ARRÊT DU TRIBUNAL (neuvième chambre)
22 septembre 2021 ( *1 )
« Marque de l’Union européenne – Procédure de révocation de décisions ou de suppression d’inscriptions – Suppression d’une inscription dans le registre entachée d’une erreur manifeste imputable à l’EUIPO – Marque incluse dans une procédure d’insolvabilité – Enregistrement du transfert de la marque – Opposabilité aux tiers d’une procédure de faillite ou de procédures analogues – Compétence de l’EUIPO – Obligation de diligence – Articles 20, 24, 27 et 103 du règlement (UE) 2017/1001 – Articles 3, 7
et 19 du règlement (UE) 2015/848 »
Dans l’affaire T‑169/20,
Marina Yachting Brand Management Co. Ltd, établie à Dublin (Irlande), représentée par Mes A. von Mühlendahl, C. Eckhartt et P. Böhner, avocats,
partie requérante,
contre
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme M. Capostagno, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant
Industries Sportswear Co. Srl, établie à Venise (Italie), représentée par Me P. Cervato, avocat,
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 10 février 2020 (affaires jointes R 252/2019‑2 et R 253/2019‑2), relative à des procédures de suppression d’inscriptions entre Industries Sportswear et Marina Yachting Brand Management,
LE TRIBUNAL (neuvième chambre),
composé de Mme M. J. Costeira, présidente, M. D. Gratsias et Mme M. Kancheva (rapporteure), juges,
greffier : Mme A. Juhasz-Toth, administratrice,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 23 mars 2020,
vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 13 août 2020,
vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 5 août 2020,
à la suite de l’audience du 5 mai 2021,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 10 août 2012, Moncler Srl a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1)].
2 La marque dont l’enregistrement a été demandé était le signe verbal MARINA YACHTING.
3 Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relevaient des classes 18, 25 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.
4 Après plusieurs transferts de la demande d’enregistrement, la marque demandée a été enregistrée le 28 septembre 2014 sous le numéro 11111317 au nom de l’intervenante, Industries Sportswear Co. Srl.
5 Le 13 octobre 2017, l’intervenante a été déclarée en faillite par le jugement no 142/2017 du Tribunale di Venezia (tribunal de Venise, Italie), prononcé dans le cadre de la procédure d’insolvabilité no 138/2017.
6 Le 18 octobre 2017, le transfert de la marque en cause, de l’intervenante à Spring Holdings Sarl, a été inscrit au registre de l’EUIPO à la demande d’un représentant commun à ces deux parties (ci-après le « représentant commun »).
7 Le 25 octobre 2017, le liquidateur désigné de l’intervenante (ci-après le « liquidateur ») a informé l’EUIPO que l’intervenante avait été déclarée en faillite, produisant une copie du jugement du Tribunale di Venezia (tribunal de Venise) du 13 octobre 2017, et que l’insolvabilité était effective à compter de cette dernière date, du fait de l’inscription de ce jugement au registre italien des sociétés (registro delle imprese). Le liquidateur a également demandé l’inscription au registre de l’EUIPO
de la procédure d’insolvabilité relative à l’intervenante, conformément à l’article 24 du règlement 2017/1001, ainsi que la suppression de l’inscription du transfert de la marque en cause à Spring Holdings, conformément à l’article 103 du même règlement.
8 Le 9 avril 2018, l’EUIPO a informé le liquidateur et le représentant commun de sa décision de supprimer l’inscription dudit transfert, car celle-ci était erronée, et de publier la correction le jour même.
9 Le 16 avril 2018, la requérante, Marina Yachting Brand Management Co. Ltd, a introduit une demande d’inscription du transfert de la marque en cause à son bénéfice. Elle avançait que ladite marque, initialement cédée par l’intervenante à Spring Holdings, lui avait par la suite été cédée par celle-ci. Elle a produit, s’agissant du premier transfert, une copie certifiée, datée du 21 mars 2018, d’un contrat de cession portant la date du 26 juin 2014 et, s’agissant du second transfert, une copie
certifiée, datée du 1er mars 2018, d’un contrat de cession portant la date du 15 décembre 2017.
10 Le jour même, à savoir le 16 avril 2018, les transferts de la propriété de la marque en cause à Spring Holdings (inscription T 014185659), puis à la requérante (inscription T 014188703), ont été inscrits au registre de l’EUIPO.
11 Le 23 juin 2018, le liquidateur a réitéré sa demande d’inscription au registre de la procédure d’insolvabilité relative à l’intervenante et a demandé la suppression, conformément à l’article 103 du règlement 2017/1001, des inscriptions T 014185659 et T 014188703 sur le fondement de l’article 42 du Regio decreto n. 267 (décret royal no 267/1942), du 16 mars 1942 (GU no 81, du 6 avril 1942) (ci-après la « loi italienne sur la faillite »), qui prive une société en faillite du droit d’administrer ses
actifs et d’en jouir à compter de la date de déclaration de son insolvabilité, à savoir, s’agissant de l’intervenante, le 13 octobre 2017. Le liquidateur a également précisé qu’il avait déjà présenté une telle demande de suppression les 5 et 14 juin 2018, mais qu’il n’avait reçu aucun accusé de réception de la part de l’EUIPO.
12 Le 11 juillet 2018, concernant la demande d’inscription de la procédure d’insolvabilité relative à l’intervenante, présentée le 25 octobre 2017, l’EUIPO a informé le liquidateur de l’acceptation de cette demande tout en soulignant que ladite demande n’avait « jamais été enregistrée dans [sa] base de données en raison de problèmes techniques survenus à cette date ».
13 Le 12 juillet 2018, l’EUIPO a informé la requérante des demandes de suppression T 014552205 (suppression de l’inscription au registre T 014185659) et T 014480019 (suppression de l’inscription au registre T 014188703) et l’a invitée à présenter ses observations. Le 8 août 2018, la requérante a présenté des observations.
14 Le 21 août 2018, l’EUIPO a transmis une copie de ces observations au liquidateur, lui a demandé de fournir la « preuve officielle des droits de propriété d[e l’intervenante] sur la marque [en cause] au moment de la procédure d’insolvabilité » et l’a invité à présenter ses observations. Les 20 et 21 septembre 2018, le liquidateur a déféré à cette invitation et produit des documents visant à répondre à la demande de preuve de l’EUIPO.
15 Le 25 septembre 2018, l’EUIPO a informé la requérante que, compte tenu des documents déposés par le liquidateur, il considérait que l’intervenante était titulaire de la marque en cause au moment de la procédure d’insolvabilité et que les inscriptions T 014185659 et T 014188703 devaient dès lors être supprimées. La requérante a été invitée à présenter ses observations.
16 Le 20 novembre 2018, la requérante a déposé ses observations, dans lesquelles elle a notamment fait référence à un « contrat de cession » conclu le 26 juin 2014 entre l’intervenante et Spring Holdings ainsi qu’à un « accord de licence de droits de propriété intellectuelle » (Intellectual Property Licence Agreement) conclu le 30 décembre 2014 entre Spring Holdings, en tant que nouvelle titulaire de la marque en cause depuis le 26 juin 2014, et l’intervenante, en tant que preneuse de licence
(ci-après l’« accord de licence »). Le 17 janvier 2019, le liquidateur a présenté ses observations en réponse.
17 Le 30 janvier 2019, conformément à l’article 162 du règlement 2017/1001, l’instance chargée de la tenue du registre de l’EUIPO, établie à l’article 159, sous c), de ce règlement, a adopté deux décisions portant suppression rétroactive des inscriptions au registre T 014185659 et T 014188703, effectuées le 16 avril 2018, dès lors qu’elles étaient postérieures au 13 octobre 2017. Elle a considéré que l’EUIPO avait commis une erreur manifeste en ne tenant pas compte d’une « étape procédurale
essentielle » signalée le 25 octobre 2017, à savoir la demande d’inscription d’une procédure d’insolvabilité concernant l’intervenante, fondée sur une décision finale du Tribunale di Venezia (tribunal de Venise) prenant effet le 13 octobre 2017. En outre, elle a ordonné que la demande d’inscription de cette procédure d’insolvabilité sur la base de cette décision du tribunal de Venise fût enregistrée avec effet rétroactif au 13 octobre 2017 (dossier T 014459807), conformément à l’article 24,
paragraphe 3, du règlement 2017/1001.
18 Le 31 janvier 2019, au titre des articles 66 à 71 du règlement 2017/1001, la requérante a formé deux recours contre les décisions de l’instance chargée de la tenue du registre de l’EUIPO portant suppression des inscriptions T 014185659 et T 014188703.
