ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre élargie)
27 janvier 2021 ( *1 )
« Environnement – Directive 2010/75/UE – Émissions industrielles – Décision d’exécution (UE) 2017/1442 – Grandes installations de combustion – Conclusions sur les meilleures techniques disponibles (MTD) – Article 16, paragraphes 4 et 5, TUE – Article 3, paragraphes 2 et 3, du protocole (no 36) sur les dispositions transitoires – Application de la loi dans le temps – Comitologie »
Dans l’affaire T‑699/17,
République de Pologne, représentée par MM. B. Majczyna et D. Krawczyk, en qualité d’agents,
partie requérante,
soutenue par
République de Bulgarie, représentée par Mmes E. Petranova et T. Mitova, en qualité d’agents,
et par
Hongrie, représentée par M. M. Fehér, en qualité d’agent,
parties intervenantes,
contre
Commission européenne, représentée par M. Ł. Habiak, Mme K. Herrmann et M. R. Tricot, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
soutenue par
Royaume de Belgique, représenté par Mme M. Jacobs, en qualité d’agent,
par
République française, représentée par M. J. Traband et Mme A.-L. Desjonquères, en qualité d’agents,
et par
Royaume de Suède, représenté par Mmes C. Meyer-Seitz, H. Shev, L. Zettergren et A. Alriksson, en qualité d’agents,
parties intervenantes,
ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision d’exécution (UE) 2017/1442 de la Commission, du 31 juillet 2017, établissant les conclusions sur les meilleures techniques disponibles (MTD), au titre de la directive 2010/75/UE du Parlement européen et du Conseil, pour les grandes installations de combustion (JO 2017, L 212, p. 1),
LE TRIBUNAL (troisième chambre élargie),
composé de MM. A. M. Collins, président, V. Kreuschitz (rapporteur), Z. Csehi, G. De Baere et Mme G. Steinfatt, juges,
greffier : Mme R. Ūkelytė, administratrice,
vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 17 septembre 2020,
rend le présent
Arrêt
Cadre juridique
Sur la procédure d’adoption des conclusions sur les meilleures techniques disponibles (MTD)
1 Les conclusions sur les meilleures techniques disponibles (MTD) servent de référence, conformément à l’article 14, paragraphe 3, de la directive 2010/75/UE du Parlement européen et du Conseil, du 24 novembre 2010, relative aux émissions industrielles (prévention et réduction intégrées de la pollution) (JO 2010, L 334, p. 17), pour la fixation des conditions d’autorisation d’exploitation des installations de combustion.
2 Les conclusions sur les MTD sont adoptées en deux étapes, conformément à l’article 13 de la directive 2010/75 et à l’annexe de la décision d’exécution 2012/119/UE de la Commission, du 10 février 2012, établissant les lignes directrices sur la collecte de données, sur l’élaboration de documents de référence MTD et sur leur assurance qualité, visées par la directive 2010/75 (JO 2012, L 63, p. 1).
3 La première étape consiste à établir un document technique de référence sur les MTD (ci‑après le « BREF ») à la suite d’un échange d’informations avec la participation de la Commission européenne, des États membres, des secteurs concernés et des organisations non gouvernementales œuvrant pour la protection de l’environnement. Dans ce cadre, un groupe de travail technique élabore les documents relatifs au BREF en tenant compte des résultats de l’échange d’informations pour le secteur déterminé. Le
projet final du BREF est envoyé au forum mis en place par l’article 13, paragraphe 3, de la directive 2010/75, qui donne son avis sur le contenu proposé du BREF à l’issue des travaux réalisés sur le plan technique.
4 Dans la seconde étape, conformément à l’article 13, paragraphe 5, et à l’article 75, paragraphe 2, de la directive 2010/75, la Commission présente un projet de décision d’exécution concernant les conclusions sur les MTD au comité établi par l’article 75 de la directive 2010/75 (ci‑après le « comité ») et composé des représentants des États membres. Le comité émet, en application de la procédure d’examen visée par l’article 5 du règlement (UE) no 182/2011 du Parlement européen et du Conseil, du
16 février 2011, établissant les règles et les principes généraux relatifs aux modalités de contrôle par les États membres de l’exercice des compétences d’exécution par la Commission (JO 2011, L 55, p. 13), son avis sur le projet de décision d’exécution de la Commission à la majorité qualifiée définie à l’article 16, paragraphes 4 et 5, TUE. Lorsque cet avis est favorable, la Commission adopte la décision d’exécution fixant les conclusions sur les MTD.
Sur les dispositions applicables relatives à la majorité qualifiée
5 L’article 16, paragraphes 4 et 5, TUE dispose :
« 4. À partir du 1er novembre 2014, la majorité qualifiée se définit comme étant égale à au moins 55 % des membres du Conseil, comprenant au moins quinze d’entre eux et représentant des États membres réunissant au moins 65 % de la population de l’Union.
