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13/07/2022 | CJUE | N°T-150/20

CJUE | CJUE, Arrêt du Tribunal, Tartu Agro AS contre Commission européenne., 13/07/2022, T-150/20


 ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

13 juillet 2022 ( *1 )

« Aides d’État – Agriculture – Contrat de bail portant sur des terres agricoles en Estonie – Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché intérieur et ordonnant sa récupération – Avantage – Détermination du prix du marché – Principe de l’opérateur privé – Appréciations économiques complexes – Contrôle juridictionnel – Prise en compte de tous les éléments pertinents – Obligation de diligence »

Dans l’affaire T‑150/20,

Tar

tu Agro AS, établie à Tartu (Estonie), représentée par Mes T. Järviste, T. Kaurov, M. Valberg et M. Peetsalu, avocats,

partie requér...

 ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

13 juillet 2022 ( *1 )

« Aides d’État – Agriculture – Contrat de bail portant sur des terres agricoles en Estonie – Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché intérieur et ordonnant sa récupération – Avantage – Détermination du prix du marché – Principe de l’opérateur privé – Appréciations économiques complexes – Contrôle juridictionnel – Prise en compte de tous les éléments pertinents – Obligation de diligence »

Dans l’affaire T‑150/20,

Tartu Agro AS, établie à Tartu (Estonie), représentée par Mes T. Järviste, T. Kaurov, M. Valberg et M. Peetsalu, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. V. Bottka et Mme E. Randvere, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. G. De Baere, président, V. Kreuschitz (rapporteur) et K. Kecsmár, juges,

greffier : Mme S. Jund, administratrice,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l'audience du 13 janvier 2022,

rend le présent

Arrêt

1 Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, Tartu Agro AS, demande l’annulation de la décision C(2020) 252 final de la Commission, du 24 janvier 2020, concernant l’aide d’État SA.39182 (2017/C) (ex 2017/NN) (ex 2014/CP) – Octroi d’une aide présumée illégale à AS Tartu Agro (ci-après la « décision attaquée »).

Antécédents du litige

Sur la requérante et sur la location des terres agricoles

2 La requérante est une société à responsabilité limitée ayant succédé, en 1997, à Tartu Riigimajand, une exploitation agricole d’État produisant du lait, de la viande et des céréales. Le 2 octobre 2001, la République d’Estonie a, dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres restreint, vendu la totalité des actions de la requérante à OÜ Tartland, laquelle a fusionné avec la requérante en 2002.

3 Le 16 novembre 2000, la République d’Estonie, représentée par son ministère de l’Agriculture, et la requérante ont, à l’issue d’une procédure d’appel d’offres restreint (ci-après l’« appel d’offres »), conclu un contrat de bail (ci-après le « contrat de bail ») pour une durée de 25 ans concernant des parcelles de terres agricoles d’une superficie totale de 3089,17 ha, situées sur le territoire de la municipalité de Tähtvere, dans le comté de Tartu, et dont la République d’Estonie est propriétaire
(ci-après la « location litigieuse »).

4 Le contrat de bail prévoyait un loyer de 10000 couronnes estoniennes (EEK) (environ 639 euros) par an, soit 3,24 EEK/ha (0,20 euros/ha), et la prise en charge, par la requérante, des coûts d’entretien et d’amélioration des parcelles, notamment des investissements annuels en systèmes de drainage d’un montant minimal de 400000 EEK (environ 25565 euros, soit 8,28 euros/ha), les coûts d’entretien des terres et d’amélioration de la qualité des sols d’un montant minimal total de 3981000 EEK (environ
254432 euros), y compris les coûts liés à la protection des cultures (820000 EEK), aux engrais minéraux et organiques (3100000 EEK), au chaulage (20000 EEK) et à l’entretien des bas-côtés (41000 EEK), ainsi que l’acquittement de l’ensemble des taxes.

5 Le contrat de bail prévoyait également une clause de modification et a été modifié plusieurs fois. Trois de ces modifications portaient sur l’augmentation du loyer annuel, lequel a été porté à 80000 EEK (environ 5113 euros) le 14 janvier 2005, à 250000 EEK (15978 euros) le 21 mars 2007, et à 416000 EEK (26626 euros), soit 136 EEK/ha (8,69 euros/ha), le 12 mai 2009. Ces augmentations du loyer ont pris effet rétroactivement, respectivement, le 1er janvier 2005, le 1er janvier 2007 et le 1er janvier
2009.

Sur la procédure administrative devant la Commission

6 Le 28 juillet 2014, la Commission européenne a enregistré une plainte déposée le 24 juillet 2014 et alléguant que le ministère des Affaires rurales estonien (anciennement ministère de l’Agriculture estonien) avait accordé une aide d’État illégale à la requérante.

7 La Commission a transmis la plainte aux autorités estoniennes le 14 août 2014, les invitant à fournir des informations et à présenter des observations. Les autorités estoniennes ont fourni les informations demandées le 3 octobre 2014.

8 Par décision du 27 février 2017, la Commission a ouvert la procédure formelle d’examen, prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, à l’égard de la location litigieuse (JO 2017, C 103, p. 4, ci-après la « décision d’ouverture »), invitant les tiers intéressés à présenter leurs observations.

9 Dans la décision d’ouverture, la Commission a relevé qu’elle ne pouvait exclure que la location litigieuse ait constitué une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Premièrement, il serait possible que la requérante ait reçu un avantage, notamment, sous la forme d’un loyer inférieur au prix du marché, ce qui semblerait ressortir d’un rapport indépendant soumis par les autorités estoniennes. À cet égard, la Commission a également remis en cause le caractère transparent, non
discriminatoire et inconditionnel de l’appel d’offres. Deuxièmement, l’avantage serait sélectif dans la mesure où les terres agricoles en question n’auraient été louées qu’à la requérante. Troisièmement, la Commission a considéré que les autres conditions de l’article 107, paragraphe 1, TFUE semblaient également être remplies.

10 Le 21 avril 2017, les autorités estoniennes ont présenté leurs observations. La Commission a également reçu des observations de la part de deux tiers intéressés, à savoir celles du plaignant et celles de la requérante, lesquelles ont, par la suite, été transmises aux autorités estoniennes, respectivement, les 10 et 12 mai 2017. Les autorités estoniennes ont déposé leurs observations sur celles du plaignant le 28 juin 2018.

11 Les 11 et 19 juin 2017, le plaignant a présenté des observations supplémentaires accompagnées de cinq annexes. La Commission a transmis ces observations aux autorités estoniennes le 3 juillet 2017, lesquelles ont présenté leurs observations le 21 juillet 2017.

12 Par lettre du 30 août 2017, la requérante a contacté la Commission, laquelle a répondu le 11 septembre 2017. Le plaignant a contacté la Commission par lettres, respectivement, des 9 janvier 2018, 30 janvier et 14 juillet 2019, auxquelles celle-ci a répondu, respectivement, les 7 février 2018, 1er mars et 17 juillet 2019.

13 Le 7 février 2019, la Commission a organisé une téléconférence avec les autorités estoniennes et leur a envoyé, le 15 février 2019, une demande de renseignements complémentaires, à laquelle celles-ci ont répondu le 17 avril 2019.

14 Le 24 janvier 2020, la Commission a adopté la décision attaquée, en concluant que la location litigieuse remplissait l’ensemble des conditions énoncées à l’article 107, paragraphe 1, TFUE et constituait, dès lors, une aide d’État (point 153 de la décision attaquée).

Conclusions des parties

15 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– annuler en totalité la décision attaquée ;

– condamner la Commission aux dépens.

16 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– rejeter le recours ;

– condamner la requérante aux dépens.

En droit

17 À l’appui du recours, la requérante soulève formellement huit moyens. Le premier moyen formellement soulevé ne concernant que des considérations relatives à la recevabilité, il convient d’examiner les sept autres moyens formellement soulevés.

18 En substance, la requérante fait valoir que la Commission a commis des erreurs (« manifestes ») de droit, de procédure et de fait viciant son appréciation relative, premièrement, à la conformité de l’appel d’offres aux exigences garantissant des conditions du marché, deuxièmement, à la conformité du loyer du contrat de bail à un prix du marché, troisièmement, à la détermination du montant de l’avantage, quatrièmement, à la qualification d’aide nouvelle, cinquièmement, à l’obligation de
restitution d’une partie de l’aide, sixièmement, à l’obligation de récupération de l’aide par la République d’Estonie et, septièmement, à l’incompatibilité de l’aide avec le marché intérieur.

19 Le Tribunal estime opportun de contrôler en premier lieu la légalité de la décision attaquée en ce qui concerne l’appréciation relative à la conformité du loyer prévu par le contrat de bail avec le prix du marché et la détermination du montant de l’avantage.

20 Par ses troisième et quatrième moyens formellement soulevés, la requérante conteste, en substance, que la condition relative à l’existence d’un avantage économique, telle qu’elle est prévue par l’article 107, paragraphe 1, TFUE, soit réunie en l’espèce. Plus précisément, elle soutient que c’est à tort que la Commission a conclu, aux points 131 à 148 de la décision attaquée, que la location litigieuse procurait un avantage à la requérante au motif que le loyer versé par cette dernière a été
inférieur à un prix du marché pendant la période allant de 2000 à 2017 et, aux points 154 à 165 de ladite décision, que cet avantage correspondait à la différence entre le montant moyen découlant des estimations annuelles du taux du marché pour le loyer des terrains en cause et le montant du loyer réel versé pour ces terrains, majoré de la moitié du montant des investissements annuels effectués dans le système de drainage et de la taxe foncière acquittée au nom du propriétaire.

