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15/12/1986 | FRANCE | N°51653

France | France, Conseil d'État, 9 / 7 ssr, 15 décembre 1986, 51653


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 27 juin 1983 et 24 octobre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bernard X..., demeurant ... à Colombes 92700 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 24 mars 1983 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce que lui soit accordée la décharge des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti au titre de l'impôt sur le revenu des années 1974, 1975 et 1976 mis en recouvrement le 31 janvier 1978 à la

suite de la réintégration dans ses revenus imposables des frais forfai...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 27 juin 1983 et 24 octobre 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Bernard X..., demeurant ... à Colombes 92700 , et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du 24 mars 1983 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à ce que lui soit accordée la décharge des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti au titre de l'impôt sur le revenu des années 1974, 1975 et 1976 mis en recouvrement le 31 janvier 1978 à la suite de la réintégration dans ses revenus imposables des frais forfaitaires de 30 % qu'il avait déduits sur le fondement de l'article 5 de l'annexe IV du code général des impôts ;
2° lui accorde la décharge des impositions contestées,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Vu l'article 93-II de la loi n° 83-1179 du 29 décembre 1983, portant loi de finances pour 1984 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Faugère, Maître des requêtes,
- les observations de Me Baraduc-Benabent, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Y.... Martin, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 81 du code général des impôts : "Sont affranchis de l'impôt : 1° Les allocations spéciales destinées à couvrir les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi et effectivement utilisées conformément à leur objet..." ; qu'aux termes de l'article 83 du même code, dans sa rédaction alors applicable : "Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés... 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales. La déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut... elle est fixée à 10 % du montant de ce revenu... Toutefois, en ce qui concerne les catégories de professions qui comportent des frais dont le montant est notoirement supérieur à celui résultant de l'application des pourcentages prévus à l'alinéa précédent, un arrêté ministériel fixe le taux de la déduction dont les contribuables appartenant à ces professions peuvent bénéficier en sus de la déduction forfaitaire visée audit alinéa. Cette déduction supplémentaire est limitée à 50 000 F" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les salariés qui appartiennent aux professions mentionnées au 3° de l'article 83 ne peuvent bénéficier de la déduction supplémentaire prévue à leur profit que dans la mesure où les frais particuliers dont elle est destinée à tenir compte ne sont pas déjà couverts par des allocations spéciales affrnchies de l'impôt en application de l'article 81 ou ne sont pas directement pris en charge par l'employeur ou par des tierces personnes ; que, dans le cas où ces frais font, en tout ou en partie, l'objet d'une telle prise en charge et à condition qu'ils soient de même nature que ceux que la déduction supplémentaire a pour objet de couvrir, ils doivent être retranchés de la somme qui est obtenue en appliquant le taux de la déduction supplémentaire au revenu brut des contribuables intéressés, diminué préalablement de la déduction de 10 % ; que seul l'excédent éventuel de cette somme sur les frais pris en charge par l'employeur ou par les tierces personnes peut être déduit du revenu brut pour le calcul du revenu net ;