19 Le 9 avril 2019, le liquidateur a déposé une demande d’inscription d’un jugement rendu le 13 mars 2019 par le Tribunale di Venezia (tribunal de Venise), chargé de la procédure d’insolvabilité relative à l’intervenante, autorisant la saisie de la marque en cause à titre de mesure conservatoire en application du code de procédure civile italien. Le liquidateur a exposé que, le 22 février 2019, il avait présenté devant cette juridiction une demande dans laquelle il l’avait informée que, au cours de
la procédure devant l’EUIPO, il avait pris connaissance du « contrat de cession » et de l’accord de licence de 2014 invoqués par la requérante (voir point 16 ci-dessus) et avait réclamé la saisie de la marque en cause en raison de la nullité et du caractère frauduleux de ces actes. Le 5 juillet 2019, après avoir entendu toutes les parties concernées, le Tribunale di Venezia (tribunal de Venise) a confirmé ledit jugement du 13 mars 2019.
20 Par décision du 10 février 2020 (ci-après la « décision attaquée »), la chambre de recours a rejeté les recours visés au point 18 ci-dessus, après les avoir joints.
21 Dans un premier temps, aux points 43 à 49 de la décision attaquée, la chambre de recours a, tout d’abord, constaté que, en l’espèce, le 13 octobre 2017, l’intervenante, dont le siège social était sis en Italie, avait été déclarée insolvable par le Tribunale di Venezia (tribunal de Venise). Elle en a déduit que la procédure d’insolvabilité relative à l’intervenante était soumise au droit italien, à savoir la loi italienne sur la faillite, comme l’affirmait le liquidateur. Selon cette loi, le
jugement déclaratif de faillite était opposable au débiteur (la société insolvable, en l’espèce l’intervenante) à compter de son dépôt au greffe du tribunal italien et aux tiers (donc aux cessionnaires de la marque en cause, à savoir Spring Holdings et la requérante) dès son inscription au registre italien des sociétés, en application de l’article 16 de la loi italienne sur la faillite, renvoyant à l’article 133 du code de procédure civile italien.
22 Ensuite, la chambre de recours a constaté que, en l’espèce, le jugement déclaratif de la faillite de l’intervenante avait été rendu, déposé et inscrit au registre italien des sociétés à la même date, soit le 13 octobre 2017, ainsi qu’il résultait de ce jugement et de l’extrait du rapport dudit registre. Elle en a déduit que, à compter de ce jour, l’intervenante avait été privée du droit d’administrer les actifs en sa possession et d’en jouir, conformément à l’article 42 de la loi italienne sur la
faillite, et que tous les actes accomplis par celle-ci après ledit jugement étaient inopposables à ses créanciers en vertu de l’article 44 de la même loi. Elle a également relevé que, à cette même date, l’intervenante était inscrite en tant que titulaire de la marque en cause dans le registre de l’EUIPO et, par ailleurs, que cette marque figurait dans la liste d’inventaire de la faillite, qui reproduisait les données du registre de l’EUIPO.
23 En outre, la chambre de recours a constaté que, le 25 octobre 2017, le liquidateur avait demandé l’inscription de la procédure d’insolvabilité relative à l’intervenante dans le registre de l’EUIPO, que l’EUIPO n’avait pas tenu compte de cette demande, qui était toujours pendante le 16 avril 2018, lorsque la demande d’enregistrement du transfert de la marque en cause à la requérante avait été présentée, et que l’EUIPO avait néanmoins enregistré le changement de titulaire de cette marque en
effectuant, le même jour, deux enregistrements successifs de transferts de ladite marque (en faveur de Spring Holdings, puis en faveur de la requérante). La chambre de recours a également observé que, quelques jours auparavant, à savoir le 9 avril 2018, l’EUIPO avait décidé de supprimer un précédent enregistrement du premier de ces transferts, en faveur de Spring Holdings, après avoir été informé par le liquidateur, d’une part, de la faillite de l’intervenante et, d’autre part, du fait que le
représentant commun n’avait pas pu représenter celle-ci en tant que société cédante.
24 Dans un second temps, aux points 50 à 58 de la décision attaquée, la chambre de recours a, tout d’abord, répondu à l’argument de la requérante selon lequel l’EUIPO n’aurait pas dû supprimer ces enregistrements dès lors que, indépendamment de l’insolvabilité de l’intervenante, la marque en cause avait déjà été transférée à Spring Holdings dans le courant du mois de juin 2014. La chambre de recours a constaté, à cet égard, que, en vertu de l’article 45 de la loi italienne sur la faillite, les
formalités requises pour rendre un acte opposable aux tiers étaient inopérantes en ce qui concerne la procédure de faillite si elles avaient été exécutées après la déclaration d’insolvabilité. Or, conformément à l’article 27, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, les prétendus transferts de la marque en cause n’avaient pas été inscrits au registre avant la déclaration d’insolvabilité de l’intervenante et n’étaient donc pas opposables aux tiers, à savoir, en l’espèce, le liquidateur. Il aurait
donc été sans pertinence de déterminer si la date du 26 juin 2014 indiquée sur le premier contrat de cession de la marque en cause était certaine, au sens de la législation italienne, ce dont les parties discutaient en détail, dès lors que la cession n’avait pas été inscrite au registre de l’EUIPO. En tout état de cause, comme l’admettait la requérante elle-même, la chambre de recours a considéré qu’elle n’était pas compétente pour statuer sur cette question, qui relèverait de la compétence des
juridictions nationales. Selon la chambre de recours, s’il était certes vrai que l’inscription d’une cession au registre de l’EUIPO n’était pas une condition de la validité de cette cession entre parties, ainsi que le soutenait la requérante, il s’agissait néanmoins d’une condition pour que le transfert de la marque fût opposable aux tiers, à savoir, en l’espèce, le liquidateur.
25 Ensuite, la chambre de recours a constaté que le prétendu acte de « prorogation » de l’accord de licence (qui, selon la requérante, avait confirmé le droit de propriété de Spring Holdings sur la marque en cause) n’avait pas été signé par le liquidateur, de sorte que la requérante ne pouvait valablement prétendre que le liquidateur eût reconnu les droits de Spring Holdings sur ladite marque. De plus, elle a relevé que le liquidateur avait contesté le contrat de cession entre l’intervenante et
Spring Holdings du 26 juin 2014 devant le Tribunale di Venezia (tribunal de Venise).
26 En outre, la chambre de recours a constaté que, étant donné que la marque en cause était mentionnée dans la liste d’inventaire annexée au jugement déclaratif de la faillite de l’intervenante, liste que l’EUIPO n’était pas habilité à contester, dès lors qu’il ne pouvait se substituer aux juridictions nationales, l’EUIPO était tenu de tenir compte de ce fait et d’inscrire au registre la procédure d’insolvabilité relative à cette marque, conformément à la demande du liquidateur. Selon la chambre de
recours, la demande d’enregistrement des transferts successifs de la marque en cause présentée par la requérante à la suite de la faillite de l’intervenante était tardive et n’apportait pas la preuve que le jugement déclaratif de faillite fût erroné. Il aurait appartenu à la requérante de présenter à l’EUIPO la preuve que ledit jugement n’avait pas d’effet sur ladite marque sur la base d’une décision de justice nationale, ce qu’elle n’avait pas fait.
27 Enfin, la chambre de recours a considéré que l’EUIPO avait commis une erreur manifeste en inscrivant les transferts successifs de la marque en cause au registre le 16 avril 2018, dans la mesure où l’intervenante, cédante dans le cadre du premier de ces transferts, était une entreprise déclarée en faillite depuis le 13 octobre 2017, ce dont l’EUIPO avait été informé. Elle a précisé que l’erreur manifeste avait donc été commise lors des inscriptions intervenues le 16 avril 2018, et non uniquement
en 2017 comme le soutenait la requérante. Elle a ajouté que la suppression des inscriptions au registre avait été décidée dans un délai d’un an à compter de la date à laquelle ces inscriptions avaient été effectuées, à savoir le 30 janvier 2019, de sorte que les conditions nécessaires à l’application de l’article 103 du règlement 2017/1001 étaient remplies. Par conséquent, elle a considéré que les décisions supprimant les inscriptions au registre T 014185659 et T 014188703 étaient correctes.
Conclusions des parties
28 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens.
29 L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
30 L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– confirmer la décision attaquée, avec pour conséquence que l’EUIPO doit, d’une part, supprimer les inscriptions au registre des transferts de la marque en cause effectuées le 16 avril 2018 et réenregistrer l’intervenante comme étant la titulaire exclusive de cette marque et, d’autre part, inscrire la procédure d’insolvabilité relative à l’intervenante au registre à compter du 13 octobre 2017 ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
Sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de l’intervenante
31 Par son deuxième chef de conclusions, l’intervenante demande au Tribunal de confirmer la décision attaquée, avec pour conséquence que l’EUIPO doit, d’une part, supprimer les inscriptions au registre des transferts de la marque en cause effectuées le 16 avril 2018 et réenregistrer l’intervenante comme étant la titulaire exclusive de cette marque et, d’autre part, inscrire la procédure d’insolvabilité relative à l’intervenante au registre à compter du 13 octobre 2017.