21 Plus précisément, la requérante estime que le rapport Uus Maa, sur lequel la Commission s’est appuyée pour la période allant de 2000 à 2014, n’est pas fiable dans la mesure où, d’une part, il présente des fourchettes de prix pour le loyer par périodes, au sein desquelles le montant maximal est parfois plus de deux fois supérieur au montant minimal, et, d’autre part, les prix réels peuvent varier de 20 % par rapport à ce qui y est indiqué. Elle critique le fait que la Commission a déterminé le
prix du marché sur la base de la moyenne arithmétique des valeurs minimales et maximales de ces fourchettes de prix. Selon elle, peuvent être considérés comme étant conformes au prix du marché tant le montant minimal que le montant maximal compris dans une fourchette et même un loyer s’écartant de 20 % d’un tel montant. En se fondant sur la moyenne arithmétique de cette expertise imprécise, la Commission aurait violé son obligation d’analyse et de motivation. Les données de l’Office des
statistiques estonien, utilisées comme base de comparaison pour la période allant de 2015 à 2017, ne constitueraient pas une expertise et ne tiendraient pas compte des spécificités des terrains en cause.

22 La requérante avance que, pour rechercher si l’État estonien a adopté ou non le comportement d’un opérateur privé, la Commission devait tenir compte du contexte et des considérations économiques prévalant lors de la conclusion du contrat de bail en 2000. À ce stade, l’adhésion de la République d’Estonie à l’Union aurait été incertaine, le marché des terrains agricoles aurait été déprimé, la valeur des terrains et le prix des loyers auraient été faibles.

23 La requérante soutient que les investissements dans l’amélioration des terres ainsi que les dépenses pour l’entretien des terrains et d’autres améliorations qualitatives, tels qu’ils sont prévus par le contrat de bail, doivent entièrement être intégrés dans le prix du loyer. Il ressortirait du rapport Uus Maa que, en 2000, ni l’imposition de telles obligations ni la conclusion de contrats de bail à long terme portant sur une superficie aussi importante ne relevaient d’une pratique courante. Il
n’existerait donc pas de contrats comparables et le prix du loyer inclurait nécessairement la valeur de ces obligations.

24 Selon la requérante, la Commission n’a satisfait ni aux obligations au titre de la charge de preuve ni aux exigences procédurales qui lui incombaient. En particulier, elle estime que la Commission n’a pas correctement interprété les faits ainsi que les données de nature économique et aurait apprécié les éléments de preuve de manière sélective. Il découlerait du rapport Uus Maa que les terres au sud de Tartu nécessitaient des systèmes d’amélioration des terres représentant un coût supplémentaire,
que la construction de tels systèmes était un investissement dans les biens du propriétaire, que les obligations liées à la fertilisation des sols n’étaient pas une pratique courante, qu’aucun nouveau contrat de bail conclu sur le marché n’avait été aussi favorable au propriétaire comparé à celui en cause, que les bailleurs privés tiraient un revenu net réel annuel inférieur en raison des impôts sur le revenu et de la taxe foncière et que le contrat de bail n’était pas comparable à un contrat de
bail ordinaire.

25 La requérante soutient que la Commission n’a pas tenu compte du fait que, selon les données indiquées dans le rapport Uus Maa, la surface exploitable des terrains en cause ne représente que 2833,596 ha, soit 83 % de la superficie totale de ces terrains. Selon elle, le loyer effectif qu’elle a payé est donc de 16,7 % supérieur à celui prévu par le contrat de bail. En outre, les terrains en cause incluraient, pour une part importante, des chemins et autres terres non exploitables.

26 La requérante ajoute que l’analyse d’AS Pindi Kinnisvara (ci-après l’« analyse Pindi Kinnisvara »), qui a été présentée par les autorités estoniennes dans le cadre de la procédure administrative et dont la Commission a omis de tenir compte, démontre également la conformité du loyer aux conditions du marché.

27 La Commission conteste les arguments de la requérante.

28 La Commission rappelle avoir comparé, avant de procéder à des ajustements, le loyer payé par la requérante dans les années en cause aux loyers annuels moyens résultant du rapport Uus Maa et des données de l’Office des statistiques estonien. Ledit rapport aurait fourni des estimations plausibles des loyers pratiqués dans le comté de Tartu au cours de la période allant de 2000 à 2014. La Commission précise s’être fondée sur l’estimation moyenne des loyers indiquée dans ce rapport et qu’il est
habituel d’utiliser de telles estimations et des fourchettes de prix pour effectuer des comparaisons. Les terrains en cause ne seraient pas différents des terrains moyens en Estonie et une comparaison avec le prix le plus bas de ces fourchettes de prix, telle qu’elle est proposée par la requérante, aurait sous-estimé l’avantage. La Commission estime donc avoir adopté une approche prudente et équilibrée en se fondant sur les montants moyens des loyers et des données objectives. En outre, ce
rapport aurait été produit par les autorités estoniennes et la requérante n’aurait pas été en mesure de présenter des éléments de preuve plus fiables.

29 La Commission considère que les données de l’Office des statistiques estonien, telles qu’elles ont été utilisées pour la période allant de 2015 à 2017, constituent des éléments de preuve fiables. Elle indique avoir exposé dans la décision attaquée que lesdites données ne constituaient pas le résultat d’une évaluation experte du prix de la location des terres, mais reflétaient les prix moyens des loyers rapportés durant cette période. Elle relève que ces données étaient les seules informations
fiables dont elle disposait et que les résultats obtenus concordaient avec ceux relatifs à la période allant de 2000 à 2014. Ni la requérante ni les autorités estoniennes n’auraient démontré que les terrains en cause avaient une valeur moindre par rapport à la valeur moyenne des terres agricoles en Estonie. La situation financière de la requérante n’indiquerait pas non plus une valeur inférieure. La Commission ajoute que le fait que les données statistiques ne peuvent tenir compte de toutes les
particularités d’une parcelle donnée ne signifie pas qu’elle les a utilisées à tort.

30 La Commission estime avoir tenu compte du contexte à l’époque de la conclusion du contrat de bail et fait remarquer que la requérante ne relève aucune lacune à cet égard dans la décision attaquée. Elle précise que, même si les prix du marché étaient initialement peu élevés, elle a démontré, dans ladite décision, que le loyer de la requérante était resté inférieur à ces prix pendant toute la période allant de 2000 à 2017, et ce malgré les augmentations effectuées.

31 La Commission conteste l’affirmation de la requérante selon laquelle le loyer devait inclure l’intégralité des investissements réalisés pour les terrains en cause. Les investissements concernant l’amélioration et l’entretien des terres ainsi que l’amélioration de la qualité du sol seraient des dépenses de fonctionnement effectuées, dans le cadre du cycle annuel de production agricole, dans l’intérêt de l’exploitant. La Commission relève que la requérante ne se trouvait pas dans une situation
spécifique qui devait être prise en considération dans la mesure où, d’une part, ces caractéristiques se reflétaient dans les prix du marché locatif et, d’autre part, l’ensemble des terres agricoles en Estonie nécessitait des investissements massifs durant la période en cause. Elle soutient que l’amélioration de la fertilité, premièrement, est inhérente à la nature de l’exploitation agricole, deuxièmement, ne démontre pas que la valeur des terrains en cause a considérablement différé de celle des
terres agricoles moyennes en Estonie, et, troisièmement, n’explique pas les raisons pour lesquelles le loyer était inférieur au prix du marché. D’après la Commission, un loyer inférieur aurait uniquement été justifié si la fertilité des sols avait été inférieure à la fertilité moyenne ou si celle-ci s’était détériorée. Quant aux investissements dans le système de drainage, elle soutient avoir reconnu que l’État estonien avait, en tant que propriétaire, été libéré de certains coûts d’entretien et
bénéficiait d’une augmentation de la valeur des terrains. Ces investissements dépassant les exigences légales et profitant également à la requérante, la Commission estime que la prise en compte de leur moitié représente une estimation prudente. Selon elle, cela démontre également qu’elle a tenu compte des améliorations des terres, notamment de leur fertilité.

32 La Commission considère que l’argument relatif à la charge de la preuve est fondé sur des allégations dénuées de fondement et, partant, inopérant. Elle soutient que l’analyse Pindi Kinnisvara constitue une expertise ex post qui n’a pas été présentée dans le cadre de la procédure administrative et ne saurait affaiblir la valeur probante du rapport Uus Maa, tel qu’il est présenté par les autorités estoniennes lors de cette même procédure et fondé sur des données concernant la période pertinente. En
revanche, dans la duplique, elle relève que ce n’était pas la requérante, mais ces autorités qui l’avaient fournie au cours de cette procédure. Elle indique que, ladite analyse ayant été mandatée par la requérante, il aurait été demandé auxdites autorités de fournir une évaluation indépendante, à savoir le rapport Uus Maa. Il n’aurait donc plus été nécessaire de prendre position sur cette analyse partiale, considérée comme retirée par les autorités estoniennes. À l’audience, en réponse aux
questions orales posées par le Tribunal, la Commission a précisé que la lettre des autorités estoniennes du 7 octobre 2015 et les échanges ultérieurs avec ces autorités ont permis à la Commission de considérer que l’analyse en question avait été retirée. Selon la Commission, la même analyse ne faisait donc plus partie du dossier administratif au moment de l’adoption de la décision attaquée et il n’était pas nécessaire de la mentionner dans cette décision. Le Tribunal a pris acte de ces
explications dans le procès-verbal de l’audience.

