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09/10/2013 | FRANCE | N°360137

France | France, Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 09 octobre 2013, 360137


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 juin et 10 septembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Sonotel SA, dont le siège est La Martinière, route de Deauville Coudray-Rabut à Pont-L'Evêque (14130), représentée par son président ; la société Sonotel SA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09PA00320 de la cour administrative d'appel de Paris du 10 avril 2012 en tant que, après avoir annulé le jugement n° 0419345/6-2 du tribunal administratif de Paris du 17 novembre 2008, il

a, statuant par voie d'évocation, rejeté sa requête déposée en son nom prop...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 11 juin et 10 septembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la société Sonotel SA, dont le siège est La Martinière, route de Deauville Coudray-Rabut à Pont-L'Evêque (14130), représentée par son président ; la société Sonotel SA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêt n° 09PA00320 de la cour administrative d'appel de Paris du 10 avril 2012 en tant que, après avoir annulé le jugement n° 0419345/6-2 du tribunal administratif de Paris du 17 novembre 2008, il a, statuant par voie d'évocation, rejeté sa requête déposée en son nom propre et au nom de la société Sonotel Lex, tendant, à titre principal, à ce que la Société des Autoroutes Paris-Normandie (SAPN) soit condamnée à lui verser la somme de 8 186 613 euros en réparation du préjudice financier résultant pour elle de la résiliation du contrat de sous-concession de l'aire d'autoroute de Bosguet Sud et la somme de 2 414 899 euros en réparation du préjudice financier résultant pour la société Sonotel Lex de la résiliation du contrat de sous-concession de l'aire de Rosny Sud, et, à titre subsidiaire, à ce que la SAPN soit condamnée à verser les sommes de 9 128 611 euros et 3 111 945 euros en réparation des préjudices résultant de la nullité des contrats, ces sommes étant assorties des intérêts légaux à compter du 26 juin 2003 avec capitalisation ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la SAPN le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Stéphane Bouchard, Maître des Requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Bertrand Dacosta, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament, avocat de la SELARL Bernard Beuzeboc, agissant en qualité de liquidateur de la société Sonotel SA et de la société Sonotel Lex, et à la SCP Boutet, avocat de la Société des autoroutes de Paris-Normandie ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la Société de l'autoroute Paris Normandie (SAPN), concessionnaire de l'autoroute de Normandie (A13), a conclu respectivement le 25 avril 1980 avec la société Sonotel SA et le 9 novembre 1987 avec la société Sonotel Lex, deux contrats de sous-concession ayant pour objet l'exploitation de deux restaurants sur des aires de services de l'autoroute ; que l'article 2 de chacun de ces deux contrats de sous-concession prévoyait qu'ils étaient conclus pour une durée allant " jusqu'à l'expiration de la concession de l'Autoroute " à la SAPN, soit le 3 août 2003, et que " au cas où cette concession viendrait à être prorogée, la durée du contrat le serait tout autant " ; qu'à trois reprises, en 1991, 1995 et 2001, la durée de la concession de l'autoroute à la SAPN a été allongée par l'Etat, avec un terme fixé, en dernier lieu, au 31 décembre 2028 ; que, par un courrier du 22 mai 2003, la SAPN a informé les deux sociétés sous-concessionnaires que les contrats " n'étaient pas susceptibles d'être prorogés automatiquement " et qu'ils " prendront donc fin à la date normale d'expiration en dehors de toute prorogation, soit le 3 août 2003 " ; que la cour administrative d'appel de Paris, par un arrêt du 10 avril 2012, statuant après évocation, a rejeté les demandes principales des sociétés contre la SAPN, tendant au versement d'indemnités à raison d'une résiliation anticipée des contrats, ainsi que les demandes indemnitaires subsidiaires fondées sur la responsabilité quasi-contractuelle et quasi-délictuelle de la SAPN ; que la SELARL Bernard Beuzeboc, agissant en qualité de liquidateur de la société Sonotel SA et de la société Sonotel Lex, se pourvoit en cassation contre cet arrêt en tant qu'il a statué après évocation ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'en estimant que les deux contrats de sous-concession avaient, eu égard aux conditions dans lesquelles leur équilibre financier était défini, été conclus pour une période s'achevant le 3 août 2003 et que les stipulations des articles 2 de ces contrats, qui avaient pour objet de prolonger leur durée au-delà de la durée initiale sous la seule condition que la durée de la concession de l'autoroute soit prorogée par l'Etat, devaient être regardées comme des clauses de tacite reconduction, susceptibles de faire naître de nouveaux contrats, la cour administrative d'appel de Paris a porté sur les contrats qui lui étaient soumis une appréciation souveraine exempte de dénaturation et n'a pas commis d'erreur de droit ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que si la cour a par ailleurs jugé que les sociétés requérantes ne pouvaient bénéficier d'un droit acquis au renouvellement des autorisations d'occupation du domaine public incluses dans les contrats, un tel motif présente un caractère surabondant ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la cour aurait commis sur ce point une erreur de droit ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'en estimant que l'équilibre financier des contrats en cause n'exigeait pas une prorogation de leur durée, et en en déduisant que les stipulations de leurs articles 2 étaient divisibles, la cour a porté sur ces clauses une appréciation souveraine exempte de dénaturation et n'a pas commis d'erreur de droit ;

5. Considérant, enfin, qu'en estimant que les clauses des articles 2 des contrats litigieux étaient " entachées de nullité ab initio ", la cour a nécessairement jugé qu'elles n'avaient pu avoir pour effet de faire naître, à l'occasion des prolongations de la concession de l'autoroute par l'Etat intervenues en 1991, 1995 et 2001, de nouveaux contrats de sous-concession dont l'irrégularité aurait ouvert la possibilité, pour les sociétés sous-concessionnaires, de poursuivre la responsabilité quasi-contractuelle et la responsabilité quasi-délictuelle de la SAPN ; qu'ainsi le moyen tiré de ce qu'elle aurait entaché son arrêt d'irrégularité, faute d'avoir répondu sur ce point en rejetant les demandes indemnitaires présentées à titre subsidiaire par les sociétés, ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SELARL Bernard Beuzeboc n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SELARL Bernard Beuzeboc, agissant en qualité de liquidateur des sociétés Sonotel SA et Sonotel Lex, la somme de 3 000 euros à verser à la SAPN au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'en revanche ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la SAPN qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la SELARL Bernard Beuzeboc est rejeté.

Article 2 : La SELARL Bernard Beuzeboc, agissant en qualité de liquidateur des sociétés Sonotel SA et Sonotel Lex, versera à la SAPN une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SELARL Bernard Beuzeboc, agissant en qualité de liquidateur des sociétés Sonotel SA et Sonotel Lex, et à la Société des Autoroutes Paris-Normandie (SAPN).


Synthèse
Formation : 7ème et 2ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 360137
Date de la décision : 09/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 09 oct. 2013, n° 360137
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Stéphane Bouchard
Rapporteur public ?: M. Bertrand Dacosta
Avocat(s) : SCP POTIER DE LA VARDE, BUK LAMENT ; SCP BOUTET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2013:360137.20131009
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