32 S’agissant de la demande faite au Tribunal de confirmer la décision attaquée, il y a lieu de la comprendre comme visant, en substance, au rejet du recours [voir, en ce sens, arrêt du 5 février 2016, Kicktipp/OHMI – Italiana Calzature (kicktipp), T‑135/14, EU:T:2016:69, point 19 (non publié) et jurisprudence citée]. Elle se confond donc, en réalité, avec le premier chef de conclusions de l’intervenante, visant au rejet du recours.
33 S’agissant des conséquences que l’intervenante demande au Tribunal de tirer du rejet du recours, qui constituent, en substance, des demandes tendant à ce que le Tribunal ordonne à l’EUIPO d’effectuer diverses opérations dans son registre, il suffit de rappeler qu’il n’appartient pas au Tribunal d’adresser des injonctions à l’EUIPO, auquel il incombe de tirer les conséquences du dispositif et des motifs des arrêts du juge de l’Union européenne [voir arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI –
Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, EU:T:2007:219, point 20 et jurisprudence citée].
34 Le deuxième chef de conclusions de l’intervenante doit donc être rejeté, en tant qu’il vise à ce que le Tribunal adresse des injonctions à l’EUIPO, pour cause d’incompétence.
Sur le fond
35 À l’appui de son recours, la requérante invoque, en substance, un moyen unique, tiré de la violation de l’article 103 du règlement 2017/1001, lu en combinaison avec les articles 20, 24 et 27 du même règlement. Elle fait valoir, en substance, que la chambre de recours a commis une erreur lorsqu’elle a considéré que les conditions de révocation d’une décision ou de suppression d’une inscription entachées d’« erreur manifeste » au sens de l’article 103 dudit règlement étaient remplies, alors que les
inscriptions des transferts de la marque en cause effectuées le 16 avril 2018 auraient satisfait à toutes les conditions légales.
36 Ce moyen unique s’articule formellement en quatre branches étroitement liées, par lesquelles la requérante allègue, premièrement, que lesdites inscriptions ont été effectuées conformément au droit applicable et ne sont pas entachées d’« erreur manifeste » au sens de l’article 103 du règlement 2017/1001, deuxièmement, que cette disposition n’est pas applicable en l’espèce, en l’absence d’« erreur manifeste », troisièmement, que l’article 27 du même règlement n’est pas applicable et, quatrièmement,
que, quand bien même cette dernière disposition serait applicable, l’intervenante et le liquidateur avaient connaissance des transferts de la marque en cause.
37 À cet égard, le Tribunal considère que les griefs relatifs à l’absence d’erreur manifeste de la part de l’EUIPO au sens de l’article 103 du règlement 2017/1001, figurant dans les deux premières branches du moyen unique de la requérante, constituent en réalité une cinquième branche autonome, qui doit logiquement être examinée à la suite des quatre autres branches, relatives aux articles 20, 24 et 27 du même règlement.
38 Le Tribunal considère également qu’il convient de requalifier les cinq branches du moyen unique de la requérante, d’après leur contenu respectif, comme étant, en substance, tirées, premièrement, de la méconnaissance par l’EUIPO de ses compétences en vertu des articles 20 et 24 du règlement 2017/1001, deuxièmement, de la prise en compte erronée par l’EUIPO et la chambre de recours du jugement déclaratif de faillite du 13 octobre 2017, troisièmement, de l’inapplicabilité en l’espèce de
l’article 27, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, quatrièmement, de l’applicabilité en l’espèce de l’exception de connaissance prévue à l’article 27 du règlement 2017/1001 et de la prétendue connaissance, par l’intervenante et le liquidateur, du contrat de cession de 2014 et, cinquièmement, de l’application erronée de l’article 103 du règlement 2017/1001 par la chambre de recours aux décisions de l’EUIPO de supprimer les inscriptions du 16 avril 2018.
39 L’EUIPO et l’intervenante concluent au rejet du moyen unique de la requérante et contestent ses arguments.
Observations liminaires
40 À titre liminaire, il convient de relever, à l’instar de l’intervenante, que la famille A, comportant notamment B et son fils C, qui dirige la requérante, dirigeait auparavant l’intervenante, alors que le liquidateur représente la masse des créanciers de la faillite de l’intervenante.
41 En l’espèce, il incombe au Tribunal de juger si c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que les décisions de l’instance chargée de la tenue du registre de l’EUIPO portant suppression des inscriptions du 16 avril 2018, relatives aux transferts successifs de la marque en cause, étaient régulières au regard de l’article 103 du règlement 2017/1001. À cet égard, il y a lieu de tenir compte des dispositions pertinentes de ce règlement, notamment les articles 103, 20, 24 et 27, ainsi que
des articles 3, 7 et 19 du règlement (UE) 2015/848 du Parlement européen et du Conseil, du 20 mai 2015, relatif aux procédures d’insolvabilité (JO 2015, L 141, p. 19, rectificatif JO 2016, L 349, p. 9).
42 L’article 103 du règlement 2017/1001, intitulé « Révocation de décisions », mais concernant également les suppressions d’inscriptions, dispose à ses paragraphes 1 et 2 :
« 1. Lorsque l’[EUIPO] effectue une inscription dans le registre ou prend une décision entachées d’une erreur manifeste qui lui est imputable, il se charge de supprimer une telle inscription ou de révoquer cette décision. Dans le cas où il n’y a qu’une seule partie à la procédure dont les droits sont lésés par l’inscription ou l’acte, la suppression de l’inscription ou la révocation de la décision est ordonnée même si, pour la partie, l’erreur n’était pas manifeste.
2. La suppression de l’inscription ou la révocation de la décision, visées au paragraphe 1, sont ordonnées, d’office ou à la demande de l’une des parties à la procédure, par l’instance ayant procédé à l’inscription ou ayant adopté la décision. La suppression de l’inscription au registre ou la révocation de la décision est effectuée dans un délai d’un an à compter de la date d’inscription au registre ou de l’adoption de la décision, après avoir entendu les parties à la procédure ainsi que les
éventuels titulaires de droits sur la marque de l’Union européenne en question qui sont inscrits au registre. L’[EUIPO] conserve une trace écrite de toute suppression ou révocation. »
43 L’article 20 du règlement 2017/1001, intitulé « Transfert », prévoit à ses paragraphes 1, 3 à 5 et 11 :
« 1. La marque de l’Union européenne peut, indépendamment du transfert de l’entreprise, être transférée pour tout ou pour partie des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée.
[…]
3. […] la cession de la marque de l’Union européenne doit être faite par écrit et requiert la signature des parties au contrat, sauf si elle résulte d’un jugement ; à défaut, la cession est nulle.
4. Sur requête d’une des parties, le transfert est inscrit au registre et publié.
5. La demande d’enregistrement d’un transfert comporte des informations [spécifiées].
[…]
11. Tant que le transfert n’a pas été inscrit au registre, l’ayant cause ne peut pas se prévaloir des droits découlant de l’enregistrement de la marque de l’Union européenne. »
44 L’article 13 du règlement d’exécution (UE) 2018/626 de la Commission, du 5 mars 2018, établissant les modalités d’application de certaines dispositions du règlement 2017/1001, et abrogeant le règlement d’exécution (UE) 2017/1431 (JO 2018, L 104 p. 37), précise les informations que doit contenir une demande d’enregistrement d’un transfert de marque présentée en application de l’article 20, paragraphe 5, du règlement 2017/1001.
45 L’article 24 du règlement 2017/1001, intitulé « Procédure d’insolvabilité », établit à son paragraphe 1, premier alinéa, et à son paragraphe 3 :
« 1. La seule procédure d’insolvabilité dans laquelle une marque de l’Union européenne peut être incluse est celle qui a été ouverte dans l’État membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur.
[…]
3. Lorsqu’une marque de l’Union européenne est incluse dans une procédure d’insolvabilité, une inscription en ce sens est portée au registre et publiée au Bulletin des marques de l’Union européenne visé à l’article 116, sur demande de l’autorité nationale compétente. »
46 L’article 27 du règlement 2017/1001, intitulé « Opposabilité aux tiers », énonce à ses paragraphes 1 et 4 :
« 1. Les actes juridiques concernant la marque de l’Union européenne visés aux articles 20, 22 et 25 ne sont opposables aux tiers dans tous les États membres qu’après leur inscription au registre. Toutefois, avant son inscription, un tel acte est opposable aux tiers qui ont acquis des droits sur la marque après la date de cet acte mais qui avaient connaissance de celui-ci lors de l’acquisition de ces droits.
[…]
4. Jusqu’à l’entrée en vigueur de dispositions communes aux États membres en matière de faillite, l’opposabilité aux tiers d’une procédure de faillite ou de procédures analogues est régie par le droit de l’État membre où une telle procédure a été ouverte en premier lieu au sens de la loi nationale ou des conventions applicables en la matière. »
47 L’article 3 du règlement 2015/848, intitulé « Compétence internationale », dispose à son paragraphe 1, premier et deuxième alinéas :
« Les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel est situé le centre des intérêts principaux du débiteur sont compétentes pour ouvrir la procédure d’insolvabilité […] Le centre des intérêts principaux correspond au lieu où le débiteur gère habituellement ses intérêts et qui est vérifiable par des tiers.
