Vu la requête, enregistrée le 29 novembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE L'ISERE ; le PREFET DE L'ISERE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 11 novembre 2002 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé ses arrêtés du 21 octobre 2002 décidant la reconduite à la frontière de Mme Nassima A, épouse B, et fixant l'Algérie comme pays de renvoi ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme A devant le tribunal administratif de Grenoble ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme von Coester, Auditeur,
- les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : I- Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3°) Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification de ce refus ou de ce retrait ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A, de nationalité algérienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification le 4 juillet 2002 de la décision du 3 juillet 2002 par laquelle le PREFET DE L'ISERE a rejeté sa demande de titre de séjour ; qu'elle était ainsi dans les cas visés au 3° de l'article 22-I de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider de la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A est entrée régulièrement en France le 15 août 2000, qu'elle a vécu depuis cette date en concubinage avec un compatriote arrivé en France en 1979 et titulaire d'un certificat de résidence de dix ans, avec lequel elle a eu un enfant, né en France le 15 septembre 2001, et avec lequel elle s'est mariée le 31 août 2002 ; qu'en outre, compte tenu des circonstances de la naissance de son enfant, sa famille restée en Algérie a rompu tout lien avec elle ; que, dès lors, dans les circonstances particulières de l'espèce, et alors même que l'intéressée pouvait demander à bénéficier d'une procédure de regroupement familial, l'arrêté du 21 octobre 2002 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme A a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise et méconnu, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE L'ISERE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Grenoble a annulé son arrêté du 21 octobre 2002 ;
Sur les conclusions de Mme A tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à Mme A la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête du PREFET DE L'ISERE est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Mme A une somme de 1 800 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE L'ISERE et à Mme Nassima A, épouse B.