La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/07/2005 | FRANCE | N°267195

France | France, Conseil d'État, 3eme sous-section jugeant seule, 27 juillet 2005, 267195


Vu la requête, enregistrée le 4 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Noëlle X, demeurant ... et Mme Maryse Y, demeurant ... ; Mmes X et Y demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté interpréfectoral du 3 mars 2004 par lequel le préfet des Yvelines et le préfet du Val-d'Oise ont déclaré immédiatement cessibles, pour cause d'utilité publique au profit de l'Etat, les biens exposés au risque naturel majeur de mouvement de terrain du massif de l'Hautil situés sur le territoire de Chanteloup-les-Vignes, Triel-sur-Seine, Vaux-s

ur-Seine et Menucourt, en tant qu'il inclut les parcelles cadastrées AH...

Vu la requête, enregistrée le 4 mai 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Noëlle X, demeurant ... et Mme Maryse Y, demeurant ... ; Mmes X et Y demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté interpréfectoral du 3 mars 2004 par lequel le préfet des Yvelines et le préfet du Val-d'Oise ont déclaré immédiatement cessibles, pour cause d'utilité publique au profit de l'Etat, les biens exposés au risque naturel majeur de mouvement de terrain du massif de l'Hautil situés sur le territoire de Chanteloup-les-Vignes, Triel-sur-Seine, Vaux-sur-Seine et Menucourt, en tant qu'il inclut les parcelles cadastrées AH 143 et AH 144 à Triel-sur-Seine dont elles sont propriétaires ;

2°) à mettre à la charge de l'Etat et de l'agence foncière et technique de la région parisienne (AFTRP) la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement et notamment son article L. 561-1 ;

Vu l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Cabrera, Auditeur,

- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mmes X et Y demandent l'annulation de l'arrêté du 3 mars 2004 par lequel les préfets des Yvelines et du Val-d'Oise ont prononcé la cessibilité de biens exposés au risque naturel majeur de mouvement de terrain du massif de l'Hautil situés sur les communes de Chanteloup-les-Vignes, Triel-sur-Seine, Vaux-sur-Seine (Yvelines) et de Menucourt (Val-d'Oise) en tant qu'il a déclaré immédiatement cessible au profit de l'Etat les deux parcelles cadastrées AH 143 et AH 144 à Triel-sur-Seine ;

Sur la légalité externe de l'arrêté interpréfectoral attaqué :

En ce qui concerne la compétence des signataires de l'arrêté :

Considérant que par un arrêté en date du 9 novembre 2000, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de l'Etat dans les Yvelines, le préfet des Yvelines a donné à M. Delattre, secrétaire général de la préfecture, délégation pour signer tous arrêtés relevant des attributions de l'Etat dans le département à l'exception de certaines catégories parmi lesquelles ne figurent pas les arrêtés de cessibilité ; que, de même, M. Vernhes, secrétaire général de préfecture du Val-d'Oise, avait régulièrement reçu du préfet du Val-d'Oise délégation de signature par arrêté du 22 octobre 2003 publié au recueil des actes administratifs de l'Etat dans le Val-d'Oise ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté de cessibilité attaqué aurait été signé par des autorités incompétentes manque en fait ;

En ce qui concerne les vices de procédure invoqués :

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles R. 11-4 et R. 11-5 et R. 11-20 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique que le commissaire-enquêteur chargé de l'enquête parcellaire est désigné par arrêté du préfet parmi les personnes figurant sur une liste d'aptitude prévue à l'article L. 123-4 du code de l'environnement ; que l'article R. 11-5 précise que Ne peuvent être désignées pour exercer les fonctions de commissaire-enquêteur les personnes appartenant à l'administration de la collectivité ou de l'organisme expropriant ou participant à son contrôle ou les personnes intéressées à l'opération soit à titre personnel, soit en raison des fonctions qu'elles exercent ou ont exercées depuis moins de cinq ans. ; qu'il ressort des pièces de dossier que M. Lecomte, désigné par arrêté interpréfectoral du 4 août 2003 en qualité de commissaire-enquêteur pour l'enquête parcellaire, figurait sur la liste établie pour l'année 2003 par arrêté du préfet des Yvelines du 18 décembre 2002, et que, ingénieur des travaux publics de l'Etat admis à faire valoir ses droits à la retraite, il n'appartenait pas à l'administration expropriante ; qu'il n'est pas établi ni même soutenu qu'il aurait été intéressé à l'opération à titre personnel ou en raison des fonctions qu'il exerçait antérieurement à sa mise à la retraite ;

Considérant que selon l'article R. 11-20 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, l'arrêté préfectoral prescrivant l'enquête parcellaire détermine le lieu où siège le commissaire-enquêteur ; que l'arrêté du 4 août 2003 précisait dans son article 2 l'adresse personnelle du commissaire-enquêteur et indiquait que les observations seraient soit consignées sur les registres d'enquête, soit adressées par écrit aux maires qui les joindraient aux mêmes registres, soit encore transmises au commissaire-enquêteur ; que dans ces conditions la règle fixée à l'article R. 11-20 doit être regardée comme ayant été satisfaite ;

