Vu le pourvoi, enregistré le 18 mai 2010 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DE L'IMMIGRATION ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 0700270 du 11 mars 2010 par lequel le tribunal administratif de Mayotte a, d'une part, annulé à la demande de M. Romain A, la décision implicite rejetant son recours gracieux du 17 octobre 2007 ainsi que la décision du 31 décembre 2007 par laquelle le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE a arrêté le tableau d'avancement pour l'année 2007 au titre du grade de brigadier en tant qu'il n'y figure pas et, d'autre part, enjoint au ministre de régulariser sa situation sur la base d'une nomination en qualité de brigadier de police avec effet au 1er avril 2007 et en qualité de brigadier-chef avec effet au 1er juillet 2008 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. A ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 2004-1439 du 23 décembre 2004 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Yves Rossi, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Boutet, avocat de M. A,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Thiellay, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boutet, avocat de M. A ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A, gardien de la paix, a saisi, par recours gracieux en date du 15 octobre 2007, le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE d'une demande tendant à ce qu'il soit promu au grade de brigadier de police au titre de l'année 2007 ; que par jugement du 11 mars 2010, contre lequel le ministre se pourvoit en cassation, le tribunal de Mayotte a annulé, d'une part, la décision implicite rejetant son recours gracieux ainsi que la décision ministérielle refusant de le promouvoir au grade de brigadier de police au titre de l'année 2007 et, d'autre part, enjoint au ministre de régulariser la situation de l'intéressé sur la base d'une nomination en qualité de brigadier de police avec effet au 1er avril 2007 et en qualité de brigadier-chef avec effet au 1er juillet 2008 ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte du second alinéa de l'article R. 312-2 du code de justice administrative que le moyen tiré de l'incompétence territoriale du tribunal administratif de Mayotte, présenté pour la première fois devant le juge de cassation, est irrecevable ;
Considérant, en second lieu, que pour annuler le refus ministériel de promouvoir M. A, le tribunal a estimé que ce refus avait été motivé par la circonstance que l'intéressé avait, au mois de juin 2007, reçu et accepté une proposition de mutation sur un poste de la direction de la police aux frontières de Mayotte ; que ce faisant le tribunal administratif n'a pas dénaturé les pièces du dossier ; qu'il n'a pas davantage commis d'erreur de droit en jugeant que ce motif n'était pas au nombre de ceux pouvant légalement justifier un refus d'inscription au tableau d'avancement ;
Mais considérant que l'annulation ainsi prononcée n'impliquait pas que l'administration prenne une nouvelle décision dans un sens déterminé, mais seulement qu'elle réexamine la demande de M. A ; qu'en enjoignant à l'administration de nommer l'intéressé en qualité de brigadier de police avec effet au 1er avril 2007 et en qualité de brigadier-chef, avec effet au 1er juillet 2008, le tribunal a par suite commis une erreur de droit ; que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DE L'IMMIGRATION est en conséquence fondé à demander l'annulation du jugement attaqué, en tant qu'il comporte cette injonction ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : S'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction administrative statuant en dernier ressort, le Conseil d'Etat peut (...) régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; qu'il y a lieu de régler l'affaire au fond dans la mesure de la cassation prononcée ;
Considérant qu'à la suite de l'annulation de la décision du MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DE L'IMMIGRATION refusant de promouvoir M. A au grade de brigadier de police pour l'année 2007, il y a lieu d'enjoindre à l'administration de réexaminer la demande de l'intéressé tendant à cette inscription ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. A au titre des frais engagés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'article 2 du jugement n° 0700270 du tribunal de Mayotte du 11 mars 2010 est annulé.
Article 2 : Il est enjoint au MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DE L'IMMIGRATION de procéder au réexamen de la demande de M. A d'inscription au grade de brigadier de police pour l'année 2007 dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi et les conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DE L'IMMIGRATION et à M. Romain A.