33 La Commission souligne que, l’appréciation de l’avantage constituant une évaluation économique complexe, elle dispose d’un pouvoir discrétionnaire concernant l’utilisation des éléments de preuve et de la méthode d’analyse les plus appropriés. Quant aux ajustements appliqués aux résultats initiaux de la comparaison, elle fait valoir qu’elle a expliqué son approche et s’est fondée sur les éléments de preuve afin de ne procéder qu’aux adaptations nécessaires. La requérante n’aurait ni prouvé qu’une
de ces démarches était inappropriée, ni démontré l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation.

34 La Commission ajoute que, en 2000, la requérante a bénéficié d’une aide agricole couvrant 2912,76 ha, ce qui démontre la grande superficie du terrain comprenant de nombreux types de parcelles différents présentant des valeurs différentes. Pour un tel terrain, un prix moyen serait donc représentatif.

35 Il résulte d’une jurisprudence constante que sont considérées comme des aides d’État les interventions qui, sous quelque forme que ce soit, sont susceptibles de favoriser directement ou indirectement des entreprises ou qui doivent être considérées comme un avantage économique que l’entreprise bénéficiaire n’aurait pas obtenu dans des conditions normales de marché (voir arrêt du 17 septembre 2020, Compagnie des pêches de Saint-Malo, C‑212/19, EU:C:2020:726, point 39 et jurisprudence citée).

36 Conformément à une jurisprudence établie, la fourniture de biens ou de services à des conditions préférentielles est susceptible de constituer une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (voir arrêts du 11 juillet 1996, SFEI e.a., C‑39/94, EU:C:1996:285, point 59 et jurisprudence citée ; du 1er juillet 2010, ThyssenKrupp Acciai Speciali Terni/Commission, T‑62/08, EU:T:2010:268, point 57 et jurisprudence citée, et du 28 février 2012, Land Burgenland/Commission, T‑268/08 et
T‑281/08, EU:T:2012:90, point 47 et jurisprudence citée).

37 Dans le cas de la location d’un terrain à un prix prétendu préférentiel, opération qui est comparable à la vente d’un terrain par une autorité publique à une entreprise, il convient de vérifier si le prix payé par le présumé bénéficiaire de l’aide correspond à un prix qu’il n’aurait pas pu obtenir dans des conditions normales de marché. Dans ces circonstances, le montant de l’aide est égal à la différence entre ce que le bénéficiaire a réellement payé et ce qu’il aurait dû payer à l’époque dans
des conditions normales du marché (voir, en ce sens, arrêt du 9 décembre 2015, Grèce et Ellinikos Chrysos/Commission, T‑233/11 et T‑262/11, EU:T:2015:948, point 79 et jurisprudence citée).

38 La Commission devait donc examiner si le loyer payé par la requérante dans le cadre de la location litigieuse correspondait aux conditions normales de marché.

39 Dans ce contexte, la Commission était amenée à effectuer des appréciations économiques complexes. Dans le cadre du contrôle que les juridictions de l’Union exercent sur les appréciations économiques complexes faites par la Commission dans le domaine des aides d’État, il n’appartient pas au juge de l’Union de substituer son appréciation économique à celle de la Commission (arrêts du 22 novembre 2007, Espagne/Lenzing, C‑525/04 P, EU:C:2007:698, point 57, et du 2 septembre 2010, Commission/Scott,
C‑290/07 P, EU:C:2010:480, point 66 ; voir, également, arrêt du 10 décembre 2020, Comune di Milano/Commission, C‑160/19 P, EU:C:2020:1012, point 100 et jurisprudence citée). Dès lors, le contrôle par le juge de l’Union est restreint, se limitant à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de l’exactitude matérielle des faits ainsi que de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir (voir, en ce sens, arrêt du 9 mars 2017, Ellinikos
Chrysos/Commission, C‑100/16 P, EU:C:2017:194, points 18 et 19 et jurisprudence citée).

40 Toutefois, cela n’implique pas que le juge de l’Union doive s’abstenir de contrôler l’interprétation, par la Commission, de données de nature économique. En effet, ledit juge doit notamment vérifier non seulement l’exactitude matérielle des éléments de preuve invoqués, leur fiabilité et leur cohérence, mais également contrôler si ces éléments constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe et s’ils sont de nature à étayer
les conclusions qui en sont tirées (arrêts du 22 novembre 2007, Espagne/Lenzing, C‑525/04 P, EU:C:2007:698, points 56 et 57 ; du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C‑290/07 P, EU:C:2010:480, points 64 et 65, et du 10 décembre 2020, Comune di Milano/Commission, C‑160/19 P, EU:C:2020:1012, point 115). En outre, dans les cas où une institution de l’Union disposerait d’un large pouvoir d’appréciation, le contrôle du respect de certaines garanties procédurales revêtirait une importance fondamentale.
Parmi ces garanties figure l’obligation pour l’institution compétente d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce et de motiver sa décision de façon suffisante (arrêt du 22 novembre 2007, Espagne/Lenzing, C‑525/04 P, EU:C:2007:698, point 58).

41 C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’apprécier le bien-fondé de l’argumentation de la requérante.

42 En l’espèce, afin de déterminer si la location litigieuse était conforme aux conditions du marché, la Commission a effectué un examen en deux étapes. Dans un premier temps, elle a vérifié si le montant du loyer à lui seul était inférieur au prix du marché (points 132 à 139 de la décision attaquée). Dans un second temps, elle a examiné si ce montant augmenté par des obligations contractuelles supplémentaires, pour autant que celles-ci fassent partie du revenu locatif de l’État, restait inférieur
audit prix du marché (points 141 à 146 de ladite décision).

Sur la conformité du montant du loyer au prix du marché

43 Afin de comparer le montant du loyer au prix du marché, la Commission s’est fondée sur le rapport Uus Maa et les données de l’Office des statistiques estonien, tous les deux présentés par les autorités estoniennes dans le cadre de la procédure administrative. Elle a examiné, sur cette base, si le montant du loyer versé par la requérante dans le cadre de la location litigieuse correspondait, à lui seul, au niveau du montant moyen du loyer des terres agricoles en Estonie tout au long de la période
de bail (point 131 de la décision attaquée).

44 Plus précisément, d’une part, la Commission a relevé, aux points 134 à 136 de la décision attaquée, que, selon le rapport Uus Maa, le montant du loyer des terres agricoles dans le comté de Tartu était compris, durant la période allant de 2000 à 2004, entre 6 et 10 euros/ha, durant la période allant de 2005 à 2009, entre 10 et 20 euros/ha, et, durant la période allant de 2010 à 2014, entre 25 et 60 euros/ha. En revanche, dans cette première période, la requérante aurait versé un montant du loyer
de 0,20 euros/ha, dans cette deuxième période, son loyer aurait été augmenté, les 14 janvier 2005 et 21 mars 2007, à respectivement 1,66 euros/ha et à 5,21 euros/ha, et, dans cette troisième période, ce loyer aurait été augmenté, le 12 mai 2009, à 8,68 euros/ha.

45 D’autre part, la Commission a indiqué, aux points 137 à 139 de la décision attaquée, que, selon les données de l’Office des statistiques estonien, en 2015, le montant moyen du loyer des terres agricoles et des terres arables aurait été, respectivement, en Estonie, de 52 euros/ha et de 55 euros/ha, et, dans le comté de Tartu, de 63 euros/ha et de 65 euros/ha. En 2016, ces montants auraient été, respectivement, de 52 euros/ha et de 54 euros/ha en Estonie et de 61 euros/ha et de 61 euros/ha dans
ledit comté. En 2017, lesdits montants en Estonie auraient été, respectivement, de 58 euros/ha et de 60 euros/ha. Pour cette année, des données sur ce comté n’existeraient pas. En revanche, la requérante aurait versé un montant du loyer de 26,86 euros/ha en 2015, de 27,30 euros/ha en 2016 et de 27,28 euros/ha en 2017.

46 Sur la base de cette comparaison, la Commission a conclu, au point 140 de la décision attaquée, que le montant du loyer à lui seul était inférieur au prix du marché tout au long de la période allant de 2000 à 2017. Elle a appliqué une approche similaire, aux points 154 à 156 de ladite décision, pour le calcul de l’avantage, pour lequel elle a indiqué qu’il convenait de comparer le montant annuel du loyer payé par la requérante avec les montants moyens annuels découlant des fourchettes de prix
retenues dans le rapport Uus Maa et des données de l’Office des statistiques estonien. Elle a considéré, d’une part, que cet avantage consistait en la différence entre ces montants moyens et ledit loyer et, d’autre part, que le nombre d’hectares pour lequel un soutien agricole a été versé devait servir de base de calcul (points 140 et 165 de cette décision).

47 À cet égard, il convient de relever que les rapports d’expertise établis par des experts indépendants postérieurement à l’opération en cause, tels que le rapport Uus Maa qui rend compte de l’expertise des terrains et des parcelles faisant l’objet du contrat de bail (voir point 28 de la décision attaquée), peuvent, certes, être utilisés pour déterminer si le loyer payé par la requérante dans le cadre de la location litigieuse s’écarte du loyer du marché à un point tel qu’il y a lieu de conclure à
l’existence d’un avantage (voir, en ce sens, arrêt du 16 septembre 2004, Valmont/Commission, T‑274/01, EU:T:2004:266, point 45). De même, il n’est pas exclu que la Commission tienne compte des prix moyens des loyers rapportés par l’Office des statistiques estonien reposant sur une méthodologie approuvée par l’office statistique de l’Union européenne (Eurostat) (voir point 39 de ladite décision), étant donné que d’autres méthodes que des évaluations expertes peuvent également fournir des prix
correspondant aux valeurs réelles du marché, pour autant qu’elles prévoient l’actualisation des prix en cas de forte hausse (voir, en ce sens, arrêt du 16 décembre 2010, Seydaland Vereinigte Agrarbetriebe, C‑239/09, EU:C:2010:778, points 39 et 54), ce qui est nécessairement le cas pour les données statistiques.

