Vu 1° sous le n° 56 142 la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 9 janvier 1984 et 9 mai 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS DE SANTE, dont le siège est ... à Paris 75007 , représentée par ses dirigeants légaux domiciliés audit siège, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement en date du 20 octobre 1983 en tant que, par ce jugement le tribunal administratif de Paris a partiellement rejeté sa demande en décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1979 au 30 septembre 1980 par un avis de mise en recouvrement en date du 18 juin 1981 ;
2° lui accorde la décharge des droits contestés,
Vu 2° sous le n° 57 069, le recours du ministre de l'économie, des finances et du budget, enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 16 février 1984, et tendant à ce que le Conseil d'Etat :
1° annule l'article 1er du jugement en date du 20 octobre 1983 par lequel le tribunal administratif de Paris a accordé à l'ASSOCIATION DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS DE SANTE, dont le siège est ... à Paris 75007 , décharge de l'indemnité de retard qui lui a été réclamée en complément des droits de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1979 au 30 septembre 1980 par un avis de mise en recouvrement en date du 18 juin 1981 ;
2° remette à la charge de l'association l'indemnité de retard dont le dégrèvement a été ordonné par les premiers juges,
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales du nouveau code des impôts ;
Vu l'article 64 de la loi n° 76-1232 du 29 décembre 1976 ;
Vu la loi n° 78-1240 du 29 décembre 1978 ;
Vu le décret n° 79-40 du 17 janvier 1979 ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Leclerc, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat de l'ASSOCIATION DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS DE SANTE,
- les conclusions de Mme Latournerie, Commissaire du Gouvernement.
Considérant que la requête n° 56 142 de l'Association de gestion agréée des professions de santé et le recours n° 57 069 du ministre de l'économie, des finances et du budget sont dirigés contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article 1649 quinquies A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en l'espèce : "... 2 Les notifications de redressement doivent être motivée de manière à mettre le contribuable en état de pouvoir formuler ses observations ou faire connaître son acceptation... Les réponses par lesquelles l'administration rejette les observations du contribuable doivent être motivées..." ;
Considérant que la notification adressée le 19 décembre 1980 à l'association de gestion agréée des professions de santé indiquait la nature, les motifs et le montant des redressements envisagés ; que ces indications étaient suffisamment explicites et détaillées pour mettre l'association en mesure de présenter ses observations, ainsi qu'elle l'a d'ailleurs fait par une lettre du 17 janvier 1981 ; que la réponse faite par l'administration, le 13 février 1981, à ces observations, était, elle aussi, suffisamment motivée ; qu'ainsi l'association n'est pas fondée à soutenir que l'administration a méconnu les dispositions précitées de l'article 1649 quinquies A du code général des impôts ;
Sur l'assujettissement des opérations de l'association à la taxe sur la valeur ajoutée :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts, dans la rédaction issue de la loi n° 78-1240 du 29 décembre 1978 : "I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée... les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel" et qu'aux termes de l'article 256-A du même code, dans la rédaction issue de la même loi : "Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent d'une manière indépendante, à titre habituel ou occasionnel, une ou plusieurs opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention" ;
Considérant que les associations agréées, dont le régime juridique est défini par l'article 64 de la loi du 29 décembre 1976, portant loi de finances pour 1977, ont pour objet "de développer l'usage de la comptabilité et de faciliter l'accomplissement de leurs obligations administratives et fiscales par les membres des professions libérales" ; que l'association de gestion agréée des professions de santé rend à ses adhérents, en contrepartie du paiement d'une cotisation annuelle dont le montant s'est échelonné, selon les cas, de 350 à 900 F pour l'année 1979, des services qui consistent, notamment, à répondre à leurs demandes de renseignements, à leur fournir des conseils ou à leur adresser des recommandations quant à la tenue de leurs documents comptables et à la confection de leurs déclarations de revenu ; qu'en admettant que comme elle l'affirme, elle ait renoncé à la possibilité d'établir pour le compte de ses membres lesdites déclarations, l'association n'en doit pas moins être regardée comme effectuant, à titre onéreux, des prestations de services ; qu'elle est ainsi assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, en vertu des dispositions précitées des articles 256 et 256-A du code général des impôts ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'article 261,7,1° a du même code exonère de la taxe "les services de caractère social, éducatif, culturel et sportif rendus à leurs membres par les organismes légalement constitués sans but lucratif et dont la gestion est désintéressée" ; que l'association requérante ne peut utilement invoquer ces dispositions, dont le champ d'application ne s'étend pas aux services consistant à faciliter aux adhérents l'exécution de tâches qui sont l'un des aspects de leur activité professionnelle ;
Considérant, enfin, que l'association, qui procure à ses adhérents des services de caractère individuel, ne peut bénéficier de l'exonération prévue par l'article 261,4,9° du code, dès lors que l'octroi de celle-ci est subordonnée à la condition que les prestations fournies "se rattachent directement à la défense collective des intérêts moraux ou matériels des membres" ;
Considérant que si l'association se prévaut, sur le fondement de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts, applicable en l'espèce, de la doctrine administrative exprimée dans une instruction du 15 février 1979, qui aurait retenu une définition plus large des opérations exonérées par l'article 261,4,9°, il ressort du texte même de l'instruction qu'elle exclut du bénéfice de l'exonération les conseils ou consultations "personnalisés" de la nature de ceux que dispense l'association ;
