Vu la requête, enregistrée le 17 janvier 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Ekrem X..., ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 02.5166 en date du 3 décembre 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté, en application de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, sa demande tendant à la suspension des décisions des 28 juin et 27 août 2002 par lesquelles le préfet de l'Hérault a refusé d'engager la procédure de regroupement familial qu'il a sollicité au bénéfice de ses deux enfants mineurs, Sevda et Ahmed ;
2°) de régler l'affaire au fond, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de procéder à un nouvel examen de la demande de M. X..., dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de condamner l'Etat au versement d'une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
Vu l'ordonnance n° 42-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu le décret n° 99-566 du 6 juillet 1999, relatif au regroupement familial des étrangers ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Herondart, Auditeur ;
- les observations de la SCP Roger, Sevaux, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X... demande l'annulation de l'ordonnance du 3 décembre 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a rejeté, en application de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, sa demande tendant à la suspension des décisions des 28 juin et 27 août 2002 par lesquelles le préfet de l'Hérault a refusé d'engager la procédure de regroupement familial sollicité par le requérant au bénéfice de ses deux enfants mineurs, Sevda et Ahmed ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : "Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (.)" ; qu'aux termes de l'article L. 522-3 du même code : "Lorsque la demande ne présente pas un caractère d'urgence (.), le juge des référés peut la rejeter par une ordonnance motivée sans qu'il y ait lieu d'appliquer les deux premiers alinéas de l'article L. 522-1" ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte-tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ; que l'urgence s'apprécie objectivement et compte-tenu des circonstances de chaque espèce ;
Considérant que le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier s'est fondé, pour estimer que la condition d'urgence n'était pas remplie, non pas sur une appréciation globale et objective des circonstances de l'espèce mais sur des motifs tirés de considérations générales qui lui sont propres, sans rapport avec la législation applicable et la situation personnelle de M. X... ; qu'ainsi le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a commis une erreur de droit ; que son ordonnance doit, par suite, être annulée ;
Considérant qu'il y a lieu, par application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par M. X... ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X..., entré sur le territoire français en 1993, dispose depuis 1999 d'une carte de résident valable dix ans ; que les enfants mineurs du requérant, Sevda et Ahmed X..., sont entrés sur le territoire français en 1998, avec leur mère, en étant dépourvus de visas ; que les décisions attaquées ont pour seul effet de refuser aux enfants mineurs du requérant l'autorisation de séjour que leur père avait sollicitée au titre des dispositions régissant le regroupement familial ; qu'ainsi M. X... ne justifie pas de circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier à très bref délai d'une mesure provisoire dans l'attente d'une décision juridictionnelle statuant sur la légalité des décisions litigieuses ; que dans ces conditions il n'apparaît pas, en l'état de l'instruction, que l'urgence justifie la suspension des décisions des 28 juin et 27 août 2002 par lesquelles le préfet de l'Hérault a refusé d'engager la procédure de regroupement familial sollicité par le requérant au bénéfice de ses deux enfants mineurs ; qu'il en résulte que la demande de suspension doit être rejetée ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte :
Considérant que la présente décision, qui rejette la demande de M. X..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que ses conclusions aux fins d'injonction sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier du 3 décembre 2002 est annulée.
Article 2 : La demande de M. X... devant le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier est rejetée.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X... présentée devant le Conseil d'Etat est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Ekrem X... et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.