La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/09/2018 | CJUE | N°T-682/16

CJUE | CJUE, Arrêt du Tribunal, République française contre Commission européenne., 26/09/2018, T-682/16


ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

26 septembre 2018 ( *1 )

« FEAGA – Aides liées à la surface – Procédure de suspension des paiements mensuels à un État membre – Article 41, paragraphe 2, sous b), du règlement (UE) no 1306/2013 – Éléments clés du système de contrôle national – Déficiences constatées – Plan d’action comportant des indicateurs de progrès clairs établis après consultation de la Commission – Proportionnalité »

Dans l’affaire T‑682/16,

République française, représentée par MM. F

. Alabrune, D. Colas, D. Segoin, Mme A.-L. Desjonquères et M. S. Horrenberger, en qualité d’agents,

partie requérante,

soute...

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

26 septembre 2018 ( *1 )

« FEAGA – Aides liées à la surface – Procédure de suspension des paiements mensuels à un État membre – Article 41, paragraphe 2, sous b), du règlement (UE) no 1306/2013 – Éléments clés du système de contrôle national – Déficiences constatées – Plan d’action comportant des indicateurs de progrès clairs établis après consultation de la Commission – Proportionnalité »

Dans l’affaire T‑682/16,

République française, représentée par MM. F. Alabrune, D. Colas, D. Segoin, Mme A.-L. Desjonquères et M. S. Horrenberger, en qualité d’agents,

partie requérante,

soutenue par

République portugaise, représentée par MM. L. Inez Fernandes, M. Figueiredo, Mme P. Estêvão et M. J. Saraiva de Almeida, en qualité d’agents,

partie intervenante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. X. Lewis et D. Triantafyllou, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de la décision d’exécution C(2016) 4287 final de la Commission, du 12 juillet 2016, suspendant les paiements mensuels à la République française au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA),

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de MM. S. Frimodt Nielsen (rapporteur), président, V. Kreuschitz et Mme N. Półtorak, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

Cadre juridique et antécédents du litige

Dispositions litigieuses

1 L’article 41, intitulé « Réduction et suspension des paiements mensuels et intermédiaires », du règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant les règlements (CEE) no 352/78, (CE) no 165/94, (CE) no 2799/98, (CE) no 814/2000, (CE) no 1290/2005 et (CE) no 485/2008 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 549, rectificatif JO 2016, L 130, p. 13), dispose :

« 2.   La Commission peut adopter des actes d’exécution pour réduire ou suspendre les paiements mensuels ou intermédiaires à un État membre si un ou plusieurs des éléments clés du système de contrôle national en cause font défaut ou sont inopérants en raison de la gravité ou de la persistance des déficiences constatées, ou si le système de recouvrement des paiements irréguliers présente de graves déficiences similaires et si l’une des conditions suivantes est remplie :

[…]

b) la Commission conclut que l’État membre concerné n’est pas en mesure de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour remédier à la situation dans l’immédiat, conformément à un plan d’action comportant des indicateurs de progrès clairs qui doivent être établis après consultation de la Commission.

La réduction ou la suspension sont appliquées aux dépenses concernées, effectuées par l’organisme payeur au sein duquel des déficiences sont constatées, pendant une période à déterminer dans les actes d’exécution visés au premier alinéa, qui ne dépassera pas douze mois […]

Les actes d’exécution prévus au premier alinéa sont adoptés en conformité avec la procédure consultative visée à l’article 116, paragraphe 2.

Avant d’adopter les actes d’exécution visés au présent paragraphe, la Commission informe l’État membre concerné de son intention et lui demande de réagir dans un délai qui ne peut être inférieur à 30 jours.

Les actes d’exécution déterminant les paiements mensuels visés à l’article 18, paragraphe 3, ou les paiements intermédiaires visés à l’article 36 tiennent compte des actes d’exécution adoptés en vertu du présent paragraphe. »

2 L’article 41, paragraphe 3, du règlement no 1306/2013 indique quant à lui :

« Les réductions et les suspensions prévues par le présent article sont appliquées conformément au principe de proportionnalité et sont sans préjudice de l’application des articles 51 [sur l’apurement comptable] et 52 [sur l’apurement de conformité]. »

Élaboration et approbation du plan d’action

3 Par lettre du 14 mai 2013, la Commission européenne a indiqué aux autorités françaises que plusieurs audits réalisés par ses services révélaient des problèmes récurrents concernant les aides à la surface octroyées dans le cadre de la politique agricole commune (PAC). Ces problèmes concernaient, notamment, le système intégré de gestion et de contrôle (ci-après le « SIGC »), le système d’identification des parcelles agricoles (ci-après le « SIPA »), également appelé « registre parcellaire
graphique » (ci-après le « RPG »), les contrôles administratifs croisés et les contrôles sur place. Par conséquent, la Commission a demandé aux autorités françaises de présenter un « plan d’action détaillant les mesures nécessaires pour remédier aux faiblesses constatées ».

4 Par lettre du 13 novembre 2013, à la suite de plusieurs échanges avec la Commission, les autorités françaises ont présenté leur plan d’action. Par lettre du 28 novembre 2013, la Commission a indiqué que ce plan d’action pouvait « être considéré comme définitif » (ci-après le « plan d’action ») tout en relevant que, « dans le domaine des aides à la surface […] les actions proposées pourraient encore être complétées [et] détaillées au cours de sa mise en œuvre ».

5 Le premier des quatre volets du plan d’action concernait les aides à la surface. Ce volet comprenait, premièrement, diverses actions visant à remettre à jour le SIPA, deuxièmement, des actions relatives aux contrôles sur place et, troisièmement, des actions relatives au calcul des paiements et des sanctions. S’agissant de la mise à jour du SIPA, les actions prévues visaient, pour l’essentiel, à interpréter les éléments photographiques contenus dans une base de données, dénommée BD TOPO (ci-après
la « base de données BD TOPO »), dans laquelle étaient numérisés divers éléments de paysage tels que les forêts, les cours d’eau ou les bâtiments. Ce travail d’interprétation systématique devait permettre de recalculer les surfaces admissibles sur lesquelles les paiements étaient fondés. Les trois autres volets du plan d’action, qui ne sont pas en cause dans la présente affaire, concernaient la conditionnalité des aides, les droits à paiement et les primes animales.

Suivi, demande de révision et nouvelles modalités du plan d’action

6 Le plan d’action comportait un dispositif de suivi, en application duquel de nombreux échanges ont eu lieu entre les autorités françaises et la Commission. Ainsi, le plan d’action prévoyait que les autorités françaises transmettent des rapports d’étape sur sa mise en œuvre. En 2014, de tels rapports ont été transmis les 4 février, 4 avril, 2 juillet et 14 octobre.

7 Par lettre du 22 décembre 2014, la Commission a conclu, à la suite d’un audit réalisé en novembre 2014 pour évaluer l’état d’avancement du plan d’action, que la base de données BD TOPO était trop ancienne et imparfaite pour permettre la mise à jour du SIPA et que, de ce fait, le succès du plan d’action ne pouvait pas être confirmé. Pour autant, la Commission faisait observer qu’elle avait noté que les autorités françaises développaient une approche alternative qui devait, en partie, résoudre les
problèmes relevés. La Commission était ainsi d’avis que, pour éviter une éventuelle suspension ou réduction des paiements en application de l’article 41, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1306/2013, « l’établissement d’un plan d’action révisé [était] requis » et qu’il « s’av[érait] indispensable de remédier à ces déficiences avant la mise en œuvre de la campagne 2015 (avril 2015) ».

8 Par lettre du 23 décembre 2014, les autorités françaises ont communiqué à la Commission « les éléments attendus relatifs à la mise en œuvre du plan d’action[…] en 2014 et à sa poursuite en 2015 ». Ces éléments ont été complétés par le cinquième rapport d’étape, transmis par les autorités françaises à la Commission le 30 janvier 2015.

9 Par lettre du 17 février 2015, la Commission a relevé, notamment, que plusieurs aspects relatifs à la mise en œuvre du plan d’action envisagés par les autorités françaises, dans leur lettre de transmission du cinquième rapport d’étape du 30 janvier 2015, nécessitaient des clarifications. Par lettre du 25 février 2015, la Commission a communiqué aux autorités françaises plusieurs éléments relatifs aux résultats d’une enquête relative aux années de demande 2013 et 2014, de laquelle il ressortait que
le « système de contrôle mis en place en France était déficient en raison des déficiences du SIPA […], des problèmes liés à la définition des surfaces éligibles, du manque d’efficacité des contrôles sur place, ainsi que du mode de calcul de l’aide et des sanctions en l’absence de recouvrement rétroactif ». Par la suite, une mission de la Commission a été organisée en France du 11 au 13 mars 2015 et les autorités françaises ont procédé à une mise à jour du plan d’action. Une nouvelle note des
autorités françaises, en date du 30 mars 2015, a communiqué des éléments complémentaires à la Commission.

Mise en œuvre de la procédure de suspension des paiements

10 Par lettre du 13 avril 2015, la Commission a transmis aux autorités françaises une communication en application de l’article 41, paragraphe 2, quatrième alinéa, du règlement no 1306/2013 (ci-après la « communication du 13 avril 2015 »).

11 Dans une première partie, la Commission a rappelé différents éléments relatifs au plan d’action et à sa révision.

12 En premier lieu, la Commission a indiqué que le plan d’action visait concrètement la mise à jour du SIPA afin que, pour chaque parcelle de référence, la surface maximale éligible soit établie selon les dispositions réglementaires, en considération, notamment, d’orthophotographies plus récentes, des résultats des contrôles sur place et des éléments inéligibles présents dans les bases de données existantes.

13 En deuxième lieu, la Commission a exposé les raisons pour lesquelles, à la suite de l’audit de novembre 2014, elle avait considéré que les jalons prévus n’étaient pas respectés, qu’il existait des failles dans la qualité du travail ainsi que des problèmes concernant les surfaces payées au titre du paiement unique et, en conséquence, avait requis des autorités françaises un « plan d’action révisé » dans sa lettre du 22 décembre 2014.

14 En troisième lieu, la Commission a relevé, à ce propos, que le « plan d’action révisé soumis par la France[, par lettre du 23] décembre 2014 » comportait des éléments relatifs à l’interprétation des images selon des règles assurant l’éligibilité des surfaces et leur conformité avec la réglementation, des éléments relatifs à l’application d’un système de prorata au sens de l’article 10 du règlement délégué (UE) no 640/2014 de la Commission, du 11 mars 2014, complétant le règlement no 1306/2013 en
ce qui concerne le SIGC, les conditions relatives au refus ou au retrait des paiements et les sanctions administratives applicables aux paiements directs, le soutien au développement rural et la conditionnalité (JO 2014, L 181, p. 48) (ci-après le « système de prorata »), des éléments relatifs à l’éligibilité de certaines prairies permanentes, au sens de l’article 4, paragraphe 1, sous h), du règlement (UE) no 1307/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, établissant les
règles relatives aux paiements directs en faveur des agriculteurs au titre des régimes de soutien relevant de la PAC et abrogeant le règlement (CE) no 637/2008 du Conseil et le règlement (CE) no 73/2009 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 608), au titre des pratiques locales établies (ci-après l’« éligibilité de certaines prairies permanentes au titre des pratiques locales établies ») et des éléments relatifs à la « déclaration des parcelles agricoles de manière graphique dès 2015 ». La Commission a
toutefois relevé que, par lettre du 20 janvier 2015, les autorités françaises avaient présenté, en ce qui concerne la mise en œuvre du plan d’action révisé, les difficultés rencontrées dans la gestion des demandes d’aide 2015, lesquelles avaient fait l’objet de discussions lors d’une mission conduite en France au mois de mars 2015.

