article 56 du traité instituant la Communauté européenne, alors en vigueur, devenu l'article 63 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne : "Dans le cadre des dispositions du présent chapitre, toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les États membres (...) sont interdites " ;

3. Considérant que, si, en vertu des dispositions citées au point 1 du c du 5 de l'article 206 du code général des impôts, combinées avec notamment celles de son 1 et avec celles du 5° bis du 1 de l'article 207, un organisme établi en France ayant pour objet de servir des pensions de retraite, tel qu'une caisse de retraite de base ou complémentaire, ou une société mutualiste, dont la gestion est désintéressée et dont les activités non lucratives restent significativement prépondérantes, est assujetti à l'impôt sur les sociétés à raison des revenus de capitaux mobiliers dont il dispose, les dividendes de sociétés établies en France perçus par cet organisme ne sont pas imposables ; que l'application de la retenue à la source au versement de dividendes de sociétés françaises à des organismes installés dans un autre Etat membre remplissant les mêmes conditions, constitue ainsi une restriction aux mouvements de capitaux ; que le régime d'exonération prévu par les dispositions des articles 206 et 207 du code général des impôts étant applicable à des associations, fondations et autres organismes à raison du caractère non lucratif de leur activité et non d'une charge d'intérêt général qui pèserait sur les seuls organismes résidents de France, cette restriction à la liberté de circulation des capitaux ne saurait être justifiée, pour ce motif, par l'existence d'une différence de situation objective entre organismes français et allemands ; qu'ainsi, et faute que soit établie l'existence d'une raison impérieuse d'intérêt général, cette restriction méconnaît les stipulations de l'article 56 du traité instituant la Communauté européenne en tant qu'elle prive tout organisme installé dans un autre Etat membre de la faculté d'apporter la preuve qu'il pourrait bénéficier, s'il était établi en France, de l'exonération d'impôt sur les sociétés prévue au c du 5 de l'article 206 à raison de la perception de dividendes de sociétés françaises ; qu'il appartient, à cette fin, à cet organisme d'établir, d'une part, que sa gestion présente un caractère désintéressé et, d'autre part, que les services qu'il rend ne sont pas offerts en concurrence dans la même zone géographique d'attraction avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique ; que, toutefois, même dans le cas où cet organisme intervient dans un domaine d'activité et dans un secteur géographique où existent des entreprises commerciales, il peut bénéficier de cette exonération s'il exerce son activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, soit en répondant à certains besoins insuffisamment satisfaits par le marché, soit en s'adressant à un public qui ne peut normalement accéder aux services offerts par les entreprises commerciales, notamment en pratiquant des prix inférieurs à ceux du secteur concurrentiel et, à tout le moins, des tarifs modulés en fonction de la situation des bénéficiaires, sous réserve de ne pas recourir à des méthodes commerciales excédant les besoins de l'information du public sur les services qu'il offre ;

4. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Versailles a estimé qu'il résultait de l'instruction que la VZB devait être regardée comme ayant un objet social à but non lucratif dès lors qu'il s'agissait d'un organisme d'assurance retraite allemand à l'affiliation duquel étaient astreints les dentistes, qu'elle était placée sous la surveillance du Land de Berlin, que l'intégralité des fonds et des actifs dont elle disposait était affectée au financement des diverses prestations sociales qu'elle servait à ses assurés et qu'il n'existait pas de différence de situation objective entre les organismes français de même nature et elle-même ; qu'il résulte, toutefois, de ce qui a été dit ci-dessus que si la cour devait prendre en compte les règles spécifiques auxquelles cet organisme était soumis dans son Etat de résidence afin d'apprécier si elle satisfaisait aux conditions mentionnées au point 3, elle a commis une erreur de droit en ne recherchant pas si l'ensemble de celles-ci étaient remplies, et en particulier si la gestion de la VZB présentait un caractère désintéressé ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre délégué, chargé du budget, est fondé, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de son pourvoi, à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ;

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 3 juillet 2012 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : Les conclusions de la VZB présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre des finances et des comptes publics et à la Versorgungswerk der Zahnärztekammer aus Berlin (VZB).


