Vu la requête, enregistrée le 2 septembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la SOCIETE VAUDIS, dont le siège est aux 6 et 8, avenue des Hautes Folies à Vaux-sur-Mer (17640), représentée par son président ; la SOCIETE VAUDIS demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision du 3 juin 2009 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial a accordé à la société Atlantique Expansion l'autorisation préalable requise en vue de la création d'un ensemble commercial de 4 536 m² de surface de vente composé d'un hypermarché de 3 582 m² à l'enseigne Intermarché et d'une galerie marchande de 954 m², à Vaux-sur-Mer (Charente-Maritime) ;
2°) de mettre solidairement à la charge de l'Etat et de la société Atlantique Expansion une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de commerce ;
Vu le décret n° 2008-1477 du 30 décembre 2008 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Bethânia Gaschet, Auditeur,
- les conclusions de M. Rémi Keller, rapporteur public ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la société Atlantique Expansion ;
Sur la légalité externe de la décision attaquée :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 752-17 du code de commerce : (...) la décision de la commission départementale d'aménagement commercial peut, dans un délai d'un mois, faire l'objet d'un recours devant la Commission nationale d'aménagement commercial. La commission nationale se prononce dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine. / La saisine de la commission nationale est un préalable obligatoire à un recours contentieux à peine d'irrecevabilité de ce dernier (...) ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en raison des pouvoirs ainsi conférés à la Commission nationale d'aménagement commercial, ses décisions se substituent à celles de la commission départementale contestées devant elle ; que, par suite, les moyens tirés de l'irrégularité de la décision du 14 janvier 2009 de la commission départementale d'aménagement commercial de l'Yonne sont inopérants ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe ne faisait obligation à la décision attaquée d'attester que la convocation des membres de la Commission nationale d'aménagement commercial, dont la réunion n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, méconnu la condition de quorum prévue à l'alinéa 3 de l'article R. 752-49 du code de commerce précité, avait été effectuée régulièrement ;
Considérant, en troisième lieu, que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent être utilement invoqués, la décision d'autorisation attaquée n'émanant ni d'une juridiction, ni d'un tribunal au sens de ces stipulations ; que, par ailleurs, il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe que la commission nationale serait tenue de communiquer aux auteurs d'un recours contre une décision d'autorisation accordée à une société pétitionnaire les documents produits par cette dernière pour sa défense et l'avis du commissaire du gouvernement afin que les auteurs du recours puissent y répondre ; que, par conséquent, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure suivie devant la commission nationale doit être écarté ;
Sur la légalité interne de la décision attaquée :
En ce qui concerne la composition du dossier de la demande d'autorisation :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 752-7 du code de commerce I. La demande est accompagnée : (...) 2° Des renseignements suivants : / a) Délimitation de la zone de chalandise du projet, telle que définie à l'article R. 752-8, et mention de la population de chaque commune comprise dans cette zone ainsi que de son évolution entre les deux derniers recensements authentifiés par décret (...) / II. La demande est également accompagnée d'une étude destinée à permettre à la commission d'apprécier les effets prévisibles du projet au regard des critères prévus par l'article L. 752-6. Celle-ci comporte les éléments permettant d'apprécier les effets du projet sur : (...) / 2° Les flux de voitures particulières et de véhicules de livraison ainsi que sur les accès sécurisés à la voie publique ; / 3° La gestion de l'espace ; / 4° Les consommations énergétiques et la pollution (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le dossier accompagnant la demande d'autorisation délimite la zone de chalandise et indique la population de chaque commune comprise dans cette zone aux recensements de 1990 et de 1999, ainsi qu'une estimation établie à partir du dernier recensement intermédiaire ; que le dossier comprend également des données relatives aux flux de circulation, à la gestion de l'espace, aux consommations énergétiques et à la pollution, dont les requérants ne démontrent pas qu'elles soient fausses ou insuffisantes ; qu'ainsi, les moyens tirés de l'insuffisance du dossier de demande au regard des prescriptions de l'article R. 752-7 du code de commerce précité doivent être écartés ;