15 Dans une deuxième partie, la Commission a procédé à un état des lieux du plan d’action, dans lequel elle évoquait, notamment, la manière dont les autorités françaises appliquaient le système de prorata et les risques qui, selon elle, persistaient dans la définition de l’éligibilité de certaines surfaces au titre des pratiques locales établies. En conclusion sur ce point, la Commission était d’avis qu’il y avait « un non-respect du plan d’action […] au motif que les surfaces répertoriées dans le
RPG ne dispos[aient] pas toutes d’une surface maximale éligible établie selon les dispositions de l’Union européenne ».

16 Dans une troisième partie, la Commission évoquait également les modalités de gestion des demandes d’aide 2015 qui avaient été présentées, par ailleurs, par les autorités françaises.

17 En considération de ce qui précède, la Commission indiquait que « l’effet combiné des faiblesses dans la qualité intrinsèque [du moment] du système de gestion et de contrôle et des dérogations aux règles de soumission des demandes d’aide que la France a[vait] l’intention d’appliquer pour les demandes 2015 »« n’offr[ait] pas l’assurance raisonnable requise pour une bonne gestion des aides et donc sur la légalité et la régularité des dépenses » et « exacerb[ait] les doutes de la [Commission] quant
à la possibilité d’effectuer des paiements corrects dans les délais que les autorités françaises [s’étaient] fixées ». Par conséquent, la Commission envisageait une suspension ou une réduction des paiements de l’ordre de 5 % si les autorités françaises ne remédiaient pas, avant le 16 octobre 2015, aux incertitudes identifiées en ce qui concerne l’état des lieux du plan d’action et les modalités de gestion des demandes d’aides 2015.

18 Les autorités françaises ont répondu à la communication du 13 avril 2015 par une nouvelle mise à jour du plan d’action en date du 24 avril 2015, intitulée « Plan d’action […] – Objectif de calendrier de la campagne PAC 2015 », et par une lettre du 7 mai 2015 ayant pour objet le « suivi du plan d’action […] », qui récapitulait leur position.

19 Plusieurs échanges se sont ensuite tenus entre la Commission et les autorités françaises : une réunion bilatérale a été organisée le 10 juin 2015, un rapport d’étape intermédiaire a été remis à la Commission le 13 juillet 2015, le sixième plan d’étape a été transmis le 9 octobre 2015 et une visite en France des services de la Commission a été organisée le 1er décembre 2015.

20 Par lettre du 22 décembre 2015, la Commission a présenté des observations complémentaires au titre de la procédure de suspension des paiements. Elle a rappelé que des rapports d’étape ne lui avaient pas été transmis dans les délais et que l’application du système de prorata ainsi que la détermination de l’éligibilité de certaines prairies permanentes au titre des pratiques locales établies et les contrôles sur place faisaient l’objet de remarques de sa part.

21 Par lettre du 13 janvier 2016, les autorités françaises ont répondu à ces observations complémentaires. Tout d’abord, elles ont récapitulé l’ensemble des éléments transmis à la Commission. Ensuite, elles ont détaillé la mise en œuvre des éléments qui figuraient dans le plan d’action en rappelant que, conformément au plan d’action tel qu’il avait été approuvé en novembre 2013, ces actions devaient être finalisées en 2016. La Commission ne pourrait donc pas invoquer, en 2015, l’absence de
réalisation du plan d’action pour adopter une mesure de suspension des paiements. Les autorités françaises rappelaient également les nouvelles modalités de photo-interprétation mises en place à partir de 2015. Enfin, les autorités françaises répondaient aux diverses observations de la Commission sur l’application du système de prorata et sur l’éligibilité de certaines prairies permanentes au titre des pratiques locales établies ainsi que sur les critiques formulées sur la réalisation des
contrôles sur place. En conclusion, les autorités françaises faisaient valoir qu’elles avaient intégralement tenu ou allaient intégralement tenir les engagements prévus dans le plan d’action approuvé en novembre 2013.

22 À la suite de ces échanges, des rapports d’étapes ont été transmis à la Commission les 28 janvier, 26 février, 4 et 29 avril 2016. Par ailleurs, une nouvelle mission de la Commission a été programmée en France du 11 au 15 avril 2016.

23 Par lettre du 20 mai 2016, la Commission a transmis une communication supplémentaire en application de l’article 41, paragraphe 2, quatrième alinéa, du règlement no 1306/2013 (ci-après la « communication supplémentaire du 20 mai 2016 »). Elle y évoquait la nécessité de vérifier la qualité des contrôles sur place et l’allocation correcte des droits à paiement. La Commission faisait également état de « déficiences liées à la qualité des visites rapides » et mentionnait « un problème de conformité
avec la définition des ‘prairies permanentes’ relevant de pratiques locales établies » et « des problèmes liés à l’établissement d’un [système de prorata] ». Sur cette base, la Commission informait les autorités françaises qu’elle envisageait une suspension ou une réduction des paiements de l’ordre de 3 %.

24 Par lettre du 16 juin 2016, les autorités françaises ont répondu à la communication supplémentaire du 20 mai 2016. Elles ont indiqué qu’elles considéraient avoir mis en œuvre le plan d’action conformément à leurs engagements et que les constats soulevés concernant les nouvelles modalités de gestion des prairies mises en œuvre dans le cadre de la réforme de la PAC relevaient d’appréciations non fondées.

25 Le 12 juillet 2016, la Commission a adopté la décision d’exécution suspendant les paiements mensuels à la République française au titre du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) (ci-après la « décision attaquée »). Dans cette décision, la Commission a décidé que les paiements mensuels à la République française effectués en vertu de l’article 18 du règlement no 1306/2013 étaient suspendus à hauteur d’un montant résultant de l’application d’un pourcentage de suspension de 3 % aux paiements
mensuels relatifs aux aides liées à la surface au titre de l’année 2015 et que les suspensions étaient appliquées aux paiements mensuels à verser à la République française en vertu de l’article 18, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013 pour les dépenses mensuelles effectuées par l’organisme payeur Agence de services et de paiement, du mois de juillet 2016 au mois de juin 2017 inclus. Cette décision a été notifiée aux autorités françaises le13 juillet 2016.

Procédure et conclusions des parties

26 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 septembre 2016, la République française a introduit le présent recours.

27 Le 22 décembre 2016, la Commission a produit son mémoire en défense. La réplique et la duplique ont été déposées dans les délais impartis.

28 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 7 décembre 2016, la République portugaise a demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la République française. Par décision du 12 janvier 2017, le président de la troisième chambre du Tribunal a admis cette intervention. La République portugaise a déposé son mémoire et les parties principales ont déposé leurs observations sur celui-ci dans les délais impartis.

29 Par mesure d’organisation de la procédure du 26 janvier 2018, adoptée en vertu de l’article 89, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, les parties ont été invitées à répondre à plusieurs questions. Les parties ont répondu à cette demande dans le délai imparti.

30 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé, en l’absence de demande de fixation d’une audience par les parties et en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure, de statuer sans phase orale de la procédure. Le Tribunal a en effet estimé qu’il était suffisamment éclairé par les pièces du dossier pour statuer sans poursuivre la procédure.

31 La République française conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– annuler la décision attaquée ;

– condamner la Commission aux dépens.

32 La République portugaise, intervenant au soutien de la République française, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal d’annuler la décision attaquée.

33 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– rejeter le recours ;

– condamner la République française aux dépens.

En droit

34 La République française soulève deux moyens dans son recours. Le premier moyen, présenté à titre principal, est pris de la violation de l’article 41, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1306/2013, dès lors, d’une part, que les autorités françaises auraient intégralement mis en œuvre le plan d’action, lequel comporte des indicateurs de progrès clairs établis après consultation de la Commission, et, d’autre part, que la décision attaquée serait fondée sur des éléments qui n’étaient pas prévus
dans le plan d’action. Le second moyen, présenté à titre subsidiaire, est pris de la violation du principe de proportionnalité.

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 41, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1306/2013

35 À titre liminaire, la République française rappelle que la procédure d’apurement de conformité prévue par l’article 52 du règlement no 1306/2013 (ci-après la « procédure d’apurement de conformité ») permet de s’assurer que les dépenses agricoles ont été effectuées conformément au droit de l’Union européenne. Cette procédure permettrait aux États membres de disposer des garanties requises pour présenter leur point de vue et serait encadrée par des orientations de la Commission précisant,
notamment, comment les conséquences financières d’un apurement de conformité sont calculées. En revanche, la procédure de suspension des paiements prévue par l’article 41 du règlement no 1306/2013 (ci-après la « procédure de suspension ») n’aurait pratiquement jamais été mise en œuvre et ne serait pas encadrée par des orientations de la Commission.

36 Selon la République française, la procédure de suspension ne concerne pas l’hypothèse d’un désaccord relatif, comme en l’espèce, d’une part, à l’application d’un système de prorata et, d’autre part, à la détermination de l’éligibilité de certaines surfaces au titre des pratiques locales établies. Accepter qu’un tel désaccord puisse être invoqué au titre de deux procédures distinctes risquerait de porter atteinte aux garanties procédurales dont dispose l’État membre concerné dans le cadre de la
procédure d’apurement de conformité, de contraindre cet État à modifier ses pratiques dans le cadre de la procédure de suspension, alors même que la réalité du manquement ne serait pas encore établie, ou encore de priver de son effectivité la procédure d’apurement de conformité. En évoquant un tel désaccord dans le cadre de la procédure de suspension, la Commission aurait empêché le bon déroulement des échanges au titre de la procédure d’apurement de conformité.

37 De même, selon la République portugaise, l’article 41 du règlement no 1306/2013 ne permettrait pas d’adopter une décision de suspension des paiements mensuels fondée sur des éléments qui n’ont pas été proposés par l’État membre concerné dans son plan d’action. Une telle décision aurait des conséquences équivalentes à une correction financière sans que soient pour autant respectées les garanties offertes par la procédure d’apurement de conformité. En modifiant ou en révisant unilatéralement les
termes stricts des engagements d’un État membre, la Commission aurait utilisé une procédure offrant des garanties sensiblement moindres. En présence d’éléments nouveaux, apparus postérieurement, la Commission aurait dû ouvrir une procédure d’apurement de conformité.

38 À titre principal, la République française fait valoir que la décision attaquée viole l’article 41, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1306/2013 parce que la Commission ne pouvait pas conclure que l’État membre concerné n’était « pas en mesure de mettre en œuvre les mesures prévues dans un plan d’action comportant des indicateurs de progrès clairs qui doivent être établis après consultation de la Commission ». Cette condition ne serait pas satisfaite dès lors, d’une part, que le plan d’action
aurait été pleinement mis en œuvre et, d’autre part, que la décision attaquée serait fondée sur des éléments qui n’étaient pas prévus dans le plan d’action.

39 En premier lieu, la République française rappelle s’être engagée à appliquer le plan d’action validé en novembre 2013. Les modalités initialement prévues pour mettre à jour le SIPA ne s’avérant pas satisfaisantes, la République française rappelle également avoir proposé, par lettre du 23 décembre 2014, des modalités alternatives qui ont été validées par la Commission.