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème ssr
Numéro d'arrêt : 361842
Date de la décision : 30/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES ET UNION EUROPÉENNE - RÈGLES APPLICABLES - LIBERTÉS DE CIRCULATION - LIBRE CIRCULATION DES CAPITAUX - 1) RETENUE À LA SOURCE SUR LES BÉNÉFICES DISTRIBUÉS PAR DES SOCIÉTÉS FRANÇAISES À DES PERSONNES ÉTABLIES HORS DE FRANCE (ART - 119 BIS - 2 DU CGI) - APPLICATION AUX DIVIDENDES DISTRIBUÉS AUX ORGANISMES INSTALLÉS DANS UN AUTRE ETAT MEMBRE QUE LA FRANCE AYANT POUR OBJET DE SERVIR DES PENSIONS DE RETRAITE - DONT LA GESTION EST DÉSINTÉRESSÉE ET DONT LES ACTIVITÉS NON LUCRATIVES RESTENT SIGNIFICATIVEMENT PRÉPONDÉRANTES - ALORS QUE LES DIVIDENDES PERÇUS PAR UN ORGANISME DE MÊME NATURE ÉTABLI EN FRANCE NE SONT PAS IMPOSABLES - ENTRAVE INJUSTIFIÉE À LA LIBRE CIRCULATION DES CAPITAUX (ART - 56 DU TCE) - EXISTENCE [RJ1] - 2) PREUVE À APPORTER PAR CES ORGANISMES INSTALLÉS DANS UN AUTRE ETAT MEMBRE POUR BÉNÉFICIER DE L'EXONÉRATION D'IMPÔTS SUR LES SOCIÉTÉS POUR LES DIVIDENDES QU'ILS PERÇOIVENT - GESTION DÉSINTÉRESSÉ ET SERVICES RENDUS NON CONCURRENTS DE CEUX PROPOSÉS PAR DES ENTREPRISES COMMERCIALES - CAS PARTICULIER OÙ L'ORGANISME INTERVIENT DANS UN DOMAINE D'ACTIVITÉ ET DANS UN SECTEUR GÉOGRAPHIQUE OÙ EXISTENT DES ENTREPRISES COMMERCIALES - POSSIBILITÉ DE BÉNÉFICIER DE L'EXONÉRATION S'IL EXERCE SON ACTIVITÉ DANS DES CONDITIONS DIFFÉRENTES DE CELLES DES ENTREPRISES COMMERCIALES.

15-05-01-03 1) Si, en vertu des dispositions du c du 5 de l'article 206 du code général des impôts, combinées avec notamment celles de son 1 et avec celles du 5° bis du 1 de l'article 207, un organisme établi en France ayant pour objet de servir des pensions de retraite, tel qu'une caisse de retraite de base ou complémentaire, ou une société mutualiste, dont la gestion est désintéressée et dont les activités non lucratives restent significativement prépondérantes, est assujetti à l'impôt sur les sociétés à raison des revenus de capitaux mobiliers dont il dispose, les dividendes de sociétés établies en France perçus par cet organisme ne sont pas imposables.,,,L'application de la retenue à la source au versement de dividendes de sociétés françaises à des organismes installés dans un autre Etat membre remplissant les mêmes conditions, constitue ainsi une restriction aux mouvements de capitaux. Le régime d'exonération prévu par les dispositions des articles 206 et 207 du code général des impôts étant applicable à des associations, fondations et autres organismes à raison du caractère non lucratif de leur activité et non d'une charge d'intérêt général qui pèserait sur les seuls organismes résidents de France, cette restriction à la liberté de circulation des capitaux ne saurait être justifiée, pour ce motif, par l'existence d'une différence de situation objective entre organismes français et allemands. Ainsi, et