48 Toutefois, la comparaison du loyer payé par la requérante dans le cadre de la location litigieuse avec des montants moyens du rapport Uus Maa et des données de l’Office des statistiques estonien, telle qu’elle est effectuée par la Commission dans la décision attaquée, est trop générale et insuffisamment nuancée pour démontrer que le prix de ce loyer ne correspondait pas à celui que la requérante aurait obtenu dans les conditions normales de marché (voir point 37 et 38 ci-dessus). En particulier,
ladite comparaison ne lui a pas permis, en faisant abstraction de la marge de variation qui devait nécessairement être tolérée, d’étayer, de manière suffisamment plausible et cohérente, le prix le plus proche possible de la valeur du marché, tel que cela est exigé par la jurisprudence (voir, en ce sens, arrêt du 16 décembre 2010, Seydaland Vereinigte Agrarbetriebe, C‑239/09, EU:C:2010:778, points 35 et 54). En outre, dans le cadre de cette comparaison, la Commission n’a pas tenu compte de tous
les éléments d’information pertinents dont elle a disposé ou pouvait disposer au moment de l’adoption de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêts du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C‑290/07 P, EU:C:2010:480, point 91 ; du 20 septembre 2017, Commission/Frucona Košice, C‑300/16 P, EU:C:2017:706, point 70, et du 26 mars 2020, Larko/Commission, C‑244/18 P, EU:C:2020:238, points 41 et 42).

49 Cette appréciation repose sur les éléments suivants.

50 En premier lieu, le rapport Uus Maa expose les prix du marché en fourchettes de prix. En effet, selon les pages 101 et 107 dudit rapport, le montant du loyer des terres arables de qualité moyenne situées dans le comté de Tartu était compris, durant la période allant de 2000 à 2004, entre 6 et 10 euros/ha et, durant la période allant de 2005 à 2009, entre 10 et 20 euros/ha (voir points 31, 32, 134 et 135 de la décision attaquée ; voir aussi point 44 ci-dessus). En ce qui concerne la période allant
de 2010 à 2014, ce rapport indique, à sa page 101, une première fourchette se situant entre 25 et 60 euros/ha, tandis qu’il expose, au tableau figurant à sa page 107, une seconde fourchette exposant des montants compris entre 30 et 50 euros/ha. La Commission a repris la première fourchette se situant entre 25 et 60 euros/ha (voir points 33, 136 et 156 de la décision attaquée ; voir également point 44 ci-dessus), dont le montant minimal de 25 euros/ha est plus bas que celui de la seconde
fourchette qui est de 30 euros/ha.

51 La Commission a estimé, sans fournir des explications plus détaillées à cet égard, que les moyennes arithmétiques des montants compris dans les fourchettes de prix en cause devaient servir comme base de comparaison avec le loyer versé par la requérante dans le cadre de la location litigieuse, et ce tant dans le cadre de la constatation de l’existence d’un avantage que dans celui de sa quantification (voir points 131 et 154 à 156 de la décision attaquée ; voir aussi points 43 et 46 ci-dessus).
Dans ses écritures devant le Tribunal et à l’audience, la Commission a confirmé s’être fondée sur cette moyenne arithmétique.

52 Or, comme le soutient la requérante, à juste titre, le fait que le rapport Uus Maa a exprimé le prix du marché sous forme de fourchettes de prix implique nécessairement qu’un loyer correspondant aux montants minimaux de ces fourchettes de prix constitue un loyer qui est également conforme au prix du marché. Il en est a fortiori ainsi dans la mesure où la Commission reconnaît elle-même que, pour les biens immobiliers et fonciers, il est habituel d’utiliser des estimations exprimées en fourchettes
de prix comme base d’évaluation, raison pour laquelle elle s’est fiée aux chiffres retenus dans ledit rapport. Ainsi, sauf justification particulière pour y déroger, la Commission devait, en principe, considérer qu’un loyer correspondant aux montants minimaux des fourchettes de prix retenues dans la décision attaquée, à savoir 6, 10 et 25 euros/ha (voir point 50 ci-dessus), durant les périodes pertinentes respectives était conforme à un tel prix du marché.

53 Contrairement aux affirmations avancées dans ses écritures et à l’audience, la Commission n’est pas parvenue à démontrer que la moyenne arithmétique des montants compris dans les fourchettes de prix en cause constituait la valeur la plus représentative et la méthode de calcul la plus adéquate pour déterminer le prix du marché et que le recours à ladite moyenne était nécessaire pour équilibrer les résultats obtenus sur plusieurs années et les rendre plus fiables, pour éviter la sous-estimation
dudit prix, ou pour tenir compte de la qualité moyenne des terrains en cause.

54 En effet, comme il est indiqué aux points 28 et 30 de la décision attaquée, le rapport Uus Maa rend compte de l’expertise des terrains et des parcelles faisant l’objet du contrat de bail et repose sur une méthode qui consiste à les comparer à d’autres biens présentant des caractéristiques similaires. Cette méthode comparative relève, ainsi qu’il est exposé à la page 106 de ce rapport, d’une pratique répandue pour apprécier le prix du marché et permet d’obtenir le prix du marché le plus fiable.
Les fourchettes de prix en cause expriment les montants du loyer du marché des terres arables qui, comme les terrains en cause, présentent une qualité moyenne et se situent dans le comté de Tartu (voir point 50 ci-dessus). Sauf indication contraire, il peut donc être considéré que ces fourchettes de prix fournissent les estimations les plus crédibles et les plus adéquates du loyer du marché des terrains en cause, ce que la Commission a reconnu au point 133 de la décision attaquée en relevant que
« le rapport Uus Maa fourni[ssai]t des estimations plausibles, bien que prudentes, du montant des loyers dans le comté de Tartu au cours de la période courant de 2000 à 2014 ».

55 Ainsi, eu égard au fait que les fourchettes de prix en cause, d’une part, tiennent compte de la qualité moyenne des terrains en cause et, d’autre part, sont déjà le résultat d’un équilibrage en ce qu’elles concernent des périodes de quatre ans et ne contiennent donc que des données agrégées, il n’est pas avéré que le recours à la moyenne arithmétique desdites fourchettes de prix soit de nature à fournir des résultats plus fiables et à aboutir à un prix qui soit le plus proche possible de celui du
marché. Au contraire, un tel recours est susceptible de donner lieu à des résultats imprécis et à une surestimation importante du prix du marché.

56 Pour les mêmes raisons, la large marge d’erreur du rapport Uus Maa, telle qu’elle est indiquée à la page 107 de ce rapport et retenue au point 38 de la décision attaquée, selon laquelle le loyer réel sur le marché peut varier de plus ou moins 20 % par rapport à celui indiqué dans ledit rapport, n’était pas non plus susceptible de justifier le recours à cette moyenne arithmétique, ce que la Commission n’a prétendu ni dans la décision attaquée ni en cours d’instance. En effet, il ne ressort d’aucun
élément de l’analyse relative à la conformité du montant du loyer au prix du marché, telle que figurant aux points 131 à 140 et 154 à 157 de la décision attaquée, que la Commission a tenu compte de cette large marge d’erreur nonobstant son ampleur et son éventuelle incidence sur son appréciation. Or, ainsi que la requérante le soutient, il n’est pas exclu qu’un loyer qui est, au maximum, inférieur de 20 % aux fourchettes de prix les plus basses du rapport Uus Maa, puisse également constituer un
prix du marché.

57 Le recours à la moyenne arithmétique ne permet pas non plus de remédier au problème lié au fait que les fourchettes de prix du rapport Uus Maa sont particulièrement larges, comme le fait valoir à juste titre la requérante. En effet, l’écart entre les montants minimaux et maximaux d’une fourchette de prix correspond, pour la période allant de 2000 à 2004 et pour celle allant de 2005 à 2009, à respectivement environ 67 % et 100 %. En ce qui concerne la période allant de 2010 à 2014, pour laquelle
le rapport Uus Maa contient des fourchettes de prix divergentes (voir point 50 ci-dessus), l’écart correspond, selon la fourchette de prix, respectivement, à environ 67 % et 140 %. Il en résulte que le recours à la moyenne arithmétique de ces fourchettes de prix donne nécessairement lieu à des imprécisions considérables, voire à une surestimation importante du prix du marché.

58 Certes, la Commission a précisé à l’audience, en se référant au point 156 de la décision attaquée, avoir utilisé les données de l’Office des statistiques estonien pour la période allant de 2010 à 2014 afin de tenir compte des fourchettes de prix larges retenues dans le rapport Uus Maa, ce dont il a été pris acte dans le procès-verbal de l’audience. Toutefois, outre le fait que cela semble uniquement être le cas pour la quantification de l’avantage audit point et non pour la constatation de
l’existence d’un avantage au point 136 de la décision attaquée, dans le cadre de laquelle elle a comparé les loyers payés par la requérante aux montants moyens compris dans ces fourchettes de prix, elle n’a donc pas tenté de remédier au problème des fourchettes de prix particulièrement larges pour les périodes allant de 2000 à 2004 et de 2005 à 2009.