40 En deuxième lieu, la République française soutient que le plan d’action, validé en novembre 2013 et modifié en décembre 2014, a été intégralement mis en œuvre.

41 S’agissant de la mise à jour du SIPA, la République française rappelle qu’il était initialement prévu d’actualiser les photographies et d’utiliser les bases de données existantes, notamment la base de données BD TOPO, pour en faciliter l’interprétation et que les modalités révisées proposées en décembre 2014 avaient pour objectif de surmonter les difficultés apparues quand il s’est avéré que la base de données BD TOPO n’était pas suffisamment fiable. Cette mise à jour aurait été réalisée dans le
délai maximal prévu. Le problème posé par l’ancienneté des photographies aurait été résolu à la fin de 2014, comme l’indiquait la lettre des autorités françaises du 23 décembre 2014, et le travail d’interprétation des photographies aurait été achevé en 2016, comme le mentionnait le quatorzième rapport d’étape du 1er septembre 2016.

42 En ce qui concerne les contrôles sur place, la République française relève qu’il lui était reproché d’inclure des éléments et des zones qui n’étaient pas éligibles. Pour résoudre ce problème, le plan d’action prévoyait de mettre en place une procédure de remontée au niveau de l’administration centrale des arrêtés préfectoraux en la matière avant que ces arrêtés ne soient signés. Cette action aurait été mise en œuvre dans le délai prévu, à savoir pour la campagne 2014.

43 S’agissant du calcul des paiements et des sanctions, la République française souligne qu’il lui était reproché d’effectuer des calculs incorrects, de ne pas prévoir le suivi des recouvrements rétroactifs et de ne pas recouvrer des paiements indus. Pour résoudre ce problème, il avait été prévu, pour les campagnes 2013 et 2014, de renforcer les instructions aux services compétents et d’améliorer la supervision et, à compter de la campagne 2015, de revoir l’algorithme de calcul des pénalités sur
l’aide découplée, cette date plus lointaine permettant d’intégrer les modifications de l’algorithme rendues nécessaires par la réforme de la PAC. Ces mesures auraient été adoptées dans les délais prévus. En particulier, s’il n’a été possible de confirmer la bonne exécution de la révision de l’algorithme qu’en août 2016 avec la liquidation effective des paiements pour la campagne 2015, il ne s’agissait là que de constater les effets du nouvel algorithme à la première date possible. L’engagement
contenu dans le plan d’action, qui consistait à réviser l’algorithme en 2015, aurait été tenu dans le délai prévu.

44 À cet égard, la République française relève que, même si la mise en œuvre des mesures prévues par le plan d’action, telle la mise à jour du SIPA ou la révision de l’algorithme, a occasionné des retards dans la mise en œuvre des paiements de la campagne 2015, cette question ne relèverait pas du plan d’action proprement dit, qui ne portait pas sur le calendrier de mise en œuvre de cette campagne, ni d’aucune autre.

45 En troisième lieu, la République française soutient que la Commission ne peut pas se fonder sur des éléments extérieurs au plan d’action pour adopter une décision de suspension des paiements. Seule la méconnaissance des mesures prévues dans le plan d’action tel qu’approuvé en novembre 2013 et révisé en décembre 2014 permettrait l’adoption d’une telle décision.

46 Sur ce point, tout d’abord, la République française reconnaît que, lors des échanges avec la Commission sur la mise en œuvre du plan d’action, la discussion a porté sur l’application du système de prorata ou sur la détermination de l’éligibilité de certaines prairies permanentes au titre des pratiques locales établies. La République française fait observer que, en effet, la mise en œuvre des nouvelles possibilités prévues par le droit de l’Union à partir de la campagne 2015 pouvait impliquer,
pour mettre à jour le SIPA, d’ajouter au travail de photo-interprétation prévu par le plan d’action la réalisation de certaines visites de terrain pour un nombre assez limité de surfaces. Cependant, l’application du système de prorata et la détermination de l’éligibilité de certaines prairies permanentes au titre des pratiques locales établies n’auraient jamais été incluses par les autorités françaises, en tant que telles, parmi les indicateurs de progrès du plan d’action et il ne reviendrait pas
à la Commission de modifier unilatéralement ce plan pour les inclure. Aucun indicateur de progrès ne mentionnerait ces questions dans tous les rapports d’étapes transmis à la Commission, ainsi que dans les mises à jour du plan d’action, comme celles des 12 mars et 24 avril 2015.

47 Ensuite, la République française fait observer que, dans la décision attaquée, la Commission a relevé qu’il existait toujours un retard considérable s’agissant de l’instruction des demandes d’aide, particulièrement pour les dossiers relatifs aux prairies permanentes. La Commission en aurait déduit que les objectifs du plan d’action ne pourraient pas être atteints dans un avenir immédiat. Selon la République française, toutefois, le plan d’action sur lequel elle s’était engagée a été exécuté dans
les délais prévus. Les retards dans la mise en œuvre des paiements de la campagne 2015 ne relèveraient pas du plan d’action, qui ne portait pas sur le calendrier de mise en œuvre de cette campagne ni d’aucune autre. Si la Commission a considéré qu’il n’existait pas de perspective de mise en œuvre du plan d’action dans des délais rapprochés et donc qu’elle pouvait adopter la décision attaquée, ce serait parce qu’elle aurait inclus dans le plan d’action l’application du système de prorata et la
détermination de l’éligibilité de certaines prairies permanentes au titre des pratiques locales établies, deux questions sur lesquelles le plan d’action ne comporterait pas d’indicateurs de progrès.

48 En effet, premièrement, dans sa lettre du 17 février 2015, la Commission ferait état d’un « lien étroit entre la bonne mise en œuvre du plan d’action et la proposition de la réforme de la PAC, particulièrement s’agissant des questions relatives à l’éligibilité des surfaces et de certains éléments de paysage ». Un tel lien ne permettrait pourtant pas de considérer que le plan d’action serait ipso facto élargi au point de couvrir ces éléments. Le plan d’action et la réforme de la PAC seraient deux
choses distinctes. Dans cette même lettre, la Commission inclurait également unilatéralement dans ce qu’elle appelle le « plan d’action révisé » des mesures sur la conformité du système de prorata et la détermination de l’éligibilité de certains types de surfaces. La Commission n’aurait toutefois pas le pouvoir de procéder à une telle modification unilatérale du plan d’action.

49 Deuxièmement, dans sa communication du 13 avril 2015, la Commission continuerait à inclure, comme élément clé du plan d’action révisé, des éléments relatifs à l’application du système de prorata et à l’inclusion de prairies permanentes au titre des pratiques locales établies qui ne figurent pourtant pas dans le plan d’action tel qu’il a été approuvé en novembre 2013 ou dans le plan d’action révisé de décembre 2014. Or, ce serait en se fondant sur l’« effet combiné » de ces prétendues faiblesses
que la Commission aurait décidé que la mise en œuvre du plan d’action « n’offr[ait] pas l’assurance raisonnable requise pour une bonne gestion des aides ».

50 Troisièmement, dans la lettre de la Commission du 22 décembre 2015, le différend relatif à l’application du système de prorata et à l’inclusion comme surface éligible de certaines prairies permanentes au titre des pratiques locales établies serait un aspect déterminant du raisonnement de la Commission.

51 Quatrièmement, si, dans la décision attaquée, la Commission se fonde sur le retard prétendument considérable s’agissant de l’instruction des demandes d’aide, ce serait après avoir longuement exposé le différend relatif à l’application du système de prorata et à l’inclusion comme surface éligible de certaines prairies permanentes au titre des pratiques locales établies. Dans la décision attaquée, la Commission fait également référence au plan d’action « révisé » de mars 2015, alors que la dernière
révision date de décembre 2014. Ce serait donc la persistance de ce différend qui fonderait la conclusion de la Commission selon laquelle les autorités françaises n’étaient pas en mesure de mettre en œuvre le plan d’action.

52 En conclusion, la République française fait valoir que le différend d’ordre juridique relatif à l’application du système de prorata et à la détermination de l’éligibilité de certains types de surfaces diffère complètement du différend relatif aux déficiences du système de contrôle qui avait motivé le plan d’action. En effet, d’une part, le plan d’action correspondrait, pour l’essentiel, à un travail technique de remise à niveau des éléments géographiques sur la base desquels le SIPA était
élaboré. D’autre part, avec la réforme de la PAC, il était devenu possible de prévoir l’éligibilité aux aides agricoles d’un certain prorata de la surface en cause ou de rendre éligibles certaines surfaces aptes à accueillir des activités d’élevage même si les surfaces herbacées n’y étaient pas prédominantes, lorsque des pratiques locales établies permettaient de considérer que ces surfaces étaient aptes à l’élevage.

53 Par ailleurs, d’une part, la République française rappelle qu’il ressort de la disposition litigieuse que la décision attaquée ne peut se fonder que sur la démonstration que les autorités françaises n’ont pas été en mesure de mettre en œuvre les mesures contenues dans le plan d’action. La Commission devrait se fonder sur des défaillances de mise en œuvre des mesures contenues dans le plan d’action et non sur un « ensemble de faiblesse et de défaillances » invoquées de manière générale. D’autre
part, aucun élément évoqué par la Commission ne démontrerait l’existence d’une défaillance dans la mise en œuvre des mesures contenues dans le plan d’action. Ainsi, quant à la mise à jour du SIPA, laquelle devait être opérationnelle en 2016 selon le plan d’action, ou quant aux contrôles sur place et au calcul des paiements, la Commission n’alléguerait pas que ces mesures n’ont pas été mises en œuvre, mais se contenterait d’affirmer que les retards observés constitueraient une violation des
engagements pris dans le plan d’action.

54 En dernier lieu, la République française fait valoir que, s’il est vrai que son choix d’appliquer le système de prorata impliquait de revoir le système des paiements et en particulier le SIPA, cela ne signifierait pas que le système de prorata soit indissociable de la mise en œuvre du plan d’action ou que le plan d’action puisse être considéré comme évolutif. La modernisation de l’outil permettant de déterminer les surfaces éligibles afin de mettre à jour les bases de données jugées trop
anciennes devrait être distinguée de sa révision afin d’intégrer un nouveau paramètre issu de la réglementation. Ces deux actions seraient dissociables. Ce ne serait pas le plan d’action qui aurait un caractère dynamique et évolutif, mais l’outil de détermination des surfaces éligibles.

55 La République portugaise fait valoir, pour sa part, que la décision attaquée repose sur un « plan d’action révisé », ainsi désigné par la Commission, qui en aurait établi unilatéralement les termes à la suite de l’introduction du système de prorata mis en œuvre par les autorités françaises conformément à l’article 10 du règlement délégué no 640/2014. Or, la mise en œuvre des dispositions du droit de l’Union relatives à l’application d’un système de prorata ou à la détermination de l’éligibilité
de certaines prairies permanentes au titre des pratiques locales établies n’aurait aucun rapport avec les défaillances des systèmes de contrôle qui étaient à l’origine du plan d’action. La décision attaquée violerait l’article 41, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1306/2013 parce que la nécessité d’éventuelles modifications du SIPA, motivées par l’introduction du système de prorata, aurait été mentionnée après l’établissement du plan d’action et n’aurait pas été soumise à la procédure
d’apurement de conformité afin de conclure que des éléments clés du système de contrôle national faisaient défaut ou étaient inopérants en raison de la gravité ou de la persistance des déficiences constatées. La décision attaquée violerait également la disposition litigieuse parce qu’elle ne serait pas spécifiquement fondée sur les engagements contenus dans le plan d’action que l’État membre concerné s’était engagé à mettre en œuvre, mais sur des éléments étrangers à ces engagements, comme
l’introduction du système de prorata.