faute que soit établie l'existence d'une raison impérieuse d'intérêt général, cette restriction méconnaît les stipulations de l'article 56 du traité instituant la Communauté européenne en tant qu'elle prive tout organisme installé dans un autre Etat membre de la faculté d'apporter la preuve qu'il pourrait bénéficier, s'il était établi en France, de l'exonération d'impôt sur les sociétés prévue au c du 5 de l'article 206 à raison de la perception de dividendes de sociétés françaises.,,,2) Il appartient, à cette fin, à cet organisme d'établir, d'une part, que sa gestion présente un caractère désintéressé et, d'autre part, que les services qu'il rend ne sont pas offerts en concurrence dans la même zone géographique d'attraction avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique. Toutefois, même dans le cas où cet organisme intervient dans un domaine d'activité et dans un secteur géographique où existent des entreprises commerciales, il peut bénéficier de cette exonération s'il exerce son activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, soit en répondant à certains besoins insuffisamment satisfaits par le marché, soit en s'adressant à un public qui ne peut normalement accéder aux services offerts par les entreprises commerciales, notamment en pratiquant des prix inférieurs à ceux du secteur concurrentiel et, à tout le moins, des tarifs modulés en fonction de la situation des bénéficiaires, sous réserve de ne pas recourir à des méthodes commerciales excédant les besoins de l'information du public sur les services qu'il offre.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - TEXTES FISCAUX - LÉGALITÉ ET CONVENTIONNALITÉ DES DISPOSITIONS FISCALES - LOIS - 1) RETENUE À LA SOURCE SUR LES BÉNÉFICES DISTRIBUÉS PAR DES SOCIÉTÉS FRANÇAISES À DES PERSONNES ÉTABLIES HORS DE FRANCE (ART - 119 BIS - 2 DU CGI) - APPLICATION AUX DIVIDENDES DISTRIBUÉS AUX ORGANISMES INSTALLÉS DANS UN AUTRE ETAT MEMBRE QUE LA FRANCE AYANT POUR OBJET DE SERVIR DES PENSIONS DE RETRAITE - DONT LA GESTION EST DÉSINTÉRESSÉE ET DONT LES ACTIVITÉS NON LUCRATIVES RESTENT SIGNIFICATIVEMENT PRÉPONDÉRANTES - ALORS QUE LES DIVIDENDES PERÇUS PAR UN ORGANISME DE MÊME NATURE ÉTABLI EN FRANCE NE SONT PAS IMPOSABLES - ENTRAVE INJUSTIFIÉE À LA LIBRE CIRCULATION DES CAPITAUX (ART - 56 DU TCE) - EXISTENCE [RJ1] - 2) PREUVE À APPORTER PAR CES ORGANISMES INSTALLÉS DANS UN AUTRE ETAT MEMBRE POUR BÉNÉFICIER DE L'EXONÉRATION D'IMPÔTS SUR LES SOCIÉTÉS POUR LES DIVIDENDES QU'ILS PERÇOIVENT - GESTION DÉSINTÉRESSÉ ET SERVICES RENDUS NON CONCURRENTS DE CEUX PROPOSÉS PAR DES ENTREPRISES COMMERCIALES - CAS PARTICULIER OÙ L'ORGANISME INTERVIENT DANS UN DOMAINE D'ACTIVITÉ ET DANS UN SECTEUR GÉOGRAPHIQUE OÙ EXISTENT DES ENTREPRISES COMMERCIALES - POSSIBILITÉ DE BÉNÉFICIER DE L'EXONÉRATION S'IL EXERCE SON ACTIVITÉ DANS DES CONDITIONS DIFFÉRENTES DE CELLES DES ENTREPRISES COMMERCIALES.