Pour les sociétés et les personnes morales, le centre des intérêts principaux est présumé, jusqu’à preuve du contraire, être le lieu du siège statutaire […] »
48 L’article 7 du règlement 2015/848, intitulé « Loi applicable », prévoit à ses paragraphes 1 et 2 :
« 1. Sauf disposition contraire du présent règlement, la loi applicable à la procédure d’insolvabilité et à ses effets est celle de l’État membre sur le territoire duquel cette procédure est ouverte (ci-après dénommé « État d’ouverture »).
2. La loi de l’État d’ouverture détermine les conditions liées à l’ouverture, au déroulement et à la clôture de la procédure d’insolvabilité. Elle détermine notamment les éléments suivants :
[…]
b) les biens qui font partie de la masse de l’insolvabilité et le sort des biens acquis par le débiteur ou qui lui reviennent après l’ouverture de la procédure d’insolvabilité ;
[…]
m) les règles relatives à la nullité, à l’annulation ou à l’inopposabilité des actes juridiques préjudiciables à la masse des créanciers. »
49 L’article 19 du règlement 2015/848, intitulé « Principe », établit, à son paragraphe 1, premier alinéa :
« Toute décision ouvrant une procédure d’insolvabilité rendue par une juridiction d’un État membre compétente en vertu de l’article 3 est reconnue dans tous les autres États membres dès qu’elle produit ses effets dans l’État d’ouverture. »
50 Il convient ainsi de relever que, conformément au règlement 2017/1001, la loi italienne sur la faillite est applicable à certains aspects de la présente affaire.
51 Tout d’abord, la loi italienne sur la faillite, en tant que loi de l’État membre sur le territoire duquel était situé le centre des intérêts principaux de l’intervenante au moment de la déclaration de faillite, régit la procédure d’insolvabilité dans laquelle la marque en cause est incluse, en vertu de l’article 24, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, de même d’ailleurs qu’en vertu de l’article 7 du règlement 2015/848. En outre, en vertu de l’article 27, paragraphe 4, du règlement 2017/1001,
elle régit également les questions liées à l’opposabilité aux tiers de ladite procédure d’insolvabilité.
52 Par ailleurs, conformément à l’article 7, paragraphe 2, du règlement 2015/848, la loi italienne sur la faillite détermine notamment, sous b), « les biens qui font partie de la masse de l’insolvabilité et le sort des biens acquis par le débiteur ou qui lui reviennent après l’ouverture de la procédure d’insolvabilité » et, sous m), « les règles relatives à la nullité, à l’annulation ou à l’inopposabilité des actes juridiques préjudiciables à la masse des créanciers ». De même, en vertu de
l’article 19 du même règlement, le jugement déclaratif de faillite rendu par le Tribunale di Venezia (tribunal de Venise) produit ses effets de plein droit dans l’ensemble de l’Union à l’égard de l’ensemble des tiers et donc, en l’espèce, à l’égard de la requérante et de l’EUIPO.
53 La loi italienne sur la faillite prévoit, en substance, à ses articles 16 et 17, que le jugement déclaratif de faillite est opposable au débiteur (la personne physique ou morale déclarée en faillite) à compter de son dépôt au greffe de la juridiction et aux tiers dès son inscription au registre italien des sociétés (en l’espèce le 13 octobre 2017) ; à son article 42, relatif à la dépossession du débiteur, que la gestion des actifs du débiteur est confiée à la personne chargée de la liquidation de
la faillite ; à son article 44, que tous les actes accomplis par le débiteur après la déclaration de faillite ou n’ayant pas acquis date certaine avant la déclaration de faillite sont inopérants en droit et inopposables aux tiers, dont la masse des créanciers, et, à son article 45, que les formalités requises pour rendre un acte opposable aux tiers, dont la masse des créanciers, sont inopérantes si elles ont été exécutées après la déclaration de faillite.
54 C’est à l’aune de ces dispositions qu’il y a lieu d’examiner les cinq branches du moyen unique de la requérante.
Sur la première branche du moyen unique, tirée de la méconnaissance par l’EUIPO de ses compétences en vertu des articles 20 et 24 du règlement 2017/1001
55 Par la première branche du moyen unique, la requérante allègue, en substance, que l’EUIPO doit seulement vérifier les conditions formelles d’une demande d’enregistrement du transfert d’une marque, en vertu notamment de l’article 20 du règlement 2017/1001, et qu’il ne lui appartient pas d’examiner les questions de fond, lesquelles ne relèveraient pas de ses compétences.
56 En l’espèce, la requérante avance que l’EUIPO a outrepassé ses compétences et excédé ses pouvoirs, d’une part, en examinant des questions relatives au droit de propriété en vertu du droit italien et, d’autre part, en ne se limitant pas à l’examen formel des documents fournis à l’appui des demandes d’inscription des transferts de la marque en cause, à savoir des accords écrits revêtus de la signature des parties concernées. L’EUIPO aurait donc dû uniquement examiner si la preuve suffisante desdits
transferts avait été produite et si les documents présentés contenaient les éléments indiqués dans les demandes d’enregistrement de ces transferts. Il résulterait également de la jurisprudence du Tribunal que l’EUIPO n’est pas habilité à apprécier la validité et les effets juridiques d’une cession de marque au regard du droit national en vigueur. Or, la chambre de recours aurait outrepassé ses compétences et excédé ses pouvoirs en appréciant, sur le fond, si la liste d’inventaire annexée au
jugement déclaratif de la faillite de l’intervenante prouvait la propriété de la marque en cause.
57 Selon la requérante, il est incontesté que la demande d’enregistrement des transferts de ladite marque présentée le 16 avril 2018 satisfaisait à toutes les conditions de fond et de forme, les contrats de cession ayant été conclus par écrit et signés par les deux parties concernées par chacun de ces transferts. Tout en admettant que, à cette date, à laquelle les inscriptions desdits transferts ont été effectuées, la titulaire enregistrée de cette marque était l’intervenante, elle soutient
cependant que le registre ne reflétait pas la situation juridique, puisque l’intervenante avait cédé la marque en cause en 2014 à Spring Holdings, laquelle avait à son tour cédé cette marque à la requérante dans le courant du mois de décembre 2017. Elle en conclut que lesdits transferts ont été enregistrés le 16 avril 2018 conformément aux conditions juridiques applicables et que l’EUIPO ne pouvait pas examiner si les accords conclus en 2014 (transfert en faveur de Spring Holdings) ou en 2017
(transfert en sa faveur) étaient valables au regard du droit italien ou du droit irlandais.
58 À titre liminaire, d’une part, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, applicable à l’EUIPO, l’institution ou l’agence compétente est tenue d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments de fait et de droit pertinents du cas d’espèce [voir, en ce sens, arrêts du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, EU:C:1991:438, point 14 ; du 15 juillet 2011, Zino Davidoff/OHMI – Kleinakis kai SIA (GOOD LIFE), T‑108/08, EU:T:2011:391, point 19, et du
25 septembre 2018, Grendene/EUIPO – Hipanema (HIPANEMA), T‑435/17, non publié, EU:T:2018:596, point 79 et jurisprudence citée]. En particulier, l’EUIPO, qui tient un registre public, doit, à ce titre, prendre diligemment en compte les faits susceptibles d’avoir des implications juridiques sur les mentions qu’il inscrit dans ledit registre.
59 D’autre part, il y a lieu de relever que, selon la jurisprudence citée par la requérante, l’article 19 du règlement 2017/1001 n’exige pas, en principe, que l’EUIPO examine et applique les lois des États membres concernant une marque de l’Union européenne comme objet de propriété. En particulier, il ne ressort pas de cette disposition que l’EUIPO ou les juridictions de l’Union aient à examiner ou à statuer sur des questions contractuelles ou juridiques issues du droit national [voir, en ce sens,
arrêt du 9 septembre 2011, Chalk/OHMI – Reformed Spirits Company Holdings (CRAIC), T‑83/09, non publié, EU:T:2011:450, point 27].
60 Selon cette même jurisprudence, un éventuel conflit entre deux cessions de marque soulève des questions relatives au droit des contrats et au droit de la propriété qui dépassent le cadre de l’article 20 du règlement 2017/1001 et du règlement d’exécution 2018/626 et dont le traitement ne relève pas des compétences de l’EUIPO. Il en résulte qu’il n’appartient pas à l’EUIPO d’examiner la validité et les effets juridiques d’un transfert de marque de l’Union européenne selon le droit national
applicable (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2011, CRAIC, T‑83/09, non publié, EU:T:2011:450, points 30 et 31).
61 Ainsi, comme l’EUIPO, au demeurant, le relève dans son mémoire en réponse, il ressort de cette jurisprudence que, lors du traitement d’une demande d’inscription d’un transfert de marque de l’Union européenne, la compétence de l’EUIPO se limite, en principe, à l’examen des conditions formelles visées à l’article 20 du règlement 2017/1001 et à l’article 13 du règlement d’exécution 2018/626 et n’implique pas une appréciation des questions de fond qui peuvent se poser dans le cadre du droit national
applicable.
