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21/10/2013 | FRANCE | N°358061

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 21 octobre 2013, 358061


Vu le pourvoi sommaire, le mémoire complémentaire et les nouveaux mémoires enregistrés les 28 mars, 28 juin, 28 décembre 2012 et 12 mars 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A...demeurant... ; il demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n°10DA00723 du 26 janvier 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n°s 0803648, 0903085 du 20 avril 2010 du tribunal administratif de Rouen rejetant ses demandes tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'im

pôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a é...

Vu le pourvoi sommaire, le mémoire complémentaire et les nouveaux mémoires enregistrés les 28 mars, 28 juin, 28 décembre 2012 et 12 mars 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A...demeurant... ; il demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n°10DA00723 du 26 janvier 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation du jugement n°s 0803648, 0903085 du 20 avril 2010 du tribunal administratif de Rouen rejetant ses demandes tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2004, ainsi que des pénalités correspondantes, d'autre part, à ce que soit prononcée la réduction demandée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de M. A...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un acte de donation-partage en date du 15 février 1972, M. A...a reçu de ses parents, en pleine propriété, la finance du droit de présentation afférent à l'office notarial dans lequel exerçait son père ; que cet acte stipulait que la valeur de la finance du droit de présentation s'élevait à 960 000 F ; qu'il imposait à M. A...la charge de verser à ses parents une rente viagère évaluée en capital à 160 000 F et de verser à sa soeur, dans les trois mois du décès du survivant des donateurs, une soulte de 400 000 F indexée sur la moyenne des produits demi-nets de l'ensemble des offices de notaires dépendant du conseil régional des notaires de la cour d'appel de Rouen ; qu'en exécution de cet acte, M. A...a versé à ses parents, jusqu'en 1989, des arrérages dont le montant cumulé s'est élevé à 260 000 F et a versé à sa soeur, à la suite du décès des donateurs, en 1994, une soulte s'élevant, compte tenu de l'indexation, à 1 983 389 F ; qu'il a cédé son office notarial par acte du 21 octobre 2003 au prix de 760 000 euros (4 985 273 F), la vente étant devenue définitive le 21 mai 2004 ; qu'il a déclaré, au titre de l'année 2004, avoir réalisé à cette occasion une plus-value égale à la différence entre ce prix de cession et un prix de revient qu'il a estimé égal à la valeur de l'office stipulée dans l'acte de donation-partage, majorée des montants qu'il avait versés au titre de la rente viagère et de la soulte indexée ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration a remis en cause ce calcul du prix de revient de l'office notarial, en retenant seulement, pour le calcul de la plus-value, la valeur stipulée dans l'acte de donation-partage du 15 février 1972 ; qu'elle a, en conséquence, rehaussé le montant de la plus-value imposable dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ; que M.A..., qui conteste ce redressement en ce qu'il exclut la rente viagère et les sommes versées au titre de l'indexation de la soulte dans le calcul du prix de revient, se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 26 janvier 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 20 avril 2010 du tribunal administratif de Rouen rejetant ses demandes tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2. Considérant, en premier lieu, que la cour a relevé que la charge dont était grevée la donation de la finance du droit de présentation dont a bénéficié M.A... était composée d'une rente viagère estimée en capital à 160 000 F et de la soulte d'un montant de 400 000 F et que cette charge était inférieure à la valeur du bien transmis stipulée par l'acte de donation, égale à 960 000 F, pour en déduire que la donation-partage en litige constituait une libéralité pour le tout ; qu'elle a ainsi porté sur l'acte de donation-partage du 15 février 1972, dont elle n'a pas dénaturé les termes, une appréciation souveraine qui n'est pas susceptible d'être discutée en cassation ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du 1. de l'article 92 du code général des impôts : " Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus. " ; qu'aux termes du 1. de l'article 93 du même code : " Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession. Sous réserve des dispositions de l'article 151 sexies, il tient compte des gains ou des pertes provenant soit de la réalisation des éléments d'actif affectés à l'exercice de la profession, soit des cessions de charges ou d'offices, ainsi que de toutes indemnités reçues en contrepartie de la cessation de l'exercice de la profession ou du transfert d'une clientèle. " ; qu'en vertu de l'article 93 quater du même code, les plus-values à caractère professionnel réalisées sur des immobilisations sont soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies de ce code ; qu'aux termes de l'article 39 duodecies du même code : " 1. par dérogation aux dispositions de l'article 38, les plus-values provenant de la cession d'éléments d'actif immobilisé sont soumises à des régimes distincts suivant qu'elles sont réalisées à court ou à long terme (...) " ; qu'aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe III au même code : " Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. (...) " ;