Une minorité de blocage doit inclure au moins quatre membres du Conseil, faute de quoi la majorité qualifiée est réputée acquise.
Les autres modalités régissant le vote à la majorité qualifiée sont fixées à l’article 238, paragraphe 2[, TFUE].
5. Les dispositions transitoires relatives à la définition de la majorité qualifiée qui sont applicables jusqu’au 31 octobre 2014, ainsi que celles qui seront applicables entre le 1er novembre 2014 et le 31 mars 2017, sont fixées par le protocole sur les dispositions transitoires. »
6 L’article 3 du protocole (no 36) sur les dispositions transitoires (JO 2016, C 202, p. 321, ci‑après le « protocole no 36 ») prévoit :
« 1. Conformément à l’article 16, paragraphe 4, [TUE], les dispositions de ce paragraphe et les dispositions de l’article 238, paragraphe 2, [TFUE], relatives à la définition de la majorité qualifiée au Conseil européen et au Conseil, prennent effet le 1er novembre 2014.
2. Entre le 1er novembre 2014 et le 31 mars 2017, lorsqu’une délibération doit être prise à la majorité qualifiée, un membre du Conseil peut demander que cette délibération soit prise à la majorité qualifiée telle que définie au paragraphe 3. Dans ce cas, les paragraphes 3 et 4 s’appliquent.
3. Jusqu’au 31 octobre 2014, les dispositions suivantes sont en vigueur, sans préjudice de l’article 235, paragraphe 1, deuxième alinéa, [TFUE].
Pour les délibérations du Conseil européen et du Conseil qui requièrent une majorité qualifiée, les voix des membres sont affectées de la pondération suivante :
Belgique 12
Bulgarie 10
République tchèque 12
Danemark 7
Allemagne 29
Estonie 4
Irlande 7
Grèce 12
Espagne 27
France 29
Croatie 7
Italie 29
Chypre 4
Lettonie 4
Lituanie 7
Luxembourg 4
Hongrie 12
Malte 3
Pays‑Bas 13
Autriche 10
Pologne 27
Portugal 12
Roumanie 14
Slovénie 4
Slovaquie 7
Finlande 7
Suède 10
Royaume‑Uni 29
Les délibérations sont acquises si elles ont recueilli au moins 260 voix exprimant le vote favorable de la majorité des membres, lorsque, en vertu des traités, elles doivent être prises sur proposition de la Commission. Dans les autres cas, les délibérations sont acquises si elles ont recueilli au moins 260 voix exprimant le vote favorable d’au moins deux tiers des membres.
Un membre du Conseil européen ou du Conseil peut demander que, lorsqu’un acte est adopté par le Conseil européen ou par le Conseil à la majorité qualifiée, il soit vérifié que les États membres constituant cette majorité qualifiée représentent au moins 62 % de la population totale de l’Union. S’il s’avère que cette condition n’est pas remplie, l’acte en cause n’est pas adopté.
4. Jusqu’au 31 octobre 2014, dans les cas où, en application des traités, tous les membres du Conseil ne prennent pas part au vote, à savoir dans les cas où il est fait renvoi à la majorité qualifiée définie conformément à l’article 238, paragraphe 3, [TFUE], la majorité qualifiée se définit comme étant la même proportion des voix pondérées et la même proportion du nombre des membres du Conseil, ainsi que, le cas échéant, le même pourcentage de la population des États membres concernés que ceux
fixés au paragraphe 3 du présent article. »
7 L’article 5 du règlement no 182/2011 prévoit notamment ce qui suit :
« 1. Lorsque la procédure d’examen s’applique, le comité émet son avis à la majorité définie à l’article 16, paragraphes 4 et 5, [TUE] et, le cas échéant, à l’article 238, paragraphe 3, [TFUE], pour les actes à adopter sur proposition de la Commission. Les votes des représentants des États membres au sein du comité sont pondérés de la manière définie auxdits articles.
2. Lorsque le comité émet un avis favorable, la Commission adopte le projet d’acte d’exécution.
[...] »
Antécédents du litige
8 Le 9 mars 2017, la Commission a, en sa qualité de président du comité, présenté au comité un projet de décision d’exécution établissant les conclusions sur les MTD, au titre de la directive 2010/75, pour les grandes installations de combustion (ci‑après les « GIC »).
9 Par courrier du 23 mars 2017, la Commission a invité les membres du comité à une réunion devant avoir lieu le 28 avril 2017. L’objet de cette réunion était de procéder au vote sur l’avis relatif à ce projet de décision d’exécution. Un projet d’ordre du jour était joint à ce courrier.
10 Le 30 mars 2017, la République de Pologne a demandé que le comité vote sur l’avis relatif audit projet de décision d’exécution selon les règles de vote énoncées à l’article 3, paragraphe 3, du protocole no 36.