62 Cependant, conformément à une jurisprudence constante, il convient, pour interpréter une disposition du droit de l’Union, de tenir compte non seulement de ses termes, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie (voir arrêt du 4 février 2016, Hassan, C‑163/15, EU:C:2016:71, point 19 et jurisprudence citée).
63 En particulier, l’article 20 du règlement 2017/1001 doit être interprété à la lumière des dispositions relevant de la même section du règlement 2017/1001, intitulée « La marque de l’Union européenne comme objet de propriété » (chapitre II, section 4, articles 19 à 29), dont l’objet est d’assurer qu’une telle marque puisse « être transférée, donnée en gage à un tiers ou faire l’objet de licences » (voir considérant 26 dudit règlement).
64 Ainsi, dans le cadre de l’application de l’article 20 du règlement 2017/1001, l’EUIPO doit tenir compte, notamment, de l’article 27, paragraphe 1, de ce règlement, en vertu duquel les transferts de marque de l’Union européenne ne sont opposables aux tiers, en principe, qu’après leur inscription au registre des marques de l’Union européenne, ce dont il résulte d’ailleurs qu’une telle inscription n’a pas d’effet rétroactif.
65 En outre, le cas échéant, lorsque, comme en l’espèce, une procédure d’insolvabilité a été ouverte à l’encontre du titulaire d’une marque, l’EUIPO doit tenir compte des dispositions de l’article 27, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, dont il résulte que l’opposabilité aux tiers de telles procédures est régie par le droit national.
66 Or, en l’espèce, la procédure relative à l’insolvabilité de l’intervenante est régie par le droit italien, ce que la requérante ne conteste pas. En particulier, il ressort des renseignements fournis par le liquidateur à l’EUIPO que, tout d’abord, les articles 16 et 17 de la loi italienne sur la faillite prévoient, en substance, que le jugement déclaratif de faillite est opposable, d’une part, au débiteur, à savoir la personne physique ou morale en faillite, à compter du dépôt de ce jugement au
greffe de la juridiction et, d’autre part, aux tiers dès son inscription au registre italien des sociétés. Ensuite, il ressort de l’article 42 de cette loi que la gestion de la société en faillite est confiée au liquidateur. Enfin, il ressort de ses articles 44 et 45 que, d’une part, tous les actes accomplis par le débiteur après la déclaration de faillite, ou n’ayant pas date certaine avant la déclaration de faillite, sont inopérants en droit et inopposables aux tiers, dont la masse des
créanciers, et que, d’autre part, les formalités requises pour rendre un acte opposable à ces mêmes tiers sont inopérantes si elles ont été exécutées après la déclaration de faillite.
67 Ainsi, en l’espèce, conformément à l’article 27, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, les implications de la procédure de faillite devaient être déduites du droit italien, notamment en tenant dûment compte de ses conséquences sur les actes accomplis par le débiteur après cette déclaration de faillite ou n’ayant pas acquis date certaine avant ladite déclaration.
68 Par conséquent, à la lumière de ce qui précède, il y a lieu de considérer que, si l’EUIPO doit certes se limiter à l’examen des conditions formelles de validité d’une demande d’enregistrement d’un transfert de marque au titre de l’article 20, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 et de l’article 13 du règlement d’exécution 2018/626, cet examen n’en implique pas moins de prendre diligemment en compte les faits susceptibles d’avoir des implications juridiques pour la demande d’enregistrement d’un
tel transfert, y compris l’existence d’une procédure de faillite.
69 L’obligation de diligence qui s’impose à l’EUIPO en vertu du principe rappelé au point 58 ci-dessus est d’autant plus impérative lorsque, comme en l’espèce, avant de recevoir une demande d’enregistrement du transfert d’une marque de l’Union européenne, l’EUIPO a été informé, par une demande d’inscription antérieure présentée conformément à l’article 24, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, que cette marque était incluse dans une procédure d’insolvabilité, c’est-à-dire une procédure tendant à la
réalisation des actifs de la titulaire de cette marque au profit de ses créanciers. En pareil cas, il appartient à l’EUIPO de traiter ladite demande d’enregistrement de transfert avec une diligence particulière, afin de prendre en considération l’objectif de « garantir l’efficacité » de la procédure d’insolvabilité visé au considérant 36 du règlement 2015/848, en particulier si l’existence, la validité ou la date certaine dudit transfert est contestée par le liquidateur.
70 La requérante fait toutefois valoir, en substance, qu’une demande d’enregistrement d’un transfert de marque de l’Union européenne est totalement indépendante de toute demande antérieure concernant l’inscription d’une procédure d’insolvabilité affectant la même marque. Elle soutient que l’EUIPO est uniquement compétent pour vérifier les conditions formelles du transfert et qu’il devrait s’abstenir de toute appréciation des implications éventuelles de la première demande sur les demandes
ultérieures.
71 Or, au regard des considérations énoncées aux points 58 à 69 ci-dessus, une telle argumentation doit être écartée. En effet, une fois qu’il a été informé de l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité incluant une marque de l’Union européenne par une juridiction nationale, l’EUIPO ne saurait méconnaître ce fait lorsque, à une date ultérieure, une demande d’enregistrement d’un transfert concernant la même marque est présentée, et ce d’autant moins lorsque, de surcroît, la personne chargée de la
liquidation des actifs faisant partie de la masse de l’insolvabilité conteste expressément l’existence ou la validité du document produit à l’appui de ladite demande et qu’une action en justice a été introduite à cet égard.
72 En outre, en l’espèce, ainsi qu’il a été rappelé au point 66 ci-dessus, en vertu du droit italien applicable, la procédure d’insolvabilité en cause avait pour effet de rendre inopérantes les formalités requises pour assurer l’opposabilité aux tiers d’un acte du débiteur dès lors qu’elles avaient été exécutées après la déclaration de faillite. Par conséquent, cette déclaration ayant produit ses effets antérieurement à la demande d’enregistrement des transferts en cause et l’EUIPO en ayant été
informé avant ladite demande, celui-ci était tenu de suspendre l’inscription de ces transferts jusqu’à ce que la juridiction nationale examine le fond de l’affaire.
73 En revanche, suivre l’argumentation de la requérante non seulement entraînerait, en pratique, un contournement des dispositions nationales en matière d’insolvabilité et de leur objectif, à savoir la protection des créanciers, mais aussi priverait l’article 24, paragraphe 3, du règlement 2017/1001 d’une grande partie de son effet utile.
74 C’est donc à bon droit que la chambre de recours a notamment constaté, au point 56 de la décision attaquée, que, étant donné que la marque en cause était mentionnée dans la liste d’inventaire annexée au jugement déclaratif de la faillite de l’intervenante, l’EUIPO était tenu de prendre ce fait en compte et d’inscrire au registre la procédure d’insolvabilité relative à cette marque, conformément à la demande du liquidateur. Ce faisant, la chambre de recours a simplement rappelé l’obligation de
diligence qui incombait à l’EUIPO, telle qu’explicitée aux points 58 à 69 ci-dessus. Par ailleurs, c’est également à bon droit que, au même point de sa décision, la chambre de recours a rappelé que l’EUIPO n’était pas habilité à contester ladite liste d’inventaire, dès lors qu’il ne pouvait se substituer aux juridictions nationales.
75 La première branche du moyen unique doit donc être rejetée.
Sur la deuxième branche du moyen unique, tirée de la prise en compte erronée par l’EUIPO et la chambre de recours du jugement déclaratif de faillite du 13 octobre 2017
76 Par la deuxième branche du moyen unique, la requérante estime, en substance, que la chambre de recours a commis une erreur lorsqu’elle a considéré qu’une étape essentielle de la procédure faisait défaut au motif que, lorsqu’il avait effectué l’enregistrement des transferts de la marque en cause le 16 avril 2018, l’EUIPO n’avait pas pris en compte le fait qu’il avait lui-même ignoré la demande antérieure d’inscription au registre de la procédure d’insolvabilité relative à l’intervenante, présentée
par le liquidateur le 25 octobre 2017 en vertu de l’article 24 du règlement 2017/1001. La requérante considère que, à la date de la demande d’enregistrement desdits transferts, l’intervenante ne pouvait plus être considérée comme titulaire de cette marque, dès lors que celle-ci avait précédemment été transférée par l’intervenante à Spring Holdings par un contrat de cession du 26 juin 2014, cette dernière société l’ayant par la suite transférée à la requérante. Selon cette dernière, l’inscription
de la procédure d’insolvabilité en vertu de l’article 24 du règlement 2017/1001 n’aurait donc pu avoir aucune incidence, car, en octobre 2017 et en avril 2018, l’intervenante ne pouvait plus être considérée comme la titulaire de ladite marque.