En ce qui concerne l'appréciation de la Commission nationale d'aménagement commercial :
Considérant, d'une part, qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 : Les pouvoirs publics veillent à ce que l'essor du commerce et de l'artisanat permette l'expansion de toutes les formes d'entreprises, indépendantes, groupées ou intégrées, en évitant qu'une croissance désordonnée des formes nouvelles de distribution ne provoque l'écrasement de la petite entreprise et le gaspillage des équipements commerciaux et ne soit préjudiciable à l'emploi ; qu'aux termes de l'article L. 750-1 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie : Les implantations, extensions, transferts d'activités existantes et changements de secteur d'activité d'entreprises commerciales et artisanales doivent répondre aux exigences d'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et de la qualité de l'urbanisme. Ils doivent en particulier contribuer au maintien des activités dans les zones rurales et de montagne ainsi qu'au rééquilibrage des agglomérations par le développement des activités en centre-ville et dans les zones de dynamisation urbaine. / Dans le cadre d'une concurrence loyale, ils doivent également contribuer à la modernisation des équipements commerciaux, à leur adaptation à l'évolution des modes de consommation et des techniques de commercialisation, au confort d'achat du consommateur et à l'amélioration des conditions de travail des salariés. ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 752-6 du même code, issu de la même loi du 4 août 2008 : Lorsqu'elle statue sur l'autorisation d'exploitation commerciale visée à l'article L. 752-1, la commission départementale d'aménagement commercial se prononce sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs. Les critères d'évaluation sont : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et de montagne ; / b) L'effet du projet sur les flux de transport ; / c) Les effets découlant des procédures prévues aux articles L. 303-1 du code de la construction et de l'habitation et L. 123-11 du code de l'urbanisme ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet ; / b) Son insertion dans les réseaux de transports collectifs. ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi ; qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce ;
Considérant, en premier lieu, s'agissant de l'objectif d'aménagement du territoire, qu'il ressort des pièces du dossier que le projet, qui n'est pas incompatible avec le schéma de cohérence territoriale, s'intégrera dans la zone d'aménagement concertée dite Pôle économique Val Lumière et permettra un rééquilibrage de l'offre commerciale dans l'agglomération Royan-Atlantique, sans qu'il soit établi qu'il porterait atteinte au développement des activités du centre-ville de la commune de Royan ou que les flux de circulation induits par lui remettraient en cause l'accessibilité du site ;
Considérant, en deuxième lieu, s'agissant de l'objectif de développement durable, qu'il ressort des pièces du dossier, d'une part, que le projet prévoit l'installation de dispositifs d'économie d'énergie, des mesures concernant le traitement des déchets et les pollutions sonores, d'autre part, qu'il répond au critère d'insertion dans le bâti avoisinant et qu'il fera l'objet d'un traitement paysager approprié ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet de la société Atlantique Expansion compromettrait l'objectif de protection des consommateurs ; qu'en particulier les considérations liées à l'équilibre entre les différents types de commerce sont sans incidence sur la protection des consommateurs ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Commission nationale d'aménagement commercial n'a pas fait une inexacte application des dispositions précédemment citées du code de commerce en confirmant l'autorisation que la commission départementale avait accordée ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis solidairement à la charge de l'Etat et de la société Atlantique Expansion, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes le versement de la somme que demande la SOCIETE VAUDIS au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la SOCIETE VAUDIS le versement d'une somme de 5 000 euros à la société Atlantique Expansion au titre des frais de même nature exposés par elle ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la SOCIETE VAUDIS est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE VAUDIS versera à la société Atlantique Expansion la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE VAUDIS et à la société Atlantique Expansion.
Copie en sera adressée pour information à la Commission nationale d'aménagement commercial et à la ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.