La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/02/2014 | FRANCE | N°361675

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 10 février 2014, 361675


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 août et 6 novembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A..., demeurant... ; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10DA01325 du 24 mai 2012 de la cour administrative d'appel de Douai en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 1001021 du 27 juillet 2010 du tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 février 2010 par laquelle le p

résident de la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne a prononcé...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 6 août et 6 novembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A..., demeurant... ; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 10DA01325 du 24 mai 2012 de la cour administrative d'appel de Douai en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa requête tendant à l'annulation du jugement n° 1001021 du 27 juillet 2010 du tribunal administratif d'Amiens en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 février 2010 par laquelle le président de la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne a prononcé son licenciement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit aux conclusions de sa requête d'appel sur ce point ;

3°) de mettre à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;

Vu l'arrêté interministériel du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie et des groupements inter-consulaires ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Natacha Chicot, Auditeur,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, avocat de M. A...et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la chambre de commerce et de l'industrie de l'Aisne ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'assemblée générale de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de l'Aisne a, par délibération du 8 juin 2009, décidé la suppression du poste occupé par M.A..., chef de service au sein de cette chambre et responsable du département " salons internationaux ", en raison du transfert à un prestataire extérieur des missions qui étaient les siennes ; que le président de la CCI a ultérieurement procédé au licenciement de M.A..., le 8 février 2010 ; que M. A... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 24 mai 2012 de la cour administrative d'appel de Douai en tant que cet arrêt rejette son appel dirigé contre le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 27 juillet 2010, en tant que celui-ci rejette sa demande d'annulation de la décision de licenciement du 8 février 2010 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 33 du statut du personnel administratif des CCI : " La cessation de fonctions de tout agent titulaire ne peut intervenir que dans les conditions suivantes : (...) / 5) Par suppression d'emploi, après avis de la commission paritaire compétente (...) " ; qu'aux termes de l'article 35-1 du même statut : " Lorsqu'une Compagnie Consulaire décide de prendre des mesures pouvant entraîner un ou plusieurs licenciements par suppression d'emploi, le Président, au vu de la délibération prise en Assemblée Générale, convoque la Commission Paritaire Locale aux fins de l'informer. Un dossier est communiqué, au plus tard quinze jours avant la date de la réunion, aux membres de la Commission Paritaire Locale et aux délégués syndicaux. Ce dossier comprend : / - une information sur les raisons économiques, financières et techniques qui sont à l'origine de la suppression d'un ou plusieurs postes de travail ; / - une information sur les moyens examinés par la Compagnie Consulaire pour éviter les suppressions d'emplois tels que notamment : / les possibilités de création d'activités nouvelles, d'augmentation de ressources ou de diminution de charges, d'aménagement du temps de travail et/ou de réduction du temps de travail, de reclassement des agents dont l'emploi pourrait être supprimé dans d'autres services de la Compagnie Consulaire, d'autres Compagnies Consulaires ou à l'extérieur de l'Institution Consulaire ainsi que toutes autres mesures alternatives au licenciement ; / - la liste des emplois susceptibles d'être supprimés et les critères retenus ; / - le coût et les modalités de mise en oeuvre des mesures annoncées ; / - les aides et mesures d'accompagnement apportées aux agents licenciés pour faciliter leur réemploi telles que bilan de compétences ou financement de formations. / Au plus tard dans le mois qui suit la réunion de cette commission et au plus tôt après huit jours francs, les agents dont l'emploi est menacé sont convoqués à un entretien individuel avec le Président ou son délégataire. Dans le délai d'un mois et au plus tôt dans le délai de huit jours francs qui suit le ou les entretiens individuels, la Commission Paritaire Locale est convoquée de nouveau pour émettre un avis d'une part, sur les démarches, propositions et actions entreprises pour éviter les licenciements et, d'autre part, sur les mesures individuelles de licenciement envisagées. : (...) La Compagnie Consulaire ne peut effectuer de recrutement sur poste permanent correspondant à un ou plusieurs emplois supprimés pendant un délai de dix-huit mois à compter de la (des) notification(s) de licenciement pour suppression d'emploi. Les autres emplois mis en recrutement pendant cette période doivent être proposés en priorité aux agents licenciés " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, lorsqu'une décision peut entraîner un ou plusieurs licenciements par suppression d'emploi, le président de l'organisme consulaire a l'obligation de réunir la commission paritaire locale à deux reprises ; qu'il est tenu de lui communiquer, avant sa première réunion, un dossier comprenant des informations relatives aux causes des suppressions d'emplois, aux types de solutions envisagées, à ce stade, pour les éviter, aux emplois supprimés, aux coûts et aux modalités des licenciements et aux mesures d'accompagnement proposées aux personnes concernées ; que la commission paritaire locale doit à nouveau être réunie après qu'ont eu lieu les entretiens individuels des agents concernés, afin de rendre un avis sur les mesures qui ont été effectivement prises pour éviter les licenciements ainsi que sur les mesures individuelles de licenciement envisagées ; que la commission paritaire locale doit, par suite, être informée au plus tard à l'occasion de cette seconde réunion des actions qui ont été concrètement entreprises à l'égard de ces agents pour éviter leur licenciement ; que, compte tenu de l'obligation qui incombe à la compagnie consulaire d'examiner les possibilités de reclassement, notamment en son sein, des agents dont le licenciement est envisagé, c'est par suite au plus tard à l'occasion de sa seconde réunion que la commission paritaire locale doit être informée des propositions de reclassement qui ont pu être faites à ces mêmes agents ;