56 Par ailleurs, la République portugaise se prévaut du principe de protection de la confiance légitime. Faisant référence à cet égard aux points 71, 161 et 167 de l’arrêt du 22 juin 2006, Belgique et Forum 187/Commission (C‑182/03 et C‑217/03, EU:C:2006:416), la République portugaise soutient que, dans l’hypothèse où la Commission changerait son appréciation sur le seul fondement d’une application plus rigoureuse des règles juridiques ou, comme en l’espèce, extra legem, sans accorder le temps
nécessaire pour prendre effectivement en compte ce changement d’appréciation, il y aurait violation dudit principe. La République portugaise rappelle également que la législation de l’Union doit être certaine et son application prévisible pour les justiciables. Le principe de sécurité juridique exigerait que tout acte des institutions qui produit des effets juridiques soit clair, précis et porté à la connaissance de l’intéressé de telle manière que celui-ci puisse connaître avec certitude le
moment à partir duquel ledit acte existe et commence à produire ses effets juridiques. Se référant au point 124 de l’arrêt du 22 janvier 1997, Opel Austria/Conseil (T‑115/94, EU:T:1997:3), la République portugaise estime que cet impératif de sécurité juridique s’imposerait avec rigueur lorsqu’il s’agit d’un acte susceptible de comporter des conséquences financières, comme en l’espèce, afin de permettre aux intéressés de connaître avec exactitude l’étendue des obligations qu’il leur impose.

57 La Commission conteste cette argumentation en renvoyant aux antécédents du litige. En substance, elle fait valoir que, même si la République française excipe des mesures prises pour mettre en œuvre le plan d’action, cette mise en œuvre a accusé des retards et des défaillances qui justifient l’adoption de la décision attaquée.

58 En l’espèce, il y a lieu de relever que, dans la décision attaquée, la Commission a suspendu les paiements mensuels à la République française au titre du FEAGA en application de l’article 41, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1306/2013.

59 Au considérant 1 de la décision attaquée, la Commission a rappelé que cette disposition lui permettait de suspendre les paiements mensuels à un État membre dans l’hypothèse où, d’une part, « un ou plusieurs des éléments clés du système de contrôle national en cause [faisaient] défaut ou [étaient] inopérants en raison de la gravité ou de la persistance des déficiences constatées », et où, d’autre part, elle « en conclu[ait] que l’État membre concerné n’[était] pas en mesure de mettre en œuvre les
mesures nécessaires pour remédier à la situation dans l’immédiat, conformément à un plan d’action comportant des indicateurs de progrès clairs qui [devaient] être établis après l’avoir consultée ».

60 À cet égard, il convient de rappeler que la procédure de suspension n’a pas le même objet que la procédure d’apurement de conformité. En effet, la procédure de suspension permet à la Commission de suspendre temporairement des paiements mensuels à un État membre en application du FEAGA ou du Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), notamment en cas de défaillances graves des systèmes de contrôle national ou de recouvrement des paiements irréguliers. En revanche, la procédure
d’apurement de conformité permet à la Commission de déterminer les montants à exclure définitivement du financement de l’Union lorsque les dépenses relevant du FEAGA et du Feader n’ont pas été effectuées conformément au droit de l’Union. Contrairement à ce que font valoir la République française et la République portugaise, il ne peut être déduit de l’existence d’une procédure d’apurement permettant de déterminer les montants à exclure du financement de l’Union que la Commission ne puisse pour
autant, auparavant ou concomitamment, utiliser la procédure de suspension pour ce qui concerne les paiements mensuels correspondant à de tels montants. En effet, l’article 41, paragraphe 3, du règlement no 1306/2013 prévoit expressément que les suspensions prévues par cette disposition sont sans préjudice de l’application des articles 51 et 52 du règlement no 1306/2013 portant respectivement sur l’apurement comptable et l’apurement de conformité.

61 En outre, il doit être relevé que, tout comme la procédure d’apurement de conformité, la procédure de suspension des paiements mensuels offre des garanties procédurales à l’État concerné afin de lui permettre de faire valoir ses observations avant l’adoption d’une décision de suspension des paiements. Dans la présente affaire, la République française a ainsi été informée à deux reprises, par la communication du 13 avril 2015 et par la communication supplémentaire du 20 mai 2016, de l’intention de
la Commission d’adopter une décision de suspension des paiements mensuels pour les raisons exposées dans ces communications. La République française a également pu présenter ses observations à cet égard le 24 avril 2015 et le 16 juin 2016.

62 De même, s’agissant des allégations de la République française relatives au risque d’atteinte aux garanties procédurales reconnues à l’État concerné au titre de la procédure d’apurement de conformité ou au fait que les raisons exposées par la Commission pour les besoins de la procédure de suspension auraient empêché le bon déroulement des échanges au titre de la procédure d’apurement de conformité, il y a lieu de constater que de telles affirmations, au demeurant non étayées, relèvent d’une
procédure distincte qui ne fait pas l’objet de la présente affaire. Il en va également ainsi de la question du paiement des montants mensuels suspendus par la décision attaquée, soulevée par le Tribunal dans la mesure d’organisation de la procédure du 26 janvier 2018, qui, comme le souligne la Commission, fait l’objet de la procédure d’apurement de conformité.

63 Partant et en premier lieu, il résulte de ce qui précède que la décision attaquée n’a pas pour objet d’exclure définitivement des montants du financement de l’Union et ainsi de contourner la procédure d’apurement de conformité comme le font valoir en substance la République française et la République portugaise, mais seulement de suspendre des paiements mensuels en application de la procédure prévue à cet effet.

64 Pour pouvoir adopter une décision de suspension des paiements mensuels, la Commission doit donc s’assurer que les conditions définies par l’article 41, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1306/2013 sont satisfaites.

65 En l’espèce, la première condition requise pour permettre la suspension des paiements mensuels est d’avoir « un ou plusieurs des éléments clés du système de contrôle national en cause [qui] font défaut ou sont inopérants en raison de la gravité ou de la persistance des déficiences constatées ».

66 À cet égard, au considérant 2 de la décision attaquée, la Commission a indiqué que « plusieurs audits effectués par la Commission avaient révélé des problèmes liés, entre autres, au [SIGC], au [SIPA], aux contrôles administratifs croisés et aux contrôles sur place » et qu’« un plan d’action [avait] été établi par les autorités françaises en novembre 2013 afin de remédier aux faiblesses du système de gestion et de contrôles des aides à la surface financé par le [FEAGA][, lequel] comportait, entre
autres aspects, la mise à jour et l’amélioration de la qualité de l’information du SIPA en France ».

67 Ainsi, par lettre du 14 mai 2013 (voir point 3 ci-dessus), la Commission avait fait état de problèmes récurrents concernant notamment les aides à la surface. Les trois principales faiblesses identifiées dans ce domaine étaient les suivantes :

– premièrement, en ce qui concerne le SIPA, la surface maximale non éligible n’était pas à jour en raison de l’ancienneté des photos utilisées et d’une interprétation incorrecte des dispositions réglementaires concernant les éléments de paysage (bosquets pâturables, mares, rochers) ;

– deuxièmement, en ce qui concerne les contrôles sur place, des éléments de paysage et des zones inéligibles étaient considérés comme des surfaces admissibles (bosquets pâturables, mares, rochers, jardins, parcs, zones de stationnement, zones boisées tels les parcours exclusivement ligneux) ;

– troisièmement, en ce qui concerne le calcul des paiements et des sanctions, le calcul incorrect des paiements, l’absence de suivi des recouvrements rétroactifs et, dans certains cas, un défaut de recouvrement pour les paiements indus avaient été relevés.

68 Partant, et en deuxième lieu, il convient de relever que la République française ne conteste pas dans la présente affaire que, sur plusieurs éléments clés, son système de contrôle faisait défaut en raison de la gravité ou de la persistance des déficiences constatées au cours des années qui ont précédé l’adoption du plan d’action en ce qui concerne, notamment, « la mise à jour et l’amélioration de la qualité de l’information du SIPA en France ». Ces déficiences avaient pour conséquence que des
éléments qui n’étaient pas éligibles aux aides à la surface étaient pourtant pris en considération alors qu’ils auraient dû être exclus, aussi bien initialement, sur la base du SIPA, que par la suite, à l’issue des contrôles sur place ou du calcul des paiements et des sanctions. Concrètement cela signifie que des surfaces qui étaient déclarées par les bénéficiaires des aides comportaient des éléments qui auraient dû en être exclus dès le stade de la demande d’aide, la photo-interprétation de
cette surface identifiant ces éléments, ou dès l’identification postérieure de la non-admissibilité de tels éléments.

69 La seconde condition requise par l’article 41, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1306/2013 pour permettre la suspension des paiements mensuels est que la Commission puisse conclure que « l’État membre concerné n’[était] pas en mesure de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour remédier à la situation dans l’immédiat, conformément à un plan d’action comportant des indicateurs de progrès clairs qui [devaient] être établis après consultation de la Commission ».

70 En l’espèce, pour remédier à la situation caractérisée par la Commission, la République française a défini le plan d’action, qui a été transmis à la Commission par lettre du 13 novembre 2013. Le plan d’action prévoyait les mesures et étapes suivantes.

71 Premièrement, en ce qui concerne le SIPA, les autorités françaises envisageaient de remédier à l’ancienneté des photos en garantissant le respect de leur ancienneté maximale et en renouvelant plus rapidement les prises de vue. Les autorités françaises relevaient à cet égard que 100 % des photos dataient de moins de cinq ans en 2013. Un indicateur de suivi devait être déterminé en décembre 2013 et l’objectif était d’être opérationnel en 2016.

72 S’agissant de l’interprétation incorrecte des dispositions réglementaires concernant les éléments de paysage, les autorités françaises indiquaient avoir déjà renforcé les consignes pour prendre en compte les résultats des contrôles effectués lors de la campagne 2012. Elles envisageaient également d’incorporer systématiquement les résultats des contrôles sur place effectués à partir de la campagne 2013, l’objectif étant que les agriculteurs puissent effectuer leurs déclarations de 2014 avec un RPG
complètement mis à jour avec les résultats de ces contrôles.

73 Les autorités françaises précisaient aussi étudier une hypothèse de photo-interprétation systématique des nouvelles orthophotographies qui devait être progressivement utilisée sur les campagnes 2012 à 2015 et au plus tard en 2016. Elles suggéraient de se servir de la base de données BD TOPO pour atteindre différents résultats :

– l’incorporation de la base de données BD TOPO dans le système de gestion devait permettre de développer un contrôle croisé sur les éléments artificialisés pour les campagnes 2012 (seuil à 5 ares) et 2013 (abaissement du seuil à 2 ares), ces éléments artificialisés devant être intégrés dans la couche des surfaces non admissibles du RPG ;

– l’incorporation de la base de données BD TOPO pour tous les éléments artificialisés du territoire sans limite de surface pouvait, quant à elle, être reportée en 2015, compte tenu de la faible surface en chevauchement de moins de 2 ares (moins de 800 hectares au total), une décision à cet égard devant être prise en novembre ou en décembre 2013 ;

– l’incorporation dans le SIGC de la couche « forêt » de la base de données BD TOPO, afin de développer un contrôle croisé, était envisagée dès octobre ou novembre 2013 pour un travail débutant lors de la campagne 2014 susceptible d’être poursuivi, selon le nombre de chevauchements, en 2015 et au plus tard en 2016 ;

– l’incorporation dans le SIGC de la couche « surface en eau » et des rochers présents dans la base de données BD TOPO, afin de développer un contrôle croisé, était envisagée dès décembre 2013 ou janvier 2014, la campagne d’exploitation de ces couches devant être fixée en fonction des résultats de l’analyse technique et du dénombrement des chevauchements.

