Vu, enregistrés les 17 novembre 1994 et 16 mars 1995, la requête sommaire et le mémoire complémentaire présentés par le conseil départemental de l'ordre des médecins de Saône-et-Loire ; le conseil départemental demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision de la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins, en date du 15 septembre 1994 qui, d'une part, annule la décision prise par le Conseil régional de Bourgogne le 18 juillet 1994, rejetant la demande de M. X... tendant à son inscription au tableau de l'ordre en Saône-et-Loire et, d'autre part, l'inscrit à ce tableau ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 79-506 du 28 juin 1979 portant code de déontologie des médecins ;
Vu l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. François Bernard, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Richard, Mandelkern, avocat du conseil départemental de l'ordre des médecins de Saône-et-Loire, et de la SCP Le Bret, Laugier, avocat de M. Philippe X...,
- les conclusions de M. Schwartz, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que l'article L. 423 du code de la santé publique dispose : "Les peines disciplinaires que le conseil régional peut appliquer sont les suivantes : ... la radiation du tableau de l'ordre ... Le médecin radié ne peut se faire inscrire à un autre tableau de l'ordre. La décision qui l'a frappé est portée à la connaissance des autres conseils départementaux ..." ; qu'aux termes de l'article L. 428 du même code : " ... après qu'un intervalle de trois ans au moins se sera écoulé depuis une décision définitive de radiation du tableau, le médecin frappé de cette peine pourra être relevé de l'incapacité en résultant par une décision du conseil régional qui a prononcé la sanction" ; qu'il résulte de ces dispositions que si l'existence d'une sanction de radiation définitive du tableau de l'ordre d'un département interdit au médecin qui en a été frappé de demander son inscription à un autre tableau départemental, l'intervention, en application de l'article L. 428, d'une nouvelle décision juridictionnelle le relevant de cette incapacité a seulement pour effet de lui donner vocation à obtenir une nouvelle inscription au tableau du conseil départemental de l'ordre des médecins dont il relevait avant la sanction, ou d'un autre conseil départemental, sans lui ouvrir un droit à obtenir cette inscription ; qu'il appartient au conseil départemental saisi de cette demande d'apprécier si le praticien remplit les conditions requises, en tenant compte de l'ensemble des faits portés à sa connaissance, à l'exception de la sanction disciplinaire dont il avait fait l'objet ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'en raison de faits délictueux M. X..., médecin inscrit au tableau de l'ordre du département du Maine-et-Loire a été radié du tableau de l'ordre par une décision confirmée par la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins en date du 11 juillet 1990 ; que, par une décision du 29 novembre 1993, le conseil régional de l'ordre des médecins des Pays de la Loire, par application de l'article L. 428 précité du code de la santé publique, l'a relevé de l'incapacité résultant de cette sanction ; que, par décision du 18 janvier 1994, le conseil départemental du Maine-et-Loire a procédé à sa réinscription au tableau ; que M. X... ayant alors transféré sa résidence professionnelle à Mâcon, le conseil départemental de l'ordre des médecins de Saône-et-Loire puis le conseil régional de Bourgogne par des décisions des 30 juin et 18 juillet 1994 ont refusé son inscription au tableau dans le département de Saône-et-Loire en se fondant à titre principal sur les faits qui avaient donné lieu à sa radiation du tableau ; que, saisie d'un recours contre ce refus, la section disciplinaire du conseil national, statuant en matière administrative a, par la décision attaquée, en date du 15 septembre 1994, annulé la décision du conseil régional de Bourgogne ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, un médecin relevé, en application de l'article L. 428 du code de la santé publique, de l'incapacité résultant d'une décision de radiation tient seulement d'une telle décision la possibilité et non pas le droit d'être inscrit à nouveau au tableau ; que si la décision juridictionnelle du 29 novembre 1993 prise en application de l'article L. 428 précité par le conseil régional de l'ordre des médecins des Pays de la Loire, après avoir prononcé la "réhabilitation" du docteur X..., comporte une mention relative à la "réinscription" de l'intéressé au tableau de l'ordre, le conseil régional doit être regardé comme n'ayant pas entendu par cette mention empiéter sur la compétence des conseils départementaux pour se prononcer, par une décision de nature administrative, sur les mérites de la demande d'inscription au tableau ; qu'en se fondant, pour annuler les décisions du conseil départemental de Saône-et-Loire et du conseil régional de Bourgogne et procéder à l'inscription de M. X... au tableau du conseil départemental de l'ordre des médecins de Saône-et-Loire, sur le motif que la décision du conseil régional des Pays de la Loire en date du 29 novembre 1993 faisait obstacle par elle-même à ce que le conseil départemental de l'ordre des médecins de Saône-et-Loire et le conseil régional de Bourgogne retiennent, pour refuser l'inscription du docteur X..., les faits qui avaient entraîné sa radiation, la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins a entaché sa décision d'une erreur de droit ; que le conseil départemental de l'ordre des médecins de Saône-et-Loire est, par suite, fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision ;
Sur les conclusions de M. X... tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que le conseil départemental de l'ordre des médecins de Saône-et-Loire qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante soit condamné à payer à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La décision de la section disciplinaire du Conseil national de l'Ordre des médecins en date du 15 septembre 1994 est annulée.
Article 2 : Les conclusions de M. X... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au conseil départemental de l'ordre des médecins de Saône-et-Loire, au Conseil national de l'Ordre des médecins, à M. X... et au ministre de l'emploi et de la solidarité.