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05/05/2006 | FRANCE | N°271304

France | France, Conseil d'État, 3eme sous-section jugeant seule, 05 mai 2006, 271304


Vu, la requête enregistrée le 17 août 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 9 juin 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 12 mai 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. Joël X... A et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Paris ;
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Vu, la requête enregistrée le 17 août 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 9 juin 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 12 mai 2004 décidant la reconduite à la frontière de M. Joël X... A et la décision du même jour fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Touvet, Maître des Requêtes,

- les conclusions de M. François Séners, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à l'appui de sa demande d'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière présentée devant le tribunal administratif de Paris, M. A a excipé de l'illégalité de la décision du 11 mars 2004 par laquelle le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que cette décision a été présentée le 12 mars 2004 à l'adresse de domiciliation que M. A avait indiquée à l'administration pour recevoir sa correspondance ; que si ce pli a été retourné le 22 mars 2004 à la préfecture avec la mention n'habite pas à l'adresse indiquée, la décision du 11 mars 2004 doit être regardée comme ayant été régulièrement notifiée à M. A le 12 mars 2004, la circonstance que l'intéressé ait changé d'adresse, sans en avertir les services de la préfecture comme il était tenu de le faire, étant sans influence sur la régularité de la notification ; qu'il suit de là qu'à la date à laquelle M. A a excipé de l'illégalité de cette décision devant le tribunal administratif de Paris, soit le 3 juin 2004, cette décision était devenue définitive ; que, par suite, sa légalité ne peut être contestée, par voie d'exception, à l'appui des conclusions aux fins d'annulation de la décision du 12 mai 2004 par laquelle le PREFET DE POLICE a ordonné la reconduite à la frontière de M. A ; que c'est, dès lors, à tort que le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a accueilli le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour, pour annuler l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué ;

Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le tribunal administratif de Paris ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la demande de première instance :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée en vigueur à la date de la décision litigieuse : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de la notification du refus ou du retrait (…) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité ghanéenne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 12 mars 2004, de la décision du PREFET DE POLICE du 11 mars 2004 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; que l'intéressé était ainsi dans le cas visé au 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le PREFET DE POLICE peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant, d'une part, que si M. A se prévaut de ce que, compte tenu des risques encourus par lui en cas de retour dans son pays d'origine, l'arrêté attaqué serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, un tel moyen est inopérant à l'encontre de l'arrêté de reconduite ;

Considérant, d'autre part, que M. A soutient qu'il s'expose en cas de retour au Ghana à des risques graves pour sa vie en raison de son rôle à la tête d'une organisation opposante au gouvernement ; que, toutefois, l'intéressé, auquel au demeurant le statut de réfugié a été refusé par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, n'établit pas, faute de justifications suffisantes, la réalité et le caractère personnel des risques qu'il invoque ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision distincte fixant le Ghana comme pays de destination de la reconduite méconnaîtrait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE POLICE est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 12 mai 2004 ordonnant la reconduite à la frontière de M. A ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris du 9 juin 2004 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Joël X... A et ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 05 mai. 2006, n° 271304
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Martin Laprade
Rapporteur public ?: M. Séners

Origine de la décision
Formation : 3eme sous-section jugeant seule
Date de la décision : 05/05/2006
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 271304
Numéro NOR : CETATEXT000008260749 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2006-05-05;271304 ?
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