11 Le 4 avril 2017, le service juridique du Conseil de l’Union européenne a adressé au comité des représentants permanents des États membres un avis selon lequel, en substance, pour qu’un vote sur un projet d’acte soit émis selon les règles applicables avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, il fallait que l’État membre présente une demande en ce sens au plus tard le 31 mars 2017 et que le vote, objet de la demande, intervienne également avant cette date.
12 Le 10 avril 2017, la direction générale de l’environnement de la Commission a refusé la demande de la République de Pologne du 30 mars 2017, au motif que le vote sur l’avis était prévu pour le 28 avril 2017, soit après le 31 mars 2017, la date limite prévue à l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36.
13 Le 28 avril 2017 s’est tenue une réunion du comité au cours de laquelle les membres ont voté afin d’adopter un avis sur un projet modifié de décision d’exécution. Le vote a eu lieu en application des règles de vote établies par l’article 16, paragraphe 4, TUE et non de celles établies par l’article 3, paragraphe 3, du protocole no 36. Le vote a abouti à un avis favorable du comité à l’égard du projet à la suite du vote positif de 20 États membres représentant 65,14 % de la population et 71,43 %
des membres dudit comité. Huit États membres, dont la République de Pologne, ont émis un vote négatif.
14 Le 31 juillet 2017, à la suite de ce vote, la Commission a adopté la décision d’exécution (UE) 2017/1442, établissant les conclusions sur les meilleures techniques disponibles (MTD), au titre de la directive 2010/75, pour les grandes installations de combustion (JO 2017, L 212, p. 1, ci‑après la « décision attaquée »).
15 La décision attaquée impose notamment les niveaux d’émissions associés aux meilleures techniques disponibles (ci‑après les « NEA-MTD ») en ce qui concerne les émissions d’oxydes d’azote (NOx), de mercure (Hg) et de chlorure d’hydrogène (HCl) pour les GIC, c’est-à-dire des installations d’une puissance thermique nominale d’au moins 50 mégawatts (MW) indépendamment du type de combustible utilisé.
Procédure et conclusions des parties
16 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 octobre 2017, la République de Pologne a introduit le présent recours.
17 Par actes déposés au greffe du Tribunal, respectivement le 4 et le 15 janvier 2018, la Hongrie et la République de Bulgarie ont demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la République de Pologne. Par décision du 19 février 2018, le président de la troisième chambre du Tribunal (ancienne formation) a admis ces interventions.
18 Par actes déposés au greffe du Tribunal, respectivement le 16 et le 25 janvier 2018, le Royaume de Belgique, la République française et le Royaume de Suède ont demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la Commission. Par décisions, respectivement du 19 et du 21 février 2018, le président de la troisième chambre du Tribunal (ancienne formation) a admis ces interventions.
19 Les intervenantes ont déposé leurs mémoires et les parties principales ont déposé leurs observations sur ceux‑ci dans les délais impartis.
20 Par décision adoptée le 11 mars 2019, en application de l’article 27, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, le président du Tribunal a réattribué l’affaire à un autre juge rapporteur, affecté à la troisième chambre (ancienne formation).
21 La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, en application de l’article 27, paragraphe 5, du règlement de procédure, le juge rapporteur a été affecté à la troisième chambre (nouvelle formation) à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.
22 Sur proposition de la troisième chambre (nouvelle formation), le Tribunal a décidé, en application de l’article 28 du règlement de procédure, de renvoyer l’affaire devant une formation de jugement élargie.
23 Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre élargie) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, au titre de l’article 89, paragraphe 3, sous a) et b), du règlement de procédure, a posé aux parties principales des questions écrites et a invité ces parties à se prononcer par écrit sur certains aspects du litige. Les parties principales ont répondu à ces questions dans le délai imparti.
24 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 17 septembre 2020.
25 La République de Pologne, soutenue par la République de Bulgarie et la Hongrie, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner la Commission aux dépens.
26 La Commission, soutenue par le Royaume de Belgique, la République française et le Royaume de Suède, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la République de Pologne aux dépens.
En droit
27 À l’appui de son recours, la République de Pologne invoque cinq moyens.
28 Le premier moyen est tiré de la violation des dispositions applicables en matière de majorité qualifiée. La République de Pologne estime que, à la suite de sa demande en ce sens et en application de l’article 3, paragraphes 2 et 3, du protocole no 36, la décision attaquée aurait dû être adoptée selon les règles de majorité qualifiée prévues par le traité de Nice et non selon celles prévues par le traité de Lisbonne.
29 Dans le cadre des deuxième et troisième moyens, la République de Pologne estime que les NEA-MTD imposés par la décision attaquée pour les émissions d’oxydes d’azote (NOx), de mercure (Hg), de chlorure d’hydrogène (HCl) des GIC, ainsi que certains NEA-MTD applicables aux GIC dont la durée d’exploitation annuelle est inférieure à 1500 heures, ont été fixés sur la base de données erronées et non représentatives et violent le principe de proportionnalité.
