Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 6 avril 1994 et le 8 août 1994, présentés pour M. Jean-Yves X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler le décret en date du 1er avril 1994, par lequel le président de la République a mis fin à ses fonctions en qualité de directeur général du Crédit National ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 10 octobre 1919 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le décret n° 59-587 du 29 avril 1959 ;
Vu le décret n° 79-153 du 26 février 1979 ;
Vu le décret n° 85-834 du 6 août 1985 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Pécresse, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. Jean-Yves X... et de la SCP Ancel, Couturier-Heller, avocat du ministre de l'économie et des finances,
- les conclusions de M. Lasvignes, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'en vertu de l'article 7 de la loi du 10 octobre 1919, en vigueur à la date de la décision attaquée, le directeur général du Crédit National est nommé par décret du Président de la République contresigné par le ministre des finances sur la présentation du conseil d'administration de la société ; que si, à défaut de disposition déterminant l'autorité compétente pour mettre fin aux fonctions du directeur général du Crédit National, ce pouvoir appartient de plein droit à l'autorité investie du pouvoir de nomination, c'est-à-dire au Président de la République, les règles de procédure édictées par le législateur pour la nomination à l'emploi susmentionné, lesquelles comportent une présentation du conseil d'administration, ne sauraient, en l'absence de toute prescription expresse les rendant applicables en cas de cessation de fonctions du directeur général du Crédit National, s'imposer dans ce cas ; qu'ainsi le défaut de consultation du conseil d'administration du Crédit National n'entache pas la régularité du décret du 1er avril 1994, par lequel le Président de la République a mis fin aux fonctions de M. X... en qualité de directeur général de cette société ;
Considérant que M. X... a été informé le 28 mars 1994 de l'intention des pouvoirs publics de mettre fin à ses fonctions de directeur général du Crédit National ; qu'il a reçu le 29 mars une convocation pour rencontrer, le lendemain, le ministre de l'économie ; qu'il n'est pas contesté que M. X... a refusé de se rendre à cette entrevue ; que dès lors, M. X... n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas été mis à même de présenter ses observations en défense sur la mesure dont il a fait l'objet ;
Considérant qu'eu égard au caractère essentiellement révocable des fonctions de directeur général du Crédit National, le décret attaqué n'est pas au nombre des décisions dont la loi du 11 juillet 1979 impose la motivation ;
Considérant qu'en raison de la nature des fonctions qu'occupait M. X..., le Président de la République pouvait à tout moment décider, pour des motifs d'intérêt général, de mettre fin à celles-ci ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que cette décision soit fondée sur des faits matériellement inexacts ni qu'elle soit entachée d'erreur de droit ;
Considérant que la décision de mettre fin aux fonctions exercées par M. X... au Crédit National, prise ainsi qu'il a été dit ci-dessus, pour des motifs d'intérêtgénéral relevant de l'appréciation du Président de la République, n'a pas le caractère d'une mesure disciplinaire ; que, par suite, M. X... ne saurait utilement soutenir qu'il aurait été sanctionné une deuxième fois ou pour des faits relatifs à des fonctions qu'il avait précédemment exercées dans un autre établissement bancaire, ni que ces faits ne constituaient pas une faute de nature à donner lieu à une sanction au titre de ses fonctions au Crédit National, ni que le décret attaqué lui a infligé une sanction dont la gravité est disproportionnée par rapport aux faits qui lui ont été reprochés ;
Considérant que l'illégalité alléguée du décret du 6 août 1985 qui fait figurer l'emploi de directeur général du Crédit National au nombre des emplois qui doivent être pourvus par décret en conseil des ministres est sans influence sur la légalité de la décision attaquée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à demander l'annulation du décret en date du 1er avril 1994 par lequel le Président de la République a décidé de mettre fin à ses fonctions de directeur général du Crédit National ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. X... la somme de 60 000 F qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Yves X..., au ministre de l'économie et des finances et au Premier ministre.