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03/12/2012 | FRANCE | N°351606

France | France, Conseil d'État, 8ème et 3ème sous-sections réunies, 03 décembre 2012, 351606


Vu le pourvoi, enregistré le 5 août 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 08MA01646 du 14 juin 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, statuant sur requête de la SNC Schlecker tendant à l'annulation du jugement n° 0302971 du 22 janvier 2008 du tribunal administratif de Nice rejetant sa demande tendant au rétablissement et à la restitution d'une créance sur le Trésor publi

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Vu le pourvoi, enregistré le 5 août 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement ; le ministre demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt n° 08MA01646 du 14 juin 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille, statuant sur requête de la SNC Schlecker tendant à l'annulation du jugement n° 0302971 du 22 janvier 2008 du tribunal administratif de Nice rejetant sa demande tendant au rétablissement et à la restitution d'une créance sur le Trésor public née à son profit du report en arrière du déficit constaté à la clôture de l'exercice 1993, a annulé ce jugement et a condamné l'Etat à restituer le montant de 921 970,19 euros à la SNC Schlecker au titre de cette créance ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Patrick Quinqueton, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Gadiou, Chevallier, avocat de la SNC Schlecker,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public ;

1. Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration " ; qu'aux termes du paragraphe 5 du chapitre III de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal (...) Si après ces contacts des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental ou régional qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur (...) " ;

2. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de ce paragraphe de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié que des éclaircissements supplémentaires ne peuvent être fournis par l'inspecteur principal, supérieur hiérarchique du vérificateur, qu'après que le vérificateur a, en application des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, répondu aux observations du contribuable et informé celui-ci de la persistance du désaccord et des motifs de ce désaccord ; qu'il suit de là que la demande d'éclaircissements à l'inspecteur principal, supérieur hiérarchique du vérificateur, ne peut qu'être postérieure à l'envoi par le vérificateur au contribuable de la confirmation des redressements envisagés ; qu'ainsi, les dispositions du paragraphe 5 du chapitre III de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié font obstacle à ce que la demande de saisine de l'inspecteur principal formée par le contribuable soit subordonnée à la réalisation ultérieure d'une condition tenant à ce que le vérificateur maintienne les redressements envisagés dans la notification adressée au contribuable ; que, par suite, l'administration n'entache pas d'irrégularité la procédure d'établissement de l'impôt en s'abstenant de donner suite à une telle demande conditionnelle de saisine de l'inspecteur principal, qui ne peut être regardée comme régulièrement formée ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SNC Schlecker a, le 17 décembre 1998, reçu notification de redressements au titre de l'exercice 1995 ; que, par lettre du 11 janvier 1999, elle a présenté ses observations sur ces redressements et indiqué qu'elle sollicitait d'ores et déjà une entrevue avec le supérieur hiérarchique du vérificateur, dans l'hypothèse où l'administration confirmerait les redressements envisagés ; qu'il est constant que la société n'a pas réitéré cette demande d'entretien postérieurement au 1er septembre 1999, date de la confirmation, par le vérificateur, des redressements précédemment notifiés ; qu'en estimant que l'administration, en ne donnant pas suite à la demande d'entretien avec le supérieur hiérarchique du vérificateur présentée dans la lettre du 11 janvier 1999, avait méconnu la garantie prévue par le paragraphe 5 du chapitre III de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié et en jugeant que la procédure d'imposition était ainsi entachée d'irrégularité, alors que l'administration, ainsi qu'il a été dit, n'était pas tenue de donner suite à une telle demande, présentée à titre conditionnel et de manière prématurée, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit ; que, par suite, le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du Gouvernement, est fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;

4. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 14 juin 2011 de la cour administrative d'appel de Marseille est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : Les conclusions de la SNC Schlecker présentées sur le fondement de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie et des finances et à la SNC Schlecker.