77 La requérante estime que, même si l’EUIPO avait inscrit au registre la procédure d’insolvabilité, les transferts de la marque en cause, d’abord au profit de Spring Holdings puis au profit de la requérante, auraient néanmoins dû être enregistrés, dès lors, d’une part, que toutes les conditions de l’enregistrement d’un transfert énoncées à l’article 20 du règlement 2017/1001 (accord écrit, signatures, demande d’enregistrement) étaient remplies et que la preuve exigée avait été produite et, d’autre
part, que, à la date d’une telle inscription au registre, l’intervenante n’était plus titulaire de cette marque, qu’elle avait cédée à Spring Holdings. Elle avance que l’inscription de la procédure d’insolvabilité au registre n’aurait pas pu avoir pour effet de réintégrer dans les actifs de l’intervenante, société en faillite, des éléments – tels que ladite marque – qui, à la date de l’ouverture de la procédure d’insolvabilité, ne faisaient plus partie de ses actifs. Elle ajoute que
l’insolvabilité en tant que telle et l’inscription de la procédure d’insolvabilité au registre produisent des effets pour l’avenir, ainsi qu’il résulterait de l’article 27, paragraphe 4, du règlement 2017/1001.
78 D’emblée, il y a lieu de relever qu’il est constant entre les parties que l’intervenante a été déclarée insolvable par un jugement déclaratif de faillite prononcé le 13 octobre 2017 par le Tribunale di Venezia (tribunal de Venise) en application de la loi italienne sur la faillite et rendu opposable aux tiers le même jour conformément à ladite loi, laquelle, en vertu de l’article 27, paragraphe 4, du règlement 2017/1001, régit l’opposabilité aux tiers de cette procédure. Partant, à compter de
cette date, l’intervenante n’était plus habilitée à transférer la marque en cause conformément à l’article 20 du même règlement et l’EUIPO ne pouvait pas effectuer l’enregistrement d’un transfert demandé après cette date.
79 La chambre de recours, aux points 46 et 47 de la décision attaquée, a simplement rappelé les conséquences d’un tel jugement déclaratif de faillite pour la partie inscrite comme titulaire d’une marque de l’Union européenne à la date de ce jugement, c’est-à-dire l’interdiction d’administrer ses actifs (biens et titres de propriété inscrits au registre) et la nullité ou l’inopposabilité de tout acte ultérieur à l’égard des créanciers (y compris les formalités requises pour assurer l’opposabilité
d’un acte aux tiers, qui sont inopérantes si elles sont exécutées après la déclaration d’insolvabilité). Elle a fait observer que, en l’espèce, à la date du prononcé dudit jugement, le 13 octobre 2017, l’intervenante était inscrite en tant que titulaire de la marque en cause dans le registre de l’EUIPO et que cette marque figurait sur la liste d’inventaire de la faillite.
80 À cet égard, force est de constater que, contrairement à ce qu’allègue la requérante, la chambre de recours n’a pas apprécié sur le fond si la liste d’inventaire prouvait la propriété de la marque en cause. En effet, la chambre de recours a simplement pris en considération un document officiel approuvé par le Tribunale di Venezia (tribunal de Venise), chargé de la procédure d’insolvabilité, et a constaté, au point 56 de la décision attaquée, qu’aucune preuve n’avait été apportée pour démontrer
que ce document avait été contesté devant un tribunal. Par ailleurs, aux points 48 et 49 de cette décision, la chambre de recours a relevé que l’EUIPO n’avait pas traité la demande du liquidateur, reçue le 25 octobre 2017, concernant l’inscription au registre de la procédure d’insolvabilité relative à l’intervenante et que cette demande était toujours pendante le 16 avril 2018, date du dépôt de la demande d’enregistrement des transferts de ladite marque de l’intervenante à Spring Holdings et de
cette dernière à la requérante.
81 C’est donc à juste titre que, aux points 50 à 54 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que l’argument de la requérante selon lequel la cession de la marque en cause par l’intervenante à Spring Holdings avait eu lieu le 26 juin 2014 (c’est-à-dire avant la déclaration de faillite de l’intervenante) ne permettait pas de considérer que les inscriptions de transfert effectuées le 16 avril 2018 étaient régulières et, en substance, que cet argument était inopérant.
82 À cet égard, la chambre de recours s’est fondée, à bon droit, sur l’article 27, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, concernant l’opposabilité aux tiers des actes juridiques tels que les transferts de marque, laquelle n’est acquise qu’après leur inscription au registre. Elle a estimé que la cession alléguée de la marque en cause par l’intervenante, quels que fussent sa validité et le caractère certain de sa date, n’avait, en tout état de cause, pas été inscrite au registre de l’EUIPO avant le
jugement déclaratif de faillite du 13 octobre 2017 et que, de ce fait, elle ne pouvait pas avoir d’effet à l’égard du liquidateur, lequel devait être qualifié de « tiers », puisqu’il n’était pas partie à cette prétendue cession. Par ailleurs, eu égard à l’article 27, paragraphe 4, du même règlement, c’est à bon droit qu’elle s’est fondée sur l’article 45 de la loi italienne sur la faillite, qui dispose que toutes les formalités requises pour assurer l’opposabilité d’un acte aux tiers sont
inopérantes si elles sont exécutées après la déclaration d’insolvabilité, comme c’était le cas en l’espèce.
83 Il ressort donc de la décision attaquée que la chambre de recours n’a pas statué sur les questions juridiques de fond relevant de la compétence des juridictions nationales et du droit national, telles que la propriété de la marque en cause au regard du droit italien ou la validité sur le fond des transferts de cette marque enregistrés le 16 avril 2018. Bien au contraire, aux points 53 et 56 de la décision attaquée, elle s’est expressément déclarée dépourvue de toute compétence à cet égard et a
dûment reconnu la compétence des juridictions nationales en la matière.
84 Enfin, dans la mesure où la requérante se prévaut du point 30 de l’arrêt du 9 septembre 2011, CRAIC (T‑83/09, non publié, EU:T:2011:450), il convient de rappeler que, à ce point dudit arrêt, le Tribunal a jugé que la première demande d’enregistrement de transfert de la marque concernée dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt satisfaisait aux exigences de la règle 31 du règlement (CE) no 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94
du Conseil sur la marque communautaire (JO 1995, L 303, p. 1) (devenue article 13 du règlement d’exécution 2018/626), car elle était accompagnée d’un document de cession de la marque correspondant aux exigences de cette règle, de sorte que ladite demande ainsi que l’enregistrement du cessionnaire comme nouveau titulaire de la marque en question étaient valables. En revanche, le Tribunal a jugé qu’une seconde demande d’enregistrement de transfert de la même marque n’était pas conforme à ces
exigences, étant donné que le cédant ne correspondait pas au titulaire inscrit, qui était alors déjà le cessionnaire dans le cadre du transfert antérieur de ladite marque. À cet égard, le Tribunal a relevé qu’un éventuel conflit entre les deux cessions dont cette marque avait fait l’objet soulevait des questions relatives au droit des contrats et au droit de la propriété, qui dépassaient le cadre de ladite règle et dont l’examen ne relevait pas des compétences de l’EUIPO.
85 Cependant, ces considérations n’impliquent pas que, dans la présente espèce, la chambre de recours ait apprécié la validité des transferts de la marque en cause sur le fond, comme la requérante semble le laisser entendre. À cet égard, il suffit de relever que, dans le litige sur lequel le Tribunal a statué dans l’arrêt du 9 septembre 2011, CRAIC (T‑83/09, non publié, EU:T:2011:450), le requérant ne s’était pas prévalu, au soutien de sa demande d’enregistrement de transfert de marque, d’une
décision d’une juridiction nationale relative à une procédure d’insolvabilité analogue au jugement rendu en l’espèce par le Tribunale di Venezia (tribunal de Venise). L’EUIPO n’était donc pas tenu de faire application du droit national et la référence à l’arrêt cité n’est donc pas pertinente. En tout état de cause, dans la décision attaquée, la chambre de recours s’est bornée à prendre acte dudit jugement italien et, comme il a déjà été relevé au point 83 ci-dessus, elle n’a pas statué elle-même
sur la propriété de la marque en cause au regard du droit italien ni apprécié la validité sur le fond des transferts de celle-ci.
86 La deuxième branche du moyen unique doit donc être rejetée.
Sur la troisième branche du moyen unique, tirée de l’inapplicabilité en l’espèce de l’article 27, paragraphe 1, du règlement 2017/1001
87 Par la troisième branche du moyen unique, la requérante allègue, en substance, que l’article 27, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 ne peut s’appliquer au cas d’espèce, étant donné qu’il concernerait uniquement des situations dans lesquelles plus d’une partie revendiquent un droit sur une marque de l’Union européenne, c’est-à-dire se prévalent d’actes juridiques ayant pour objet ou pour effet la création ou le transfert de droits sur une telle marque. En revanche, il ne serait pas applicable à
une situation, telle que celle de la présente affaire, où une entité n’est plus la titulaire de la marque concernée à la date d’ouverture d’une procédure d’insolvabilité la concernant, car elle a cédé cette marque à une autre entité des années auparavant.