Sur l'imposition des cotisations versées en 1979 par des membres de l'association ayant adhéré avant le 1er janvier 1979 ; Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 49 de la loi n° 78-1240 du 29 décembre 1978 que les dispositions des articles 24 à 48 de cette loi, qui ont soumis certaines prestations de services à la taxe sur la valeur ajoutée, ne sont entrées en vigueur le 1er janvier 1979 que sous réserve de dispositions transitoires fixées par décret en Conseil d'Etat en ce qui concerne notamment les modalités d'imposition des affaires en cours ; qu'en vertu des dispositions du décret n° 79-40 du 17 janvier 1979 pris sur le fondement de l'article 49 susrappelé, sont au nombre des "affaires en cours" au sens de cet article, les prestations de services qui deviennent imposables à la taxe sur la valeur ajoutée à compter du 1er janvier 1979, lorsque ces prestations, effectuées en vertu de contrats conclus avant le 1er janvier 1979, ne sont pas entièrement exécutées à cette date, et que, lorsqu'ils sont effectués avant le 1er janvier 1982, les encaissements correspondant à ces opérations sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée ;
Considérant que les cotisations versées, au titre de l'année 1979, par ceux des membres des professions de santé qui avaient adhéré avant cette date à l'association ne peuvent être regardées comme des encaissements correspondant à des prestations de services effectuées en exécution de contrats conclus antérieurement à la même date et non encore entièrement exécutées à cette date et donc comme constituant des affaires en cours au sens des dispositions susanalysées ;
Considérant que la doctrine administrative exprimée dans une instruction du 8 mars 1979, selon laquelle les associations de gestion agréées peuvent bénéficier des dispositions transitoires édictées par le décret précité du 17 janvier 1979, ne vise que les cotisations appelées avant le 1er janvier 1979 ; que tel n'est pas le cas de celles qui ont été soumises aux impositions contestées ; que, dès lors, l'association requérante ne peut utilement se prévaloir de cette instruction sur le fondement de l'article 1649 quinquies E du code général des impôts, repris à l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ;
Sur l'imposition de prétendus "droits d'entrée" :
Considérant, que si l'association invoque une instruction du 25 mai 1979 qui a admis, sur le fondement de l'article 1649 quinquies E précité, une exonération temporaire de la part des cotisations versées aux associations de gestion agréées qui représente un "droit d'entrée", sous certaines conditions tenant notamment au montant de cette part et aux modalités de sa fixation, il est établi et n'est d'ailleurs pas contesté, que les conditions prévues par cette instruction n'étaient pas remplies par l'association ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSOCIATION DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS DE SANTE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui n'est entaché d'aucune omission de statuer, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge ou en réduction, des droits en principal de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie ;
Sur les intérêts de retard :
Considérant qu'aux termes de l'article 1728, alinéa 2 du code général des impôts : "Lorsqu'un contribuable fait connaître par une indication expresse portée sur la déclaration ou l'acte, ou dans une note y annexée, les motifs de droit ou de fait pour lesquels il ne mentionne pas certains éléments d'imposition en totalité ou en partie ou donne à ces éléments une qualification qui entraînerait, si elle était fondée, une taxation atténuée ou fait état de déduction qui sont ultérieurement reconnues injustifiées, les redressements opérés à ces titres n'entraînent pas l'application de l'indemnité ou de l'intérêt de retard prévu ci-dessus ;
Considérant que si l'ASSOCIATION DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS DE SANTE se prévaut des indications fournies par elle en complément de la mention portée sur sa déclaration de chiffre d'affaires, ces indications ne figuraient que dans une lettre adressée au service en réponse à une demande d'éclaircissements formulée par celui-ci, et non dans une note annexée à la déclaration ; qu'ainsi les conditions exigées par les dispositions précitées de l'article 1728 du code général des impôts n'étaient pas remplies ; que dès lors le ministre de l'économie, des finances et du budget est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a accordé à l'association le décharge des intérêts de retard mis à sa charge ;
Sur la demande de remboursement de taxe sur les salaires :
Considérant que l'ASSOCIATION DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS DE SANTE a saisi le tribunal administratif de Paris de conclusions tendant à la décharge de la taxe sur les salaires versée par elle pour les années 1979 et 1980 et dont le sursis de paiement lui avait été accordé par l'administration ; que ces conclusions fondées sur le droit à compensation, pouvaient être présentées devant le tribunal administratif sans avoir fait l'objet d'une réclamation préalable à l'administration ; que, dès lors, c'est à tort qu'elles ont été jugées irrecevables par le tribunal administratif ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'ASSOCIATION DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS DE SANTE devant le tribunal administratif pour qu'il soit statué sur lesdites conclusions ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris, en date du 20 octobre 1983 est annulé en tant, d'une part, qu'il accorde décharge à l'ASSOCIATION DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS DE SANTE de l'indemnité de retard qui avait été mise à sa charge et d'autre part, qu'il rejette les conclusions de l'association tendant au remboursement de la taxe sur les salaires au titre des années 1979 et 1980.
Article 2 : L'indemnité de retard, d'un montant de 106 828 F, dont il a été accordé décharge par le jugement attaqué est remise à la charge de l'ASSOCIATION DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS DE SANTE.
Article 3 : L'ASSOCIATION DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS DE SANTE est renvoyée devant le tribunal administratif de Paris pour qu'il soit statué sur ses conclusions tendant à la décharge de la taxe sur les salaires versée par elle pour les années 1979 et 1980.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de l'ASSOCIATION DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS DE SANTE est rejeté.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION DE GESTION AGREEE DES PROFESSIONS DE SANTE et au ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la privatisation, chargé du budget.