Vu le pourvoi, enregistrés le 1er février 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour Mlle Rima A, demeurant ... ; Mlle A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1119782/9 du 14 novembre 2011 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement des articles L. 521-1 et L. 522-3 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du Préfet de police en date du 4 septembre 2011 et à la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande de suspension et à ses conclusions aux fins d'injonction présentées devant le tribunal administratif de Paris ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à Me Carbonnier en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Vincent Bréhier, Maître des Requêtes en service extraordinaire,
- les observations de Me Carbonnier, avocat de Mlle A,
- les conclusions de Mme Delphine Hedary, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me Carbonnier, avocat de Mlle A ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ;
Considérant que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés, saisi d'une demande de suspension d'une décision refusant la délivrance d'un titre de séjour, d'apprécier et de motiver l'urgence compte tenu de l'incidence immédiate du refus de titre de séjour sur la situation concrète de l'intéressé ; que cette condition d'urgence sera en principe constatée dans le cas d'un refus de renouvellement du titre de séjour, comme d'ailleurs d'un retrait de celui-ci ; que, dans les autres cas, il appartient au requérant de justifier de circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier à très bref délai d'une mesure provisoire dans l'attente d'une décision juridictionnelle statuant sur la légalité de la décision litigieuse ;
Considérant que, pour rejeter pour défaut d'urgence, en application de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, les conclusions de Mlle A aux fins de suspension de l'exécution de l'arrêté du 4 septembre 2011 par lequel le préfet de police de Paris avait refusé le renouvellement de son titre de séjour portant la mention " étudiant ", le juge des référés du tribunal administratif de Paris a relevé qu'elle ne pouvait invoquer la nécessité d'obtenir la suspension demandée avant le 15 novembre dès lors qu'elle n'avait enregistrée que le 7 novembre sa requête contre une décision qui lui avait été notifiée le 7 octobre ; qu'en ne retenant pas la présomption d'urgence applicable s'agissant d'une décision de refus de renouvellement de titre de séjour et en n'exposant pas les circonstances particulières qui le conduisaient en l'espèce à l'écarter, le juge des référés a entaché son ordonnance d'une erreur de droit ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, l'ordonnance attaquée doit être annulée ;
Considérant qu'il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par Mlle A ;
Considérant, d'une part, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que l'urgence à suspendre une décision de refus de renouvellement d'un titre de séjour doit, en principe, être reconnue ; qu'en défense, le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ne fait état d'aucune circonstance particulière de nature à faire échec en l'espèce à cette présomption ; que, par suite, la condition d'urgence doit être regardée comme remplie ;
Considérant, d'autre part, qu'est de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté attaqué le moyen tiré de ce que le préfet se serait fondé sur un motif entaché d'une erreur d'appréciation en estimant que le caractère réel et sérieux des études de Mlle A, de nationalité libanaise, n'était pas avéré au seul motif qu'elle avait déjà obtenu un diplôme de même nature que celui auquel elle souhaitait s'inscrire, alors qu'il ressort des pièces du dossier que le nouveau master qu'elle souhaitait suivre s'inscrivait dans la continuité de ses études, qu'il était de nature à compléter utilement, et était de nature à lui offrir des débouchés professionnels supplémentaires ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle A est fondée à demander la suspension de l'exécution de l'arrêté litigieux ; qu'en l'espèce, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de réexaminer la demande de Mlle A et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Considérant enfin que Mlle A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Carbonnier, avocat de Mlle A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Carbonnier de la somme de 3 000 euros ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du 14 novembre 2011 du juge des référés du tribunal administratif de Paris est annulée.
Article 2 : L'exécution de la décision par laquelle le préfet des police a refusé à Mlle A le renouvellement de son titre de séjour " étudiant " est suspendue jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la demande présentée par l'intéressé devant le tribunal administratif de Paris.
Article 3 : Il est enjoint au préfet police, à compter de la notification qui lui sera faite de la présente décision, de réexaminer la demande de Mlle A et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour.
Article 4 : L'Etat versera à Me Carbonnier, avocat de Mlle A, une somme de 3 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 5 : Le surplus des conclusions du pourvoi et de la demande de première instance de Mlle A est rejeté.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à Mlle Rima A et au ministre de l'intérieur.