30 Par les quatrième et cinquième moyens, la République de Pologne conteste la légalité de la dérogation octroyée par la décision attaquée à certaines régions insulaires pour l’application des NEA-MTD aux moteurs alimentés au fioul lourd ou au gazole.
Sur le premier moyen, tiré d’une violation des dispositions combinées de l’article 16, paragraphes 4 et 5, TUE et de l’article 3, paragraphes 2 et 3, du protocole no 36
31 La République de Pologne, soutenue par la Hongrie, considère que la décision attaquée a été adoptée en violation des règles régissant le vote à la majorité qualifiée établies par l’article 16, paragraphes 4 et 5, TUE et par l’article 3, paragraphes 2 et 3, du protocole no 36. En substance, elle estime que, afin de bénéficier des règles de la majorité qualifiée prévues à l’article 3, paragraphe 3, de ce protocole, il suffit pour un État membre d’en faire la demande dans le délai fixé à
l’article 3, paragraphe 2, dudit protocole, à savoir entre le 1er novembre 2014 et le 31 mars 2017. La République de Pologne ayant présenté une telle demande le 30 mars 2017, ces règles de la majorité qualifiée auraient dû être appliquées lors du vote sur le projet de la décision attaquée au sein du comité le 28 avril 2017. La Hongrie ajoute que, en application desdites règles, le seuil des voix nécessaires pour l’adoption dudit projet n’aurait pas pu être atteint et le vote aurait donc abouti à
un résultat différent.
32 La Commission, soutenue par le Royaume de Belgique, par la République française et par le Royaume de Suède, rétorque, en substance, que la période définie à l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36 englobe à la fois la date à laquelle le membre du Conseil présente sa demande et celle à laquelle le vote a lieu. Selon elle, cette disposition prévoit une exception à la règle générale consacrée à l’article 16, paragraphe 4, TUE et doit, dès lors, être interprétée strictement. L’article 16,
paragraphe 5, TUE établirait de manière décisive le champ d’application matériel des dispositions transitoires contenues dans le protocole no 36 et il ressortirait clairement de son texte, ainsi que de celui de l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36, que la majorité qualifiée définie à l’article 3, paragraphe 3, du protocole no 36 ne s’applique qu’aux votes ayant eu lieu entre le 1er novembre 2014 et le 31 mars 2017. La Commission estime que l’approche de la République de Pologne revient à
admettre que les dispositions transitoires relatives à la définition de la majorité qualifiée dépendent exclusivement d’une décision unilatérale d’un seul État membre et que celles‑ci pourraient s’appliquer indéfiniment, ce qui priverait l’article 16, paragraphe 4, TUE et la procédure de comité de leur effet utile et entraînerait une violation du principe de sécurité juridique. La Commission précise que la durée de la période transitoire doit être connue a priori et qu’elle a été clairement
déterminée par les auteurs du traité.
33 Dans le cadre du présent moyen, le Tribunal est appelé à se prononcer sur la portée de l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36 et, plus concrètement, sur la question de savoir si, pour pouvoir bénéficier de l’application des règles de la majorité qualifiée prévues au paragraphe 3 dudit article, qui correspondent à la majorité qualifiée du traité de Nice, il suffit pour un État membre d’en faire la demande entre le 1er novembre 2014 et le 31 mars 2017 ou s’il est nécessaire que la décision
soit également prise au cours de cette période.
34 À cet égard, il importe de rappeler que l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union requiert de tenir compte non seulement de ses termes, mais également du contexte dans lequel elle s’inscrit ainsi que des objectifs et de la finalité que poursuit l’acte dont elle fait partie. La genèse d’une disposition du droit de l’Union peut également révéler des éléments pertinents pour son interprétation [arrêt du 25 juin 2020, A e.a. (Éoliennes à Aalter et à Nevele), C‑24/19, EU:C:2020:503,
point 37]. Il convient donc de procéder à une interprétation littérale, contextuelle, téléologique et historique de l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36. Dans ce contexte, il y a lieu de tenir compte du fait que les textes de droit de l’Union sont rédigés en plusieurs langues et que toutes les versions linguistiques font foi, ce qui peut nécessiter une comparaison des versions linguistiques (voir arrêt du 14 juillet 2016, Lettonie/Commission, T‑661/14, EU:T:2016:412, point 39 et
jurisprudence citée).
35 En premier lieu, s’agissant de l’interprétation littérale, les parties s’accordent sur le fait que le libellé de l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36 ne permet pas de lever le doute quant à la portée exacte de cette disposition. En effet, il ne ressort pas du texte selon lequel, « [e]ntre le 1er novembre 2014 et le 31 mars 2017, lorsqu’une délibération doit être prise à la majorité qualifiée, un membre du Conseil peut demander que cette délibération soit prise à la majorité qualifiée
telle que définie au paragraphe 3 » que ladite délibération doit, ou non, également avoir lieu dans cette période.
