Vu, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 20 avril 1973, la requête présentée pour la société anonyme "Compagnie française John Deere", agissant poursuites et diligences de son président en exercice, domicilié au siège de la société, à La Foulonnerie à Fleury-les-Aubrais Loiret , ladite requête tendant à l'annulation d'un jugement, en date du 30 janvier 1973, par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté comme irrecevable sa requête tendant à annuler un titre de recette en date du 13 mai 1970 émis pour le compte de la commune de Fleury-les-Aubrais en vue du recouvrement d'une somme de 80.000 F à titre d'acompte à verser sur la "redevance d'équipement" exigée par ladite commune ;
Vu le Code général des impôts ; Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Considérant que l'article 1er, 1er alinéa du décret du 11 janvier 1965 dispose que "sauf en matière de travaux publics, la juridiction administrative ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée" ; qu'il résulte de cette disposition que le délai de deux mois qu'elle fixe ne s'applique pas aux demandes présentées en matière de travaux publics, même si ces demandes sont dirigées contre une décision administrative notifiée au demandeur ; que, constituent de telles demandes, celles qui sont dirigées contre les actes tendant à percevoir tout ou partie des sommes nécessaires au financement de travaux publics, lorsque ces demandes ne sont pas régies par des dispositions spéciales ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par une lettre en date du 23 mars 1970, le maire de Fleury-les-Aubrais a informé la société anonyme "Compagnie française John Deere, propriétaire de terrains sur la zone industrielle Nord de cette commune, de son intention de mettre en recouvrement un compte de 80.000 F sur le paiement d'une "redevance" destinée à financer des équipements de viabilité, d'assainissement, d'électrification et d'éclairage réalisées par la commune sur cette zone ; que ces équipements constituaient des travaux publics ; que, dès lors, en l'absence de dispositions spéciales régissant les contestations relatives à cette "redevance", la notification de la lettre précitée, qui ne constituait d'ailleurs pas une décision faisant grief, n'a pas fait courir les délais de recours contentieux à l'égard de la société ; que, contrairement à ce qu'ont décidé les premiers juges, celle-ci était, par suite, recevable à se pourvoir, comme elle l'a fait le 22 juillet 1970, contre le titre de perception émis le 13 mai 1970 en vue du recouvrement de cette "redevance" ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'annuler le jugement attaqué en date du 30 janvier 1973, par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande comme non recevable ;
Considérant que l'affaire est en état ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de la société "Compagnie française John Deere" ;
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 44 du Code de l'administration communale que l'irrégularité d'une délibération de conseil municipal peut être opposée "à toute époque" ; que, dès lors, la fin de non-recevoir tirée par la commune de Fleury-les-Aubrais de ce que l'irrégularité de la délibération du Conseil Municipal en date du 29 avril 1966 instituant la redevance litigieuse aurait été invoquée tardivement doit, en tout état de cause, être écartée ;
Considérant que cette délibération ainsi que celle du 25 février 1970 n'ont eu ni pour objet, ni pour effet de rendre applicable dans la commune l'un des impôts ou l'une des taxes parafiscales prévues par les textes alors en vigueur ; que la "redevance" litigieuse a été instituée en vue de faire rembourser par les propriétaires des terrains compris dans une zone industrielle les dépenses exposées par la commune pour la réalisation de divers équipements présentant de l'intérêt pour les entreprises installées dans cette zone ; qu'ainsi elle ne peut pas être regardée comme une redevance pour service rendu ; que, dès lors, la société requérante est fondée à demander l'annulation du titre de perception établi à son encontre et la restitution de la somme correspondante ;
Sur les dépens de première instance : Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre les dépens de première instance à la charge de la commune ;
DECIDE : Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif d'Orléans en date du 30 janvier 1973 est annulé. Article 2 : Le titre de perception en date du 13 mai 1970 est annulé. La commune de Fleury-les-Aubrais remboursera à la société "Compagnie française John Deere" la somme de 80.000 F perçue en exécution de ce titre. Article 3 : Les dépens de première instance et d'appel sont mis à la charge de la commune de Fleury-les-Aubrais. Article 4 : Expédition de la présente décision sera transmise au Ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur.