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26/05/2014 | FRANCE | N°360357

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 26 mai 2014, 360357


VU LA PROCEDURE SUIVANTE :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 19 juin 2012, 17 septembre 2012, 13 mai 2013 et 8 août 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat national des agences de mannequins demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la circulaire du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, du ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat et du ministre des solidarités et de la cohésion sociale du 20 avril 2012 relative au régi

me social des redevances et avances sur redevances ;

2°) de mettre à la ...

VU LA PROCEDURE SUIVANTE :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 19 juin 2012, 17 septembre 2012, 13 mai 2013 et 8 août 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat national des agences de mannequins demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la circulaire du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, du ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat et du ministre des solidarités et de la cohésion sociale du 20 avril 2012 relative au régime social des redevances et avances sur redevances ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la circulaire attaquée est entachée d'incompétence en ce qu'elle modifie la répartition de la part de cotisation d'assurance maladie à la charge respective du mannequin et de son employeur ;

- elle est entachée d'incompétence en que le dispositif prévu revient à mettre à la charge du mannequin une cotisation d'assurance maladie à un taux de 12,81 %, ce qui est contraire aux dispositions de l'article D. 242-3 du code de la sécurité sociale et à l'arrêté du 24 janvier 1975 ;

- elle méconnaît l'article L. 7123-6 du code du travail et la jurisprudence de la Cour de cassation en prévoyant qu'une rémunération doit être requalifiée en salaire dès lors que ses modalités de fixation ne tiennent pas compte de l'aléa économique inhérent à l'exploitation et à la vente ;

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 242-1 du code de la sécurité sociale et L. 7123-6 du code du travail ainsi que les stipulations de la convention collective des mannequins adultes et mannequins enfants de moins de 16 ans employés par les agences de mannequins du 22 juin 2004, une agence ne pouvant être assujettie à une cotisation de type patronal lorsqu'elle agit en qualité de mandataire du mannequin.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 8 avril et 24 juillet 2013, le ministre des affaires sociales et de la santé conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code du travail ;

- l'arrêté du 24 janvier 1975 fixant le taux des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales dues au titre de l'emploi des artistes du spectacle ;

- la décision n° 2012-659 DC du Conseil constitutionnel du 13 décembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pascal Trouilly, Maître des Requêtes,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public.

Une note en délibéré, enregistrée le 11 avril 2014, a été présentée par le syndicat national des agences de mannequins.

CONSIDERANT CE QUI SUIT :

1. Par la circulaire attaquée du 20 avril 2012 relative au régime social des redevances et avances sur redevances, le ministre du travail, de l'emploi et de la santé, le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat et le ministre des solidarités et de la cohésion sociale ont précisé, par des dispositions impératives à caractère général, le régime social des redevances perçues par les artistes du spectacle et les mannequins, notamment en cas de résidence fiscale à l'étranger.

Sur la définition des redevances et avances sur redevances :

2. Aux termes de l'article L. 7123-6 du code du travail : " La rémunération due au mannequin à l'occasion de la vente ou de l'exploitation de l'enregistrement de sa présentation par l'employeur ou tout autre utilisateur n'est pas considérée comme salaire dès que la présence physique du mannequin n'est plus requise pour exploiter cet enregistrement et que cette rémunération n'est pas fonction du salaire reçu pour la production de sa présentation, mais est fonction du produit de la vente ou de l'exploitation de l'enregistrement ".

3. La circulaire attaquée rappelle, en son point 1.1, les conditions que doit remplir une somme versée à un mannequin pour être qualifiée de redevance au sens de l'article L. 7123-6 du code du travail, en mentionnant, notamment, que cette somme doit être " fonction du produit de la vente ou de l'exploitation de l'enregistrement ". Si, en rappelant la jurisprudence de la Cour de cassation, elle indique que " la fixation d'une rémunération forfaitaire préalable à l'exploitation doit être requalifiée en salaire, quand bien même cette rémunération est qualifiée par le contrat de redevance ou d'avance sur redevance, dès lors que ses modalités de fixation ne tiennent pas compte de l'aléa économique inhérent à l'exploitation et à la vente ", elle fait ainsi référence à l'aléa économique qui peut résulter tant de l'exploitation que de la vente de l'enregistrement et n'introduit pas une condition nouvelle illégale. Par suite, le syndicat requérant n'est pas fondé à soutenir que la circulaire attaquée subordonnerait la requalification d'une rémunération forfaitaire en salaire à une condition cumulative contraire à l'article L. 7123-6 du code du travail.

