Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 28 mars 1983 et 25 juillet 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la SOCIETE CIVILE "BOUCHET-LUSTIGNAN", représentée par son liquidateur, M. Claude X..., et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 13 décembre 1982 par lequel le tribunal administratif de Paris ne lui a accordé qu'une décharge partielle du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 1971 au 31 décembre 1972 ;
2° lui accorde la décharge de l'imposition contestée,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Hagelsteen, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Chahid-Nouraï, Commissaire du gouvernement ;
Sur la requête de la SOCIETE CIVILE "BOUCHET-LUSTIGNAN" :
Considérant que, par jugement en date du 7 décembre 1981, le tribunal administratif de Paris, après avoir expressément admis la régularité de la procédure d'imposition et en avoir déduit que la société requérante supportait la charge de la preuve, a ordonné une expertise en vue de rechercher si cette preuve était rapportée ; qu'ainsi le tribunal administratif ne s'est pas borné à écarter certains moyens tirés d'irrégularités de la procédure d'imposition, mais a statué définitivement sur la régularité de cette procédure ; que, dès lors, l'autorité de la chose jugée qui s'attache à ce jugement, devenu définitif faute d'avoir été frappé d'appel, s'oppose à l'examen d'un moyen soulevé pour la première fois devant le Conseil d'Etat et tiré d'une prétendue irrégularité de la procédure d'imposition ;
Considérant que la circonstance alléguée par la SOCIETE CIVILE "BOUCHET-LUSTIGNAN" que les comptabilités d'un certain nombre de sociétés avec lesquelles elle était en relation, auraient été détruites, à la supposer établie, est sans influence sur la charge qui incombe à cette société de justifier, par tout moyen, l'exagération du chiffre d'affaires qui a servi de base au rappel de taxe contesté et la déductibilité de certaines taxes non admise par le service ;
Considérant que si la société requérante conteste la réintégration, dans ses recettes de l'année 1971, de versements inexpliqués à hauteur de 120 000 F et d'encaissements non comptabilisés à concurrence de 56 472 F, elle n'a apporté, notamment au cours de l'expertise décidée par le tribunal administratif, aucun commencement de preuve permettant d'établir qu'à l'exception d'un versement de 10 000 F, fait par la société SPAT et dont les premiers juges ont tenu compte, les versements susmentionnés correspondaient à des opérations non imposables et que l'encaissement non comptabilisé de 56 472 F avait été réalisé, comme elle e soutient, pour le compte d'une autre société en cours de formation ;
Considérant que si la société soutient que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal n'a pas admis la déductibilité totale des taxes portées sur deux factures, elle n'a assorti cette contestation d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur le recours incident du ministre :
Considérant que le tribunal administratif, entérinant un mode de calcul proposé par l'expert, d'une part, a calculé la taxe sur la valeur ajoutée due par la SOCIETE CIVILE "BOUCHET-LUSTIGNAN" non pas sur le montant du chiffre d'affaires imposable reconstitué, mais sur l'insuffisance du chiffre d'affaires déclaré par cette société et, d'autre part, a retenu un montant de droits mis en recouvrement de 52 756,48 F alors qu'il était en réalité de 60 485,69 F ; qu'il en est résulté un dégrèvement injustifié de 2 619,27 F ; qu'en conséquence, il y a lieu de faire droit au recours incident du ministre tendant à ce que le dégrèvement résultant de l'exécution du jugement attaqué soit ramené de 5 405,50 F à 2 786,23 F en droits et de 4 947,33 F à 2 328,06 F en pénalités, et à ce que les frais d'expertise soient supportés à concurrence de 11 865 F, au lieu de 11 247 F, par la société requérante ;
Article ler : Les droits et pénalités auxquels la SOCIETE CIVILE "BOUCHET-LUSTIGNAN" est assujettie au titre de la taxesur la valeur ajoutée due pour la période du 1er janvier 1971 au 31 décembre 1971 sont remis à sa charge à raison de 2 619,27 F au titre des droits et 2 619,27 F au titre des pénalités.
Article 2 : Les frais d'expertise, liquidés à la somme de 12 360F, seront supportés par la société requérante à concurrence de 11 865F et par l'Etat pour le surplus.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 13 décembre 1982 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : La requête de la SOCIETE CIVILE "BOUCHET-LUSTIGNAN" est rejetée.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE CIVILE "BOUCHET-LUSTIGNAN" et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.