Vu la requête enregistrée le 3 septembre 1996 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Marcin X... demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le Premier ministre sur sa demande présentée le 7 mars 1996 et tendant à l'abrogation du décret n° 93-1195 du 22 octobre 1993 modifiant l'article R. 421-1 du code de l'urbanisme et fixant les conditions d'assujettissement au permis de construire des antennes de réception des signaux de télévision ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 10 000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales signée le 4 novembre 1950 ;
Vu la convention européenne sur la télévision transfrontière (ensemble une annexe) faite à Strasbourg le 5 mai 1989 et signée par la France le 12 février 1991 ;
Vu la directive n° 89/552/CEE du Conseil des communautés européennes en date du 3 octobre 1989 visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 66-457 du 2 juillet 1966 modifiée ;
Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiée ;
Vu le décret n° 93-1195 du 22 octobre 1993 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Olson, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction résultant de la loi du 6 janvier 1986, le permis de construire "n'est pas ... exigé pour les ouvrages qui, en raison de leur nature ou de leur très faible dimension, ne peuvent être qualifiés de constructions ... Un décret en Conseil d'Etat précise, en tant que de besoin, les ouvrages qui, de ce fait, ne sont pas soumis au permis de construire" ; qu'aux termes de l'article R. 421-1 du même code, dans sa rédaction issue du décret du 15 janvier 1986 et antérieure au décret du 22 octobre 1993 : "En vertu du quatrième alinéa de l'article L.421-1 n'entrent pas dans le champ d'application du permis de construire, notamment, les travaux ou ouvrages suivants : .... 8 ... les antennes d'émission ou de réception de signaux radio-électriques dont aucune dimension n'excède quatre mètres" ; que le décret du 22 octobre 1993 a complété ces dispositions par les mots : "et, dans le cas où l'antenne comporte un réflecteur, lorsque aucune dimension de ce dernier n'excède un mètre" ; que la requête de M. X... est dirigée contre la décision de rejet née du silence gardé pendant plus de quatre mois par le Premier ministre sur sa demande tendant à l'abrogation des dispositions ajoutées au 8 de l'article R. 421-1 du code de l'urbanisme par le décret du 22 octobre 1993 ;
Considérant que, d'une part, le Gouvernement tenait de l'habilitation qui lui était conférée par les prescriptions de l'article L.421-1 du code de l'urbanisme le pouvoir d'édicter les dispositions contestées ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier que le décret du 22 octobre 1993 ne diffère pas à la fois du projet soumis par le Gouvernement à la consultation du Conseil d'Etat et du texte adopté par celui-ci ; qu'ainsi M. X... n'est pas fondé à prétendre que les dispositions dont il a demandé l'abrogation seraient entachées d'incompétence ;
Considérant qu'en prévoyant que certaines antennes d'émission ou de réception de signaux radio-électriques seraient comprises dans le champ d'application du permis de construire même si aucune de leurs dimensions n'excédait quatre mètres, le Gouvernement n'a pas appliqué de manière erronée les conditions, posées à l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme, relatives à la nature et à la dimension des ouvrages pour lesquels le permis de construire n'est pas exigé ; que, si le requérant se prévaut de ce que les dispositions de l'article R. 421-1 du même code mentionnent des ouvrages dont certaines dimensions peuvent être sensiblement supérieures à un mètre, il ne ressort pas des pièces du dossier que les dispositions contestées du 8 de cet article soient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'elles incluent dans le champ d'application du permis de construire les antennes comportant un réflecteur dont l'une des dimensions est supérieure à un mètre ;
Considérant que les dispositions dont M. X... a demandé l'abrogation tendent à préserver l'esthétique des lieux, compte tenu notamment de l'importante augmentation du nombre des antennes extérieures, en particulier des antennes collectives ; qu'elles n'ont ni pour objet, ni pour effet de soumettre à une autorisation l'émission ou la réception de signaux radio-électriques ; que, si l'installation des antennes entrant dans le champ d'application du permis de construire est subordonnée, de ce fait, au respect de certaines conditions posées par la législation et la réglementation de l'urbanisme, les restrictions résultant des dispositions contestées ne sont pas disproportionnées aux exigences inhérentes, d'une part, à la liberté d'émission et de réception telle qu'elle est définie par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950, par la convention européenne sur la télévision transfrontière faite à Strasbourg le 5 mai 1989 et par la directive du Conseil des communautés européennes en date du 3 octobre 1989 visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle et, d'autre part, à la liberté de communication définie par la loi du 30 septembre 1986 modifiée ; que le requérant ne saurait utilement se prévaloir de ce que les dispositions contestées méconnaîtraient les prescriptions de la loi du 2 juillet 1966 modifiée relative à l'installation d'antennes réceptrices de radiodiffusion, cette loi ayant pour seul objet de déterminer les rapports entre le propriétaire ou le syndicat de copropriété et le locataire ou l'occupant d'un immeuble ;
Considérant que les dispositions dont M. X... a demandé l'abrogation ne portent par elles-mêmes aucune atteinte au droit à un recours effectif garanti par les stipulations de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du Premier ministre rejetant sa demande tendant à l'abrogation des dispositions ajoutées au 8 de l'article R. 421-1 du code de l'urbanisme par le décret du 22 octobre 1993 ;
Sur l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer la somme que M. X... demande pour les frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Marcin X..., au Premier ministre, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, au ministre de l'intérieur, au ministre de l'équipement, des transports et du logement et au ministre de la culture et de la communication.