74 Par ailleurs, les autorités françaises s’engageaient à améliorer la qualité des orthophotographies, ce qui devait être fait pour la campagne 2013 ou en avril 2014 pour le début de la période de déclaration, à évaluer la qualité du RPG, y compris les nouvelles couches graphiques, à l’occasion d’un premier rapport annuel préparé au premier semestre de 2014 sur la campagne 2013 et à mettre en place en 2014 un plan d’information et d’accompagnement des agriculteurs en matière de qualité des
déclarations.

75 Deuxièmement, en ce qui concerne les contrôles sur place, les autorités françaises indiquaient mettre en place une procédure de remontée et de validation des arrêtés préfectoraux avant leur signature et renvoyaient pour le reste au contrôle croisé avec la base de données BD TOPO mis progressivement en œuvre pour les éléments artificialisés et pérennes.

76 Troisièmement, en ce qui concerne le calcul des paiements et des sanctions, les autorités françaises indiquaient que l’algorithme de calcul des pénalités sur l’aide découplée en cas d’écart serait revu lors de la mise en œuvre de la réforme de la PAC en 2015, l’élaboration étant faite au cours de la campagne 2015 pour une application en automne 2015, d’autres mesures intervenant pour régler les autres difficultés au cours de la campagne 2013 et de la campagne 2014.

77 Par lettre du 28 novembre 2013 (voir point 4 ci-dessus), la Commission a indiqué aux autorités françaises que le plan d’action pouvait « être considéré comme définitif » tout en relevant que, « dans le domaine des aides à la surface, les actions proposées pourraient encore être complétées [et] détaillées au cours de sa mise en œuvre ».

78 Dès lors, il y a lieu de souligner que le plan d’action pouvait donc être complété ou détaillé au cours de sa mise en œuvre. Dans ce contexte, au considérant 3 de la décision attaquée, la Commission a indiqué :

« Les rapports [d’étape] soumis par les autorités françaises et un audit effectué par la Commission en novembre 2014 ont mis en évidence des délais considérables dans la mise en œuvre de points essentiels du plan d’action, pouvant avoir des effets s’étendant à la gestion de l’année 2015. Par conséquent, le plan d’action initial a été révisé en mars 2015. »

79 En effet, par lettre du 22 décembre 2014 (voir point 7 ci-dessus), la Commission a communiqué aux autorités françaises ses constatations sur l’état d’avancement du plan d’action. Elle a relevé ce qui suit :

– « l’avancement du [p]lan d’action […] ne correspond pas entièrement à la réalité. Par exemple, tel que clarifié par les autorités françaises, l’ancienneté moyenne de la couche “bâti” doit être augmentée de deux ans pour chaque département (la couche est intégrée depuis 2012), ce qui signifie que pour 2014 les orthophoto[graphie]s utilisées pour mettre à jour le RPG ont plus de [cinq] ans » ;

– « [l]’estimation pour l’entièreté du territoire des volumes d’anomalies générées par le croisement du RPG avec la couche “bâti” et “végétation” au seuil de 0 are n’est pas fournie à ce jour (travail qui selon le [p]lan d’action aurait dû être finalisé en 2013 pour le “bâti” et en 2014 pour la couche “végétation”) » ;

– « [d]ans la [base de données] BD TOPO, des déficiences et éléments manquants (dans la délinéation des éléments des couches “végétation” et “bâti”) ont été constatés, ce qui a pour conséquence le non-déclenchement d’alertes pour traiter les potentiels chevauchements, notamment pour ce qui est du bâti de plus de 2 ares et la végétation de plus de 50 ares (d’après les seuils fixés par les autorités françaises) » ;

– « [l]’impact financier des chevauchements confirmés, au seuil décrit, n’a pas encore été calculé par les autorités françaises. D’après les explications données, pour les seuils en question les paiements sont arrêtés en cas de chevauchement » ;

– « le traitement des surfaces “bâtie” et “végétation” au-dessous de 2 et 50 ares respectivement doivent encore être traitées et l’impact financier calculé. À cela s’ajoute le repoussement de l’intégration de la couche “eau” et “éléments linéaires” à 2015, contrairement à ce qui était prévu initialement (été 2014 pour les éléments linéaires et fin 2014 pour les surfaces en eau) » ;

– « les visites sur le terrain ont démontré que des surfaces acceptées comme éligibles au soutien direct du premier pilier ne respectaient pas les dispositions réglementaires de l’Union européenne. Ceci est particulièrement le cas pour les pâtures permanentes et les landes et parcours […] Par extension, les arrêtés préfectoraux et/ou leur implémentation n’est pas conforme à la législation de l’Union européenne ».

80 Dans cette lettre, la Commission indiquait également que, du fait des constatations susmentionnées, l’état d’avancement effectif du plan d’action ainsi que son succès ne pouvaient pas être confirmés. Pour autant, la Commission faisait observer que ses services avaient noté que les autorités françaises développaient une approche alternative qui devait, en partie, résoudre les problèmes relevés. La Commission était ainsi d’avis que « l’établissement d’un plan d’action révisé [était] requis ».

81 La Commission invitait donc les autorités françaises à communiquer un tel plan, lequel devait au minimum comporter les éléments suivants : « l’indication précise des délais (mois et année) ; [l]’intégration directe dans [l’outil de gestion] ISIS des informations reçues de l’IGN, le re-dessin des îlots ; la correcte photo-interprétation du terrain agricole, conformément aux dispositions réglementaires applicables à partir de 2015, [étant précisé que, v]u les résultats des visites sur le terrain
obtenus [à la] suite [de] la mission, l’implémentation d’un prorata pour chaque parcelle en pâture/landes et parcours est à considérer par les autorités françaises ».

82 En conclusion, la Commission indiquait qu’il « s’av[érait] indispensable de remédier à ces déficiences avant la mise en œuvre de la campagne 2015 (avril 2015), notamment pour ce qui est des problèmes systémiques d’interprétation réglementaires ». La Commission précisait, à cet égard, que le « non-respect sera[it] considéré au regard de l’article 41[, paragraphe 2, sous b), du règlement no ]1306/2013 qui indique que le défaut de mise en œuvre d’un plan d’action peut donner lieu à la
réduction/suspension des paiements ». En conséquence, la Commission relevait que le « prochain rapport d’étape à transmettre […] pour [la] fin [de] janvier 2015 [devait] inclure les modifications nécessaires ».

83 Par lettre du 23 décembre 2014 (voir point 8 ci-dessus), les autorités françaises ont communiqué à la Commission « les éléments attendus relatifs à la mise en œuvre du [plan d’action] en 2014 et à sa poursuite en 2015 ».

84 À titre liminaire, les autorités françaises rappelaient que le plan d’action était prévu sur les campagnes 2014 et 2015, ce qui signifiait qu’il se terminerait au moment des paiements effectués au titre de la campagne 2015.

85 S’agissant de la mise à jour du RPG, les autorités françaises indiquaient que des travaux étaient en cours afin d’assurer, par photo-interprétation et croisement avec des bases de données surfaciques de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN), que toutes les surfaces non éligibles aux aides soient exclues de l’assiette des superficies pouvant recevoir des paiements. Les modalités de réalisation de ces travaux étaient détaillées. Ces travaux devaient permettre de
définir les surfaces admissibles aux aides de la PAC, mais également les « surfaces d’intérêt écologique (SIE) » dans le cadre du futur paiement au titre du verdissement. Les autorités françaises relevaient que le calendrier était « extrêmement contraint », car les travaux devaient être réalisés dans des délais compatibles avec la campagne 2015. Elles notaient que ces travaux étaient d’une « ampleur colossale compte tenu du nombre de dossiers PAC à expertiser [, à savoir] 80 % des dossiers PAC
déposés en 2014, soit plus de 300000 sur 372000 ». Comme objectifs prévisionnels de livraison des couches graphiques, les autorités françaises annonçaient le calendrier suivant : janvier 2015, pour les contours des îlots ; mars 2015, pour les surfaces non agricoles dans les îlots et juin 2015 pour les surfaces non agricoles adjacentes aux îlots. Par ailleurs, les autorités françaises relevaient que « l’une des difficultés de mise en œuvre de ce chantier sur deux ans [était] liée au fait que, [à
la] suite [des] décisions relatives à la réforme de la PAC, les règles en matière d’admissibilité des surfaces aux paiements directs [allaient] devoir évoluer ».

86 Pour ces raisons, les autorités françaises indiquaient également à la Commission avoir décidé de lancer une rénovation intégrale du RPG pour 2015. Elles précisaient, à cet égard, que, tout en intégrant les résultats du plan d’action, le dispositif mis en place en 2015 n’utiliserait plus les couches de la base de données BD TOPO, mais des couches graphiques spécifiques élaborées par l’IGN pour les besoins de la PAC. Les autorités françaises concluaient ainsi : « En d’autres termes, le plan
[d’action qui sera mis en œuvre en] 2015 ne sera pas la simple reconduite du plan [d’action qui a été mis en œuvre en] 2014 (en abaissant les seuils), mais un nouvel exercice exhaustif de photo-interprétation conduisant à la construction de ces couches graphiques ».

87 Les éléments contenus dans la lettre du 23 décembre 2014 ont été complétés par le cinquième rapport d’étape, transmis par les autorités françaises à la Commission le 30 janvier 2015 (voir point 8 ci-dessus). Dans ce rapport, les autorités françaises entendaient apporter des réponses à la lettre de la Commission du 22 décembre 2014 et communiquer de nouveaux éléments.

88 S’agissant de la mise en œuvre du plan d’action en 2014, les autorités françaises rappelaient s’être engagées à finaliser le volet RPG de ce plan sur « deux années (voire trois) : campagnes 2014 et 2015 (voire 2016) ». Ainsi, en 2014, elles avaient décidé de traiter en priorité ce qui représentait potentiellement le plus gros risque financier pour le FEAGA : la couche « bâti » au-delà de 2 ares et la couche « végétation » au-delà de 50 ares. Les éléments non traités en 2014 allaient être intégrés
au plan d’action mis en œuvre en 2015.

89 S’agissant de la mise en œuvre « d’un plan d’action révisé pour l’année 2015 », les autorités françaises, d’une part, indiquaient prendre note « de la validation de principe des services de la Commission » et, d’autre part, rappelaient « les éléments déjà transmis sur le sujet ([le] 23 décembre [2014]) ». Concernant l’interprétation des dispositions réglementaires relatives aux éléments de paysage et à l’admissibilité de certaines surfaces, les autorités françaises faisaient également part à la
Commission de leur « choix, en application de l’article 10 du règlement délégué no 640/2014, d’appliquer un système de prorata pour déterminer la surface admissible des prairies permanentes », ainsi que de la méthode envisagée à cet effet, laquelle comprenait notamment une grille de prorata nationale à cinq catégories.