36 Les autres versions linguistiques de l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36 ne permettent pas non plus de lever le doute quant à la portée exacte de ladite disposition.
37 En deuxième lieu, l’interprétation historique de la disposition en cause, ne permet pas non plus d’éclaircir son libellé. À cet égard, il y a lieu de relever que le traité de Lisbonne, ayant modifié les règles pour le calcul de la majorité qualifiée, a été adopté à la suite d’un mandat donné à la conférence intergouvernementale, convoquée dans le but d’élaborer un projet de traité modifiant le traité UE et le traité CE. Selon les termes de ce mandat, « pendant une période transitoire allant
jusqu’au 31 mars 2017, lorsqu’une décision doit être adoptée à la majorité qualifiée, un membre du Conseil peut demander que la décision soit prise à la majorité qualifiée telle que définie à l’article 205, paragraphe 2, de l’actuel traité CE » (paragraphe 13 du mandat figurant dans les conclusions de la présidence du Conseil européen de Bruxelles des 21 et 22 juin 2007, 11177/1/07 REV 1, annexe I, p. 18). Étant donné que la formulation figurant dans ce mandat est très proche de celle de
l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36, elle ne permet pas, ainsi que le soutient la Commission à juste titre, de surmonter l’ambiguïté mentionnée au point 35 ci‑dessus. Cela étant, il ne découle pas de ce document, comme l’avance la République de Pologne, que la tenue du vote selon les règles du traité de Nice devait avoir lieu avant le 1er avril 2017.
38 En troisième lieu, s’agissant de l’interprétation téléologique, il y a lieu de rappeler que l’objectif du protocole no 36 est, selon son considérant unique, « d’organiser la transition entre les dispositions institutionnelles des traités applicables avant l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne et celles prévues par ledit traité ».
39 À cette fin, l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36 attribue à un État membre le droit de demander, durant la période allant du 1er novembre 2014 au 31 mars 2017, l’application de la majorité qualifiée définie à l’article 3, paragraphe 3, du protocole no 36, correspondant à celle du traité de Nice, ce qui semble, d’ailleurs, ne pas être contesté entre les parties.
40 En revanche, les avis des parties divergent en ce qui concerne la question de savoir si le vote doit également avoir lieu durant cette même période. Or, le droit conféré aux États membres par l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36 de demander le vote à la majorité qualifiée selon les règles du traité de Nice durant la période spécifiée dans cet article implique nécessairement que, à la suite de l’introduction d’une telle demande par un État membre, le vote soit pris selon ces mêmes règles,
et ce même lorsque ce vote a lieu après le 31 mars 2017. En effet, seule une telle interprétation est susceptible d’assurer qu’un État membre puisse utilement exercer, durant toute cette période, et ce jusqu’au dernier jour du délai prévu, ledit droit.
41 Toute interprétation contraire viderait de son effet utile la fixation expresse d’une période allant du 1er novembre 2014 au 31 mars 2017 pour exercer la prérogative en cause, et réduirait significativement le délai dans lequel un vote selon les règles du traité de Nice pourrait effectivement être demandé par un État membre. En effet, elle aurait pour résultat qu’une demande introduite à la fin de cette période serait, en pratique, tardive pour déclencher l’application des règles du traité de
Nice. Une telle interprétation contraire forcerait les États membres à introduire, le cas échéant, leur demande beaucoup plus tôt, en fonction de la date – non prévisible – du vote. Un tel résultat serait contraire au droit des États membres à demander un vote selon les règles du traité de Nice jusqu’au dernier jour de la période prévue par l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36.
42 Partant, il découle d’une interprétation téléologique de la disposition en cause que la définition de la majorité qualifiée visée à l’article 3, paragraphe 3, du protocole no 36 peut être appliquée à un vote se tenant même après le 31 mars 2017, à condition que son application soit demandée par un État membre avant cette date.
43 En quatrième lieu, il convient de relever qu’une telle conclusion est également soutenue par une interprétation contextuelle de la disposition en cause. À cet égard, il y a lieu d’observer que l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36 s’inscrit dans le cadre des trois étapes transitoires relatives à l’entrée en vigueur des règles de la majorité qualifiée prévues par le traité de Lisbonne.
44 En effet, bien que le traité de Lisbonne soit entré en vigueur le 1er décembre 2009, la définition de la majorité qualifiée à l’article 16, paragraphe 4, TUE n’a pris effet qu’au 1er novembre 2014. En vertu de l’article 16, paragraphe 5, TUE, des dispositions transitoires étaient applicables, d’une part, jusqu’au 31 octobre 2014 et, d’autre part, entre le 1er novembre 2014 et le 31 mars 2017, telles que fixées par le protocole sur les dispositions transitoires, à savoir le protocole no 36.