59 Il s’ensuit que la Commission n’a pas démontré que les moyennes arithmétiques des fourchettes de prix retenues dans le rapport Uus Maa sur lesquelles elle s’est fondée étaient susceptibles de déterminer le prix le plus proche possible de celui du marché, ni tenu suffisamment compte de la marge d’erreur et des fourchettes de prix particulièrement larges de ce rapport. Au contraire, eu égard aux considérations qui précèdent, cette approche devait nécessairement conduire à une surestimation de ce
prix.

60 En second lieu, s’agissant du contexte existant au moment de la conclusion du contrat de bail, le rapport Uus Maa indique, à sa page 101, que, avant l’adhésion de la République d’Estonie à l’Union en 2004, « il y avait peu de baux portant sur les terres arables », « [l]a location de terres n’était pas très courante, des contrats de bail étaient rarement conclus », « [l]es terres étaient mises à disposition gratuitement afin d’éviter qu’elles ne partent en friche », et « [l]a valeur des terres
était basse et les loyers étaient également très bas et des contrats de bail n’étaient conclus qu’avec des propriétaires terriens relativement importants » (voir aussi point 31 de la décision attaquée). Ainsi que le soutient la requérante, la Commission n’a pas tenu compte de ces éléments dans le cadre de son examen.

61 Or, eu égard audit contexte existant au moment de la conclusion du contrat de bail, il n’est pas exclu que, en 2000, un loyer s’élevant à 0,20 euros/ha, tel que celui prévu par ledit contrat (voir point 4 ci-dessus), fût conforme aux conditions normales du marché. Il en est, a fortiori, ainsi dans la mesure où ce contrat poursuit, ainsi qu’il ressort de la page 106 du rapport Uus Maa et compte tenu des obligations supplémentaires vastes qu’il prévoit, notamment pour l’entretien des terres et
l’amélioration de la qualité des sols (voir point 4 ci-dessus), l’objectif de conserver une utilisation des terres conforme à leur destination et de préserver leur fertilité.

62 Il ressort également du rapport Uus Maa, ainsi qu’il est exposé au point 31 de la décision attaquée, que, dans la période allant de 2000 à 2004, pendant laquelle le contrat de bail a été conclu (voir point 3 ci-dessus), les contrats de location étaient formulés en termes généraux et ne comportaient pas de clause d’augmentation du loyer. Cela indique que, au moment de la conclusion dudit contrat, un opérateur privé, agissant dans des conditions de concurrence normales, dont le comportement figure
parmi les éléments que la Commission était tenue de prendre en compte pour établir l’existence d’une aide (voir, en ce sens, arrêt du 10 décembre 2020, Comune di Milano/Commission, C‑160/19 P, EU:C:2020:1012, point 109 et jurisprudence citée), n’aurait, dans une situation similaire, pas nécessairement exigé une disposition contractuelle prévoyant l’augmentation automatique ou unilatérale du loyer.

63 Ainsi, en ce qui concerne le contrat de bail, la Commission n’a pas apprécié, dans la décision attaquée, si ce contrat prévoyait une telle disposition. Elle n’a pas non plus apprécié les modifications ultérieures dudit contrat, mais s’est contentée de relever, au point 27 de la décision attaquée, que le « montant du loyer a été adapté trois fois ». Dès lors, elle n’a pas établi que l’État estonien avait, en vertu du même contrat dans sa version initiale et ses modifications ultérieures, la
possibilité d’augmenter, de manière automatique ou unilatérale, le loyer chaque année pour l’adapter à celui du marché.

64 Or, en l’absence d’une telle possibilité contractuelle, la Commission ne pouvait pas se limiter à comparer le loyer versé par la requérante dans le cadre de la location litigieuse avec le prix du marché pour l’ensemble de la période allant de 2000 à 2017, mais devait examiner si, au moment de la conclusion du contrat de bail, à savoir en 2000 (voir point 3 ci-dessus) ainsi qu’à chaque modification de ce contrat, soit en 2005, en 2007 et en 2009 (voir point 5 ci-dessus), le loyer était inférieur à
un prix que la requérante aurait obtenu dans les conditions normales du marché. Il en résulte que, également pour cette raison, la Commission ne pouvait pas se contenter de recourir aux moyennes arithmétiques des montants compris dans les fourchettes de prix retenues dans le rapport Uus Maa, lesquelles étaient exprimées par période de quatre ans et ne permettaient pas de déterminer le prix du marché dans une année donnée. En outre, si elle a correctement indiqué, aux points 135 et 136 de la
décision attaquée, que les augmentations du loyer avaient eu lieu, respectivement, les 14 janvier 2005, 21 mars 2007 et 12 mai 2009, elle a omis de tenir compte du fait que lesdites augmentations ont pris effet, de manière rétroactive, respectivement les 1er janvier 2005, 1er janvier 2007 et 1er janvier 2009 (voir point 5 ci-dessus).

65 En troisième lieu, s’agissant de la taille et de l’utilisation des terrains en cause, la Commission a relevé que le contrat de bail ne précisait pas que certaines parties des terres n’étaient pas aptes à l’agriculture (point 157 de la décision attaquée). Elle a estimé que les terres non arables pouvaient être utilisées autrement, qu’il était difficile de trouver des indices fiables du prix du marché de la location des terres boisées, des prairies et des autres terres et que, par conséquent, le
nombre d’hectares faisant l’objet des demandes d’aides agricoles auprès de l’Union, qui représentait entre 95 et 97 % des terrains en cause durant la période allant de 2004 à 2018, devait servir de base de calcul (point 158 de la décision attaquée).

66 À cet égard, le rapport Uus Maa contient, d’une part, à ses pages 9 et 10, un tableau résumant les modifications du contrat de bail, y compris concernant la superficie des terrains en cause, et, d’autre part, à ses pages 12 à 99, une partie relative à la description détaillée de chaque bien et de chaque parcelle qui font l’objet du contrat de bail, dont ressortent notamment leur superficie, leur répartition en fonction de leur qualité, leur usage, leurs caractéristiques, leur fertilité, les
restrictions et les possibilités d’accès. Ce tableau et cette description détaillée étaient destinés à permettre de déterminer le prix du loyer le plus proche de celui du marché en fonction de la taille et des spécificités des terrains en cause.

67 Ainsi, cela a permis à la requérante de calculer, dans le tableau produit en tant qu’annexe A.22.12 de la requête, la proportion exacte des terres arables, qui s’élevait, comme elle le soutient à juste titre, à une superficie de 2833,596 ha, ce qui correspond à environ 83 % des terrains en cause.

68 Pour la partie restante de ces terrains, cela permettait de calculer les proportions exactes des prairies naturelles, des forêts, des terrains résidentiels, des fermes, des terres immergées ou d’autres terres et de les évaluer à la lumière des informations du rapport Uus Maa portant sur l’évolution du marché locatif dans le comté de Tartu. Ainsi, la Commission aurait dû tenir compte du fait, exposé à la page 101 de ce rapport, qu’aucun loyer n’était perçu pour les « autres terres » composées des
tourbières, des polders et des zones inondables, dans les périodes allant de 2000 à 2004 et de 2005 à 2009 et que ce n’était que durant la période allant de 2010 à 2014 qu’un marché locatif était apparu pour ces autres terres, pour lesquelles le loyer était nettement inférieur à celui des terres arables en ce qu’il s’élevait à environ 10 euros/ha. Elle aurait également dû prendre en considération que, en 2013, ainsi qu’il est indiqué à la page 102 dudit rapport à l’appui des données de l’Office
des statistiques estonien, « en règle générale le prix des champs cultivables [était] supérieur à celui des prairies permanentes ». En outre, la description détaillée des terrains en cause dans le même rapport lui aurait permis de prendre en considération que, pour les petites parcelles, les loyers inférieurs étaient payés durant la période allant de 2005 à 2009 (page 101 du rapport en question).

69 En revanche, dans le cadre de la détermination de la taille et de l’utilisation des terrains en cause, la Commission n’a pas tenu compte des informations pertinentes issues du rapport Uus Maa, sur lequel elle a néanmoins fondé une partie importante de son appréciation relative à la conformité du loyer versé par la requérante dans le cadre de la location litigieuse avec le prix du marché pour l’ensemble de la période allant de 2000 à 2017 (voir points 131 à 136 et 154 à 156 de la décision
attaquée ; voir aussi point 44 ci-dessus) et auquel la requérante a explicitement fait référence au cours de la procédure administrative pour prouver que 16,7 % des terrains en cause ne pouvaient être utilisés à des fins de production agricole (point 84 de la décision attaquée). Eu égard à l’importance dudit rapport pour la détermination de la taille et des spécificités des terrains en cause, la Commission n’était pas dispensée d’apprécier la valeur probante desdites informations (voir, en ce
sens et par analogie, arrêt du 16 septembre 2004, Valmont/Commission, T‑274/01, EU:T:2004:266, point 53) et d’en tenir compte dans le cadre de son examen. Elle ne pouvait donc pas se contenter, comme elle semble l’estimer, d’avoir recours à un prix moyen pour toutes les parcelles et pour leurs particularités confondues. La Commission ne pouvait pas non plus se contenter d’avoir recours aux informations découlant des aides agricoles, dont elle n’a précisé ni les méthodes de calcul ni les
conditions d’octroi. Dès lors, en ce qu’elle a ignoré les spécificités des terrains en cause et le fait que les terres arables ne présentaient que 83 % de ces terrains, elle a nécessairement surestimé le prix du marché desdits terrains.