90 En dernier lieu, les autorités françaises rappelaient leur proposition d’organiser à Paris (France) une réunion technique avec des représentants des services de la Commission en vue de présenter « les nouvelles modalités du plan d’action […] qui ser[aie]nt mises en œuvre en 2015 ».

91 Par lettre du 17 février 2015 (voir point 9 ci-dessus), la Commission a demandé des clarifications sur plusieurs aspects relatifs à la mise en œuvre du plan d’action envisagés par les autorités françaises dans leur lettre de transmission du cinquième rapport d’étape du 30 janvier 2015. Ainsi, la Commission indiquait devoir connaître l’impact financier et la date à laquelle serait finalisé le chiffrage pour ce qui concerne la couche « bâti » au-dessous de 2 ares, la couche « végétation »
au-dessous de 50 ares et les éléments « eau » et « linéaires ».

92 Dans cette lettre du 17 février 2015, la Commission indiquait également être d’avis, au vu des données obtenues au titre de l’audit réalisé en novembre 2014, que la technique de photo-interprétation n’était pas en conformité avec la réglementation pour ce qui était des éléments de paysage et de l’admissibilité de certaines surfaces. La Commission soulignait aussi que la grille de prorata nationale à cinq catégories ainsi que la question de l’éligibilité de surfaces telles que les bosquets ou les
mares devaient être clarifiées, que des visites sur le terrain en cas de doute devaient être entamées et qu’un « plan d’action révisé » devait être rapidement transmis pour détailler les objectifs et les jalons.

93 Par lettre du 25 février 2015 (voir point 9 ci-dessus), la Commission a communiqué aux autorités françaises plusieurs éléments relatifs aux résultats d’une enquête menée en France en ce qui concerne les années 2013 et 2014, de laquelle il ressortait que le SIPA présentait des lacunes liées à l’ancienneté des orthophotographies et à une photo-interprétation déficiente. La Commission relevait également qu’il existait des problèmes liés à la définition des surfaces éligibles en ce qui concerne les
éléments de paysage et les particularités topographiques ainsi que les « landes et parcours », que les contrôles sur place manquaient d’efficacité et qu’il y avait des problèmes en ce qui concerne le calcul des paiements et des sanctions ainsi que le recouvrement rétroactif.

94 Par lettre du 12 mars 2015 (voir point 9 ci-dessus), les autorités françaises ont transmis à la Commission le plan d’action faisant état de « diverses mises à jour ». Ce document, intitulé « Plan d’action […] – Objectif de calendrier de la campagne PAC 2015 », comportait trois rubriques intitulées « SIPA/RPG – Réduire l’ancienneté des orthophotographies », « SIPA/RPG – Procéder à une évaluation de la qualité du RPG », et « Modification de la gestion du RPG et articulation avec les contrôles sur
place ». Une nouvelle note des autorités françaises, en date du 30 mars 2015 (voir point 9 ci-dessus), a communiqué à la Commission des éléments complémentaires.

95 L’examen des modifications apportées au plan d’action permet de constater que les échéances prévues pour les différentes actions envisagées allaient du 15 janvier 2015, en ce qui concerne la livraison des nouvelles orthophotographies pour la constitution du RPG 2015, à la fin de 2015 pour la réalisation des paiements.

96 Partant et en troisième lieu, il ressort de ce qui précède que les actions initialement envisagées dans le plan d’action approuvé en novembre 2013 ont par la suite été révisées au cours de sa mise en œuvre afin de tenir compte, notamment, des difficultés rencontrées par les autorités françaises en ce qui concerne l’utilisation de la base de données BD TOPO. En particulier, n’ayant pas été en mesure de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour remédier à la situation relative aux déficiences
constatées en ce qui concerne la mise à jour de l’amélioration du SIPA, au moment de la campagne 2013 ou de la campagne 2014, les autorités françaises s’étaient engagées à y pourvoir à l’occasion de la campagne 2015.

97 Dans ce contexte, la République française ne peut être suivie dans son argumentation quand elle allègue que l’important est de relever que son engagement au titre du plan d’action était de le finaliser en 2016. Ainsi qu’il ressort de ce qui précède, plusieurs indicateurs mentionnés par le plan d’action prévoyaient une mise en œuvre échelonnée dans le temps en considération d’objectifs à atteindre à l’issue de chaque campagne. La mise en œuvre était donc progressive et n’était pas seulement
conditionnée à la réalisation des objectifs en 2016.

98 En particulier, pour ce qui concerne les modifications apportées au plan d’action au titre des révisions liées, d’une part, aux difficultés rencontrées par les autorités françaises en ce qui concerne l’utilisation de la base de données BD TOPO et, d’autre part, aux possibilités offertes par l’entrée en vigueur des dispositions relatives à l’application du système de prorata et à l’inclusion comme surfaces éligibles de certaines prairies permanentes au titre des pratiques locales établies, il y a
lieu de relever que l’accent avait été mis sur la mise en œuvre de ces mesures à l’occasion de la campagne 2015.

99 Afin d’étayer l’insuffisante mise en œuvre du plan d’action, la Commission a relevé ce qui suit aux considérants 3 à 7 de la décision attaquée :

« (3) […] Un audit de la Commission effectué en mars 2015 a confirmé que des déficiences majeures subsistaient s’agissant de la mise en œuvre du plan d’action.

(4) En conséquence, conformément à l’article 41, paragraphe 2, quatrième alinéa, du règlement […] no 1306/2013, la Commission a communiqué à la France, par lettre du 13 avril 2015, son intention de réduire ou de suspendre les paiements mensuels en l’absence d’informations complémentaires reçues ou si ces informations complémentaires n’étaient pas satisfaisantes. La France a répondu par lettre du 7 mai 2015, indiquant que des actions correctives avaient été menées à bien avec l’objectif de
finaliser le plan d’action en 2015.

(5) Les déficiences mentionnées dans la lettre du 13 avril 2015 concernaient, entre autres éléments, la manière selon laquelle la France avait établi le système de prorata pour évaluer la surface maximale éligible pour les prairies permanentes, en application de l’article 10 du règlement délégué […] no 640/2014 […], qui n’était pas en conformité avec les recommandations des lignes directrices de la Commission et qui présentait des risques importants en termes de gestion et de contrôle ; la
détermination de l’éligibilité de certains types de surfaces, notamment celles avec une densité importante d’arbres et/ou à faible ressource herbagère, par exemple des châtaigneraies, des fougères ou des parcelles ayant un prorata inférieur à 50 % ; la manière dont la France allait pouvoir gérer les anomalies liées, par exemple, à la détermination du prorata pour l’éligibilité des prairies permanentes ainsi qu’à la détermination des surfaces d’intérêt écologique (SIE) au titre du
verdissement. De manière générale, il était relevé que le plan d’action n’était toujours pas mis en œuvre au motif que les surfaces répertoriées dans le SIPA ne disposaient pas toutes d’une surface maximale éligible établie conformément aux exigences réglementaires. Il était demandé aux autorités françaises de remédier à l’ensemble des points visés dans la lettre avant le 16 octobre 2015.

(6) L’ensemble des éléments précités, en particulier les délais et insuffisances dans la mise à jour et l’amélioration du SIPA en France, ont de fait emporté des conséquences négatives importantes pour la gestion des demandes d’aide au titre de l’année 2015, notamment s’agissant de la mise à disposition du bénéficiaire de l’information requise relative à la surface maximale éligible et aux surfaces non agricoles, y compris les SIE.

(7) Un rapport de suivi envoyé par la France le 9 octobre 2015 et un nouvel audit effectué par la Commission au cours de la semaine du 30 novembre 2015 ont permis de conclure qu’il existe toujours un retard considérable s’agissant de l’instruction administrative des dossiers de demandes d’aide, de la notification aux exploitants des données issues de leurs déclarations, du calcul des surfaces admissibles et des SIE, du traitement des anomalies ressortant des contrôles administratifs et sur place,
des visites rapides sur le terrain visant à évaluer l’éligibilité des prairies permanentes et des contrôles sur place. Ces retards ont été par la suite confirmés par un audit réalisé par la Commission du 11 au 15 avril 2016. Ainsi, les contrôles sur place ne seraient finalisés qu’en juillet 2016 au plus tôt, ce qui affecte leur efficacité et par conséquent leur effet utile, en particulier en cas de doute relatif à l’éligibilité des surfaces ou au respect des exigences liées à la
diversification des cultures dans le cadre du verdissement. Ceci confirme que les objectifs du plan d’action ne pourront être atteints dans un avenir immédiat, ce qui n’offre pas l’assurance raisonnable requise quant à la bonne gestion des aides et à la légalité et la régularité des paiements au titre de l’année 2015. En outre, ces retards affectent également l’établissement de la valeur définitive des droits à paiement, qui aurait dû intervenir le 1er avril 2016 au plus tard, conformément à
l’article 18 du règlement délégué […] no 639/2014 […], ainsi que l’exécution des paiements eux-mêmes. En conséquence, une suspension des paiements est appropriée. »

100 L’examen des différents documents cités dans la décision attaquée et qui ont été évoqués aux points 69 à 98 ci-dessus permet bien d’établir l’insuffisante mise en œuvre du plan d’action qui y est mentionnée. En effet, il ressort de ces documents que, comme le fait valoir la Commission, les délais et les insuffisances relevées dans la mise à jour du SIPA et dans son amélioration ont emporté des conséquences négatives importantes pour la gestion des demandes d’aide au titre de l’année 2015,
s’agissant notamment de la mise à la disposition du bénéficiaire de l’information requise relative à la surface maximale éligible et aux surfaces non agricoles.

101 Ainsi, contrairement aux engagements adoptés une première fois dans le plan d’action approuvé en novembre 2013 et renouvelés une seconde fois à l’occasion des adaptations apportées au plan d’action, du fait des difficultés rencontrées par les autorités françaises en ce qui concerne l’utilisation de la base de données BD TOPO et des possibilités offertes par l’entrée en vigueur des dispositions prévues par la réforme de la PAC, les autorités françaises n’ont pas été en mesure de mettre en œuvre
ces engagements de manière satisfaisante à l’occasion de la campagne 2015.

102 Pour les raisons évoquées dans les différents documents mentionnés dans la décision attaquée et qui ont été évoqués aux points 69 à 98 ci-dessus, la Commission était en droit de considérer que les déficiences constatées entraînaient bien des retards et des difficultés dans la bonne conduite de la campagne 2015 en dépit des engagements pris à cet égard par les autorités françaises.

103 Ainsi, il ressort des constatations effectuées par la Commission, dans sa communication du 13 avril 2015, que plusieurs interrogations subsistaient sur la mise en œuvre du plan d’action, notamment en ce qui concerne les « modalités de gestion des demandes d’aide en 2015 ». La Commission relevait à cet égard qu’« une vraie incertitude persist[ait] sur la surface sur laquelle port[ait] la demande d’aide et sur laquelle l’agriculteur s’engage[ait] », et ce en raison de la qualité et de la quantité
d’informations que le bénéficiaire recevrait de la part de l’administration afin de pouvoir introduire sa demande d’aide. La Commission relevait également que, de ce fait, il était difficile de savoir « dans quelle mesure l’organisme payeur [allait] pouvoir gérer les nombreuses anomalies qui [allaient] remonter suite à l’instruction administrative des dossiers » et que « la distribution et l’allocation des droits à paiement risqu[ai]ent d’être affectées, avec des conséquences potentielles pour
les campagnes ultérieures ».

