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23/12/2014 | FRANCE | N°380407

France | France, Conseil d'État, 8ème ssjs, 23 décembre 2014, 380407


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'établissement public Réseau Ferré de France a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lyon, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, d'enjoindre à Mme B...ainsi qu'à tous occupants de son chef participant à l'activité exercée sous l'enseigne " Tilt Auto " de libérer la parcelle LO114 qu'elle occupe irrégulièrement dans l'emprise de la gare Bellevue à Saint-Etienne, sous astreinte de 1500 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quinze

jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir.

Par une ordon...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'établissement public Réseau Ferré de France a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lyon, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, d'enjoindre à Mme B...ainsi qu'à tous occupants de son chef participant à l'activité exercée sous l'enseigne " Tilt Auto " de libérer la parcelle LO114 qu'elle occupe irrégulièrement dans l'emprise de la gare Bellevue à Saint-Etienne, sous astreinte de 1500 euros par jour de retard à l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir.

Par une ordonnance n° 1402713 du 30 avril 2014, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a enjoint à Mme B...ainsi qu'à tous occupants de son chef participant à l'activité exercée sous l'enseigne " Tilt Auto " de libérer la parcelle LO114 qu'elle occupe irrégulièrement dans l'emprise de la gare Bellevue à Saint-Etienne et d'en évacuer les véhicules, les épaves automobiles et les matériels et objets qui y sont entreposés, dans un délai de deux mois suivant la notification de l'ordonnance et sous astreinte, à défaut d'exécution dans ce délai, de 1 000 euros par jour de retard, précisant que, faute pour elle de libérer les lieux ainsi occupés, Réseau Ferré de France pourrait requérir le concours de la force publique pour procéder à son expulsion.

Procédure devant le Conseil d'Etat

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 19 mai, 28 mai et 14 novembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A...B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 30 avril 2014 du juge des référés du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de mettre à la charge de Réseau Ferré de France la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la loi n° 97-135 du 13 février 1997 ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Karin Ciavaldini, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boulloche, avocat de Mme B...et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de Réseau Ferré de France.

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. Les exigences de la contradiction sont adaptées à celles de l'urgence " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 522-1 du même code : " Le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale " ; que l'article R. 522-4 de ce code dispose que : " Notification de la requête est faite aux défendeurs / Les délais les plus brefs sont donnés aux parties afin de fournir leurs observations (...) " ; qu'enfin, l'article R. 522-7 du même code précise que : " L'affaire est réputée en état d'être jugée dès lors qu'a été accomplie la formalité prévue au premier alinéa de l'article R. 522-4 et que les parties ont été régulièrement convoquées à une audience publique pour y présenter leurs observations " ;

2. Considérant que ces dispositions font obligation au juge des référés, sauf dans le cas où il est fait application de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, de communiquer au défendeur par tous moyens, notamment en le mettant à même d'en prendre connaissance à l'audience publique, le mémoire introductif d'instance du demandeur ; que cette communication doit être établie par les pièces du dossier ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...n'a reçu communication de la demande en référé présentée par Réseau Ferré de France ainsi que de l'avis d'audience que le 16 mai 2014, soit postérieurement à la tenue de l'audience de référé le 28 avril 2014 et à la lecture de l'ordonnance attaquée le 30 avril 2014 ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, elle est fondée à soutenir que l'ordonnance du 30 avril 2014 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Lyon, saisi d'une demande en ce sens par Réseau Ferré de France, lui a enjoint de libérer le terrain qu'elle occupe et d'en évacuer les véhicules, les épaves automobiles et les matériels et objets qui y sont entreposés est entachée d'irrégularité et doit être annulée ;

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

5. Considérant que lorsque le juge des référés est saisi, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, d'une demande d'expulsion d'un occupant du domaine public, il lui appartient de rechercher si, au jour où il statue, cette demande présente un caractère d'urgence et ne se heurte à aucune contestation sérieuse ; que cette dernière condition est remplie, dans le cas où la demande d'expulsion fait suite à la décision du gestionnaire du domaine de retirer ou de refuser de renouveler le titre dont bénéficiait l'occupant, lorsque cette décision exécutoire est devenue définitive ;

