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21/10/2013 | FRANCE | N°359093

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 21 octobre 2013, 359093


Vu le pourvoi, enregistré le 2 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement ; il demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 1 et 2 du jugement n° 1005890 du 6 mars 2012 en tant que le tribunal administratif de Paris, statuant sur la demande de la SCI Vendôme Paris, venant aux droits et obligations de la société Colisée Victoire, a déchargé la SCI Vendôme Bureaux, elle-même venant aux droits de la SCI Vendôme Paris, des cotisations de t

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Vu le pourvoi, enregistré le 2 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement ; il demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 1 et 2 du jugement n° 1005890 du 6 mars 2012 en tant que le tribunal administratif de Paris, statuant sur la demande de la SCI Vendôme Paris, venant aux droits et obligations de la société Colisée Victoire, a déchargé la SCI Vendôme Bureaux, elle-même venant aux droits de la SCI Vendôme Paris, des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles la société Colisée Victoire a été assujettie au titre des années 2005, 2006 et 2009 ainsi que de la part communale de la taxe foncière sur les propriétés bâties établie au titre de l'année 2008 à raison d'un immeuble sis 37/41, rue de la Victoire à Paris ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de la SCI Vendôme Bureaux, en tant qu'elle concerne les années 2005, 2006 et 2009 ainsi que la part communale de la taxe foncière sur les propriétés bâties établie au titre de l'année 2008 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Maryline Saleix, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat de la SCI vendome Bureaux ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société civile immobilière Colisée Victoire a été assujettie à la taxe foncière sur les propriétés bâties au titre des années 2005 à 2009 à raison d'un immeuble situé 37/41 rue de la Victoire à Paris ; que la SCI Vendôme Paris, venant aux droits et obligations de la société Colisée Victoire, a sollicité la décharge de ces cotisations, aux motifs, s'agissant des cotisations afférentes aux années 2005, 2006 et 2007, que l'immeuble avait fait l'objet d'une opération de reconstruction entre août 2004 et mars 2007 et, s'agissant des cotisations afférentes aux années 2008 et 2009, qu'elle bénéficiait de l'exonération temporaire prévue à l'article 1383 du code général des impôts durant les deux années suivant celle de l'achèvement de cette reconstruction ; que le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement, se pourvoit en cassation contre les articles 1er et 2 du jugement du 6 mars 2012, en tant que le tribunal administratif de Paris a déchargé la SCI Vendôme Bureaux, venant aux droits et obligations de la SCI Vendôme Paris, des cotisations litigieuses au titre des années 2005, 2006 et 2009, ainsi que de la part communale de la taxe foncière sur les propriétés bâties établie au titre de l'année 2008 ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, la sous-section chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué (...) " ; que, lorsqu'il est saisi d'une fin de non-recevoir, il appartient au juge administratif d'examiner les éléments de droit et de fait produits à l'appui de ces conclusions afin de déterminer le bien fondé de l'irrecevabilité alléguée ; qu'alors même que, pour statuer sur cette fin de non-recevoir, il se fonde sur des dispositions qui n'ont pas été mentionnées par les parties, il ne soulève pas d'office un moyen qu'il serait tenu de communiquer en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

3. Considérant que, pour rejeter la fin de non-recevoir opposée en défense par l'administration, tirée de la tardiveté de la réclamation préalable présentée en application de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales contre les cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties établies au titre des années 2005 et 2006, le tribunal administratif de Paris a jugé que l'absence de mention sur les avis d'imposition des délais dans lesquels la société devait exercer cette réclamation faisait obstacle à ce que le délai prévu par les articles R. 196-2 et R. 196-3 du même livre soit opposable au contribuable et a relevé que l'administration ne justifiait pas que ces avis aient comporté cette mention ; qu'en statuant ainsi, le tribunal n'a pas soulevé d'office un moyen qu'il aurait dû communiquer aux parties, alors même que la société, en réponse à cette fin de non-recevoir, n'a pas mentionné les dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative selon lesquelles les délais de recours ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la décision attaquée ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article R. 611-7 du même code doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 200-2 du livre des procédures fiscales : " Par dérogation aux dispositions de l'article R. 110 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, les requêtes au tribunal peuvent être signées d'un mandataire autre que ceux qui sont mentionnés à l'article R. 108 du même code. En ce cas, les dispositions de l'article R. 197-4 du présent livre sont applicables " ; qu'aux termes dudit article R. 197-4 du même livre : " Toute personne qui introduit ou soutient une réclamation pour autrui doit justifier d'un mandat régulier. Le mandat doit, à peine de nullité, être produit en même temps que l'acte qu'il autorise ou enregistré avant l'exécution de cet acte. Toutefois, il n'est pas exigé de mandat des avocats inscrits au barreau, ni des personnes qui, en raison de leurs fonctions ou de leur qualité, ont le droit d'agir au nom du contribuable (...) " ;

5. Considérant que le tribunal administratif de Paris a relevé que la demande présentée par la SCI Vendôme Bureaux avait été signée par une personne qui n'avait pas qualité pour la représenter ; qu'en jugeant que cette demande avait été régularisée par le mémoire en réplique présenté au nom de cette société et signé par des avocats, le tribunal a retenu un motif exempt de dénaturation, dès lors que ce mémoire tendait aux mêmes fins que la demande initiale, et n'a pas commis d'erreur de droit ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 1383 du code général des impôts : " I. Les constructions nouvelles, reconstructions et additions de construction sont exonérées de la taxe foncière sur les propriétés bâties durant les deux années qui suivent celle de leur achèvement. (...) IV. Les exonérations prévues aux I et II sont supprimées, à compter de 1992, pour la part de taxe foncière sur les propriétés bâties perçues au profit des communes et de leurs groupements, en ce qu'elles concernent les immeubles autres que ceux à usage d'habitation. (...) " ;

7. Considérant que, après avoir relevé que l'immeuble appartenant à la société était composé de neuf étages sur un niveau de sous-sol, à usage de bureau, d'habitation et de stationnement, et avoir estimé que les travaux réalisés dans cet immeuble devaient être assimilés à une opération de démolition suivie d'une reconstruction, le tribunal administratif de Paris a prononcé, sur le fondement du I de l'article 1383 du code général des impôts, la décharge des impositions contestées au titre des années 2008 et 2009 ; que le ministre soutient, pour la première fois en cassation, que les dispositions du IV de l'article 1383 faisaient obstacle à ce qu'une telle décharge soit prononcée pour la part communale de la taxe foncière, dès lors que l'opération de reconstruction avait porté sur un immeuble à usage de bureaux ; que ce moyen, nouveau en cassation, ne peut qu'être écarté ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque ;

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SCI Vendôme Bureaux de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi du ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement, est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la SCI Vendôme Bureaux la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie et des finances et à la société civile immobilière Vendôme Bureaux.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 359093
Date de la décision : 21/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 21 oct. 2013, n° 359093
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Maryline Saleix
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP ODENT, POULET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:359093.20131021
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