104 De même, dans sa lettre du 22 décembre 2015 (voir point 20 ci-dessus), la Commission a rappelé que les autorités françaises s’étaient engagées à mettre en œuvre les actions définies dans le plan d’action révisé avant la fin de l’année 2015. La Commission a fait valoir à cet égard que, en indiquant à l’occasion de la mission conduite en France le 1er décembre 2015 que ces actions ne pourraient être achevées qu’en avril ou en mai 2016, les autorités françaises retardaient pour la deuxième fois la
mise en œuvre du plan d’action. Or, selon la Commission, de tels retards avaient pour conséquence le maintien de déficiences dans la mise à jour du SIPA et l’existence d’un nombre important d’anomalies encore à traiter.

105 Enfin, dans la communication supplémentaire du 20 mai 2016 intervenue à la suite d’une mission d’audit menée en France en avril 2016, la Commission a relevé qu’il existait de « nouveaux retards », notamment pour « l’établissement définitif de la valeur et du nombre de droits à paiement, […], la réalisation des visites rapides et des contrôles sur place, sur base de quoi la réalisation des paiements pour la campagne 2015 n’[était] envisagée qu’après juin 2016 ». La Commission craignait même que
« les retards encourus affecte[nt] également la réalisation correcte des contrôles sur place et les paiements de la campagne 2016 ».

106 Aucun argument présenté par la République française n’est de nature à remettre en cause cette conclusion. En effet, outre le fait que la République française se prévaut du fait d’avoir satisfait in fine à ses engagements, ce qui ne saurait pour autant empêcher la Commission, pour les besoins de la décision attaquée, de relever les retards intervenus au regard des délais envisagés et leurs conséquences, la République française se limite en substance à faire valoir que la décision attaquée est
fondée sur un différend d’ordre juridique qui l’opposait à la Commission en ce qui concerne l’application du système de prorata et la détermination de l’éligibilité de certaines prairies permanentes au titre des pratiques locales établies.

107 Or, s’il s’avère effectivement que, comme le fait observer la République française, l’application du système de prorata et la détermination de l’éligibilité de certaines prairies permanentes au titre des pratiques locales établies ne figurent pas au nombre des indicateurs de progrès prévus par le plan d’action, dans sa version initiale comme dans sa version révisée, les observations de la Commission relatives à ces deux questions n’ont été évoquées dans la décision attaquée qu’à titre incident,
au titre d’une énumération des différentes déficiences relevées (voir décision attaquée, considérant 5).

108 Ainsi qu’il ressort de la décision attaquée, et notamment des considérants 6 et 7 ainsi que des documents mentionnés dans ladite décision, la Commission était en mesure de considérer que, en 2015, le plan d’action n’était pas mis en œuvre du fait des délais et des insuffisances dans la mise à jour et l’amélioration du SIPA et que cette défaillance avait emporté des conséquences négatives importantes pour la gestion des demandes au titre de cette année. La Commission pouvait dès lors valablement
conclure que la République française n’était pas en mesure de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour remédier à la situation dans l’immédiat.

109 S’agissant des arguments présentés par la République portugaise au soutien des moyens tirés de la violation du principe de protection de la confiance légitime et de la violation du principe de sécurité juridique, force est de constater que de tels moyens n’ont pas été soulevés par la République française dans sa requête, qui soulève à titre principal la violation de l’article 41, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1306/2013 et à titre subsidiaire la violation du principe de proportionnalité.
Il n’y a donc pas lieu de répondre à ces moyens qui sont irrecevables, un intervenant ne pouvant soulever un moyen non soulevé par la partie requérante (voir, en ce sens, arrêt du 25 juin 1998, British Airways e.a./Commission, T‑371/94 et T‑394/94, EU:T:1998:140, point 75).

110 Il ressort de ce qui précède que la République française, soutenue par la République portugaise, n’est pas fondée à soutenir que la décision attaquée viole l’article 41, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1306/2013.

111 Le premier moyen doit donc être rejeté.

Sur le second moyen, tiré de la violation du principe de proportionnalité

112 À titre subsidiaire, la République française demande l’annulation de la décision attaquée pour violation du principe de proportionnalité. Elle rappelle, tout d’abord, que, dans la décision attaquée, la Commission a décidé de suspendre les paiements à la République française « à hauteur de 3 % du total des paiements mensuels relatifs aux aides découplées liées à la surface au titre de l’année 2015, correspondant aux dépenses effectuées chaque mois par la République française du mois de juillet
2016 au mois de juillet 2017 inclus ». La République française relève également que, pour justifier ce taux de 3 %, la Commission a constaté, d’une part, qu’une correction de 5 % correspondait à la correction applicable dans le cadre de la procédure d’apurement de conformité en cas de défaillance dans les contrôles clés et, d’autre part, qu’il convenait aussi de tenir compte d’un certain nombre de mesures adoptées par la République française pour remédier à la situation.

113 Dans ce contexte, la République française souligne qu’elle ne conteste pas les modalités de détermination du taux de la suspension des paiements mensuels retenues par la Commission, mais « l’assiette de la suspension », « à savoir l’ensemble des paiements mensuels relatifs aux aides liées à la surface au titre de l’année 2015 ». En effet, la décision attaquée serait essentiellement fondée sur la persistance du différend que la Commission et les autorités françaises avait au sujet de
l’application de la réglementation relative au prorata et à l’inclusion de certaines surfaces comme prairies permanentes au titre des pratiques localement établies. D’une part, toutefois, l’ensemble des surfaces concernées par le RPG serait évalué à environ 27 millions d’hectares et les prairies permanentes susceptibles de se voir appliquer le système de prorata ou d’être déclarées éligibles au titre des pratiques locales établies ne correspondraient qu’à une faible partie du total des surfaces
éligibles à une aide agricole. D’autre part, l’ensemble des prairies permanentes serait évalué à 8,6 millions d’hectares et cet ensemble recouvrirait des réalités disparates. Pour l’essentiel, cet ensemble serait constitué de prairies couvertes d’herbes qui seraient donc manifestement éligibles sans qu’il soit besoin d’appliquer le système de prorata ou de vérifier s’il existe une pratique locale établie de pâturage malgré la faiblesse de la ressource herbacée. Les surfaces concernées par le
système de prorata ou par une déclaration d’éligibilité au titre des pratiques locales établies s’élèveraient donc au maximum à environ 520000 hectares en 2015, soit près de 2 % de l’ensemble des surfaces concernées par le RPG, étant observé que, en 2015, 500283 hectares ont été déclarés en surface pastorale ligneuse et 20852 hectares déclarés en chênaie et en châtaigneraie entretenues par des porcins ou des petits ruminants. En conséquence, la décision attaquée ne devrait appliquer un taux de
3 % qu’à une assiette correspondant à 2 % du total des paiements mensuels relatifs aux dépenses effectuées chaque mois par la République française du mois de juillet 2016 au mois de juin 2017 inclus.

114 Par ailleurs, en réponse à l’argument selon lequel la Commission pouvait invoquer non seulement une défaillance dans la mise en œuvre du plan d’action, mais aussi une défaillance du système de paiement dans son ensemble, la République française fait valoir qu’un tel argument manque en fait. De même, en réponse à la Commission qui allègue que les autorités françaises auraient dû soulever la question de la violation du principe de proportionnalité lors de leur réponse à la communication
supplémentaire du 20 mai 2016, la République française relève qu’aucune règle ne prescrit une telle obligation.

115 La République portugaise fait également valoir que la décision attaquée viole le principe de proportionnalité au motif qu’elle vise l’ensemble des paiements mensuels et non pas uniquement ceux qui concernent les surfaces relevant du système de prorata. En effet, une décision de suspension des paiements mensuels aurait pour objectif d’éviter un risque en ce qui concerne les paiements futurs et, de ce fait, devrait correspondre approximativement au montant des dépenses réputées irrégulières. Dans
le cas contraire, des paiements n’ayant aucun lien avec les irrégularités pourraient également être suspendus, ce qui remettrait en cause le financement des dépenses de la PAC. Or, dans la décision attaquée, la Commission se serait bornée à appliquer une suspension des paiements correspondant à un taux forfaitaire de 3 % sans évaluer le montant des dépenses considérées comme irrégulières. Faisant référence au rapport spécial, intitulé « Audit de la procédure d’apurement des comptes » établi en
2010 par la Cour des comptes européenne, la République portugaise estime que les corrections forfaitaires devraient pourtant être fondées par analogie sur une estimation précise du préjudice financier causé au fond.

116 À titre liminaire, la Commission fait observer que la décision attaquée n’est pas fondée sur le seul défaut de prise en compte du système de prorata. Les raisons évoquées dans ladite décision seraient plus larges. Les défaillances constatées affecteraient toutes les surfaces et pas uniquement celles des prairies permanentes. Les paiements affectés ne seraient donc pas seulement ceux qui concernent la détermination des surfaces éligibles avec le système de prorata « mais toutes les surfaces,
c’est-à-dire [les] 8,6 millions d’hectares des prairies permanentes ». En outre, le risque évoqué n’affecterait pas de la même façon toutes les surfaces et pour cela, notamment, un taux de 3 % au lieu d’un taux de 5 % a été décidé. La Commission fait également valoir que la République française aurait pu et dû soulever la question de la violation du principe de proportionnalité au stade de la procédure administrative. Or, à la suite de la communication supplémentaire du 20 mai 2016, qui exposait
clairement quelle serait l’assiette de la suspension des paiements ainsi que le taux applicable, soit celui de 3 %, la République française n’aurait pas évoqué cette question dans sa réponse du 16 juin 2016.

117 La Commission rappelle également que la difficulté qu’elle rencontrait était celle de l’identification des surfaces éligibles. Le SIPA accusait des défaillances telles qu’il n’était pas possible de préciser les surfaces éligibles, ce qui entraînait un risque financier important pour le FEAGA. De même, au vu des défaillances constatées, la Commission n’aurait pas été en mesure de calculer les surfaces concernées et la République française ne lui aurait pas transmis des informations à ce propos
dans sa réponse du 16 juin 2016. En outre, l’assiette de la suspension et le taux de suspension retenu auraient été calculés en référence à la méthodologie exposée dans la communication C(2015) 3675 final de la Commission, portant lignes directrices relatives au calcul des corrections financières dans le cadre des procédures d’apurement de conformité et d’apurement des comptes. Les autorités françaises auraient pu, comme elles pouvaient le faire au titre d’une procédure d’apurement de
conformité, présenter des éléments objectifs permettant de démontrer que la perte maximale pour le FEOGA était limitée à un montant inférieur à ce qui résulterait de l’application d’un taux forfaitaire inférieur à celui qui était proposé, mais elles ne l’auraient pas fait.

118 Il y a lieu de relever qu’il résulte d’une jurisprudence constante que le principe de proportionnalité, en tant que principe général du droit de l’Union, exige que les actes des institutions de l’Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs poursuivis par la réglementation en cause. Ainsi, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et les inconvénients causés ne doivent
pas être démesurés par rapport aux buts visés (voir arrêt du 6 novembre 2014, Grèce/Commission, T‑632/11, non publié, EU:T:2014:934, point 59 et jurisprudence citée).