70 En quatrième lieu, la Commission s’est fondée sur les données de l’Office des statistiques estonien pour déterminer le prix du marché dans la période allant de 2015 à 2017 (voir points 137 à 139 de la décision attaquée), ainsi que, selon ses propres dires, pour la période allant de 2010 à 2014, afin de corriger la « fourchette large des montants compris dans le rapport Uus Maa » (voir point 58 ci-dessus).

71 À cet égard, il y a lieu de souligner que, comme l’admet la Commission elle-même, les données de l’Office des statistiques estonien ne sont pas le résultat d’une évaluation experte du prix de la location des terres, mais constituent des prix moyens des loyers des terres agricoles qui ne tiennent pas compte des caractéristiques particulières des terrains en cause (point 133 de la décision attaquée).

72 Or, en l’absence de fourchettes de prix, telles que celles retenues dans le rapport Uus Maa, il n’est, notamment, pas possible de connaître le prix du marché le plus bas et de vérifier si le loyer payé par la requérante dans le cadre de la location litigieuse s’en écarte. Il n’est pas non plus possible de comparer ce loyer avec le prix du marché dans le comté de Tartu dans les années 2010 à 2012 et 2017, dès lors que, pour ces années, il n’existe que des données pour l’Estonie entière (voir
point 39 de la décision attaquée). À cela s’ajoutent les imprécisions liées au fait que, pour la période allant de 2015 à 2017, la Commission a comparé, aux points 137 à 139 de la décision attaquée, ledit loyer uniquement avec les montants moyens du loyer des terres agricoles et des terres arables, sans tenir compte du fait que, comme il ressort de la description détaillée dudit rapport (voir aussi points 66 à 69 ci-dessus), une partie des terrains en cause était composée par des prairies, pour
lesquelles les données de l’Office des statistiques estonien affichent généralement des montants inférieurs (voir point 39 de la décision attaquée).

73 Il s’ensuit que la Commission n’a pas démontré que les données de l’Office des statistiques estonien sur lesquelles elle s’est fondée permettaient de calculer le prix le plus proche possible de la valeur du marché et d’établir que la requérante a payé, dans le cadre de la location litigieuse, un loyer inférieur à ce prix pendant les périodes allant de 2010 à 2014 et de 2015 à 2017.

74 Même si la Commission ne disposait pas, comme elle semble le soutenir, de meilleures informations, elle ne pouvait pas se limiter à se fonder sur les données de l’Office des statistiques estonien afin d’étayer ses conclusions.

75 Au titre de sa responsabilité centrale et exclusive d’assurer, sous le contrôle du juge de l’Union, le respect de l’article 107 TFUE et la mise en œuvre de l’article 108 TFUE, la Commission est obligée de vérifier, notamment, le cas échéant, avec le concours d’experts, si une mesure étatique comporte un avantage qui ne correspond pas aux conditions normales du marché (voir, en ce sens, arrêts du 16 septembre 2004, Valmont/Commission, T‑274/01, EU:T:2004:266, point 72 et jurisprudence citée ; du
9 décembre 2015, Grèce et Ellinikos Chrysos/Commission, T‑233/11 et T‑262/11, EU:T:2015:948, point 91, et du 16 mars 2016, Frucona Košice/Commission, T‑103/14, EU:T:2016:152, points 164 à 179). Or, en l’espèce, la Commission n’a ni eu recours à un concours d’experts, ni sollicité des éléments d’information supplémentaires de la part des autorités estoniennes pour les périodes pour lesquelles, selon elle, le rapport Uus Maa ne pouvait servir de base exclusive de comparaison.

76 En outre, il convient de rappeler que, eu égard à la contestation circonstanciée de la part de la requérante et desdites autorités, c’est sur la Commission que pèse la charge de prouver l’existence d’une « aide d’État », au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, et, partant, également la preuve que la condition d’octroi d’un avantage aux bénéficiaires est remplie (voir arrêt du 4 mars 2021, Commission/Fútbol Club Barcelona, C‑362/19 P, EU:C:2021:169, point 62 et jurisprudence citée). Même à
supposer que la Commission ait été confrontée à un État membre qui, manquant à son devoir de collaboration, a omis de lui fournir l’ensemble des renseignements qu’elle lui avait enjoint de communiquer, elle doit fonder ses décisions sur des éléments d’une certaine fiabilité et cohérence qui fournissent une base suffisante pour conclure qu’une entreprise a bénéficié d’un avantage constitutif d’une aide d’État et qui sont, partant, de nature à étayer les conclusions auxquelles elle parvient. En
effet, étant donné que la récupération de l’aide en cause auprès de son bénéficiaire vise à éliminer la distorsion de concurrence causée par un avantage concurrentiel déterminé et à rétablir ainsi la situation antérieure au versement de cette aide, la Commission ne saurait supposer qu’une entreprise a bénéficié d’un avantage constitutif d’une aide d’État en se basant simplement sur une présomption négative, fondée sur l’absence d’informations permettant d’aboutir à la conclusion contraire, en
l’absence d’autres éléments de nature à établir positivement l’existence d’un tel avantage (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Larko/Commission, C‑244/18 P, EU:C:2020:238, points 69 et 70 et jurisprudence citée). La Commission ne saurait donc justifier les imprécisions des données de l’Office des statistiques estonien au seul motif que la requérante et les autorités estoniennes n’ont pas démontré que les terrains en cause affichaient une valeur inférieure à celles des terres agricoles
moyennes en Estonie.

77 En cinquième lieu, il convient de rappeler que, au cours de la procédure administrative, les autorités estoniennes n’ont pas seulement produit le rapport Uus Maa et les données de l’Office des statistiques estonien, mais également, par lettre du 2 octobre 2014, l’analyse Pindi Kinnisvara qui n’est cependant pas mentionnée dans la décision attaquée.

78 Selon l’analyse Pindi Kinnisvara, qui date du 12 avril 2013 et ne consiste qu’en une page, le tarif de location dans le comté de Tartu à cette date était principalement compris, entre 30 et 50 euros/ha pour les contrats existants, entre 50 et 100 euros/ha pour les contrats nouveaux ou prolongés, et pouvait être supérieur à 100 euros/ha dans les zones bien situées sur le plan logistique et dans un environnement avec plus de concurrence. Ces chiffres concordent avec ceux issus du rapport Uus Maa
qui affiche pour la période allant de 2010 à 2014, selon les fourchettes de prix respectives indiquées, des montants entre 25 et 60 euros/ha et entre 30 et 50 euros/ha (voir point 50 ci-dessus), ainsi qu’avec les données de l’Office des statistiques estonien, selon lesquelles le montant moyen du loyer des terres agricoles dans ledit comté s’élevait à 50 euros/ha en 2013 (voir point 39 de la décision attaquée).

79 Or, comme la requérante le soutient à juste titre, la Commission a omis de tenir compte de l’analyse Pindi Kinnisvara dans la décision attaquée. Dans le mémoire en défense, la Commission a affirmé qu’il s’agissait d’une « expertise ex post, qui n’a[vait] pas été présentée à la Commission au cours de la procédure administrative ». Ce n’est qu’au stade de la duplique que la Commission a reconnu que ladite analyse lui avait été présentée par les autorités estoniennes au cours de la procédure
administrative, tout en prétendant qu’il n’était pas nécessaire de prendre position sur cette même analyse au motif que « les autorités estoniennes [l’avaient] considéré comme retiré[e] et remplacé par le rapport Uus Maa ». À l’audience, en réponse à une question orale posée par le Tribunal, la Commission a précisé, en renvoyant à la note en bas de page no 6 de la duplique, qu’elle avait, en raison de la lettre des autorités estoniennes du 7 octobre 2015 et des échanges ultérieurs avec ces
autorités, considéré cette analyse comme retirée. Elle n’aurait donc plus fait partie du dossier administratif au moment de l’adoption de la décision attaquée. Il a été pris acte de ces affirmations dans le procès-verbal de l’audience (voir aussi point 32 ci-dessus).

80 À cet égard, il convient de relever que, par lettre du 7 septembre 2015, portant la référence agri.ddg4.i.2(2015)4096993, la Commission a notamment demandé aux autorités estoniennes de produire une évaluation, par un expert indépendant, des prix de location pour des terrains comparables aux terrains en cause. Lesdites autorités ont répondu à cette demande par la lettre du 7 octobre 2015, dont le passage pertinent, tel qu’il est reproduit à la note en bas de page no 6 de la duplique, se lit comme
suit : « nous soulignons qu’afin de dissiper tout doute concernant l’expert, nous avons lancé un appel d’offres, portant le numéro de référence 167431, et, au terme de l’attribution et de l’exécution du contrat, nous serons probablement en mesure de vous fournir le rapport d’expert demandé. » Par lettre du 16 décembre 2015, la République d’Estonie a soumis à la Commission le rapport Uus Maa. Cette lettre est assortie du commentaire suivant, tel qu’il est reproduit à la note en bas de page no 6 de
la duplique : « Nous vous soumettons par la présente l’expertise (jointe en annexe) demandée au point 5 de votre lettre référencée agri.ddg4.i.2(2015)4096993. »

81 Il en découle que ni la lettre des autorités estoniennes du 7 octobre 2015, ni celle des mêmes autorités du 16 décembre 2015 ne font mention de l’analyse Pindi Kinnisvara, mais se limitent à répondre à la demande de la Commission du 7 septembre 2015, de fournir une évaluation réalisée par un expert indépendant des loyers des terrains comparables à ceux exploités par la requérante, demande à laquelle il a été satisfait par la présentation du rapport Uus Maa. Contrairement à ce que prétend la
Commission, il ne saurait être déduit desdites lettres que cette analyse a été retirée par ces autorités, mais seulement que ladite analyse a été complétée par ce rapport.