19-01-01-01-01 1) Si, en vertu des dispositions du c du 5 de l'article 206 du code général des impôts, combinées avec notamment celles de son 1 et avec celles du 5° bis du 1 de l'article 207, un organisme établi en France ayant pour objet de servir des pensions de retraite, tel qu'une caisse de retraite de base ou complémentaire, ou une société mutualiste, dont la gestion est désintéressée et dont les activités non lucratives restent significativement prépondérantes, est assujetti à l'impôt sur les sociétés à raison des revenus de capitaux mobiliers dont il dispose, les dividendes de sociétés établies en France perçus par cet organisme ne sont pas imposables.,,,L'application de la retenue à la source au versement de dividendes de sociétés françaises à des organismes installés dans un autre Etat membre remplissant les mêmes conditions, constitue ainsi une restriction aux mouvements de capitaux. Le régime d'exonération prévu par les dispositions des articles 206 et 207 du code général des impôts étant applicable à des associations, fondations et autres organismes à raison du caractère non lucratif de leur activité et non d'une charge d'intérêt général qui pèserait sur les seuls organismes résidents de France, cette restriction à la liberté de circulation des capitaux ne saurait être justifiée, pour ce motif, par l'existence d'une différence de situation objective entre organismes français et allemands. Ainsi, et faute que soit établie l'existence d'une raison impérieuse d'intérêt général, cette restriction méconnaît les stipulations de l'article 56 du traité instituant la Communauté européenne en tant qu'elle prive tout organisme installé dans un autre Etat membre de la faculté d'apporter la preuve qu'il pourrait bénéficier, s'il était établi en France, de l'exonération d'impôt sur les sociétés prévue au c du 5 de l'article 206 à raison de la perception de dividendes de sociétés françaises.,,,2) Il appartient, à cette fin, à cet organisme d'établir, d'une part, que sa gestion présente un caractère désintéressé et, d'autre part, que les services qu'il rend ne sont pas offerts en concurrence dans la même zone géographique d'attraction avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique. Toutefois, même dans le cas où cet organisme intervient dans un domaine d'activité et dans un secteur géographique où existent des entreprises commerciales, il peut bénéficier de cette exonération s'il exerce son activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, soit en répondant à certains besoins insuffisamment satisfaits par le marché, soit en s'adressant à un public qui ne peut normalement accéder aux services offerts par les entreprises commerciales, notamment en pratiquant des prix inférieurs à ceux du secteur concurrentiel et, à tout le moins, des tarifs modulés en fonction de la situation des bénéficiaires, sous réserve de ne pas recourir à des méthodes commerciales excédant les besoins de l'information du public sur les services qu'il offre.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES - RÈGLES GÉNÉRALES - IMPÔTS ET PRÉLÈVEMENTS DIVERS SUR LES BÉNÉFICES - 1) RETENUE À LA SOURCE SUR LES BÉNÉFICES DISTRIBUÉS PAR DES SOCIÉTÉS FRANÇAISES À DES PERSONNES ÉTABLIES HORS DE FRANCE (ART - 119 BIS - 2 DU CGI) - APPLICATION AUX DIVIDENDES DISTRIBUÉS AUX ORGANISMES INSTALLÉS DANS UN AUTRE ETAT MEMBRE QUE LA FRANCE AYANT POUR OBJET DE SERVIR DES PENSIONS DE RETRAITE - DONT LA GESTION EST DÉSINTÉRESSÉE ET DONT LES ACTIVITÉS NON LUCRATIVES RESTENT SIGNIFICATIVEMENT PRÉPONDÉRANTES - ALORS QUE LES DIVIDENDES PERÇUS PAR UN ORGANISME DE MÊME NATURE ÉTABLI EN FRANCE NE SONT PAS IMPOSABLES - ENTRAVE INJUSTIFIÉE À LA LIBRE CIRCULATION DES CAPITAUX (ART - 56 DU TCE) - EXISTENCE [RJ1] - 2) PREUVE À APPORTER PAR CES ORGANISMES INSTALLÉS DANS UN AUTRE ETAT MEMBRE POUR BÉNÉFICIER DE L'EXONÉRATION D'IMPÔTS SUR LES SOCIÉTÉS POUR LES DIVIDENDES QU'ILS PERÇOIVENT - GESTION DÉSINTÉRESSÉ ET SERVICES RENDUS NON CONCURRENTS DE CEUX PROPOSÉS PAR DES ENTREPRISES COMMERCIALES - CAS PARTICULIER OÙ L'ORGANISME INTERVIENT DANS UN DOMAINE D'ACTIVITÉ ET DANS UN SECTEUR GÉOGRAPHIQUE OÙ EXISTENT DES ENTREPRISES COMMERCIALES - POSSIBILITÉ DE BÉNÉFICIER DE L'EXONÉRATION S'IL EXERCE SON ACTIVITÉ DANS DES CONDITIONS DIFFÉRENTES DE CELLES DES ENTREPRISES COMMERCIALES.