Synthèse
Formation : 8ème et 3ème sous-sections réunies
Numéro d'arrêt : 351606
Date de la décision : 03/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - CONTRÔLE FISCAL - GARANTIES ACCORDÉES AU CONTRIBUABLE VÉRIFIÉ - DEMANDE D'ÉCLAIRCISSEMENTS À L'INSPECTEUR PRINCIPAL - SUPÉRIEUR HIÉRARCHIQUE DU VÉRIFICATEUR - MODALITÉS - POSSIBILITÉ POUR LE CONTRIBUABLE DE FORMER UNE DEMANDE DE SAISINE DE L'INSPECTEUR PRINCIPAL SUBORDONNÉE À LA RÉALISATION ULTÉRIEURE D'UNE CONDITION TENANT AU MAINTIEN PAR LE VÉRIFICATEUR DES REDRESSEMENTS ENVISAGÉS DANS LA NOTIFICATION - ABSENCE [RJ1].

19-01-03-01 Des éclaircissements supplémentaires ne pouvant être fournis par l'inspecteur principal, supérieur hiérarchique du vérificateur, qu'après que le vérificateur a, en application des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, répondu aux observations du contribuable et informé celui-ci de la persistance du désaccord et des motifs de ce désaccord, la demande d'éclaircissements à l'inspecteur principal, supérieur hiérarchique du vérificateur, ne peut qu'être postérieure à l'envoi par le vérificateur au contribuable de la confirmation des redressements envisagés. Ainsi, les dispositions du paragraphe 5 du chapitre III de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié font obstacle à ce que la demande de saisine de l'inspecteur principal formée par le contribuable soit subordonnée à la réalisation ultérieure d'une condition tenant à ce que le vérificateur maintienne les redressements envisagés dans la notification adressée au contribuable, une telle demande conditionnelle de saisine de l'inspecteur principal ne pouvant être regardée comme régulièrement formée.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - CONTRÔLE FISCAL - DEMANDE D'ÉCLAIRCISSEMENTS À L'INSPECTEUR PRINCIPAL - SUPÉRIEUR HIÉRARCHIQUE DU VÉRIFICATEUR - MODALITÉS - POSSIBILITÉ POUR LE CONTRIBUABLE DE FORMER UNE DEMANDE DE SAISINE DE L'INSPECTEUR PRINCIPAL SUBORDONNÉE À LA RÉALISATION ULTÉRIEURE D'UNE CONDITION TENANT AU MAINTIEN PAR LE VÉRIFICATEUR DES REDRESSEMENTS ENVISAGÉS DANS LA NOTIFICATION - ABSENCE [RJ1].

19-01-03-01-04 Des éclaircissements supplémentaires ne pouvant être fournis par l'inspecteur principal, supérieur hiérarchique du vérificateur, qu'après que le vérificateur a, en application des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, répondu aux observations du contribuable et informé celui-ci de la persistance du désaccord et des motifs de ce désaccord, la demande d'éclaircissements à l'inspecteur principal, supérieur hiérarchique du vérificateur, ne peut qu'être postérieure à l'envoi par le vérificateur au contribuable de la confirmation des redressements envisagés. Ainsi, les dispositions du paragraphe 5 du chapitre III de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié font obstacle à ce que la demande de saisine de l'inspecteur principal formée par le contribuable soit subordonnée à la réalisation ultérieure d'une condition tenant à ce que le vérificateur maintienne les redressements envisagés dans la notification adressée au contribuable, une telle demande conditionnelle de saisine de l'inspecteur principal ne pouvant être regardée comme régulièrement formée.


Références :

[RJ1]

Rappr., s'agissant du recours à l'interlocuteur départemental, CE, 27 juin 2012, M. et Mme Guillet, n° 342736, à mentionner aux Tables. Comp, pour la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, CE, 5 juin 2009, M. et Mme Tomic, n° 303598, T. p. 693.


Publications
Proposition de citation : CE, 03 déc. 2012, n° 351606
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Patrick Quinqueton
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP GADIOU, CHEVALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:351606.20121203
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