6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que Mme B...exploite sous l'enseigne commerciale " Tilt Auto " une activité de stockage et de démolition d'automobiles ainsi que de revente de pièces en provenant sur une parcelle cadastrée LO114, composée d'entrepôts et de bureaux pour une surface de 975 m² et d'un terrain nu de 1100 m² ; que cette parcelle se situe dans l'emprise de la gare Bellevue à Saint-Etienne et n'a fait l'objet d'aucune procédure de déclassement ; qu'elle appartient à l'établissement public Réseau Ferré de France depuis le transfert en pleine propriété à cet établissement, en vertu de la loi du 13 février 1997 portant création de l'établissement public " Réseau Ferré de France " en vue du renouveau du transport ferroviaire, des biens du domaine de l'Etat composant l'infrastructure du réseau des chemins de fer exploité par la SNCF et des immeubles gérés par cette dernière pour les besoins de son activité ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que ce terrain soit manifestement insusceptible d'être regardé comme appartenant au domaine public, dont le contentieux relève de la compétence de la juridiction administrative ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'exploitant du domaine a accordé à Mme B...deux autorisations d'occupation le 20 septembre 1988 et le 25 juillet 1994, qui ont été régulièrement et tacitement reconduites annuellement ; qu'elles sont toutes deux venues à terme à la date du 31 décembre 2013, négociée avec leur bénéficiaire, après les décisions antérieures du propriétaire de ne pas les renouveler à leurs échéances respectives ; qu'aucune des décisions relatives à cette procédure n'ayant été contestée, elles sont devenues définitives ; que, par suite, la demande présentée par Réseau Ferré de France sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative ne se heurte à aucune contestation sérieuse ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que Mme B... utilise pour son activité des bâtiments vétustes en très mauvais état d'entretien et dont certains éléments, notamment les charpentes, sont parfois effondrés, présentant des risques pour la sécurité des salariés et visiteurs ; que son activité, en répandant sur le sol sans système de récupération fiable les fluides issus de la démolition des véhicules, aggrave la pollution des sols de l'enceinte domaniale qu'elle occupe, destinée à un usage industriel, et rend plus difficiles les opérations de dépollution qui incomberont pour partie au propriétaire en vue de l'aménagement d'ensemble de ce secteur ; que, dans ces circonstances, la libération par Mme B...et tous occupants de son chef de la parcelle qu'elle occupe irrégulièrement sur le domaine public de Réseau Ferré de France présente un caractère d'urgence et d'utilité ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre à Mme B... ainsi qu'à tous occupants de son chef, participant à l'activité exercée sous l'enseigne " Tilt Auto ", de libérer la parcelle LO114 qu'elle occupe irrégulièrement dans l'emprise de la gare Bellevue à Saint-Etienne et d'en évacuer les véhicules, les épaves automobiles et les matériels et objets qui y sont entreposés, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, à l'expiration d'un délai d'un mois suivant la notification de la présente décision ;

10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B...la somme de 3000 euros à verser à Réseau Ferré de France au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font en revanche obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de Réseau Ferré de France qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er: L'ordonnance du 30 avril 2014 du juge des référés du tribunal administratif de Lyon est annulée.

Article 2 : Il est enjoint à Mme B...ainsi qu'à tous occupants de son chef participant à l'activité exercée sous l'enseigne " Tilt Auto " de libérer la parcelle LO114 qu'elle occupe irrégulièrement dans l'emprise de la gare Bellevue à Saint-Etienne et d'en évacuer les véhicules, les épaves automobiles et les matériels et objets qui y sont entreposés, sous astreinte, à défaut d'exécution dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, de 1000 euros par jour de retard. Faute pour Mme B...de libérer les lieux qu'elle occupe selon ces modalités, Réseau Ferré de France pourra requérir le concours de la force publique pour procéder à son expulsion.

Article 3 : Mme B...versera à Réseau Ferré de France une somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de Mme B...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B...et à Réseau Ferré de France.


Synthèse
Formation : 8ème ssjs
Numéro d'arrêt : 380407
Date de la décision : 23/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 déc. 2014, n° 380407
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Karin Ciavaldini
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP BOULLOCHE ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 17/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:380407.20141223
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