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20/06/2001 | FRANCE | N°228292

France | France, Conseil d'État, 20 juin 2001, 228292


Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 19 décembre 2000, présentée par Mlle Monia X..., demeurant ... ; Mlle X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 4 novembre 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 19 octobre 2000 par lequel le préfet d'Eure-et-Loir a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'ordonn

er qu'il soit sursis à l'exécution de cet arrêté ;
4°) d'enjoindre au préfet d'Eur...

Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 19 décembre 2000, présentée par Mlle Monia X..., demeurant ... ; Mlle X... demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 4 novembre 2000 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 19 octobre 2000 par lequel le préfet d'Eure-et-Loir a décidé sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3°) d'ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de cet arrêté ;
4°) d'enjoindre au préfet d'Eure-et-Loir de lui délivrer un titre de séjour ;
5°) de condamner l'Etat à lui verser une somme s'élevant à 15000 F au titre de l'article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- les conclusions de M. Bachelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : "Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : ... 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ..." ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle X..., de nationalité tunisienne, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 8 août 2000, de la décision du préfet d'Eure-et-Loir du 7 août 2000, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle était ainsi dans le cas visé au 3°°du °°° de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 où le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Considérant que si Mlle X..., née en 1959, célibataire et sans enfant, fait valoir qu'elle est venue en France en décembre 1990 pour s'occuper des enfants de sa soeur gravement malade et qu'elle y est restée à la suite du décès de celle-ci, il ressort des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée et des conditions de séjour de Mlle X... en France et de la présence du reste de sa famille en Tunisie l'arrêté du préfet d'Eure-et-Loir en date du 19 octobre 2000 n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; qu'il n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi ou un engagement international prescrivent que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, Mlle X... ne justifiait pas résider habituellement en France depuis plus de quinze ans ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet d'Eure-et-Loir ne pouvait légalement prendre à son encontre ledit arrêté sans méconnaître les stipulations de l'article 10 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 doit être écarté ;

Considérant enfin que les dispositions du 3° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ayant le même objet que les stipulations de l'article 10 de l'accord franco-tunisien, la requérante ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mlle X... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à la délivrance d'un titre de séjour :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution" ;
Considérant que la présente décision qui rejette la requête de Mlle X... n'appelle aucune mesure d'exécution ; que les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour doivent, dés lors, être écartées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 reprises à l'article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à verser à Mlle X... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : la requête de Mlle X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mlle Monia X..., au préfet d'Eure-et-Loir et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 228292
Date de la décision : 20/06/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Arrêté du 17 mars 1988
Arrêté du 19 octobre 2000
Code de justice administrative L911-1, L761-1
Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 04 novembre 1950 art. 8
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22, art. 25, art. 12 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 20 jui. 2001, n° 228292
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: M. Bachelier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2001:228292.20010620
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