82 Par conséquent, même si la Commission a fondé son évaluation sur le rapport Uus Maa au motif que l’analyse Pindi Kinnisvara avait été mandatée par la requérante, il n’en demeure pas moins qu’elle disposait de cette analyse au moment de l’adoption de la décision attaquée. Dans ces circonstances, la Commission n’était pas dispensée d’apprécier la valeur probante de ladite analyse et, le cas échéant, d’en tenir compte dans le cadre de son examen (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du
16 septembre 2004, Valmont/Commission, T‑274/01, EU:T:2004:266, point 53).

83 En outre, il importe de rappeler que la Commission est tenue, dans l’intérêt d’une bonne administration des règles fondamentales du traité FUE relatives aux aides d’État, de conduire la procédure d’examen des mesures incriminées de manière diligente et impartiale afin qu’elle dispose, lors de l’adoption de la décision finale, des éléments les plus complets et les plus fiables possibles pour ce faire (arrêts du 2 septembre 2010, Commission/Scott, C‑290/07 P, EU:C:2010:480, point 90, et du 26 mars
2020, Larko/Commission, C‑244/18 P, EU:C:2020:238, point 67). Elle est notamment obligée d’examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents qui lui sont soumis. Eu égard à cette obligation de diligence, qui constitue, conformément à ladite jurisprudence, un préalable indispensable pour que le juge de l’Union puisse vérifier si les éléments de fait et de droit, dont dépend l’exercice du large pouvoir d’appréciation de la Commission, étaient réunis (voir, en ce sens, arrêts du
21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, EU:C:1991:438, point 14 ; du 20 septembre 2007, Fachvereinigung Mineralfaserindustrie/Commission, T‑375/03, non publié, EU:T:2007:293, point 90, et du 16 septembre 2013, ATC e.a./Commission, T‑333/10, EU:T:2013:451, point 84), la Commission ne pouvait pas ignorer l’analyse Pindi Kinnisvara, dont la pertinence a été rappelée au point 78 ci-dessus, dans le cadre de son examen.

84 Au vu de tout ce qui précède, il convient de conclure que, dans le cadre de la comparaison du montant du loyer au prix du marché et du calcul de l’avantage, la Commission n’a pas suffisamment tenu compte, notamment, des montants minimaux compris dans les fourchettes de prix retenues dans le rapport Uus Maa et de leur marge d’erreur, du contexte existant au moment de la conclusion du contrat de bail, dont l’absence initiale de clauses d’augmentation du prix du loyer, des informations de ce rapport
sur la taille et l’utilisation des terrains en cause ainsi que des imprécisions des données de l’Office des statistiques estonien. En outre, dans ce cadre, c’est à tort qu’elle a omis de prendre en considération l’analyse Pindi Kinnisvara, qui lui a été présentée par les autorités estoniennes au cours de la procédure administrative.

85 Partant, l’examen relatif à la conformité du montant du loyer à lui seul aux conditions du marché (points 132 à 140 de la décision attaquée) ainsi que la partie de l’appréciation relative à la quantification de l’avantage qui concerne ce montant et à la superficie des terrains en cause (points 154 à 159 de la décision attaquée) sont entachés d’une erreur manifeste d’appréciation et d’une violation de l’obligation de diligence qui incombait à la Commission.

Sur la prise en compte des obligations contractuelles supplémentaires

86 Il convient de rappeler que le contrat de bail prévoyait, outre le paiement du loyer, des obligations contractuelles supplémentaires qui concernaient, premièrement, des investissements annuels en systèmes de drainage, deuxièmement, les dépenses à engager pour l’entretien des terres et l’amélioration de la qualité des sols, y compris des dépenses telles que celles destinées à la protection des cultures, aux engrais minéraux et organiques, au chaulage et à l’entretien des bas-côtés et,
troisièmement, l’acquittement de l’ensemble des taxes (voir point 4 ci-dessus ; voir aussi point 141 de la décision attaquée).

87 Dans la décision attaquée, la Commission n’a accepté de prendre en compte, à titre de revenu de l’État estonien, que la moitié des investissements annuels dans les systèmes de drainage et les montants annuels de taxe foncière acquittés par la requérante (voir points 147 et 165 de la décision attaquée).

88 En substance, quant aux investissements annuels dans les systèmes de drainage, la Commission a estimé, d’une part, que l’État estonien était déchargé de certains coûts d’entretien qu’il aurait eu à supporter en tant que propriétaire des terres. D’autre part, eu égard à la longue durée du contrat de bail de 25 ans, la requérante, en tant qu’utilisatrice de terres, aurait également profité de ces investissements qui auraient contribué à une meilleure utilisation des terres et dont le montant moyen
de 91163 euros par an n’aurait été ni légalement requis ni imposé par l’État (points 143, 144 et 162 de la décision attaquée). En ce qui concerne les dépenses engagées pour l’entretien des terres et l’amélioration de la qualité des sols, s’élevant à un montant d’environ 255444 euros, la Commission a conclu que ces dépenses étaient dans l’intérêt de la requérante en tant que locataire (points 145 et 163 de la décision attaquée). S’agissant des taxes, elle a constaté que la requérante avait payé
les taxes au nom de l’État estonien en tant que propriétaire des terres, de sorte que ce dernier n’a pas eu à supporter de dépenses pour ce poste (points 146 et 164 de la décision attaquée).

89 Eu égard à ces considérations, la Commission a conclu, au point 147 de la décision attaquée, que, même si le montant du loyer était augmenté de la moitié des investissements dans les systèmes de drainage et des taxes acquittées par la requérante, le revenu locatif de l’État estonien restait inférieur au prix du marché tout au long de la période allant de 2000 à 2017.

90 En premier lieu, il convient de constater que la Commission n’a fondé son analyse concernant les obligations contractuelles supplémentaires, contrairement à celle relative à la conformité du montant du loyer au prix du marché (voir points 131 à 136 et 154 à 156 de la décision attaquée ; voir aussi points 43 à 46 ci-dessus), sur aucune expertise externe. En particulier, elle n’a fait référence ni à l’analyse Pindi Kinnisvara ni au rapport Uus Maa, qui lui ont été présentés par les autorités
estoniennes au cours de la procédure administrative (voir point 77 ci-dessus).

91 D’une part, en ce qui concerne l’analyse Pindi Kinnisvara, il y est indiqué qu’il n’est pas habituel, dans les contrats de location conclus aux fins de la mise à disposition de terrains agricoles, d’imposer au preneur des obligations de procéder à des investissements spécifiques, si bien qu’une telle obligation contractuelle exorbitante influe sur le taux du loyer net en proportion inverse du montant de l’obligation contractuelle par unité de surface de terrain louée.

92 D’autre part, en ce qui concerne le rapport Uus Maa, il est indiqué, à sa page 106, qu’il avait notamment pour objectif « d’établir si, dans des contrats de bail portant sur des terrains agricoles, il [était] usuel d’imposer aux preneurs des obligations relatives à la construction et à l’entretien de systèmes d’amélioration des terres ainsi que différentes mesures de fertilisation ». Ainsi, à la même page, ledit rapport contient une évaluation des obligations supplémentaires habituelles dans les
contrats de location et les compare avec celles du contrat de bail, évaluation dont les résultats sont présentés aux points 34 à 37 de la décision attaquée, sans que la Commission en ait tenu compte dans le cadre de son appréciation des obligations supplémentaires figurant dans ledit contrat, telle qu’elle est effectuée aux points 143 à 146 et 161 à 164 de la décision attaquée.

93 Il ressort de cette évaluation du rapport Uus Maa que, au début des années 2000, les contrats de location étaient plutôt rudimentaires, formulés en des termes généraux, et n’imposaient aucune obligation particulière aux locataires (voir aussi point 34 de la décision attaquée). Plus tard, essentiellement à partir de 2005, l’obligation d’acquitter la taxe foncière et les autres taxes liées au loyer, principalement l’obligation de payer l’impôt sur le revenu, aurait été incluse dans lesdits
contrats. L’amélioration des terres et l’entretien des accotements auraient été, dans ces contrats, une obligation du locataire (voir également point 35 de la décision attaquée). Selon ladite évaluation, la construction ou le remplacement des systèmes de drainage est un investissement dans le patrimoine du propriétaire qui représente une charge importante s’ajoutant au paiement du loyer. Avec le développement de la mise en location de terres agricoles, des clauses relatives à l’utilisation
raisonnée des terres et à un comportement agronomique prudent auraient été incluses dans les contrats en question à partir des années 2010 et 2011 (voir également point 36 de ladite décision).

94 En ce qui concerne le contrat de bail, le rapport Uus Maa relève qu’il n’était pas habituel d’inclure dans les contrats de location des obligations telles que celles imposées à la requérante, notamment sous une forme financièrement mesurable. La durée et le nombre d’hectares de la location litigieuse ne seraient pas non plus habituelles. Il en est déduit qu’il était particulièrement important de conserver une utilisation des terres conforme à leur destination ainsi que de préserver leur
fertilité, tout en notant que certaines clauses dudit contrat restreignent la liberté de la requérante de choisir les cultures qu’elle fait pousser (voir également point 37 de la décision attaquée).