88 À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 27, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les actes juridiques concernant la marque de l’Union européenne visés aux articles 20, 22 et 25 de ce même règlement ne sont opposables aux tiers dans tous les États membres qu’après leur inscription au registre.
89 Force est de constater que, contrairement à ce que soutient la requérante, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que cette disposition était applicable en l’espèce.
90 En effet, aux points 47 à 54 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que la propriété de la marque en cause à la date du 13 octobre 2017, date à laquelle la titulaire enregistrée de cette marque, à savoir l’intervenante, avait été déclarée en faillite, faisait l’objet d’un litige entre la requérante et le liquidateur, représentant la masse des créanciers de l’intervenante, et que la prétendue cession de cette propriété, qui, selon la requérante, avait eu lieu en 2014, n’était, en
tout état de cause, pas opposable aux tiers, dont le liquidateur, puisqu’elle n’avait pas été inscrite au registre de l’EUIPO avant le 13 octobre 2017.
91 Il s’ensuit que l’article 27, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 est applicable en l’espèce, en particulier au prétendu contrat de cession de la marque en cause de 2014, qui n’a pas été rendu opposable aux tiers conformément à cette disposition avant le 13 octobre 2017, date de prise d’effet et d’opposabilité aux tiers du jugement déclaratif de la faillite de l’intervenante conformément à la loi italienne sur la faillite, applicable en vertu de l’article 27, paragraphe 4, du même règlement et
de l’article 19, paragraphe 1, du règlement 2015/848.
92 La troisième branche du moyen unique doit donc être rejetée.
Sur la quatrième branche du moyen unique, tirée de l’applicabilité en l’espèce de l’exception de connaissance prévue à l’article 27, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et de la prétendue connaissance, par l’intervenante et le liquidateur, du contrat de cession de 2014
93 Par la quatrième branche du moyen unique, la requérante estime, en substance, que la chambre de recours a commis une erreur en ne prenant pas en considération le fait que l’intervenante ainsi que le liquidateur avaient connaissance de la cession de la marque en cause intervenue en 2014, ce qui serait établi par l’existence de l’accord de licence portant sur cette marque, conclu le 30 décembre 2014 entre l’intervenante et Spring Holdings, et la prorogation de cet accord de licence par le
liquidateur par un courrier électronique du 7 décembre 2017. Cela ressortirait également d’une « lettre d’accord » du 24 novembre 2017, par laquelle Spring Holdings a proposé de prolonger la durée de l’accord de licence jusqu’au 30 novembre 2022.
94 En tout état de cause, selon la requérante, le liquidateur ne pouvait pas être considéré comme un tiers (même agissant dans l’intérêt des créanciers de l’intervenante), puisqu’il était entré dans une relation contractuelle avec elle, en tant que partie à l’accord de licence. La requérante en conclut que, même si l’article 27, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 était applicable en l’espèce, l’intervenante et le liquidateur lui-même ne pourraient pas invoquer cette disposition, car ils avaient
effectivement connaissance de la cession antérieure de la marque en cause à Spring Holdings, intervenue en 2014.
95 Il convient de relever que ces arguments se fondent sur l’exception de connaissance prévue à l’article 27, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement 2017/1001, selon laquelle, même avant son inscription au registre de l’EUIPO, un acte juridique concernant une marque de l’Union européenne est opposable aux tiers qui ont acquis des droits sur la marque après la date de cet acte s’ils avaient connaissance de celui-ci lors de l’acquisition de ces droits.
96 Force est cependant de constater que, en l’espèce, l’EUIPO n’était pas en mesure de faire application de cette exception de connaissance.
97 En effet, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 74 ci-dessus, c’est à bon droit que, au point 56 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré que, étant donné que la marque en cause était mentionnée dans la liste d’inventaire annexée au jugement déclaratif de faillite du 13 octobre 2017, il n’appartenait pas à l’EUIPO de contester cette liste, dès lors qu’il ne pouvait se substituer aux juridictions nationales et qu’il était tenu d’inscrire au registre la procédure d’insolvabilité
relative à ladite marque. C’est encore à bon droit que, au même point de ladite décision, la chambre de recours a considéré que la demande d’enregistrement des transferts de cette marque présentée par la requérante à la suite de la déclaration de la faillite de l’intervenante était tardive et que la requérante n’apportait pas la preuve que le jugement déclaratif de faillite était erroné, sur la base d’une décision de justice nationale.
98 Par conséquent, il n’appartenait pas à l’EUIPO de vérifier si, à la date du jugement déclaratif de la faillite de l’intervenante, l’exception de connaissance pouvait être opposée à celle-ci et au liquidateur. Il s’ensuit que la présente branche est inopérante.
99 En tout état de cause, s’agissant de la prétendue connaissance par l’intervenante et le liquidateur, à la date du 13 octobre 2017, de la cession de la marque en cause par l’intervenante à Spring Holdings, prétendument survenue en 2014, il y a lieu d’observer ce qui suit.
100 D’une part, en ce qui concerne l’intervenante, il convient de rappeler que la Cour, quant à la finalité de la règle édictée à l’article 27, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, a déclaré que la non-opposabilité aux tiers des actes juridiques visés aux articles 20, 22 et 25 de ce règlement qui n’ont pas été inscrits au registre vise à protéger celui qui a ou est susceptible d’avoir des droits sur une marque de l’Union européenne en tant qu’objet de propriété (voir, en ce sens,
arrêt du 4 février 2016, Hassan, C‑163/15, EU:C:2016:71, point 25).
101 Il y a donc lieu de considérer que l’article 27, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 vise, en l’espèce, à protéger toute personne qui a ou est susceptible d’avoir des droits sur la marque en cause en tant qu’objet de propriété, c’est-à-dire les créanciers de l’intervenante, société ayant été déclarée en faillite. Dès lors, la connaissance du transfert de cette marque par l’intervenante elle-même n’est pas pertinente et ne saurait affecter les droits de ses créanciers sur son patrimoine en
liquidation.
102 D’autre part, en ce qui concerne le liquidateur, il convient d’examiner si celui-ci a effectivement confirmé qu’il avait connaissance de la cession de 2014 avant le 13 octobre 2017, comme l’allègue la requérante.
103 À cet égard, il importe de souligner que, conformément à l’article 27, paragraphe 1, du règlement 2017/1001, l’exception de connaissance s’applique à ceux qui, ayant acquis ultérieurement des droits sur la marque concernée, avaient connaissance de l’acte « lors de l’acquisition de ces droits », c’est-à-dire, en l’espèce, le 13 octobre 2017, comme le reconnaît la requérante elle-même au point 74 de la requête.
104 Or, tout d’abord, il est constant que le liquidateur n’a été impliqué ni dans le contrat de cession ni dans l’accord de licence invoqués par la requérante, prétendument conclus en 2014.
105 Ensuite, il ressort du dossier que le liquidateur a contesté la validité desdits contrat de cession et accord de licence devant le Tribunale di Venezia (tribunal de Venise). Dans le document même sur lequel s’appuie la requérante, à savoir la demande introductive d’instance soumise par le liquidateur à ce tribunal le 13 juin 2019, il est expressément indiqué que le liquidateur a eu connaissance du contrat de cession, « pour la première (et seule) fois », dans le courant du mois de juin 2018
(soit après le jugement déclaratif de faillite du 13 octobre 2017), en raison, précisément, de la procédure devant l’EUIPO.
106 À l’appui de ses allégations, la requérante fait simplement référence à la « lettre d’accord », à savoir une correspondance concernant la prorogation de l’accord de licence datée des mois de novembre et de décembre 2017. À cet égard, il importe de souligner que la correspondance invoquée par la requérante est postérieure au jugement déclaratif de faillite, daté du 13 octobre 2017. En tout état de cause, il ressort du dossier que le liquidateur a rejeté les allégations de la requérante, affirmant
que la proposition de prorogation de l’accord de licence soumise par Spring Holdings le 24 novembre 2017 était « purement temporaire et provisoire, et excluait, de toute évidence, les actions contre la prétendue cession des marques », parmi lesquelles la marque en cause. Comme cela est indiqué de manière expresse dans la demande du liquidateur visant à obtenir l’autorisation d’accepter cette prorogation, l’autorisation était « sans préjudice de toute action engagée pour déterminer si la cession
des marques était légale et correspondait à un prix raisonnable, et pour établir toute autre circonstance au regard de l’objet ». De plus, le liquidateur a contesté devant la chambre de recours la véracité du courrier électronique prétendument envoyé par lui en réponse à ladite proposition et invoqué par la requérante, et cette dernière n’a pas prouvé que le liquidateur ait jamais signé cette proposition. Ainsi, de tels éléments ne sauraient établir une connaissance par le liquidateur, à la date
du 13 octobre 2017, du prétendu contrat de cession du 26 juin 2014.
107 C’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré, en substance, que l’exception de connaissance prévue à l’article 27, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 ne s’appliquait pas en l’espèce et que les prétendus contrat de cession et accord de licence de 2014, quels que fussent leur validité et le caractère certain de leur date au regard du droit italien, étaient, en tout état de cause, inopposables à l’intervenante et au liquidateur à la date du 13 octobre 2017.
