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25/10/2002 | FRANCE | N°251161

France | France, Conseil d'État, 25 octobre 2002, 251161


Vu la requête, enregistrée le 23 octobre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Evelyne X, demeurant ... ; Mme X demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 2 octobre 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à ce que, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, soit suspendue l'exécution de l'ensemble des décisions de la commune d'Orange en matière de réglementation des cantines scolaires, à ce que soit ordonn

ée toute mesure utile à la sauvegarde des droits et libertés fondamentau...

Vu la requête, enregistrée le 23 octobre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par Mme Evelyne X, demeurant ... ; Mme X demande au juge des référés du Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance du 2 octobre 2002 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à ce que, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, soit suspendue l'exécution de l'ensemble des décisions de la commune d'Orange en matière de réglementation des cantines scolaires, à ce que soit ordonnée toute mesure utile à la sauvegarde des droits et libertés fondamentaux et à ce qu'il soit enjoint au maire de prendre les mesures nécessaires au bon fonctionnement du service de restauration scolaire ;

2°) de prononcer la suspension et les injonctions demandées en première instance ;

elle soutient que la commune d'Orange a pris, en matière de restauration scolaire, plusieurs décisions qui portent atteinte de façon grave aux droits et libertés fondamentaux ; que les menus des restaurants scolaires servis le vendredi ne comportent pas de viande ; qu'ils sont ainsi conformes aux prescriptions imposées par la religion chrétienne ce qui constitue une discrimination à l'égard des enfants appartenant à d'autres confessions ; que cette pratique est également préjudiciable à la santé des enfants qui sont exposés à manquer de protéines ; que ces pratiques sont contraires au principe de laïcité et de neutralité de l'enseignement public ; que le principe de non discrimination pour des motifs religieux est consacré par plusieurs conventions internationales ratifiées par la France ; que le régime adopté par la ville d'Orange, outre les risques qu'il fait courir à la santé des enfants, accorde aux enfants de confession chrétienne un privilège refusé aux autres et méconnaît ainsi le principe d'égalité ; que de nombreuses illégalités ont été commises lors de l'adoption du nouveau règlement des cantines scolaires ; que les membres des conseils d'école n'ont pas disposé du délai, qui ne saurait être inférieur à trois semaines, nécessaire à l'émission d'un avis éclairé sur ce règlement ; qu'un article du règlement qui réservait l'accès aux restaurants scolaires aux enfants dont les deux parents travaillent a été retiré du projet de règlement mais qu'aucune nouvelle disposition n'a été soumise à l'avis des conseils d'école ; que, sans nouvelle consultation des conseils d'école, le conseil municipal a modifié deux délibérations antérieures relatives au prix des repas et au règlement intérieur des centres de loisirs et des cantines scolaires ; qu'en limitant le nombre d'enfants pouvant accéder à chaque cantine scolaire à sa capacité d'accueil maximale le conseil municipal a édicté une règle qui n'est imposée par aucun texte législatif ou réglementaire et qui méconnaît le principe d'égalité d'accès au service public ; que, du fait de l'insuffisante capacité d'accueil des cantines, des enfants se trouvent illégalement privés de leur droit d'y accéder ; que la décision prise porte atteinte au caractère social du service et à la liberté d'entreprendre des parents d'élèves ; que des règles différentes en ce qui concerne la possibilité de report des repas non pris s'appliquent selon que les parents ont souscrit un abonnement ou pris un ticket pour une fréquentation ponctuelle ; que cette règle est discriminatoire ; que le règlement intérieur est illégal en ce qu'il n'indique pas expressément les possibilités de report des repas non pris ; qu'en privilégiant le système de l'abonnement la commune supprime toute possibilité de prendre des repas impromptus, les tickets devant être achetés au plus tard la veille du repas ; que cette procédure engendre des contraintes financières importantes pour les familles, notamment les plus modestes, prive les enfants de la possibilité d'avoir une nutrition équilibrée et va ainsi à l'encontre du droit fondamental à la santé garanti par la charte de l'organisation mondiale de la santé ; que les règles retenues par la commune ne sont pas justifiées par l'intérêt du service ; que le fait que l'organisation des cantines scolaires n'est pas une dépense obligatoire pour les communes ne doit pas entraver le droit de tous d'accéder à un service public social de restauration scolaire universel qui garantit le respect de l'égalité devant la loi, du droit à la santé, du droit à l'éducation, de la liberté d'entreprendre, du droit de bénéficier du progrès économique et des droits de l'enfant à être protégé contre toute forme de discrimination notamment en matière religieuse ; que les décisions prises par la commune ont pour seul objet de diminuer les charges financières du service de restauration scolaire ; que l'ensemble des décisions prises méconnaissent l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Considérant que l'article L. 522-3 du code de justice administrative permet au juge des référés de rejeter une requête sans audience ni instruction lorsqu'il est manifeste qu'elle est mal fondée ;

Considérant que l'article L. 521-2 du code de justice administrative sur le fondement duquel Mme X a saisi le juge des référés subordonne l'intervention de celui-ci à la condition qu'une atteinte grave et manifestement illégale ait été portée à une liberté fondamentale ;

Considérant que, dans sa demande de première instance, Mme X soutenait, d'une part, que la composition des repas servis dans les cantines scolaires de la commune d'Orange portait atteinte à la liberté religieuse en ce que, ne comportant pas de viande le vendredi, elle privilégiait les enfants de confession chrétienne, et, d'autre part, qu'en prévoyant que le nombre d'enfants accueillis dans les cantines ne pouvait excéder leur capacité d'accueil et en privilégiant un système d'abonnement la commune avait mis en place un système portant atteinte à plusieurs libertés fondamentales notamment l'égalité d'accès au service public, le droit des enfants à la santé, le droit de mener une vie familiale normale et la liberté d'entreprendre ;

Considérant que, pour rejeter cette demande, le juge des référés a relevé qu'il n'était pas contesté que les capacités d'accueil des différentes cantines scolaires ne permettent pas d'y accueillir l'ensemble des enfants scolarisés ; qu'en instaurant un système d'accès par abonnement (de 1 à 4 jours par semaine fixés à l'avance) complété par un système de fréquentation ponctuelle permettant l'accès occasionnel des enfants à la cantine, le ticket n'étant valable que le jour considéré, la vente de tickets étant limitée au capacités d'accueil du restaurant scolaire et les demandes étant servies dans leur ordre d'arrivée, la commune ne peut être regardée comme ayant mis en place un système discriminatoire portant atteinte à une liberté fondamentale ; que les dispositions relatives aux menus qui ne font référence à aucun interdit alimentaire ne présentent pas non plus un caractère discriminatoire en fonction de la religion des enfants ou de leurs parents ;

Considérant qu'à l'appui de son appel Mme X n'apporte aucun élément de nature à infirmer le bien-fondé de ces motifs qu'il y a lieu d'adopter ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de Mme X doit être rejetée selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative ;

Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros ; que la requête de Mme X présente un caractère abusif ; qu'il y a lieu, en conséquence, de lui infliger une amende de 200 euros ;

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.

Article 2 : Mme X est condamnée au paiement d'une amende de 200 euros pour requête abusive.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme Evelyne X. Copie pour information sera transmise à la commune d'Orange.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 25 oct. 2002, n° 251161
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Aubin

Origine de la décision
Date de la décision : 25/10/2002
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 251161
Numéro NOR : CETATEXT000008127069 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2002-10-25;251161 ?
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