45 Il y a donc lieu de distinguer trois périodes, à savoir, premièrement, la période allant du 1er décembre 2009 au 31 octobre 2014, deuxièmement, celle allant du 1er novembre 2014 au 31 mars 2017 et, troisièmement, la période courant à partir du 1er avril 2017.
46 Dans la première période, les règles de la majorité qualifiée définie à l’article 3, paragraphe 3, du protocole no 36 s’appliquaient, en prolongeant celles du traité de Nice, auxquelles elles correspondaient. Dans la deuxième période, un membre du Conseil pouvait, au titre de la disposition litigieuse, à savoir l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36, demander qu’une délibération soit prise selon ces règles du traité de Nice. En l’absence d’une telle demande, la nouvelle définition de la
majorité qualifiée à l’article 16, paragraphe 4, TUE s’appliquait, ce qui est souligné par l’article 3, paragraphe 1, du protocole no 36. Dans la troisième période, la majorité qualifiée se définit comme prévue à l’article 16, paragraphe 4, TUE, sans possibilité de demander un mode de calcul des voix différent.
47 Dès lors, contrairement à ce qu’estime la Commission, l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36 n’est pas une exception à la règle fixée à l’article 16, paragraphe 4, TUE, mais constitue une disposition transitoire régissant une des trois étapes transitoires qui s’appliquaient successivement après l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne. Son caractère transitoire est confirmé par le considérant unique du protocole no 36 (voir point 38 ci‑dessus) ainsi que par le libellé de l’intitulé du
protocole no 36 portant « sur les dispositions transitoires » et par celui de l’article 16, paragraphe 5, TUE prévoyant qu’un protocole fixe « [l]es dispositions transitoires » pour la période entre le 1er novembre 2014 et le 31 mars 2017.
48 Or, l’interprétation retenue au point 42 ci‑dessus est en conformité avec les exigences de l’article 16, paragraphe 5, TUE, en application duquel l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36 a été adopté. En effet, selon cette interprétation, l’article 3, paragraphe 2, dudit protocole, d’une part, était applicable entre le 1er novembre 2014 et le 31 mars 2017, car la date limite pour demander l’application de la majorité qualifiée définie au paragraphe 3 du même article était le 31 mars 2017,
et, d’autre part, était transitoire parce que le vote à cette majorité qualifiée n’avait lieu que pour les projets d’acte pour lesquels une telle demande avait été introduite pendant ladite période. C’est donc à tort que la Commission estime que l’article 16, paragraphe 5, TUE exige que la majorité qualifiée définie à l’article 3, paragraphe 3, du protocole no 36 ne s’applique qu’aux votes ayant lieu entre le 1er décembre 2009 et le 31 octobre 2014. De même, la République de Pologne n’est pas
fondée à avancer que le champ d’application de l’article 16, paragraphe 5, TUE ne concerne pas la définition de la majorité qualifiée.
49 En tout état de cause, ainsi que le démontrent ces interprétations différentes présentées par les parties, le libellé de l’article 16, paragraphe 5, TUE est à ce point équivoque qu’il ne permet pas d’infirmer l’interprétation figurant au point 42 ci‑dessus.
50 Contrairement à ce que soutient la Commission, l’interprétation retenue au point 42 ci‑dessus est également conforme à l’exigence, résultant d’une jurisprudence constante, selon laquelle une disposition transitoire est d’interprétation stricte (voir arrêt du 27 février 2019, Grèce/Commission, C‑670/17 P, EU:C:2019:145, point 52 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 28 octobre 2010, Commission/Pologne, C‑49/09, EU:C:2010:644, point 41 et jurisprudence citée). En effet,
d’une part, dans le cadre de cette interprétation, l’application de l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36 reste soumise à une limitation temporelle bien définie (voir point 48 ci‑dessus) et garantit, partant, son caractère transitoire (voir point 38 ci‑dessus). D’autre part, ladite interprétation est indispensable afin qu’un État membre puisse utilement et effectivement exercer son droit jusqu’au dernier jour du délai prévu par l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36 (voir points 40
et 41 ci‑dessus) et, dès lors, ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour assurer l’exercice de ce droit.
51 En outre, la Commission n’est pas fondée à avancer que l’interprétation exposée au point 42 ci‑dessus prive l’article 16, paragraphe 4, TUE et la procédure de comité, qui tendraient à renforcer la légitimité démocratique et la représentativité des citoyens, de leur effet utile. À cet égard, il importe de souligner que l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36 relève également du droit primaire et que son effet utile doit donc être garanti par la Commission de la même manière que pour les
traités, de sorte qu’il ne saurait être négligé au profit d’une application prématurée de l’article 16, paragraphe 4, TUE.