119 À cet égard, il ressort de l’article 41, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement no 1306/2013 qu’un acte d’exécution pris par la Commission pour suspendre les paiements mensuels à un État membre est appliqué « aux dépenses concernées, effectuées par l’organisme payeur au sein duquel les déficiences sont constatées, pendant une période à déterminer […], qui ne dépassera pas douze mois ». L’article 41, paragraphe 3, du règlement no 1306/2013 précise également expressément qu’un tel acte
d’exécution est appliqué « conformément au principe de proportionnalité ».

120 Sur ce point, contrairement à ce que fait valoir la Commission, la possibilité pour un État membre de se prévaloir devant le juge de l’Union d’une violation du principe de proportionnalité ne nécessite pas que celui-ci expose au préalable un tel grief devant la Commission à l’occasion de la procédure administrative qui précède l’adoption d’un acte d’exécution pris pour suspendre des paiements mensuels. En effet, en droit de l’Union, il n’existe aucune règle imposant à un État membre, sous peine
de forclusion, de soulever des questions de droit au cours de la procédure administrative devant la Commission (voir, par analogie, conclusions de l’avocat général Mengozzi dans l’affaire Archer Daniels Midland/Commission, C‑511/06 P, EU:C:2008:604, point 123). Ainsi qu’il ressort de l’article 41, paragraphe 3, du règlement no 1306/2013, il incombe à la Commission de se conformer au principe de proportionnalité et il appartiendra au juge de l’Union de le vérifier si cela lui est demandé, comme
c’est le cas dans la présente affaire. La Commission doit adopter une décision finale conforme au droit, indépendamment de l’exercice effectif par le destinataire de cette décision de ses droits de la défense lors de la procédure administrative, et indépendamment de la portée de cet exercice (voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Mengozzi dans l’affaire Archer Daniels Midland/Commission, C‑511/06 P, EU:C:2008:604, point 123).

121 Le fait que la République française n’a pas soulevé la question de la violation du principe de proportionnalité au stade de la procédure administrative, comme elle aurait pu le faire, ne saurait donc pour autant la priver du droit de contester la décision attaquée à cet égard une fois que la Commission a pris position sur ce point, comme elle y est tenue en application des dispositions susvisées.

122 En l’espèce, dans la décision attaquée, la Commission a décidé que « [l]es paiements mensuels à la République française effectués en vertu de l’article 18 du règlement no 1306/2013 [étaient] suspendus à hauteur d’un montant résultant de l’application d’un pourcentage de suspension de 3 % aux paiements mensuels relatifs aux aides liées à la surface au titre de l’année 2015 figurant à l’annexe de la présente décision » (décision attaquée, article 1er, premier alinéa). La Commission a également
décidé que « [l]es suspensions [étaient] appliquées aux paiements mensuels à verser à la République française en vertu de l’article 18, paragraphe 2, du règlement no 1306/2013 pour les dépenses mensuelles effectuées par l’organisme payeur Agence de services et de paiement, du mois de juillet 2016 au mois de juin 2017 inclus » (décision attaquée, considérant 8 et article 1er, second alinéa).

123 Pour ce qui est de la conformité de la mesure à l’égard du principe de proportionnalité, la Commission a indiqué, au considérant 9 de la décision attaquée, ce qui suit :

« Conformément au principe de proportionnalité, eu égard à la gravité et à la persistance des déficiences constatées et à la lumière des conclusions établies au cours des audits, la Commission considère qu’il est approprié de fixer le niveau de suspension à 3 % du total des dépenses concernées. Bien que les défaillances soient des défaillances dans les contrôles clés et les contrôles secondaires pour lesquelles la correction forfaitaire de 5 % est prévue par les [lignes directrices relatives au
calcul des corrections financières dans le cadre des procédures d’apurement], un taux de suspension de 3 % est justifié. En effet, bien que la mise en œuvre du plan d’action souffre de retards et de carences, depuis début 2015 la République française a pris des mesures supplémentaires pour pallier la situation, ce qui affectera de manière positive les contrôles croisés effectués au moment du paiement, notamment grâce à la livraison des nouvelles orthophotographies pour la constitution du
registre parcellaire graphique. Il est considéré que le risque financier est aussi réduit par le fait que les autorités françaises ont décidé de ne payer qu’après que l’ensemble des contrôles (administratifs et sur place) aura été réalisé. »

124 Dans ce contexte, la République française ne conteste pas les modalités de détermination à 3 % du montant des dépenses concernées du taux de suspension retenu par la Commission. La République française conteste seulement le fait que l’« assiette de la suspension » décidée par la Commission porte sur l’« ensemble des paiements mensuels relatifs aux aides liées à la surface au titre de l’année 2015 », alors que la décision attaquée serait essentiellement fondée sur l’application de la
réglementation relative au prorata et à l’inclusion de certaines surfaces comme prairies permanentes au titre de pratiques localement établies et non sur l’ensemble des surfaces concernées par le RPG.

125 En particulier, premièrement, la République française indique que les surfaces concernées par le RPG en France métropolitaine représentent, en tout, 27,272 millions d’hectares. Selon la République française, il s’agit des surfaces éligibles à une aide agricole au titre de l’année 2015.

126 Deuxièmement, la République française fait valoir que les prairies permanentes, qui représentent en tout 8,6 millions d’hectares, ne correspondent ainsi qu’à une faible partie du total des surfaces éligibles à une aide agricole. La République française a précisé que, pour l’essentiel, ces prairies permanentes sont des prairies couvertes d’herbes manifestement éligibles à une aide agricole sans qu’il soit besoin d’appliquer le système de prorata ou de vérifier s’il existe une pratique locale
établie de pâturage malgré la faiblesse de la ressource herbacée.

127 Troisièmement, la République française soutient également que, parmi les surfaces éligibles à une aide agricole au titre de l’année 2015, les surfaces réellement concernées par le système de prorata ou par une déclaration d’éligibilité au titre des pratiques locales établies s’élèvent au maximum à environ 520000 hectares, soit près de 2 % de l’ensemble des surfaces concernées par le RPG. Selon la République française, il s’agit d’une part de 500283 hectares, qui ont été déclarés en surface
pastorale ligneuse au titre de l’année 2015, et de 20852 hectares en chênaie et en châtaigneraie entretenues par des porcins ou des petits ruminants.

128 Cependant, contrairement à ce que fait valoir la République française, qui allègue que les seules déficiences constatées et, par voie de conséquence, les dépenses concernées seraient celles qui correspondent aux surfaces réellement concernées par le système de prorata ou par une déclaration d’éligibilité au titre des pratiques locales établies, il ressort clairement de la décision attaquée que les déficiences constatées par la Commission sont plus importantes.

129 Ainsi, selon ce qui est indiqué aux considérants 5 et 6 de la décision attaquée, les déficiences mentionnées par la Commission concernaient, « entre autres », « la manière selon laquelle la République française avait établi le système de prorata pour évaluer la surface maximale éligible pour les prairies permanentes ». En outre, la Commission a relevé que, de manière générale, le plan d’action n’était toujours pas mis en œuvre au motif que les surfaces répertoriées dans le SIPA ne disposaient
pas toutes d’une surface maximale éligible établie conformément aux exigences réglementaires. Ces éléments et, en particulier les délais et insuffisances dans la mise à jour et l’amélioration du SIPA, ont, selon la Commission, de fait emporté des conséquences négatives importantes pour la gestion des demandes d’aides au titre de l’année 2015, notamment s’agissant de la mise à la disposition du bénéficiaire de l’information requise relative à la surface maximale éligible et aux surfaces non
agricoles, y compris les surfaces d’intérêt écologique. De même, comme cela est rapporté au considérant 7 de la décision attaquée, d’une part, ces défaillances avaient pour effet, dans la mesure où les objectifs du plan d’action ne pouvaient pas être atteints dans un avenir immédiat, de ne pas permettre d’offrir « l’assurance raisonnable requise quant à la bonne gestion des aides et à la légalité et la régularité des paiements au titre de l’année 2015 ». D’autre part, ces retards avaient
également pour effet, ainsi que la Commission le soulignait, « [d’]affect[er] également l’établissement de la valeur définitive des droits à paiement, qui auraient dû intervenir le 1er avril 2016 au plus tard, […], ainsi que l’exécution des paiements eux-mêmes ». Or, pour les motifs exposés aux points 100 à 105 ci-dessus, la Commission a dénoncé tout au long de la procédure administrative les déficiences dans la mise à jour du SIPA et leurs conséquences sur la gestion et le contrôle des aides à
la surface financées par le FEAGA, sans que les autorités françaises y apportent de réponses satisfaisantes.

130 La République française ne peut donc être suivie dans son argumentation quand elle soutient que la Commission n’était pas en mesure dans la présente affaire de se prévaloir d’une déficience du système de paiement dans son ensemble.

131 Par voie de conséquence, la Commission était bien en droit de considérer que l’ensemble des paiements relatifs aux aides liées à la surface au titre de l’année 2015 pouvait être prise comme assiette pour l’application du pourcentage de suspension, dont la République française ne conteste pas la valeur, soit 3 %.

132 Dans la mesure où seule la République portugaise met en cause la méthodologie utilisée par la Commission pour arriver à un taux de suspension de 3 %, à savoir l’utilisation par analogie de ses lignes directrices relatives au calcul des corrections financières dans le cadre des procédures d’apurement, il convient de constater que l’utilisation par analogie desdites lignes directrices ne permet pas, à elle seule, de démontrer le caractère disproportionné du montant suspendu en l’espèce. En outre,
en l’absence de toute autre donnée pertinente disponible dans le dossier s’agissant des surfaces déclarées qui présentaient effectivement un problème au regard des déficiences constatées, il y a lieu de considérer que l’utilisation par la Commission d’une valeur forfaitaire n’est pas en tant que telle, sur le plan méthodologique, disproportionnée.

133 Il ressort de ce qui précède que la République française, soutenue par la République portugaise, n’est pas fondée à soutenir que la décision attaquée est entachée d’une violation du principe de proportionnalité.

134 Le second moyen doit donc être écarté et, partant, le recours rejeté dans son ensemble.

Sur les dépens

135 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La République française ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

136 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Dès lors, la République portugaise supportera ses propres dépens.

  Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

  1) Le recours est rejeté.

  2) La République française supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne.

  3) La République portugaise supportera ses propres dépens.

Frimodt Nielsen

Kreuschitz

Półtorak

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 26 septembre 2018.
 
Le greffier

E. Coulon

Le président

S. Frimodt Nielsen

Table des matières

  Cadre juridique et antécédents du litige
  Dispositions litigieuses
  Élaboration et approbation du plan d’action
  Suivi, demande de révision et nouvelles modalités du plan d’action
  Mise en œuvre de la procédure de suspension des paiements
  Procédure et conclusions des parties
  En droit
  Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 41, paragraphe 2, sous b), du règlement no 1306/2013
  Sur le second moyen, tiré de la violation du principe de proportionnalité
  Sur les dépens

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

( *1 ) Langue de procédure : le français.


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : T-682/16
Date de la décision : 26/09/2018
Type de recours : Recours en annulation - non fondé

Analyses

FEAGA – Aides liées à la surface – Procédure de suspension des paiements mensuels à un État membre – Article 41, paragraphe 2, sous b), du règlement (UE) no 1306/2013 – Éléments clés du système de contrôle national – Déficiences constatées – Plan d’action comportant des indicateurs de progrès clairs établis après consultation de la Commission – Proportionnalité.

Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA)

Agriculture et Pêche


Parties
Demandeurs : République française
Défendeurs : Commission européenne.

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Frimodt Nielsen

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:T:2018:603

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award