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04/12/1986 | CEDH | N°11353/85

CEDH | V. contre la FRANCE


La Commission européenne des Droits de l'Homme, siégeant en chambre du conseil le 4 décembre 1986 en présence de MM. C.A. NØRGAARD, Président J.A. FROWEIN E. BUSUTTIL G. JÖRUNDSSON G. TENEKIDES S. TRECHSEL B. KIERNAN A.S. GÖZÜBÜYÜK A. WEITZEL J.C. SOYER H.G. SCHERMERS H. DANELIUS G. BATLINER H. VANDENBERGHE Mme G.H. THUNE Sir Basil HALL M. F. MARTINEZ M. H.C. KRÜGER, Secrétaire

de la Commission ;
Vu l'article 25 (art. 25) de la Conventio...

La Commission européenne des Droits de l'Homme, siégeant en chambre du conseil le 4 décembre 1986 en présence de MM. C.A. NØRGAARD, Président J.A. FROWEIN E. BUSUTTIL G. JÖRUNDSSON G. TENEKIDES S. TRECHSEL B. KIERNAN A.S. GÖZÜBÜYÜK A. WEITZEL J.C. SOYER H.G. SCHERMERS H. DANELIUS G. BATLINER H. VANDENBERGHE Mme G.H. THUNE Sir Basil HALL M. F. MARTINEZ M. H.C. KRÜGER, Secrétaire de la Commission ;
Vu l'article 25 (art. 25) de la Convention de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales ;
Vu la requête introduite le 16 janvier 1985 par M.V. contre la France et enregistrée le 18 janvier 1985 sous le No de dossier 11353/85 ;
Vu le rapport prévu à l'article 40 du Règlement intérieur de la Commission ;
Après avoir délibéré,
Rend la décision suivante :
EN FAIT
Les faits, tels qu'ils ont été exposés par le requérant peuvent se résumer comme suit :
Le requérant est un ressortissant français né en 1951, sans profession. Au moment de l'introduction de la requête, il était détenu à la prison de Fresnes en tant que condamné pour certaines infractions et en tant que prévenu pour d'autres.
Devant la Commission il est représenté par Maître Bernard Donche, avocat au barreau de la Seine St-Denis.
Le 26 mai 1984, une fouille effectuée dans la cellule du requérant alors qu'il était absent a permis de découvrir plusieurs articles dont une arme et des explosifs. Ces articles constituaient, au sens du surveillant de la prison, des présomptions sérieuses de préparatifs d'évasion. Le requérant était le jour même transféré à titre préventif en cellule d'isolement.
Le 28 mai 1984, il a été informé des faits matériels mis à sa charge ainsi que du fait qu'il devait comparaître le jour même devant le directeur de la prison pour répondre d'une infraction disciplinaire, constituée par le fait que la fouille de sa cellule avait permis la découverte des objets susmentionnés.
Lors de sa comparution devant le directeur de la maison d'arrêt, il a été interrogé au sujet d'objets découverts au cours d'une deuxième fouille de sa cellule effectuée le même jour et alors qu'il avait quitté cette cellule depuis deux jours.
La détention de tous ces articles ayant été imputée au requérant malgré ses dénégations, le directeur de la prison, seul compétent en la matière aux termes de l'article D 249 du Code de procédure pénale lui infligea le 28 mai 1984 une sanction disciplinaire de 45 jours de mise en cellule de punition, soit le maximum prévu à l'article D 167 du même Code.
Cette décision entraîna conformément à l'article D 169 la privation du requérant de cantine et de visites, la restriction de sa correspondance autre que familiale, ainsi que la privation de toute participation aux services religieux habituellement accessibles aux détenus.
Le 14 juin 1984 le conseil du requérant introduisit un recours gracieux auprès du Ministre de la justice afin d'obtenir l'annulation de la sanction disciplinaire précitée aux motifs que :
a) par ses effets, la sanction prononcée était assimilable à une sanction pénale et préjudiciait aux droits de nature civile du détenu ;
b) les conditions dans lesquelles cette sanction avait été prononcée, et notamment l'impossibilité pour le requérant de consulter son conseil et de préparer sa défense, contrevenaient à l'ensemble des stipulations de l'article 6 (art. 6) de la Convention ;
c) les faits ayant motivé cette sanction, à savoir la détention d'armes et d'explosifs, constituaient une accusation en matière pénale au sens de l'article 6 (art. 6) de la Convention, d'ailleurs sanctionnée en droit français par le décret-loi du 18 avril 1939.
En effet, le 28 juin 1984, le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Créteil inculpa le requérant pour les faits précités d'infraction aux dispositions du décret-loi de 1939 relatif à la détention d'armes et d'explosifs.
Par ailleurs, le directeur de la prison de Fresnes décida, par décision du 10 juillet 1984, de mettre le requérant à l'isolement pour une durée de 3 mois en vertu du pouvoir que lui confère l'article D 170 du Code de procédure pénale.
Par lettre du 28 août 1984, le Ministre de la justice rejeta la demande du requérant en se référant à la jurisprudence constante du Conseil d'Etat disposant que les sanctions disciplinaires ne rentrent pas dans le champ d'application de l'article 6 (art. 6) de la Convention.
Par décision du 26 novembre 1984 non susceptible de recours, le juge de l'application des peines accorda au requérant, sous réserve d'une bonne conduite ultérieure, une réduction de peine de seulement 23 jours.
Par décision du 7 mai 1985, le directeur de la prison de Fleury-Mérogis, dans laquelle le requérant avait été transféré entre temps, lui imposa une nouvelle sanction disciplinaire de mise en cellule de punition de 30 jours au motif qu'il avait participé à des incidents ayant eu lieu le 6 mai 1985 à la maison d'arrêt. Le requérant contesta la réalité des faits qui lui avaient été reprochés et demanda l'assistance de son avocat mais sans succès.