52 Partant, l’analyse contextuelle confirme l’interprétation de l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36, telle que retenue au point 42 ci‑dessus.
53 En cinquième lieu, il convient de relever que cette interprétation est corroborée par le principe de sécurité juridique qui exige, d’une part, que les règles de droit soient claires et précises et, d’autre part, que leur application soit prévisible pour les justiciables. En particulier, ledit principe exige qu’une réglementation permette aux intéressés de connaître avec exactitude l’étendue des obligations qu’elle leur impose et que ces derniers puissent connaître sans ambiguïté leurs droits et
leurs obligations et prendre leurs dispositions en conséquence (voir arrêt du 1er juillet 2014, Ålands Vindkraft, C‑573/12, EU:C:2014:2037, points 127 et 128 et jurisprudence citée).
54 À cet égard, la Commission ne saurait soutenir que faire dépendre l’application de la disposition transitoire uniquement de la demande unilatérale d’un État membre permettrait d’appliquer indéfiniment cette disposition étant donné que, d’un point de vue formel, un acte continuerait à faire l’objet des délibérations du Conseil tant que la Commission ne l’a pas retiré. Cet argument méconnaît non seulement le fait que l’application de la disposition transitoire est soumise à la seule condition que
l’État membre introduise une demande à cet effet, laquelle est limitée dans le temps dès lors qu’elle doit être présentée au plus tard le 31 mars 2017, mais également le fait que les délibérations qui aboutissent à un vote mettent un terme à l’application de cette disposition transitoire de sorte qu’elle n’est pas indéfinie.
55 Au contraire, l’interprétation préconisée par la Commission qui subordonne l’application de la disposition transitoire aux exigences cumulatives de l’introduction d’une demande d’un État membre et de l’intervention d’un vote au plus tard le 31 mars 2017 entraînerait, à la fin de la période transitoire, une incertitude quant à l’application dans le temps de la majorité qualifiée selon la définition prévue à l’article 3, paragraphe 3, du protocole no 36. En effet, dès lors que la durée des travaux
sur un projet d’acte peut varier, un État membre faisant usage du droit qui lui est conféré par cette disposition durant la période transitoire, surtout lorsque la date de sa demande se rapproche de celle du 31 mars 2017, n’aurait pas la certitude que le vote puisse avoir effectivement lieu selon lesdites règles. Dans l’hypothèse où les travaux sur le projet d’acte se poursuivraient au-delà du 31 mars 2017, l’interprétation défendue par la Commission aurait pour conséquence que le vote devrait
avoir lieu à la majorité qualifiée visée à l’article 16, paragraphe 4, TUE, tandis qu’une finalisation desdits travaux avant cette date et permettant que le vote intervienne avant le 31 mars 2017, entraînerait l’application de la majorité qualifiée définie à l’article 3, paragraphe 3, du protocole no 36. En outre, une telle interprétation non seulement donnerait lieu à un manque de prévisibilité, mais également pourrait amener à un contournement de la disposition transitoire en cause en fixant la
date du vote à une date postérieure au 31 mars 2017.
56 Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient d’interpréter l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36 en ce sens que, pour voir un projet d’acte adopté selon les règles de la majorité qualifiée définies à l’article 3, paragraphe 3, du protocole no 36, qui correspondent à celles du traité de Nice, il suffit que l’application de ces règles soit demandée par un État membre entre le 1er novembre 2014 et le 31 mars 2017, sans qu’il soit nécessaire que le vote du projet d’acte
en question intervienne également entre ces dates.
57 En l’espèce, la République de Pologne ayant présenté une demande au titre de l’article 3, paragraphe 2, du protocole no 36, le 30 mars 2017, lesdites règles auraient dû être appliquées lors du vote sur le projet de la décision attaquée le 28 avril 2017.
58 Il ressort de la jurisprudence que le non‑respect des modalités de vote constitue une violation des formes substantielles au sens de l’article 263 TFUE (voir, en ce sens, arrêts du 23 février 1988, Royaume‑Uni/Conseil, 68/86, EU:C:1988:85, point 49 ; du 28 avril 2015, Commission/Conseil, C‑28/12, EU:C:2015:282, point 55, et du 20 septembre 2017, Tilly-Sabco/Commission, C‑183/16 P, EU:C:2017:704, point 115), qui entraîne nécessairement l’annulation de l’acte entaché d’un tel vice, indépendamment
de la question de savoir si cette violation a causé un préjudice à celui qui l’invoque (voir, en ce sens, arrêts du 6 avril 2000, Commission/ICI, C‑286/95 P, EU:C:2000:188, point 52 ; du 21 septembre 2017, Feralpi/Commission, C‑85/15 P, EU:C:2017:709, points 45 à 47, et du 8 septembre 2016, Goldfish e.a./Commission, T‑54/14, EU:T:2016:455, point 47).