Sur l'assujettissement des redevances à la cotisation maladie majorée lorsque le mannequin réside fiscalement à l'étranger :

4. En vertu du IV de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de l'article 19 de la loi du 21 décembre 2011 de financement de la sécurité sociale pour 2012, les redevances mentionnées à l'article L. 7123-6 du code du travail sont soumises à la contribution sociale sur les revenus du patrimoine. La première et la troisième phrases du second alinéa de l'article L. 131-9 du même code, également modifié par l'article 19 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, qui n'ont pas été déclarées contraires à la Constitution par le Conseil constitutionnel, disposent que : " Des taux particuliers de cotisations d'assurance maladie, maternité, invalidité et décès à la charge des assurés sont applicables (...) aux redevances mentionnées au IV de l'article L. 136-6 versées aux personnes qui ne remplissent pas la condition de résidence fiscale fixée au I du même article ". En vertu de l'article D. 242-3 du code de la sécurité sociale, le taux de la cotisation des assurances sociales affectée aux risques maladie, maternité, invalidité et décès est fixé, pour les personnes mentionnées au deuxième alinéa de l'article L. 131-9, à 18,30 %, soit 12,80 % à la charge de l'employeur et 5,50 % à la charge du salarié ou assimilé. Enfin, en vertu de l'article 1er de l'arrêté du 24 janvier 1975 fixant le taux des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales dues au titre de l'emploi des artistes du spectacle, également applicable aux mannequins, les taux à retenir sont fixés à hauteur de 70 % des taux précités.

5. En premier lieu, en tant qu'elle prévoit, à son point 1.2.2, que : " L'article 19 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 prévoit, en cas de résidence fiscale de l'artiste interprète ou du mannequin à l'étranger, l'assujettissement à la cotisation maladie majorée prévue à l'article L. 131-9 alinéa 2 du code de la sécurité sociale ", la circulaire attaquée se borne à rappeler les dispositions issues de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012. Par suite, le syndicat requérant ne peut utilement soutenir qu'elle méconnaîtrait les dispositions des articles L. 242-1 du code de la sécurité sociale et L. 7123-6 du code du travail, les stipulations de la convention collective applicable aux mannequins et la jurisprudence de la Cour de cassation, ni se prévaloir de la circonstance que l'agence agirait, lors de la cession ou de l'exploitation de l'enregistrement de l'image d'un mannequin, en qualité de mandataire de ce dernier et non d'employeur.

6. En second lieu, la circulaire attaquée précise, au même point, que le taux de la cotisation d'assurance maladie majorée mentionnée à l'article L. 131-9 du code de la sécurité sociale est égal à 12,81 %, par application des dispositions combinées de l'article D. 242-3 du code de la sécurité sociale et de l'article 1er de l'arrêté du 24 janvier 1975. En mentionnant ainsi le taux global de cotisation, elle ne modifie ni le partage de l'obligation de cotiser entre l'employeur et le salarié ou les personnes assimilées, ni le taux de la cotisation d'assurance maladie majorée à la charge du second ou de la personne assimilée. Par suite, le syndicat requérant n'est pas fondé à soutenir que la circulaire serait, dans cette mesure, entachée d'incompétence.

7. Il résulte de ce qui précède que les conclusions du syndicat national des agences de mannequins à fin d'annulation doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête du syndicat national des agences de mannequins est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat national des agences de mannequins, au ministre des finances et des comptes publics et à la ministre des affaires sociales et de la santé.


Synthèse
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 360357
Date de la décision : 26/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 26 mai. 2014, n° 360357
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Pascal Trouilly
Rapporteur public ?: Mme Maud Vialettes

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:360357.20140526
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