Le 13 novembre 1985, le directeur de la maison d'arrêt de Bois d'Arcy décida la mise à l'isolement du requérant au motif qu'il y aurait de sérieuses présomptions de préparatifs d'évasion. Le conseil du requérant ayant demandé l'annulation de cette décision, le juge de l'application des peines estima, par lettre du 26 novembre 1985, que la décision était justifiée.
Par lettre du 26 juin 1986, le conseil du requérant a fait savoir au Secrétaire de la Commission qu'il avait été informé par la presse de la récente évasion de son client de la prison de la Santé dans des circonstances spectaculaires à l'aide d'un hélicoptère qui aurait été piloté par son épouse, et qu'il était sans nouvelles de son client depuis cette évasion. N'ayant reçu aucune instruction concernant la présente requête, le conseil du requérant priait la Commission de bien vouloir noter son désistement d'instance.
Par lettre du 8 juillet 1986, le conseil du requérant a sollicité le renvoi sine die de l'examen de cette requête par la Commission.
GRIEFS
Devant la Commission, le requérant formule les griefs suivants :
1. S'agissant des sanctions disciplinaires qui lui ont été infligées les 28 mai 1984 et 7 mai 1985, le requérant se plaint du fait que sa cause n'a pas été entendue publiquement par un tribunal indépendant et impartial. Il invoque l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention. Il se plaint en particulier de n'avoir pas été informé dans le plus court délai d'une manière détaillée de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui. Il invoque l'article 6 par. 3 (a) (art. 6-3-a) de la Convention. Il se plaint également de n'avoir pas disposé du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense. Il invoque l'article 6 par. 3 (b), (c) (art. 6-3-b, art. 6-3-c) de la Convention.
2. Le requérant se plaint aussi de la façon discrétionnaire d'exercice du pouvoir de sanction disciplinaire en ce qui concerne l'interdiction totale de visites et les restrictions à sa correspondance autre que familiale qui lui ont été imposées pendant 45 jours puis 30 jours de mise en cellule de punition. A cet égard, il invoque l'article 8 (art. 8) de la Convention.
3. Il se plaint en outre du fait qu'il a été empêché de participer au culte collectif rendu par l'aumônier de la maison d'arrêt pendant sa mise en cellule de punition. Il invoque l'article 9 (art. 9) de la Convention.
4. Le requérant se plaint également d'avoir été soumis à un isolement total pour une durée totalisant huit mois et demi à dater du 26 mai 1984, isolement qui lui a occasionné des troubles nerveux et mentaux dont il a eu l'occasion de se plaindre auprès du médecin de la maison d'arrêt. Il invoque l'article 3 (art. 3) de la Convention.
5. Enfin, il se plaint enfin de n'avoir disposé, compte tenu des dispositions actuelles du droit français, d'aucun recours effectif contre les décisions de mise à l'isolement ou en cellule de punition devant une instance nationale habilitée à contrôler la légalité de ces décisions et leur proportionnalité avec les faits qui les ont motivées, ainsi que les conséquences qui en découlent sur le terrain des articles 8, 9 et 3 (art. 8, art. 9, art. 3) de la Convention.
MOTIFS DE LA DECISION
La Commission relève que, par lettre du 26 juin 1986, le conseil du requérant a porté à la connaissance du Secrétaire de la Commission que le requérant s'était évadé de la prison de la Santé dans des circonstances spectaculaires, qu'il n'avait plus pris contact avec son conseil et que celui-ci n'avait reçu aucune instruction de son client concernant la présente requête. Dans ces conditions, le conseil du requérant a prié la Commission de bien vouloir noter son désistement d'instance.
La Commission relève également que, par lettre du 8 juillet 1986, le conseil du requérant a sollicité le renvoi sine die de l'examen de cette requête par la Commission.
Invité par la Commission à préciser sa position quant à une éventuelle radiation du rôle de la requête, le conseil du requérant a demandé, par lettre du 20 octobre 1986, que la présente affaire soit rayée du rôle. Par ailleurs, la Commission note que ni le requérant ni une personne de son entourage n'a pris contact avec le Secrétariat.
Dans ces circonstances, la Commission estime que rien ne s'oppose à ce qu'il soit fait droit à la demande de radiation présentée par le conseil du requérant.
Par ailleurs, prenant en considération les circonstances de l'espèce, la Commission considère qu'aucun motif d'intérêt général touchant au respect de la Convention ne justifie la poursuite de l'examen de la requête, celle-ci posant des problèmes similaires à ceux soulevés dans d'autres affaires actuellement pendantes devant la Commission.
Par ces motifs, en application de l'article 44 par. 1 de son Règlement intérieur, la Commission
DECIDE DE RAYER LA REQUETE DU ROLE. Le Secrétaire Le Président de la Commission de la Commission (H.C. KRÜGER) (C.A. NØRGAARD)


Synthèse
Formation : Cour (plénière)
Numéro d'arrêt : 11353/85
Date de la décision : 04/12/1986
Type d'affaire : DECISION
Type de recours : Non-violation de P1-1

Analyses

(Art. 12) SE MARIER, (Art. 14) DISCRIMINATION, (Art. 34) VICTIME, (Art. 35-1) EPUISEMENT DES VOIES DE RECOURS INTERNES, (Art. 8-1) RESPECT DE LA VIE FAMILIALE


Parties
Demandeurs : V.
Défendeurs : la FRANCE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2012
Fonds documentaire ?: HUDOC
Identifiant URN:LEX : urn:lex;coe;cour.europeenne.droits.homme;arret;1986-12-04;11353.85 ?

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