59 Dès lors, la question de savoir si la Commission aurait pu organiser ce vote avant le 1er avril 2017 et si la République de Pologne aurait pu demander que ledit vote ait lieu avant cette date n’est pas pertinente. En tout état de cause, compte tenu du résultat de vote tel qu’indiqué au point 13 ci‑dessus, en application des règles de la majorité qualifiée définies à l’article 3, paragraphe 3, du protocole no 36, le seuil requis pour l’adoption du projet de la décision attaquée n’aurait pas été
atteint.
60 Par conséquent, il y a lieu d’accueillir le premier moyen et d’annuler la décision attaquée, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens invoqués par la requérante.
Sur les effets dans le temps de l’annulation de la décision attaquée
61 L’article 264, second alinéa, TFUE prévoit que, si le juge de l’Union l’estime nécessaire, il indique les effets de l’acte annulé qui doivent être considérés comme définitifs. Cette disposition a notamment été interprétée comme permettant, pour des motifs de sécurité juridique [voir, en ce sens, arrêts du 20 septembre 2017, Tilly-Sabco/Commission, C‑183/16 P, EU:C:2017:704, point 124, et du 4 septembre 2018, Commission/Conseil (Accord avec le Kazakhstan), C‑244/17, EU:C:2018:662, point 52], mais
aussi pour des motifs visant à éviter une discontinuité ou une régression dans la mise en œuvre de politiques conduites ou soutenues par l’Union, comme en matière de protection de l’environnement ou de la santé publique (voir, en ce sens, arrêts du 25 février 1999, Parlement/Conseil, C‑164/97 et C‑165/97, EU:C:1999:99, points 22 à 24, et du 16 avril 2015, Parlement/Conseil, C‑317/13 et C‑679/13, EU:C:2015:223, points 72 à 74), de maintenir pour un délai raisonnable les effets d’un acte annulé.
62 En l’espèce, interrogées à l’audience par le Tribunal sur une éventuelle modulation dans le temps des effets de l’annulation qu’il pourrait prononcer, la République de Pologne s’y est opposée tandis que la Commission a demandé une telle modulation en cas d’annulation de la décision attaquée.
63 Compte tenu du fait que les NEA-MTD établis par la décision attaquée servent, comme il est exposé au point 1 ci‑dessus, de base pour la fixation des conditions d’autorisation d’exploitation des GIC par les autorités nationales, l’annulation de la décision attaquée avec effet immédiat serait susceptible de mettre en péril des conditions d’autorisation uniformes pour ce type d’installations dans l’Union et risquerait de causer une insécurité juridique pour les parties intéressées, notamment les
opérateurs des GIC, jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle décision concernant les conclusions sur les MTD.
64 En outre, l’annulation de la décision attaquée avec effet immédiat irait à l’encontre des objectifs d’assurer un niveau élevé de protection de l’environnement et d’améliorer la qualité de l’environnement, tels que prévus à l’article 191, paragraphe 2, TFUE, à l’article 37 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et aux considérants 2 et 44 ainsi qu’à l’article 1er de la directive 2010/75, auxquels la décision attaquée contribue.
65 Par conséquent, il y a lieu de maintenir les effets de la décision attaquée jusqu’à l’entrée en vigueur, dans un délai raisonnable qui ne saurait excéder douze mois à compter de la date du prononcé du présent arrêt, d’un nouvel acte appelé à la remplacer et adopté selon les règles de la majorité qualifiée prévues à l’article 3, paragraphe 3, du protocole no 36.
Sur les dépens
66 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la République de Pologne.
67 L’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure prévoit que les États membres et les institutions qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Par conséquent, le Royaume de Belgique, la République de Bulgarie, la République française, la Hongrie et le Royaume de Suède supporteront leurs propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (troisième chambre élargie)
déclare et arrête :
1) La décision d’exécution (UE) 2017/1442 de la Commission, du 31 juillet 2017, établissant les conclusions sur les meilleures techniques disponibles (MTD), au titre de la directive 2010/75/UE du Parlement européen et du Conseil, pour les grandes installations de combustion, est annulée.
2) Les effets de la décision d’exécution annulée en vertu du point 1 du présent dispositif sont maintenus jusqu’à l’entrée en vigueur, dans un délai raisonnable qui ne saurait excéder douze mois à compter de la date du prononcé du présent arrêt, d’un nouvel acte appelé à la remplacer et adopté selon les règles de la majorité qualifiée prévues à l’article 3, paragraphe 3, du protocole (no 36) sur les dispositions transitoires.
3) La Commission européenne supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par la République de Pologne.
4) Le Royaume de Belgique, la République de Bulgarie, la République française, la Hongrie et le Royaume de Suède supporteront leurs propres dépens.
Collins
Kreuschitz
Csehi
De Baere
Steinfatt
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 janvier 2021.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : le polonais.