4. Considérant, dès lors, qu'en jugeant que les dispositions, citées ci-dessus, de l'article 35-1 du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie n'imposaient pas que les possibilités de reclassement de M. A...aient été examinées préalablement à l'avis rendu par la commission paritaire locale sur la décision prononçant son licenciement, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, son arrêt doit être annulé en tant qu'il statue sur la décision de licenciement de M.A... ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler dans cette même mesure l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

6. Considérant, en premier lieu, que M. A... ne peut, à l'appui de sa demande d'annulation de la décision du 8 février 2010 prononçant son licenciement, utilement alléguer l'inexécution, en raison d'une absence prétendue de réintégration sur son poste, du jugement du 29 décembre 2006 par lequel le tribunal administratif d'Amiens avait annulé une précédente décision de licenciement prise à son encontre le 6 mai 2003 ; qu'au demeurant et en tout état de cause, ce jugement a bien eu pour effet de replacer M. A...dans la situation administrative où il se trouvait avant l'intervention de cette précédente décision de licenciement du 6 mai 2003, quand bien même cette réintégration n'aurait pas été formalisée par le président de la CCI de l'Aisne ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la commission paritaire locale s'est réunie une première fois le 7 septembre 2009, dans le cadre d'une procédure de licenciement qui ne concernait que M. A... ; que les membres de la commission ont reçu, préalablement à cette réunion, un document qui précisait, premièrement, les raisons de la suppression du poste de chef de service du département " salons internationaux " et de l'emploi occupé par son titulaire, deuxièmement, la nature des moyens examinés par la CCI afin d'éviter la suppression de cet emploi, c'est à dire, en l'espèce, les possibilités de reclassement interne ou de mobilité dans le réseau consulaire, troisièmement, les coûts et les modalités des mesures envisagées, notamment le versement d'une indemnité de licenciement d'un montant d'environ 100 000 euros, et, enfin, les aides et mesures d'accompagnement prévues tenant à des propositions en matière de formation ou d'aménagement du préavis ; qu'à l'occasion de la seconde réunion de la commission paritaire locale organisée le 22 octobre 2009, ses membres ont été précisément informés des deux propositions de reclassement qui avaient été faites à M.A... ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de ce que les membres de la commission paritaire locale n'auraient pas disposé des informations prévues par les dispositions de l'article 35-1 du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie doit être écarté ;

8. Considérant, en troisième lieu, que M. A... reprend, en appel, le moyen tiré de ce que la CCI de l'Aisne n'aurait pas respecté les obligations qui lui incombent en matière de reclassement ; qu'il n'apporte toutefois aucun élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le tribunal administratif d'Amiens sur son argumentation de première instance ; qu'il y a lieu, dès lors, d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision prononçant son licenciement ;

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la CCI de l'Aisne qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il n'y a pas lieu non plus, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la CCI de l'Aisne sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 24 mai 2012 est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de M. A...dirigées contre le jugement du tribunal administratif d'Amiens du 27 juillet 2010 en tant qu'il rejette sa demande d'annulation de la décision du président de la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne du 8 février 2010.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. A...devant la cour administrative d'appel de Douai, tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif d'Amiens du 27 juillet 2010 en tant qu'il rejette les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision du président de la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne du 8 février 2010 sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de M. A...tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions présentées par la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et à la chambre de commerce et d'industrie de l'Aisne.


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 361675
Date de la décision : 10/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 10 fév. 2014, n° 361675
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Natacha Chicot
Rapporteur public ?: M. Bertrand Dacosta
Avocat(s) : SCP BORE, SALVE DE BRUNETON ; SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:361675.20140210
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award