La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/10/2003 | FRANCE | N°235235

France | France, Conseil d'État, 5eme sous-section jugeant seule, 22 octobre 2003, 235235


Vu la requête, enregistrée le 27 juin 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 25 avril 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé pour excès de pouvoir son arrêté du 21 septembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Kalifa Ben Mohamed X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;>
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondam...

Vu la requête, enregistrée le 27 juin 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE POLICE ; le PREFET DE POLICE demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement du 25 avril 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé pour excès de pouvoir son arrêté du 21 septembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Kalifa Ben Mohamed X ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le tribunal administratif de Paris ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Maisl, Conseiller d'Etat,

- les observations de la SCP Bouzidi Bouhanna, avocat de M. X,

- les conclusions de M. Olson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité tunisienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois à compter de la notification, le 19 juin 2000, de l'arrêté du 6 juin 2000 par lequel le PREFET DE POLICE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans le cas où, en application du 3° du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, le préfet de police peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 3° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans (...) ;

Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que, lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient le PREFET DE POLICE, à la date à laquelle a été pris l'arrêté prononçant sa reconduite à la frontière, M. X justifiait résider habituellement en France depuis 1987 et pouvait donc prétendre de plein droit à la délivrance d'un titre de séjour en application des dispositions précitées du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ; que, par suite, le PREFET DE POLICE ne pouvait, sans méconnaître ces dispositions, prendre à son encontre l'arrêté attaqué ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 21 septembre 2000 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;

Sur les conclusions de M. X tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à payer à M. X une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. X une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE, à M. Kalifa Ben Mohamed X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.


Synthèse
Formation : 5eme sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 235235
Date de la décision : 22/10/2003
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 22 oct. 2003, n° 235235
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Delon
Rapporteur ?: Mme Christine Albanel
Rapporteur public ?: M. Olson
Avocat(s) : SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2003:235235.20031022
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award