4. Considérant, d'une part, que lorsqu'une donation porte sur un bien ou des droits qui, comme la finance du droit de présentation attachée à un office notarial, ont, par nature, un caractère professionnel et sont compris dans les éléments de l'actif professionnel du donataire, les charges de la donation supportées par celui-ci sont la contrepartie de l'acquisition ou d'un accroissement de ces éléments ; que, pour le calcul de la plus-value dégagée à l'occasion de la cession de l'actif professionnel en cause, ces charges ne peuvent être ajoutées à la valeur stipulée dans l'acte de donation, qui constitue le prix de revient à prendre en compte ; que le donataire peut seulement déduire de ses revenus professionnels les sommes versées en exécution de l'acte de donation-partage excédant cette valeur ; que, par suite, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que, pour le calcul de la plus-value provenant de sa cession, la valeur d'origine de l'office notarial s'entendait de celle qui était stipulée dans l'acte de donation-partage, sans que puissent lui être ajoutées ni la rente viagère versée par M. A...à ses parents ni la somme correspondant à l'indexation de la soulte qu'il a versée à sa soeur en exécution de cet acte ;

5. Considérant, d'autre part, qu'en déterminant ainsi le prix de revient de l'office notarial de M.A..., conformément à la loi fiscale applicable en 2004, année du fait générateur de l'imposition contestée par l'intéressé, la cour ne saurait en tout état de cause être regardée, ainsi que le soutient le requérant, comme ayant méconnu le principe de sécurité juridique au seul motif que l'interprétation de la loi fiscale retenue par l'administration et par le juge de l'impôt aux dates de versement de la rente viagère et de l'excédent de soulte résultant de son indexation n'aurait pas admis ces charges comme des charges déductibles des revenus professionnels ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente " ;

7. Considérant que la cour a jugé que M. A...ne pouvait se prévaloir de l'interprétation de la loi fiscale donnée par la documentation administrative référencée 4-B-1322 du 15 juin 1991, relative à l'évaluation du prix de revient d'éléments d'actif acquis moyennant le versement d'une rente viagère, aux motifs, d'une part, qu'il n'entrait pas dans les prévisions des points 31 à 33 de cette documentation, qui visent le cas où " le prix d'acquisition a été directement stipulé sous la forme de rente viagère " et, d'autre part, qu'il ne pouvait en tout état de cause se prévaloir des points 34 à 36 de cette documentation, qui visent le cas où " la rente viagère résulte de la transformation du prix d'acquisition stipulé par les parties ", pour obtenir la réduction de son imposition, dès lors que ces points énoncent que " dans cette hypothèse, le prix stipulé dans l'acte constitue le prix de revient de l'élément acquis qu'il convient de retenir quel que soit le montant des arrérages effectivement versés par l'acquéreur " ; que le requérant soutient qu'en statuant ainsi, la cour a insuffisamment motivé son arrêt et méconnu les dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, d'une part, en lui refusant pour ces seuls motifs le bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale résultant des points 31 à 33 et 34 à 36 de la documentation référencée 4-B-1322 et, d'autre part, en s'abstenant de se prononcer sur les points 38 à 40 de la même documentation, dont il avait également revendiqué le bénéfice ;

8. Considérant qu'il ressort toutefois des pièces du dossier soumis à la cour qu'ainsi que le soutenait le ministre devant elle, la documentation administrative dont M. A...se prévalait a été rapportée par la note 4 B-1-99 n° 154 du 7 juin 1999, publiée au bulletin officiel des impôts le 18 août 1999 ; que, par suite, en 2004, année où est intervenu le fait générateur de la plus-value en litige, elle ne pouvait pas être invoquée sur le fondement du deuxième alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; que ce motif d'ordre public, qui n'implique aucune appréciation de fait de la part du juge de cassation et justifie le dispositif de l'arrêt attaqué, doit être substitué aux motifs retenus par la cour ; qu'il suit de là que les moyens analysés ci-dessus au point 7 ne peuvent qu'être écartés ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de M. A...est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A... et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 358061
Date de la décision : 21/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 21 oct. 2013, n° 358061
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:358061.20131021
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