Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 4 et 19 novembre 2009 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Louis A, demeurant ... ; M. A demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance du 20 octobre 2009 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux, statuant sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit ordonné au maire de la commune de Sainte-Eulalie de procéder à la démolition du mur édifié pour empêcher toute entrée dans l'appartement dont il est propriétaire, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;
2°) statuant en référé, de faire droit à ses demandes ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Sainte-Eulalie le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 4 mai 2010, présentée pour la commune de Sainte-Eulalie ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Xavier de Lesquen, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. A et de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la commune de Sainte-Eulalie,
- les conclusions de Mme Catherine de Salins, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. A et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la commune de Sainte-Eulalie ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-3 du code de justice administrative : En cas d'urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l'absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l'exécution d'aucune décision administrative ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux qu'après avoir constaté, en mai 2009, l'état de grave insalubrité de l'appartement appartenant à M. A situé dans une résidence de la commune de Saint-Eulalie (Gironde), devenu vacant à la suite du décès de sa locataire, le maire de la commune a fait ériger un mur de parpaings pour interdire l'entrée de l'appartement ; que son propriétaire a demandé au juge des référés, sur le fondement de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, d'enjoindre à la commune de procéder à l'enlèvement du mur afin qu'il puisse accéder à son bien et y réaliser les travaux nécessaires à sa remise en location ;
Considérant que le juge des référés a rejeté la demande dont il était saisi pour défaut d'urgence au motif que le murage de l'appartement de M. A aurait présenté le caractère d'une mesure conservatoire qui n'avait ni pour objet ni pour effet d'interdire au propriétaire de reprendre possession de son bien en vue d'y entreprendre les travaux de sécurité et de mise en conformité rendus nécessaires par son état ; que cette appréciation, alors que, ainsi que l'établissait un constat d'huissier, le mur érigé faisait matériellement obstacle à l'accès au local et qu'il n'incombait pas au propriétaire d'assumer la charge de sa démolition, est entachée de dénaturation ; que M. A est par suite fondé à demander pour ce motif l'annulation de l'ordonnance qu'il attaque ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire en référé en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
Considérant que si le maire de la commune de Sainte-Eulalie se prévaut d'un arrêté de péril ordinaire en date du 21 juillet 2009 pris sur le fondement de l'article L. 511-1 du code de la construction et de l'habitation mettant en demeure M. A de procéder à divers travaux de réparation dans un délai de six mois ainsi que d'une lettre de la même date l'invitant à autoriser la mairie à murer l'appartement, sans être en mesure de justifier de leur notification à l'intéressé, cet arrêté, à le supposer régulier, n'était pas susceptible de justifier légalement que la commune entreprenne d'office des travaux de murage de l'appartement ; que ces travaux ont porté une atteinte manifestement illégale à la propriété de M. A ; qu'il y a urgence à permettre à ce dernier de retrouver l'usage de son bien, afin notamment qu'il puisse procéder aux travaux de réparation qui y sont nécessaires, en ordonnant au maire de la commune de faire procéder à la démolition du mur qu'il a fait édifier à l'entrée de l'appartement dans le délai de 15 jours à compter de la notification de la présente décision, sans que cette mesure qui présente un caractère utile et qui ne se heurte à aucune contestation sérieuse soit de nature à faire obstacle à l'exécution d'une décision administrative au sens de l'article L. 521-3 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, par suite, de faire droit aux conclusions en ce sens de M. A sans toutefois les assortir de l'astreinte qu'il demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la commune de Sainte-Eulalie à payer à M. A la somme de 4 000 euros que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui, dans la présente instance et dans l'instance de référé, et non compris dans les dépens ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A qui n'est pas, dans la présente instance et dans l'instance de référé, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par la commune de Sainte-Eulalie et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux en date du 20 octobre 2009 est annulée.
Article 2 : Il est ordonné au maire de la commune de Sainte-Eulalie de faire procéder à la démolition du mur qu'il a fait édifier à l'entrée de l'appartement n°456 Bâtiment D situé dans la résidence Château de Sans - Les Acacias appartenant à M. Louis A dans le délai de 15 jours à compter de la notification de la présente décision.
Article 3 : La commune de Sainte-Eulalie versera à M. A la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi et les conclusions de la commune de Sainte-Eulalie présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. Louis A et à la commune de Sainte-Eulalie.