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11/10/2012 | FRANCE | N°363296

France | France, Conseil d'État, 11 octobre 2012, 363296


Vu la requête, enregistrée le 9 octobre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Abraht B, élisant domicile à la CIMADE 14 boulevard de Brosses à Dijon (21000) ; Mme B demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1202080 du 21 septembre 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Dijon, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant, d'une part, à ce qu'il soit enjoint au directeur territorial de l'Office français de

l'immigration et de l'intégration (OFFI) de prendre les mesures nécessai...

Vu la requête, enregistrée le 9 octobre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Abraht B, élisant domicile à la CIMADE 14 boulevard de Brosses à Dijon (21000) ; Mme B demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1202080 du 21 septembre 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Dijon, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant, d'une part, à ce qu'il soit enjoint au directeur territorial de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFFI) de prendre les mesures nécessaires afin de lui assurer une domiciliation dans un délai de 24 heures suivant notification de l'ordonnance, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Côte d'Or de lui assurer un hébergement dans un délai de 24 heures suivant notification de l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de lui accorder l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Dijon est entachée d'une insuffisance de motivation et d'une erreur de droit ;

- la condition relative à l'urgence est remplie dès lors qu'elle se trouve à la rue, sans aucune ressource ;

- le préfet de la Côte d'Or a porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile ;

- le droit à l'information relatif à la procédure d'asile n'a pas été respecté ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures " ; qu'en vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut rejeter une requête par une ordonnance motivée, sans instruction contradictoire ni audience publique, lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée ; qu'à cet égard, il appartient au juge d'appel de prendre en considération les éléments recueillis par le juge du premier degré dans le cadre de la procédure écrite et orale qu'il a diligentée ;

2. Considérant, d'une part, que le droit constitutionnel d'asile, qui a le caractère d'une liberté fondamentale, a pour corollaire le droit de solliciter le statut de réfugié ; que, s'il implique que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit en principe autorisé à demeurer sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande, ce droit s'exerce dans les conditions définies par l'article L. 741-4 du code de l'entre et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'usage par le juge des référés des pouvoirs qu'il tient des dispositions de l'article L. 521-2 du code de justice administrative est subordonné à la condition qu'une autorité administrative ait porté une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale ; que la méconnaissance des obligations prévues par le droit de l'Union européenne comme par le droit national en matière d'accueil de demandeurs d'asile peut faire apparaître une telle atteinte lorsqu'elle est manifeste et qu'elle comporte en outre des conséquences graves pour le demandeur d'asile concerné, compte tenu de son âge, de son état de santé ou de sa situation familiale ; que cette méconnaissance s'apprécie compte tenu des diligences accomplies par l'administration au regard des moyens dont elle dispose ;

3. Considérant, d'autre part, qu'il appartient aux autorités de l'Etat de mettre en oeuvre le droit à l'hébergement d'urgence reconnu par l'article L. 345-2 du code de l'action sociale et des familles à toute personne sans abri qui se trouve en situation de détresse médicale, psychique et sociale ; qu'une carence caractérisée dans l'accomplissement de cette tâche peut faire apparaître, pour l'application de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale lorsqu'elle entraîne des conséquences graves pour la personne intéressée ; qu'il incombe au juge des référés d'apprécier dans chaque cas les diligences accomplies par l'administration en tenant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l'âge, de l'état de la santé et de la situation de famille de la personne intéressée ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B, de nationalité érythréenne, qui déclare être entrée en France avec ses deux enfants le 15 janvier 2012, a bénéficié d'un hébergement dans un centre d'accueil pour demandeurs d'asile durant l'examen de sa demande d'asile selon la procédure prioritaire ; que sa demande d'asile a été rejetée au motif que ses allégations ne pouvaient pas être regardées comme établies, l'intéressée ayant notamment rendu impossible l'identification de ses empreintes ; qu'en vertu de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'intéressée, même si elle a formé un recours contre cette décision, ne bénéficie pas du droit de se maintenir en France jusqu'à l'intervention de la décision de la Cour nationale du droit d'asile ; que le préfet de la Côte d'Or a toutefois, pour tenir compte de la situation de la requérante, qui élève deux enfants mineurs, dont l'un est atteint d'un handicap, et malgré l'engorgement des dispositifs d'hébergement d'urgence dans le département, proposé à la requérante une place au sein du dispositif d'hébergement d'urgence de droit commun, lequel ne saurait être regardé comme portant atteinte à la dignité de la requérante ; qu'ainsi, le préfet de la Côte-d'Or et le directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'ont pas porté une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile, au droit d'hébergement d'urgence et au droit à un recours effectif de l'intéressée, qui dispose, en tout état de cause et contrairement à ce qu'elle soutient, d'une domiciliation pour les besoins de la procédure engagée devant la Cour nationale du droit d'asile ; que, par suite, la requérante n'est manifestement pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée, qui est suffisamment motivée ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il y ait lieu de l'admettre à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle, la requête de Mme B doit être rejetée, y compris les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du même code ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de Mme B est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme Abraht B.

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et au préfet de la Côte d'Or.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 363296
Date de la décision : 11/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 11 oct. 2012, n° 363296
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SPINOSI

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:363296.20121011
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