La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/12/2013 | FRANCE | N°363816

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 26 décembre 2013, 363816


VU LA PROCEDURE SUIVANTE :

Par une requête, un mémoire rectificatif et un mémoire en réplique, enregistrés les 9 novembre 2012, 23 novembre 2012 et 8 octobre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association de défense du droit des patients à la continuité des soins et à l'accueil des urgences et l'association de défense des médecins contrôlés du 93 et des autres départements demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision par laquelle le Premier ministre a implicitement rejeté leur demande du 11 juillet 2012 tend

ant à la modification de l'article R. 4126-30 du code de la santé publique ;

...

VU LA PROCEDURE SUIVANTE :

Par une requête, un mémoire rectificatif et un mémoire en réplique, enregistrés les 9 novembre 2012, 23 novembre 2012 et 8 octobre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association de défense du droit des patients à la continuité des soins et à l'accueil des urgences et l'association de défense des médecins contrôlés du 93 et des autres départements demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision par laquelle le Premier ministre a implicitement rejeté leur demande du 11 juillet 2012 tendant à la modification de l'article R. 4126-30 du code de la santé publique ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre de se prononcer à nouveau sur leur demande sous astreinte de 250 euros par jour à compter de la notification de la décision à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à chacune d'elles au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mars 2013, le Premier ministre déclare faire siennes les observations présentées par le ministre des affaires sociales et de la santé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 mars 2013, le ministre des affaires sociales et de la santé conclut au rejet de la requête.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Combettes, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ;

CONSIDERANT CE QUI SUIT :

1. L'article L. 4124-6 du code de la santé publique détermine les peines disciplinaires susceptibles d'être prononcées par les juridictions ordinales des professions médicales, au nombre desquelles figure " l'interdiction temporaire d'exercer avec ou sans sursis ; cette interdiction ne pouvant excéder trois années " et " la radiation du tableau de l'ordre ". Aux termes de l'article R. 4126-30 du même code : " Les décisions de la chambre disciplinaire prononçant une peine d'interdiction temporaire d'exercer la profession ou de radiation ou les ordonnances du président fixent la période d'exécution ou la date d'effet de cette sanction en tenant compte du délai d'appel et, s'agissant de la chambre nationale, le cas échéant du délai d'opposition. / Si la décision ne précise pas de période d'exécution, la peine est exécutoire le lendemain du jour où elle devient définitive ".

Sur la légalité externe de la décision attaquée :

2. Si le Conseil d'Etat a été consulté avant l'adoption du décret n° 2007-434 du 25 mars 2007 relatif au fonctionnement et à la procédure disciplinaire des conseils de l'ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes, des pharmaciens, des masseurs-kinésithérapeutes et des pédicures-podologues, dont est issu l'article R. 4126-30 du code de la santé publique, aucune règle ni aucun principe n'imposaient que le refus de modifier les dispositions de cet article soit précédé de l'avis du Conseil d'Etat. De même, aucune règle ni aucun principe n'imposaient de recueillir l'avis du Conseil national de l'Ordre des médecins avant de modifier ces dispositions. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière, faute de ces avis préalables, doit être écarté.

Sur la légalité interne de la décision attaquée :

3. En premier lieu, les dispositions de l'article R. 4126-30 du code de la santé publique ont pour seul objet de prévoir les modalités de détermination de la période d'exécution ou de la date d'effet des sanctions d'interdiction temporaire d'exercer la profession et de radiation du tableau de l'ordre, prévues par l'article L. 4124-6 du même code. En particulier, elles n'instituent pas ces sanctions, ne définissent pas les manquements qui en sont passibles et ne déterminent pas les conditions dans lesquelles elles sont susceptibles d'être prononcées. Elles sont ainsi dépourvues de toute incidence sur le respect des principes d'égal accès aux soins et de continuité des soins prévus à l'article L. 1110-1 du code de la santé publique et sur le droit du malade au libre choix de son praticien mentionné à l'article L. 1110-8 du même code. Dès lors, les associations requérantes ne peuvent utilement soutenir que l'article R. 4126-30 méconnaîtrait ces principes.

4. En deuxième lieu, s'il appartient aux juridictions disciplinaires d'apprécier la gravité des fautes commises et de déterminer la sanction adaptée à ces manquements, conformément au principe constitutionnel de nécessité des peines, ni les principes d'égal accès aux soins et de continuité des soins, ni le droit du malade au libre choix de son praticien n'imposent de limiter la possibilité de prononcer une sanction d'interdiction d'exercice aux seules hypothèses dans lesquelles le praticien aurait compromis la sécurité de ses patients. Par suite, les associations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que le Premier ministre était tenu de modifier l'article R. 4126-30 du code de la santé publique pour prévoir une telle limitation.

5. En troisième lieu, les associations requérantes ont saisi le Premier ministre d'une demande tendant à ce qu'il modifie l'article R. 4126-30 du code de la santé publique pour que les juridictions ordinales ne puissent infliger une sanction d'interdiction de la profession qu'aux médecins qui auraient porté atteinte à la sécurité de leurs patients. Par suite, elles ne peuvent utilement soutenir, à l'appui de leur demande d'annulation de la décision de refus qui leur a été opposée, que le Premier ministre aurait dû modifier ces dispositions pour, d'une part, préserver l'offre de soins dans les zones où les médecins sont en nombre insuffisant et, d'autre part, aménager les conditions d'exécution des sanctions disciplinaires de façon à maintenir la relation entre le médecin et son patient, en l'absence de risque pour la sécurité de ce dernier.

6. Il résulte de ce qui précède que les associations requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation de la décision par laquelle le Premier ministre a refusé de modifier les dispositions de l'article R. 4126-30 du code de la santé publique. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et les conclusions qu'elles présentent au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de l'association de défense du droit des patients à la continuité des soins et à l'accueil des urgences et de l'association de défense des médecins contrôlés du 93 et des autres départements est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association de défense du droit des patients à la continuité des soins et à l'accueil des urgences, à l'association de défense des médecins contrôlés du 93 et des autres départements, au Premier ministre et à la ministre des affaires sociales et de la santé.


Synthèse
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 363816
Date de la décision : 26/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 26 déc. 2013, n° 363816
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Philippe Combettes
Rapporteur public ?: M. Alexandre Lallet

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:363816.20131226
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award