Considérant que, pour la détermination du revenu net imposable en application des dispositions précitées, l'article 5 de l'annexe 4 au code général des impôts dispose que les voyageurs, représentants et placiers de commerce ou d'industrie ont droit à une déduction supplémentaire de 30 % pour frais professionnels ; que, pour bénéficier de cette déduction, les intéressés doivent exercer leur activité dans le cadre d'un contrat de louage de service dans les conditions fixées par l'article L.751-1 du code du travail lequel dispose notamment que : "Les conventions dont l'objet est la représentation... sont... des contrats de louage de service lorsque les voyageurs, représentants ou placiers : 1° Travaillent pour le compte d'un ou plusieurs employeurs ; 2° Exercent en fait d'une façon exclusive et constante leur profession de représentants ; 3° Ne font effectivement aucune opération commerciale pour leur compte personnel ; 4° Sont liés à leurs employeurs par des engagements déterminant la nature des prestations de services ou des marchandises offertes à la vente ou à l'achat, la région dans laquelle ils doivent exercer leur activité ou les catégories de clients qu'ils sont chargés de visiter, le taux des rémunérations..." ;
Considérant que, pour l'application de ces dispositions, il y a lieu de tenir compte, non de la dénomination donnée au poste occupé par le contribuable dans l'entreprise qui l'emploie, mais de l'exercice effectif par celui-ci de l'une des activités professionnelles énumérées à l'article 5 de l'annexe IV au code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... exerçait au cours des années 1974, 1975 et 1976 la profession de chef de ventes de la société anonyme "NCR-France" ; que ses fonctions consistaient à visiter, dans un secteur géographique déterminé, les clients de la société et à susciter ou recueillir directement leurs commandes ; qu'il était placé sous l'autorité des dirigeants de l'entreprise, percevait une rémunération composée d'un salaire fixe augmenté d'un pourcentage sur le chiffre d'affaires réalisé dans ce secteur d'activités et n'exerçait pas de responsabilité dans l'organisation du service des ventes ; que dans ces conditions, le requérant exerçait effectivement la profession de représentant de commerce ;
Considérant que si l'administration fait valoir que M. X... exerçait, en outre, des activités d'une nature distincte de celle de voyageur, représentant ou placier, en ce qu'il lui appartenait de coordonner le travail de trois agents commerciaux débutants chargés avec lui de l'exploitation du secteur géographique en cause, il résulte de l'instruction que ces activités, exercées au sein de la même société, avaient un caractère accessoire et ne pouvaient lui faire perdre le bénéfice de la qualité de voyageur, représentant ou placier, alors même que les commissions perçues par lui étaient assises sur le chiffre d'affaires global réalisé dans ledit secteur géographique ; qu'il en est de même de la circonstance qu'il n'était pas titulaire d'une carte professionnelle en qualité de voyageur, représentant ou placier ; que M. X... était, ainsi, en droit de bénéficier de la déduction supplémentaire forfaitaire de 30 % prévue à l'article 5 de l'annexe IV au code général des impôts ; que, toutefois, durant les années litigieuses, M. X... a perçu une allocation forfaitaire mensuelle de 75 F pour frais professionnels ; qu'en vertu du 1° de l'article 81 précité du code, pareille indemnité ne devait pas être comprise dans le revenu brut de M. X..., mais que les frais auxquels elle correspond, couverts par l'entreprise au lieu d'être assumés par l'intéressé, étaient de la nature de ceux dont est destinée à tenir compte la déduction supplémentaire de 30 % appliquée au revenu brut ; que si l'administration fait valoir que M. X... a bénéficié en outre de remboursements de frais, il résulte de l'instruction qu'il s'agit de frais exposés pour le compte de l'entreprise à l'occasion de réunions auxquelles M. X... a été invité à participer en dehors de ses activités professionnelles de représentant de commerce et non de frais professionnels de la nature de ceux dont la déduction supplémentaire de 30 % est réputée tenir compte ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le requérant est fondé à demander la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années susindiquées pour une part limitée toutefois à la déduction de la différence entre 30 % du revenu brut imposable et le montant cumulé des allocations mensuelles de 75 F allouées au cours desdites années, ainsi que la réformation en ce sens du jugement attaqué ;
Article 1er : M. X... est déchargé des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujettiau titre des années 1974, 1975 et 1976, à raison de la réintégration dans les bases d'imposition des frais forfaitaires de 30 % qu'il avait déduits en application de l'article 5 de l'annexe IV au code général des impôts, après qu'ait été défalqué de cette somme le montant cumulé des allocations mensuelles de 75 F perçues par lui respectivement au cours de chacune de ces trois années.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 24 mars 1983 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances etde la privatisation, chargé du budget.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 15 déc. 1986, n° 51653
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Faugère
Rapporteur public ?: Ph. Martin

Origine de la décision
Formation : 9 / 7 ssr
Date de la décision : 15/12/1986
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 51653
Numéro NOR : CETATEXT000007623199 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1986-12-15;51653 ?
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