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26/12/2013 | FRANCE | N°348160

France | France, Conseil d'État, 9ème et 10ème sous-sections réunies, 26 décembre 2013, 348160


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 avril et 5 juillet 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Grison et Boiry, dont le siège est 65 rue Jean-Jacques Rousseau à Suresnes (92150) ; la société Grison et Boiry demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09PA00618 du 8 février 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendantà l'annulation du jugement n° 0312549/2 du 11 décembre 2008 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la d

charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de la co...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 avril et 5 juillet 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Grison et Boiry, dont le siège est 65 rue Jean-Jacques Rousseau à Suresnes (92150) ; la société Grison et Boiry demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09PA00618 du 8 février 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendantà l'annulation du jugement n° 0312549/2 du 11 décembre 2008 du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de la contribution sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1998 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Maïlys Lange, Auditeur,

- les conclusions de M. Frédéric Aladjidi, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de la société Grison et Boiry ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un acte du 12 avril 1991, la société Grison et Boiry a acquis les parts sociales du cabinet de courtage et conseil en assurances Lasaygues et de Lagarde (LDL) détenues par M.A..., pour le prix de 1 254 322 francs (191 220,16 euros), montant pour lequel elle a alors inscrit les parts en cause à l'actif de son bilan ; qu'estimant avoir été induite en erreur sur la consistance de la clientèle cédée, elle a toutefois refusé de payer le prix convenu et intenté une action en justice en vue d'obtenir l'annulation de la vente ou une révision du prix ; qu'après avoir été condamnée le 26 novembre 1993 par la cour d'appel de Paris, statuant en référé, à régler le prix des parts, elle a constitué à la clôture de l'exercice 1993 une provision de 1 254 322 francs constatant la dépréciation intégrale de sa participation dans la société LDL ; que, par un jugement du 21 janvier 1998, rendu après expertise, le tribunal de commerce de Paris a estimé que le prix réel des parts devait être évalué à 397 279 francs (60 564, 79 euros) ; qu'à la suite de ce jugement, la société Grison et Boiry a, au titre de l'exercice 1998, réduit la valeur d'inscription de sa participation dans la société LDL à l'actif de son bilan de 1 254 322 francs à 397 279 francs, constaté l'existence d'une créance de 857 043 francs sur le vendeur, qu'elle a immédiatement provisionnée comme douteuse, et repris partiellement, en la réduisant également à 397 279 francs, la provision pour dépréciation qu'elle avait initialement constituée en 1993 ; que cette correction de la valeur d'inscription des titres de la société LDL à son actif et cette dernière provision ont été réintégrées par l'administration dans le résultat de l'année 1998 de la société Grison et Boiry à l'issue de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet en 2000 ; que la société Grison et Boiry se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 8 février 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel dirigé contre le jugement du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 1998 en conséquence de ces réintégrations ;

Sur la correction de la valeur d'inscription des titres à l'actif :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt. " ; qu'aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe III au même code, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. Cette valeur d'origine s'entend : Pour les immobilisations acquises à titre onéreux par l'entreprise, du coût d'acquisition, c'est-à-dire du prix d'achat majoré des frais accessoires nécessaires à la mise en état d'utilisation du bien (...) " ;

3. Considérant que la cour administrative d'appel de Paris a relevé que le jugement mentionné au point 1 du tribunal de commerce de Paris du 21 janvier 1998 avait été annulé par un arrêt de la cour d'appel de Paris du 28 juin 1999, et, par là même, qu'étant frappé d'appel sans que le tribunal de commerce en ait accordé l'exécution provisoire, il n'était pas exécutoire à la clôture de l'exercice 1998 ; qu'elle a pu en déduire, sans commettre d'erreur de droit, que la valeur d'inscription à l'actif des parts litigieuses à prendre en considération pour le calcul de l'impôt sur les sociétés devait s'élever à 1 254 322 francs ;

Sur la provision :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (...). " ; qu'aux termes de l'article 38 sexies de l'annexe III au même code : " La dépréciation des immobilisations qui ne se déprécient pas de manière irréversible, notamment (...) les titres de participation, donne lieu à la constitution de provisions dans les conditions prévues au 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts. " ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'en relevant que la société Grison et Boiry avait intégralement déprécié sa participation dans la société LDL à la clôture de l'exercice 1998, puis en jugeant, par une motivation exempte de dénaturation, qu'elle ne pouvait cependant être regardée comme apportant la preuve de ce qu'à cette date des événements en cours rendaient probable la perte totale de valeur de sa participation, la cour administrative d'appel ne s'est pas méprise sur l'objet du litige, lequel portait sur la réintégration dans les résultats de l'exercice clos en 1998, du fait de la règle de l'intangibilité du bilan d'ouverture du premier exercice non prescrit, de la part de la provision constituée en 1993 que la société requérante n'avait pas reprise à la clôture de l'exercice vérifié ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que pour juger que la société Grison et Boiry ne pouvait être regardée comme apportant la preuve de ses allégations sur l'absence de rentabilité de la société LDL et, par suite, de la perte probable, à la clôture de l'exercice 1998, de la totalité de la valeur de sa participation dans cette société, la cour administrative d'appel a relevé que, contrairement à ce que la société requérante soutenait, le chiffre d'affaires de la société LDL n'était pas principalement constitué des commissions qu'elle lui rétrocédait et que, par ailleurs, l'estimation à 397 279 francs de la valeur vénale des parts à laquelle le tribunal de commerce de Paris avait procédé après expertise n'ayant pas été remise en cause par l'arrêt de la cour d'appel de Paris, elle pouvait être prise en considération à titre d'indice ; qu'en statuant ainsi, la cour administrative d'appel n'a entaché son arrêt ni d'insuffisance de motivation, ni de dénaturation des pièces du dossier ;

6. Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la reprise partielle, en 1998, de la provision constituée par la société Grison et Boiry en 1993 n'a pas été contestée par l'administration, qui a au contraire réintégré dans les résultats de la société la part de la provision qui n'avait pas été reprise ; que la société requérante ne peut dès lors utilement soutenir que la cour administrative d'appel aurait dû rechercher si la reprise partielle de la provision était justifiée ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de la société Grison et Boiry doit être rejeté, y compris ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société Grison et Boiry est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Grison et Boiry SAS et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 9ème et 10ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 348160
Date de la décision : 26/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 26 déc. 2013, n° 348160
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Maïlys Lange
Rapporteur public ?: M. Frédéric Aladjidi
Avocat(s) : SCP CELICE, BLANCPAIN, SOLTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:348160.20131226
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