La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/03/1987 | FRANCE | N°51846

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 02 mars 1987, 51846


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés le 1er juillet 1983 et le 20 octobre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Pierre X..., demeurant ... , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°- annule le jugement du 14 avril 1983 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti, dans les rôles de la commune de Neuilly-sur-Seine, au titre de l'impôt sur le revenu et de la majoration exceptionnelle de l'année 1973, pour un

montant principal de 433 975 F assorti de 43 397 F d'intérêts de ret...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés le 1er juillet 1983 et le 20 octobre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Pierre X..., demeurant ... , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1°- annule le jugement du 14 avril 1983 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti, dans les rôles de la commune de Neuilly-sur-Seine, au titre de l'impôt sur le revenu et de la majoration exceptionnelle de l'année 1973, pour un montant principal de 433 975 F assorti de 43 397 F d'intérêts de retard,
2°- lui accorde la décharge des impositions contestées,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Dulong, Maître des requêtes,
- les observations de Me Baraduc-Bénabent, avocat de M. Pierre X...,
- les conclusions de M. Le Roy, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que le complément d'impôt sur le revenu de l'année 1973 et les compléments de majoration exceptionnelle audit impôt dont M. Pierre X... demande la décharge procèdent du rattachement au revenu imposable de l'intéressé au titre de ladite année d'une plus-value qu'il aurait réalisée à l'occasion de la cession par un acte notarié en date des 12, 16 et 17 juillet 1973 des 900 parts de la société civile immobilière "..." qu'il détenait en indivision avec son frère, M. Jean X... ; que l'administration, constatant que, par l'acte sus-mentionné, l'ensemble des associés de la société civile immobilière "..." avait cédé la totalité des parts de ladite société, a estimé qu'en réalité la cession dont s'agit n'avait pas porté sur les parts de la société civile, mais qu'elle devait s'analyser comme une vente par ladite société à la société "Omnium de construction et de financement" OCEFI de l'immeuble sis ... qui constituait le seul élément de son actif immobilisé ; que dans ces conditions, l'administration a imposé entre les mains des associés de la S.C.I. la plus-value de cession dudit immeuble qu'elle a calculée à partir de sa valeur d'apport à la société civile conformément aux dispositions alors en vigueur de l'article 150 ter du code général des impôts, lequel était applicable dès lors que l'opération immobilière projetée par la société cessionnaire sur le terrain vendu entrait dans le champ d'application de l'article 257-7° du même code ; que M. Pierre X..., au soutien de sa demande en décharge des impositions en litige conteste la disqualification opérée par l'administration des stipulations de l'acte de cession de parts et fait valoir, sans être conteté sur ce point par l'administration, qu'en ce qui le concerne, la cession des 900 parts de la SCI "..." qu'il détenait en indivision avec son frère n'a fait apparaître aucune plus-value, dès lors que les parts avaient, à la date de la cession, la même valeur que celle qui avait été déclarée lorsqu'elles étaient entrées dans son patrimoine, en septembre 1972, par voie de succession au décès de son père ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1649 quinquies B du code général des impôts, alors en vigueur : "Les actes ... déguisant soit une réalisation soit un transfert de bénéfices ... ne sont pas opposables à l'administration, laquelle supporte la charge de la preuve du caractère réel de ces actes devant le juge de l'impôt lorsque, pour restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse, elle s'est abstenue de prendre l'avis du comité consultatif dont la composition est indiquée à l'article 1653 C" ; que, lorsque l'administration use des pouvoirs qu'elle tient de ce texte dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle doit, pour pouvoir écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, établir que ces actes ont un caractère fictif ou, à défaut, qu'ils n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supporté eu égard à sa situation et à ses activités réelles ;

Considérant qu'il résulte clairement des termes mêmes de l'acte intervenu entre l'ensemble des associés de la société civile immobilière "..." et la société OCEFI qu'il a porté non point sur la cession de l'immeuble qui était la propriété de la SCI et constituait son seul immeuble social, mais sur la totalité des parts détenues par chaque associé, la société OCEFI, cessionnaire, étant devenue à la date d'effet de la cession propriétaire de la totalité de l'actif brut de la société civile figurant au bilan annexé à l'acte ; que si l'administration fait valoir qu'au cours des années 1970 à 1972, les consorts X... ont pris des contacts avec la société OCEFI en vue de la vente du terrain dans le cadre d'une opération immobilière projetée par cette société et qu'à cet effet un protocole de vente avait été conclu par acte sous seing privé en date du 29 mars 1972 entre les consorts X... et la société OCEFI, il ressort de ce document que ladite vente, subordonnée à la réalisation d'une condition suspensive liée à la libération du terrain par les occupants, devait être réitérée par un acte authentique ; que l'existence de ce protocole de vente, qui n'a reçu d'autre suite que l'acte précité des 12, 16 et 17 juillet 1973, ne suffit pas à prouver que la cession de parts consentie par cet acte ait eu un caractère fictif ou n'ait pu être inspirée par aucun motif autre que celui d'éluder ou atténuer les charges fiscales auxquelles l'opération aurait été soumise si elle avait pris la forme d'une cession d'immeuble ;

Considérant que si la cession simultanée de leurs parts par tous les associés d'une société de personnes entraîne la dissolution de celle-ci et, par voie de conséquence, la transformation de son actif en indivision, ladite cession doit être regardée comme étant antérieure à la dissolution de la société dont elle est précisément la cause ; qu'il suit de là que l'administration n'est pas fondée, pour soutenir que la cession aurait en fait porté sur les droits indivis détenus par les associés sur l'immeuble composant l'actif social de la SCI, à exciper notamment sur ce point du fait que les parties auraient fait mentionner dans l'acte, au titre des déclarations fiscales, que ledit immeuble était un immeuble entrant dans le champ d'application de l'article 691 du code général des impôts et qu'il était destiné à l'édification d'un ensemble immobilier à usage d'habitation, ce qui plaçait la cession sous le régime de la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des impositions litigieuses ;
Article 1er : Le jugement en date du 14 avril 1983 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : M. X... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des majorations exceptionnelles auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1973 dans les rôles de la ville de Neuilly-sur-Seine.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Pierre X... et au ministre d'Etat, chargé de l'économie, des finances et de la privatisation.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

CGI 150 ter, 257 7, 1649 quinquies B, 691


Publications
Proposition de citation: CE, 02 mar. 1987, n° 51846
Inédit au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Dulong
Rapporteur public ?: Le Roy

Origine de la décision
Formation : 9 / 8 ssr
Date de la décision : 02/03/1987
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 51846
Numéro NOR : CETATEXT000007623700 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1987-03-02;51846 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award