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29/12/2014 | FRANCE | N°366597

France | France, Conseil d'État, 5ème sous-section jugeant seule, 29 décembre 2014, 366597


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 mars et 5 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme B...A..., demeurant... ; Mme A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 12LY01467 du 10 janvier 2013 de la cour administrative d'appel de Lyon rejetant sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 1001591 du 29 mars 2012 du tribunal administratif de Dijon rejetant sa demande tendant à ce qu'une expertise avant dire droit soit ordonnée et à ce que le centre hospitalier de Sens soit condamné à l'

indemniser des préjudices ayant résulté pour elle de la faute commise ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 mars et 5 juin 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme B...A..., demeurant... ; Mme A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 12LY01467 du 10 janvier 2013 de la cour administrative d'appel de Lyon rejetant sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 1001591 du 29 mars 2012 du tribunal administratif de Dijon rejetant sa demande tendant à ce qu'une expertise avant dire droit soit ordonnée et à ce que le centre hospitalier de Sens soit condamné à l'indemniser des préjudices ayant résulté pour elle de la faute commise lors de sa prise en charge dans cet établissement du 7 au 20 avril 2009 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Sens le versement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Gérald Bégranger, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lévis, avocat de Mme A...et à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat du centre hospitalier de Sens ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que MmeA..., qui souffrait depuis l'âge de 14 ans de troubles bilatéraux de l'audition, a contracté en 2006 une infection à pyocyanique rebelle et a dû subir des traitements antibiotiques répétés ; qu'hospitalisée du 7 au 20 avril 2009 au centre hospitalier de Sens, elle y a reçu, en dépit d'une contre-indication connue, un traitement à base d'Amiklin, substance appartenant à la famille des aminosides et susceptible d'avoir des effets ototoxiques ; qu'elle a invoqué une baisse de son audition, constatée le 11 mai 2009, pour rechercher la responsabilité du centre hospitalier au titre de la faute ayant consisté à lui administrer ce traitement ; que le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande par un jugement du 29 mars 2012 ; que Mme A...demande l'annulation de l'arrêt du 10 janvier 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon, tout en reconnaissant l'existence d'une faute du centre hospitalier, a confirmé le rejet de sa demande indemnitaire en jugeant qu'elle n'établissait pas l'existence d'un lien direct et certain entre cette administration et la dégradation de son audition ;

2. Considérant que, pour écarter l'existence d'un lien direct entre la faute du centre hospitalier et le préjudice invoqué par Mme A..., la cour administrative d'appel s'est fondée, d'une part, sur l'existence, de façon permanente, d'une infection des oreilles depuis de très nombreuses années et, d'autre part, sur la circonstance qu'entre 2006 et 2009, l'intéressée avait recouru, pour traiter ses symptômes infectieux, à un médicament dénommé Auricularum, dont l'utilisation, même ponctuelle, comportait elle-même un risque d'ototoxicité ; que la cour a également relevé qu'il ne ressortait pas du dossier médical que, pendant son séjour de plusieurs semaines à l'hôpital, la patiente se serait plainte d'une baisse de son audition, et qu'elle ne produisait aucun élément de nature à établir la qualité de son audition à la date du début de son hospitalisation ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'en relevant que l'utilisation " même ponctuelle " de l'Auricularum présentait un risque d'ototoxicité, la cour a répondu à l'argumentation de la requérante selon laquelle son usage de ce médicament avait été trop rare pour déterminer la baisse de son audition ; qu'en tenant pour établie l'utilisation de ce produit, qui ressortait d'une déclaration faite par Mme A...à l'expert commis par le tribunal administratif de Dijon et n'avait pas été contestée devant elle, elle n'a pas dénaturé les pièces du dossier ; que si elle a, à tort, écrit que l'Auricularum contenait des aminosides, alors que ce médicament est à base de polymyxines, cette erreur de plume est restée sans incidence sur le sens de son arrêt, dès lors qu'il ressortait du rapport de l'expert et n'était pas sérieusement contesté que les polymyxines présentent un risque d'ototoxicité ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que si Mme A...avait produit devant l'expert désigné par le tribunal administratif un document présenté comme un audiogramme datant de mars 2008, l'expert avait écarté ce document en concluant dans son rapport du 1er septembre 2011, qui n'était pas contesté sur ce point, que les dernières mesures disponibles de l'audition de l'intéressée remontaient à novembre 2001 ; qu'alors qu'il avait réservé l'hypothèse où il pourrait être démontré que " le mois ou les mois qui ont précédé l'hospitalisation, la conduction osseuse en 2009 était identique à celle de 2001 ", Mme A...n'a à aucun moment devant le tribunal administratif ni devant la cour administrative d'appel fait état de l'existence de mesures réalisées peu de temps avant son hospitalisation ; qu'au regard du débat qui s'était tenu devant elle, la cour n'a pas méconnu son office ni commis d'erreur de droit en ne l'invitant pas à verser au dossier de telles mesures ; que Mme A...ne peut invoquer pour la première fois en cassation une mesure de son audition qui serait intervenue en avril 2009 ;

5. Considérant, en troisième lieu, que la cour, qui a suffisamment répondu aux arguments avancés par l'intéressée à l'appui de son affirmation selon laquelle la baisse de ses capacités auditives avait coïncidé de manière significative avec la période d'administration de l'Amiklin, n'a pas dénaturé les pièces produites devant elle en estimant que cette circonstance n'était pas établie ;

6. Considérant, enfin, que, compte tenu des éléments qu'elle a relevés sans les dénaturer, la cour administrative d'appel de Lyon a pu, sans commettre d'erreur de droit, retenir que la faute du centre hospitalier n'était pas à l'origine du dommage subi par Mme A...du fait de la baisse de son audition et ne l'avait pas non plus privée d'une chance d'éviter ce dommage ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de Mme A... doit être rejeté ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au titre de ces mêmes dispositions par le centre hospitalier de Sens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme A... est rejeté.

Article 2 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par le centre hospitalier de Sens sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A...et au centre hospitalier de Sens.


Synthèse
Formation : 5ème sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 366597
Date de la décision : 29/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 29 déc. 2014, n° 366597
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Gérald Bégranger
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP LEVIS ; SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER, TEXIDOR

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:366597.20141229
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