Vu la requête, enregistrée le 18 octobre 2001 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Amina X..., ; Mme X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 9 août 2001 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 mai 2001 du préfet de police ordonnant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de Mme Prada Bordenave, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant qu'aux termes de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, la carte séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" prévue au premier alinéa du même article est délivrée de plein droit : "(..) 3° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans (.)" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des pièces produites en appel, que Mme X... résidait habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué ; que, par suite, le préfet de police ne pouvait légalement prendre à son encontre l'arrêté de reconduite à la frontière attaqué ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Article 1er : Le jugement du 9 août 2001 du magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet de police du 7 mai 2001 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme X... sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme Amina X..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.