95 Or, la Commission a omis de tenir compte des éléments d’information pertinents issus de l’analyse Pindi Kinnisvara et du rapport Uus Maa, et ce malgré le fait qu’elle en disposait au moment de l’adoption de la décision attaquée et qu’ils portaient sur la détermination de la valeur des obligations contractuelles supplémentaires. Dans la mesure où elle n’était, conformément à la jurisprudence citée aux points 82 et 83 ci-dessus, pas dispensée d’apprécier la valeur probante de ces informations et de
les examiner de manière diligente et impartiale, la requérante est fondée à soutenir que la Commission n’a tenu compte des avis d’experts que de manière sélective.

96 En particulier, aux fins du calcul de l’avantage, la Commission a omis d’examiner plus sérieusement, à la lumière des éléments d’information pertinents issus de l’analyse Pindi Kinnisvara et du rapport Uus Maa, la valeur des investissements effectués par la requérante et leur part dans le loyer total. Dans ce contexte, elle n’a notamment pas suffisamment tenu compte de l’investissement dans les systèmes de drainage, pour lesquels ledit rapport relève, d’une part, qu’il constitue un investissement
dans le patrimoine du propriétaire, et, d’autre part, qu’il présente une charge importante pour le locataire qui vient s’ajouter au paiement du loyer (voir point 93 ci-dessus).

97 En deuxième lieu, la conclusion, figurant aux points 144 et 162 de la décision attaquée, selon laquelle la moitié des investissements dans les systèmes de drainage devait être ajoutée dans le revenu de l’État, ne repose sur aucune opération chiffrée explicite et vérifiable, mais paraît être fondée sur une estimation vague de la part de la Commission. En effet, en ce que la Commission a considéré que ces investissements dépassaient les exigences contractuelles ou légales (points 143 et 144 de la
décision attaquée), elle a omis d’indiquer la partie qui était conforme à ces exigences et celle qui les dépassait. De même, elle ne pouvait tenir compte du fait que la requérante profitait également desdits investissements en raison de la longue durée du contrat de bail de 25 ans (point 144 de la décision attaquée) sans indiquer la période qui dépassait celle pour laquelle ces investissements pouvaient être acceptés.

98 Dès lors, l’estimation de la Commission n’était pas apte à fournir, avec une précision suffisante, la valeur des obligations contractuelles supplémentaires en cause (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 9 décembre 2015, Grèce et Ellinikos Chrysos/Commission, T‑233/11 et T‑262/11, EU:T:2015:948, point 131 et jurisprudence citée) et ne permettait pas, par conséquent, de déterminer le prix le plus proche possible de la valeur du marché, tel que cela est exigé par la jurisprudence citée au
point 48 ci-dessus.

99 En outre, le fait que la requérante ait effectué des investissements plus importants que ceux exigés par le contrat de bail ou par la loi ne démontre pas, en tant que tel, que ces investissements n’ont pas profité au patrimoine du propriétaire des terrains en cause. Au contraire, dans la mesure où ledit contrat prévoit expressément des montants minimaux pour les obligations contractuelles supplémentaires (voir point 4 ci-dessus), les investissements dépassant ces exigences minimales sont
également susceptibles d’être dans l’intérêt du bailleur, à savoir l’État estonien.

100 En troisième lieu, la Commission n’a pas examiné, dans le cadre de son analyse relative à la prise en compte des obligations supplémentaires (points 141 à 147 de la décision attaquée), si un opérateur privé, agissant dans des conditions de concurrence normale et se trouvant dans une situation la plus proche possible de celle de l’État estonien, aurait imposé les obligations contractuelles supplémentaires en cause. Or, conformément à la jurisprudence mentionnée au point 62 ci-dessus, la
Commission, sur laquelle pèse la charge de la preuve, était tenue d’effectuer un tel examen, ainsi que cela a été le cas dans des affaires similaires, à savoir celles ayant donné lieu aux arrêts du 28 février 2012, Land Burgenland/Commission (T‑268/08 et T‑281/08, EU:T:2012:90), du 28 février 2012, Grazer Wechselseitige Versicherung/Commission (T‑282/08, non publié, EU:T:2012:91, point 126), et du 22 mai 2019, Real Madrid Club de Fútbol/Commission (T‑791/16, EU:T:2019:346), dans lesquelles la
Commission a examiné si un opérateur privé avait adopté le comportement de l’État membre en question.

101 Étant donné qu’un opérateur privé est guidé par des perspectives de rentabilité à plus long terme (voir, en ce sens, arrêts du 12 décembre 2000, Alitalia/Commission, T‑296/97, EU:T:2000:289, point 84, et du 13 décembre 2018, Ryanair et Airport Marketing Services/Commission, T‑165/16, EU:T:2018:952, point 249 et jurisprudence citée), et qu’il ressort du rapport Uus Maa, d’une part, que, au moment de la conclusion du contrat de bail, les terres étaient généralement mises à disposition gratuitement
afin d’éviter qu’elles ne partent en friche (voir point 60 ci-dessus) et, d’autre part, que le contrat de bail tendait à conserver une utilisation des terres conforme à leur destination et à préserver leur fertilité (voir point 94 ci-dessus), il n’est pas exclu qu’un tel opérateur prévoie, ainsi que l’invoque la requérante, des obligations contractuelles supplémentaires pour ne pas devoir faire lui-même les investissements nécessaires, tels que ceux dans les systèmes de drainage, dans
l’entretien des terres et dans l’amélioration de la qualité des sols, qui permettent, par ailleurs, d’augmenter la valeur d’un terrain sur le long terme.

102 En l’absence d’examen de ces éléments et d’une comparaison de la rationalité économique du comportement de l’État estonien avec celle d’un opérateur privé dans des circonstances similaires, la Commission ne pouvait raisonnablement considérer, aux points 147 et 165 de la décision attaquée, que le montant du loyer à prendre en considération devait uniquement être augmenté de la moitié des investissements dans les systèmes de drainage et des taxes acquittées par la requérante.

103 Au vu de tout ce qui précède, il convient de conclure que c’est à tort que la Commission a omis de tenir compte de la totalité des investissements dans les systèmes de drainage en tant que partie intégrante du revenu locatif de l’État estonien.

104 Il s’ensuit que, s’agissant des moments pertinents, à savoir en 2000, année de la conclusion du contrat de bail, en 2005, en 2007 et en 2009, années au cours desquelles ledit contrat a amendé pour augmenter le loyer (voir point 64 ci-dessus), la Commission était tenue d’apprécier si ce revenu locatif était conforme au prix du marché, notamment eu égard aux informations pertinentes issues du rapport Uus Maa.

105 Partant, l’analyse relative à la prise en compte des obligations supplémentaires du contrat de bail dans le loyer (points 141 à 147 de la décision attaquée) ainsi que la partie de l’appréciation relative à la quantification de l’avantage qui concerne ces obligations (points 161 à 164 de la décision attaquée) sont entachées d’erreurs manifestes d’appréciation et d’une violation de l’obligation de diligence qui incombait à la Commission.

Conclusion

106 Il y a lieu de conclure que, d’une part, la Commission a violé son obligation de diligence et, d’autre part, tant l’examen relatif à la conformité du montant du loyer à lui seul aux conditions du marché (points 132 à 140 de la décision attaquée) que celui relatif à la prise en compte des obligations contractuelles supplémentaires dans le loyer (points 141 à 147 de la décision attaquée) sont entachés d’erreurs manifestes d’appréciation qui affectent aussi l’appréciation relative à la
quantification de l’avantage (points 154 à 165 de la décision attaquée).

107 Par conséquent, il y a lieu d’accueillir les troisième et quatrième moyens formellement soulevés et d’annuler la décision attaquée dans son ensemble, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur les autres moyens formellement soulevés par la requérante.

Sur les dépens

108 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, y compris ceux afférents à la procédure en référé, conformément aux conclusions de la requérante.

  Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

  1) La décision C(2020) 252 final de la Commission, du 24 janvier 2020, concernant l’aide d’État SA.39182 (2017/C) (ex 2017/NN) (ex 2014/CP) – Octroi d’une aide présumée illégale à AS Tartu Agro, est annulée.

  2) La Commission européenne supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par Tartu Agro, y compris ceux afférents à la procédure en référé.

De Baere

Kreuschitz

  Kecsmár

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 juillet 2022.

Signatures

Table des matières

  Antécédents du litige
  Sur la requérante et sur la location des terres agricoles
  Sur la procédure administrative devant la Commission
  Conclusions des parties
  En droit
  Sur la conformité du montant du loyer au prix du marché
  Sur la prise en compte des obligations contractuelles supplémentaires
  Conclusion
  Sur les dépens

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( *1 ) Langue de procédure : l’estonien.


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : T-150/20
Date de la décision : 13/07/2022
Type de recours : Recours en annulation - fondé

Analyses

Aides d’État – Agriculture – Contrat de bail portant sur des terres agricoles en Estonie – Décision déclarant l’aide incompatible avec le marché intérieur et ordonnant sa récupération – Avantage – Détermination du prix du marché – Principe de l’opérateur privé – Appréciations économiques complexes – Contrôle juridictionnel – Prise en compte de tous les éléments pertinents – Obligation de diligence.

Aides accordées par les États

Concurrence


Parties
Demandeurs : Tartu Agro AS
Défendeurs : Commission européenne.

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Kreuschitz

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:T:2022:443

Source

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