Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 22 mars 1996, 9 juillet 1996 et 22 juillet 1996 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Mohamed X..., demeurant 82, rue 33 Tinejdad Errachidia au (Maroc) ; M. X... demande l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 1er décembre 1994 du consul général de France à Fès par laquelle celui-ci a refusé de lui délivrer un visa de retour en France ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le décret n° 47-77 du 13 janvier 1947 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Edouard Philippe, Auditeur,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, Soltner, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Savoie, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... a résidé régulièrement en France entre 1965 et 1984 ; qu'il a été retenu contre son gré au Maroc entre 1984 et 1994 ; qu'en 1994, il a sollicité du consul général de France à Fès un visa afin de retrouver sa femme et ses cinq enfants, dont l'un est de nationalité française et était mineur à la date de la décision attaquée, qui résident régulièrement en France ; que, dans ces conditions, la décision du 1er décembre 1994 par laquelle le consul général de France à Fès a refusé de délivrer un visa d'entrée en France à M. X... a méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... est fondé à demander l'annulation de la décision du 1er décembre 1994 par laquelle le consul général de France à Fès a refusé de lui accorder un visa ;
Article 1er : La décision du 1er décembre 1994 par laquelle le consul général de France à Fès a refusé d'accorder un visa à M. X... est annulée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Mohamed X... et au ministre des affaires étrangères.