Considérant que selon le même article R. 11-20, un avis portant sur les modalités d'organisation de l'enquête parcellaire est, d'une part, publié par voie d'affiches, sous la responsabilité des maires, au moins dans toutes les communes sur le territoire desquelles l'opération doit avoir lieu, et, d'autre part, inséré dans un des journaux diffusés dans le département ; que les maires de Chanteloup-les-Vignes, Triel-sur-Seine, Vaux-sur-Seine et Menucourt ont certifié l'accomplissement de l'affichage réglementaire dans leur commune ; que l'avis d'enquête parcellaire a été publié dans les éditions du 10 septembre 2003 du Parisien, du Courrier des Yvelines, du Courrier de Mantes ainsi que dans la Gazette du Val-d'Oise, publications qui sont habilitées à recevoir des annonces légales pour l'année 2003 en vertu de l'arrêté du 19 décembre 2002 du préfet des Yvelines et de l'arrêté du 26 décembre 2002 du préfet du Val-d'Oise ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que la décision attaquée aurait été prise au terme d'une procédure d'enquête parcellaire irrégulière ;

Sur la légalité interne de l'arrêté attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 561-1 du code de l'environnement : Sans préjudice des dispositions prévues au 5° de l'article L. 2212-2 et à l'article L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales, lorsqu'un risque prévisible de mouvements de terrain, ou d'affaissements de terrain dus à une cavité souterraine ou à une marnière... menace gravement des vies humaines, l'Etat peut déclarer d'utilité publique l'expropriation... des biens exposés à ce risque, dans les conditions prévues par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique et sous réserve que les moyens de sauvegarde et de protection des populations s'avèrent plus coûteux que les indemnités d'expropriation ; que ces dispositions, qui permettent l'expropriation de biens exposés à un risque d'effondrement ou de glissement de terrains dont résulte une menace grave pour des vies humaines, ne sont pas seulement applicables aux terrains supportant des constructions à usage d'habitation ; qu'au demeurant, le fait qu'aucune cavité ne soit recensée sous l'assiette de la maison d'habitation ne permet pas d'écarter l'existence d'un risque pour celle-ci, dès lors qu'il n'est pas contesté qu'une extrémité de galerie se situe au droit d'un des pignons du bâtiment ; que les documents produits attestant également de la présence de plusieurs cavités dans le tréfonds du jardin, la circonstance qu'un effondrement soit déjà intervenu à proximité des parcelles concernées ne permettait pas de présumer que les vides souterrains susceptibles d'affecter ces deux parcelles ont été comblés de ce fait ; que dès lors, le moyen tiré de ce que la décision d'inscrire la propriété des requérantes parmi les biens à exproprier serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ne peut qu'être écarté ;

Considérant que les requérantes sont recevables, à l'appui de leurs conclusions dirigées contre l'arrêté de cessibilité du 3 août 2004, à contester l'utilité publique de l'expropriation des biens exposés au risque d'effondrement de terrains telle que prévue par l'arrêté interministériel du 28 mars 2002 ; qu'une opération ne peut être légalement déclarée d'utilité publique que si les atteintes a la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que les parcelles à exproprier figurent parmi celles classées comme très exposées dans le plan de prévention des risques naturels prévisibles liés aux carrières souterraines de gypse abandonnées dans le massif de l'Hautil arrêté le 26 décembre 1995 par le préfet des Yvelines et le préfet du Val d'Oise ; qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, il ne ressort pas des pièces du dossier que ce classement soit, en ce qui concerne les parcelles litigieuses, entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; que les estimations effectuées préalablement à la déclaration d'utilité publique, en vue de chiffrer le coût d'un éventuel comblement des cavités souterraines, regardé comme la seule autre solution efficace compte tenu des contraintes géologiques et de la configuration des galeries, ont fait apparaître un coût très supérieur à celui de l'indemnisation de l'expropriation des biens concernés ; qu'ainsi, eu égard à l'intérêt général qui s'attache à la protection des populations contre le risque d'effondrement des carrières souterraines, l'atteinte portée à la propriété privée et le coût de l'opération ne sont pas de nature à retirer à l'expropriation contestée son caractère d'utilité publique ;

Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que Mmes et Y ne sont pas fondées à demander l'annulation de l'arrêté interpréfectoral du 3 mars 2004 ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761- 1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Mmes X et Y est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Noëlle X, à Mme Maryse Y, au préfet des Yvelines, au préfet du Val-d'Oise et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 27 jui. 2005, n° 267195
Inédit au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Martin Laprade
Rapporteur ?: M. Laurent Cabrera
Rapporteur public ?: M. Glaser

Origine de la décision
Formation : 3eme sous-section jugeant seule
Date de la décision : 27/07/2005
Date de l'import : 04/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 267195
Numéro NOR : CETATEXT000008169859 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2005-07-27;267195 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award