Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 2 décembre et 23 décembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Claude B, demeurant ...; M. B demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 2 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis, sur protestation de M. Jean-Jacques A, a annulé les opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 mars 2008 pour l'élection aux fonctions de conseiller général dans le 4ème canton de la commune de Saint-Denis (Ile de la Réunion) ;
2°) de rejeter la protestation de M. A ;
3°) de mettre à la charge de M. A le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code électoral ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bertrand du Marais, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. B,
- les conclusions de Mme Claire Legras, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. B ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 mars 2008 en vue de l'élection du conseiller général dans le 4ème canton de la commune de Saint-Denis de la Réunion, M. B a été élu avec 2463 voix devant M. J-J A qui a obtenu 2453 voix ; que M. B fait appel du jugement du 2 octobre 2008 par lequel le tribunal administratif de Saint-Denis, sur protestation de M. A, a annulé ces opérations électorales en se fondant notamment sur la diffusion d'un tract avant le second tour de ces élections ;
Sur les griefs tirés du recensement des votes et des suffrages :
Considérant en premier lieu, que contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion, il n'est pas démontré que l'absence d'une enveloppe lors du décompte des voix soit le résultat d'une manoeuvre qui seule, peut conduire le juge de l'élection à retrancher une voix, tant du nombre de suffrages exprimés que du nombre de suffrages obtenus par M. B ; qu'il y a lieu de rectifier le décompte des suffrages retenus au profit de M. B par le jugement du tribunal administratif contesté en rétablissant un suffrage au profit de M. B ;
Considérant, en deuxième lieu, que compte tenu de la nature accidentelle de la déchirure que comportait un bulletin au nom de M. A, le bureau de vote n° 38 l'a écarté à tort ; que ceci a pour seule conséquence d'ajouter ce suffrage au nombre de voix attribué à M. A sans avoir à apprécier l'effet de cette rectification sur la sincérité du scrutin compte tenu de l'écart de voix ; que M. B n'est, dès lors, pas fondé à contester cette rectification du décompte des suffrages par le tribunal administratif ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 64 du code électoral : Lorsqu'un électeur se trouve dans l'impossibilité de signer, l'émargement prévu par le troisième alinéa de l'article L. 62-1 est apposé par un électeur de son choix qui fait suivre sa signature de la mention suivante : l'électeur ne peut signer lui-même ; que le tribunal administratif a estimé que cinq émargements, effectués à l'aide de croix, étaient irréguliers ; que M. B reconnaît lui-même que quatre de ces émargements sont irréguliers et se borne, pour le cinquième, à contester la référence au nom de l'électeur dont l'émargement a été estimé comme irrégulier par le jugement contesté ; qu'il résulte des motifs même du jugement attaqué que, contrairement à ce que soutient M. B, le tribunal administratif en a tiré la conséquence régulière en retranchant alternativement à chacun des candidats, les cinq suffrages correspondant aux émargement irréguliers ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'arrêter le décompte définitif des suffrages attribués à M. B à 2460 voix et à M. A à 2452 voix, soit un écart de huit voix ;
Sur l'abus de propagande :
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'a été diffusé massivement, l'avant-veille et la veille du scrutin, dans la ville de Saint-Denis de la Réunion, un tract mettant nommément et précisément en cause la probité de M. Victoria, député-maire sortant et candidat aux élections municipales dans la ville de Saint-Denis de la Réunion ; que si celui-ci n'était pas candidat à l'élection contestée aux fonctions de conseiller général, il avait, pour le second tour de cette élection, apporté son soutien à M. A et demandé à son candidat de se retirer au profit de ce dernier ; qu'eu égard au lien ainsi entretenu entre les deux campagnes se déroulant concomitamment et à l'écart de voix entre les deux candidats en présence, rectifié ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la distribution de ce tract a été, à elle seule, de nature à altérer la sincérité du scrutin pour l'élection aux fonctions de conseiller général dans le 4ème canton de la commune de Saint-Denis ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion, a annulé, à la demande de M. A, les opérations électorales qui se sont déroulées les 9 et 16 mars 2008 pour l'élection du conseiller général du 4ème canton de Saint-Denis de la Réunion ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que demande M. B au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des mêmes dispositions, et de mettre à la charge de M. B le versement de la somme que demande M. A ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. B est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Claude B, à M. Jean-Jacques A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.