19-04-01-05 1) Si, en vertu des dispositions du c du 5 de l'article 206 du code général des impôts, combinées avec notamment celles de son 1 et avec celles du 5° bis du 1 de l'article 207, un organisme établi en France ayant pour objet de servir des pensions de retraite, tel qu'une caisse de retraite de base ou complémentaire, ou une société mutualiste, dont la gestion est désintéressée et dont les activités non lucratives restent significativement prépondérantes, est assujetti à l'impôt sur les sociétés à raison des revenus de capitaux mobiliers dont il dispose, les dividendes de sociétés établies en France perçus par cet organisme ne sont pas imposables.,,,L'application de la retenue à la source au versement de dividendes de sociétés françaises à des organismes installés dans un autre Etat membre remplissant les mêmes conditions, constitue ainsi une restriction aux mouvements de capitaux. Le régime d'exonération prévu par les dispositions des articles 206 et 207 du code général des impôts étant applicable à des associations, fondations et autres organismes à raison du caractère non lucratif de leur activité et non d'une charge d'intérêt général qui pèserait sur les seuls organismes résidents de France, cette restriction à la liberté de circulation des capitaux ne saurait être justifiée, pour ce motif, par l'existence d'une différence de situation objective entre organismes français et allemands. Ainsi, et faute que soit établie l'existence d'une raison impérieuse d'intérêt général, cette restriction méconnaît les stipulations de l'article 56 du traité instituant la Communauté européenne en tant qu'elle prive tout organisme installé dans un autre Etat membre de la faculté d'apporter la preuve qu'il pourrait bénéficier, s'il était établi en France, de l'exonération d'impôt sur les sociétés prévue au c du 5 de l'article 206 à raison de la perception de dividendes de sociétés françaises.,,,2) Il appartient, à cette fin, à cet organisme d'établir, d'une part, que sa gestion présente un caractère désintéressé et, d'autre part, que les services qu'il rend ne sont pas offerts en concurrence dans la même zone géographique d'attraction avec ceux proposés au même public par des entreprises commerciales exerçant une activité identique. Toutefois, même dans le cas où cet organisme intervient dans un domaine d'activité et dans un secteur géographique où existent des entreprises commerciales, il peut bénéficier de cette exonération s'il exerce son activité dans des conditions différentes de celles des entreprises commerciales, soit en répondant à certains besoins insuffisamment satisfaits par le marché, soit en s'adressant à un public qui ne peut normalement accéder aux services offerts par les entreprises commerciales, notamment en pratiquant des prix inférieurs à ceux du secteur concurrentiel et, à tout le moins, des tarifs modulés en fonction de la situation des bénéficiaires, sous réserve de ne pas recourir à des méthodes commerciales excédant les besoins de l'information du public sur les services qu'il offre.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 13 février 2009, Société Stichting Unilever Pensionenfonds Progress et autres, n°298108, p. 23.


Publications
Proposition de citation : CE, 30 déc. 2014, n° 361842
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Japiot
Rapporteur public ?: M. Frédéric Aladjidi
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:361842.20141230
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