108 La quatrième branche du moyen unique doit donc être rejetée.
Sur la cinquième branche du moyen unique, tirée de l’application erronée de l’article 103 du règlement 2017/1001 par la chambre de recours aux décisions de l’EUIPO de supprimer les inscriptions du 16 avril 2018
109 Par la cinquième branche du moyen unique, la requérante allègue, en substance, que l’article 103 du règlement 2017/1001 n’est pas applicable en l’espèce, étant donné l’absence d’« erreur manifeste » lors de l’inscription par l’EUIPO du transfert de la marque en cause à son bénéfice le 16 avril 2018, dans le respect des conditions réglementaires. Elle réaffirme que l’intervenante, avant d’être déclarée en faillite, avait cédé cette marque à Spring Holdings, laquelle la lui aurait cédée à son
tour. De plus, l’erreur alléguée par l’intervenante, à savoir l’omission d’un acte de procédure, n’aurait pas été commise à la date de l’inscription dudit transfert, mais remonterait au mois d’octobre 2017.
110 À cet égard, il convient de rappeler que le libellé de l’article 103 du règlement 2017/1001, entré en vigueur le 1er octobre 2017, diffère de celui de l’article 80 du règlement no 207/2009 en ce qu’il couvre toute « erreur manifeste » imputable à l’EUIPO, et non plus seulement toute « erreur de procédure manifeste » imputable à celui-ci, laquelle avait été définie par la Cour comme une erreur flagrante de nature procédurale commise par l’EUIPO (voir, en ce sens, arrêt du 31 octobre 2019,
Repower/EUIPO, C‑281/18 P, EU:C:2019:916, point 29). Le caractère procédural de l’erreur manifeste n’est donc pas une condition d’application de l’article 103 du règlement 2017/1001.
111 Quant au caractère « manifeste » ou flagrant de l’erreur justifiant l’adoption d’une décision de révocation d’une décision antérieure ou la suppression d’une inscription, il qualifie des erreurs présentant un haut degré d’évidence qui ne permettent pas le maintien du dispositif de cette décision antérieure ou de cette inscription sans une nouvelle analyse qui sera menée ultérieurement par l’instance ayant pris ladite décision ou effectué ladite inscription [voir, en ce sens, arrêt du 28 mai
2020, Aurea Biolabs/EUIPO – Avizel (AUREA BIOLABS), T‑724/18 et T‑184/19, EU:T:2020:227, points 29 et 30 et jurisprudence citée].
112 Plus généralement, selon la jurisprudence, une erreur peut seulement être qualifiée de manifeste lorsqu’elle peut être détectée de façon évidente, à l’aune des critères auxquels le législateur a entendu subordonner l’exercice par l’administration de son pouvoir d’appréciation, et que les éléments de preuve produits sont suffisants pour priver de plausibilité l’appréciation retenue par cette administration, sans que cette appréciation puisse être admise comme justifiée et cohérente (voir, en ce
sens, arrêt du 2 avril 2019, Fleig/SEAE, T‑492/17, EU:T:2019:211, point 55 et jurisprudence citée).
113 En l’espèce, il y a lieu de relever, quant au défaut d’inscription de la procédure d’insolvabilité, qu’une insolvabilité doit être considérée comme effective et opposable à partir de la date fixée par le droit national applicable, en l’occurrence le 13 octobre 2017, en vertu des articles 44 et 45 de la loi italienne sur la faillite (voir notamment points 53 et 66 ci-dessus). En outre, l’EUIPO avait connaissance de l’insolvabilité de l’intervenante et, par la décision du 9 avril 2018 (voir
point 8 ci-dessus), avait déjà expressément fait part de son intention de lui donner effet. Ainsi, dès lors que la première inscription du transfert de la marque en cause par l’intervenante à Spring Holdings, demandée le 18 octobre 2017 par leur représentant commun, a été supprimée par l’EUIPO le 9 avril 2018 avec effet rétroactif, ladite marque devait être considérée comme appartenant à l’intervenante le 13 octobre 2017 et, à plus forte raison, le 16 avril 2018.
114 Force est, dès lors, de constater que l’« erreur manifeste » imputable à l’EUIPO, au sens de l’article 103 du règlement 2017/1001, a été commise lorsque l’EUIPO a, le 16 avril 2018, inscrit au registre les transferts de la marque en cause à la demande de la requérante sans tenir compte de l’existence et de l’opposabilité du jugement déclaratif de la faillite de l’intervenante du 13 octobre 2017, qu’il avait omis d’inscrire à la suite de la demande en ce sens déposée par le liquidateur le
25 octobre 2017.
115 Les inscriptions au registre des transferts successifs de la marque en cause effectuées le 16 avril 2018 constituaient donc des « erreurs manifestes » imputables à l’EUIPO, au sens de l’article 103 du règlement 2017/1001, étant donné que, d’une part, la faillite de l’intervenante avait été déclarée antérieurement, à savoir le 13 octobre 2017, et que, d’autre part, à la date de ces inscriptions, l’EUIPO avait connaissance de l’ouverture de la procédure d’insolvabilité relative à la titulaire de
cette marque inscrite au registre, à savoir l’intervenante.
116 Dans des conditions normales et exemptes d’erreur, si le jugement déclarant insolvable la titulaire enregistrée de la marque en cause avait été dûment inscrit au registre à la date de la demande en ce sens du liquidateur, à savoir le 25 octobre 2017, toute demande d’enregistrement ultérieure d’un transfert concernant la même marque aurait été automatiquement suspendue et n’aurait pu être mise en œuvre qu’avec l’autorisation expresse du liquidateur ou du tribunal national chargé de la procédure
d’insolvabilité.
117 En inscrivant les transferts contestés à la demande de la requérante le 16 avril 2018, après avoir omis de procéder à l’inscription au registre de la procédure d’insolvabilité concernant la titulaire de la marque en cause conformément à la demande du liquidateur du 25 octobre 2017, l’EUIPO a commis une erreur manifeste, de sorte qu’il était tenu de supprimer, dès que possible, lesdites inscriptions du 16 avril 2018, entachées de cette erreur manifeste.
118 À cet égard, la Cour a déclaré, en substance, que l’obligation de révoquer une décision ou de supprimer une inscription entachée d’une erreur manifeste imputable à l’EUIPO, actuellement imposée à celui-ci par l’article 103 du règlement 2017/1001, vise à garantir une bonne administration ainsi que des économies de procédure (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 31 octobre 2019, Repower/EUIPO, C‑281/18 P, EU:C:2019:916, point 32).
119 Par ailleurs, le délai d’un an à compter de la date d’inscription au registre, tel que prescrit à l’article 103, paragraphe 2, du règlement 2017/1001, a été dûment respecté lors de l’adoption par l’instance chargée de la tenue du registre de l’EUIPO, le 30 janvier 2019, des deux décisions portant suppression des inscriptions au registre T 014185659 et T 014188703, effectuées le 16 avril 2018.
120 Il s’ensuit que les conditions requises pour l’application de l’article 103 du règlement 2017/1001 par l’EUIPO, en particulier par l’instance chargée de la tenue du registre, étaient réunies.
121 C’est donc à juste titre que la chambre de recours a confirmé la décision de ladite instance, du 30 janvier 2019, de supprimer les inscriptions relatives aux transferts successifs de la marque en cause effectuées le 16 avril 2018.
122 La cinquième branche du moyen unique doit donc être rejetée.
123 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le moyen unique et, partant, le recours dans son intégralité.
Sur les dépens
124 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
125 La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (neuvième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Marina Yachting Brand Management Co. Ltd est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) et par Industries Sportswear Co. Srl.
Costeira
Gratsias
Kancheva
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 22 septembre 2021.
Signatures
Table des matières
Antécédents du litige
Conclusions des parties
En droit
Sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de l’intervenante
Sur le fond
Observations liminaires
Sur la première branche du moyen unique, tirée de la méconnaissance par l’EUIPO de ses compétences en vertu des articles 20 et 24 du règlement 2017/1001
Sur la deuxième branche du moyen unique, tirée de la prise en compte erronée par l’EUIPO et la chambre de recours du jugement déclaratif de faillite du 13 octobre 2017
Sur la troisième branche du moyen unique, tirée de l’inapplicabilité en l’espèce de l’article 27, paragraphe 1, du règlement 2017/1001
Sur la quatrième branche du moyen unique, tirée de l’applicabilité en l’espèce de l’exception de connaissance prévue à l’article 27, paragraphe 1, du règlement 2017/1001 et de la prétendue connaissance, par l’intervenante et le liquidateur, du contrat de cession de 2014
Sur la cinquième branche du moyen unique, tirée de l’application erronée de l’article 103 du règlement 2017/1001 par la chambre de recours aux décisions de l’EUIPO de supprimer les inscriptions du 16 avril 2018
Sur les dépens
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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.