DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)
27 juin 2017 (*)
« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne tridimensionnelle – Forme d’un briquet avec une ailette latérale, comportant l’élément verbal CLIPPER – Forme nécessaire à l’obtention du résultat technique – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), et sous e), ii), du règlement (CE) n° 207/2009 – Absence de description de la marque dans la demande d’enregistrement »
Dans l’affaire T‑580/15,
Flamagas, SA, établie à Barcelone (Espagne), représentée par M^es I. Valdelomar Serrano, G. Hinarejos Mulliez et D. Gabarre Armengol, avocats,
partie requérante,
contre
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. D. Hanf, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant
MatMind Srl, établie à Rome (Italie), représentée par M^es G. Cipriani et M. Cavattoni, avocats,
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’EUIPO du 30 juillet 2015 (affaire R 924/2013-1), relative à une procédure de nullité entre MatMind et Flamagas,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre),
composé de MM. H. Kanninen, président, L. Calvo-Sotelo Ibáñez-Martin et M^me I. Reine (rapporteur), juges,
greffier : M. E. Coulon,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 6 octobre 2015,
vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 27 janvier 2016,
vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 2 février 2016,
vu la modification de la composition des chambres du Tribunal,
vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties principales dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 24 novembre 2005, la requérante, Flamagas, SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1)].^.
2 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe tridimensionnel reproduit ci-après :
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3 Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 4, 34 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :
– classe 4 : « Gaz combustibles comprimés » ;
– classe 34 : « Briquets pour fumeurs » ;
– classe 35 : « Services de publicité, gestion d’affaires commerciales, administration commerciale, travaux de bureau, y compris services de publicité relatifs à l’import-export, aux ventes exclusives et aux représentations de tous types de briquets pour fumeurs. »
4 La marque a été enregistrée le 21 décembre 2006 sous le numéro 004758652 et publiée au Bulletin des marques communautaires n° 1/2007, du 8 janvier 2007.
5 Le 6 juillet 2011, l’intervenante, MatMind srl, a présenté une demande en nullité de la marque contestée pour l’ensemble des produits et des services couverts par celle-ci, en invoquant des causes de nullité absolue énoncées à l’article 7, paragraphe 1, sous a) à c), et sous e), i) et ii), du règlement n° 207/2009, lu conjointement avec l’article 52, paragraphe 1, sous a), du même règlement. Dans ses observations exposant les motifs de sa demande en nullité, l’intervenante a produit
des images d’autres briquets cylindriques, afin de démontrer que la forme de la marque contestée ne se distinguait pas des normes du secteur concerné.
6 De même, d’autres images de briquet ont été produites par l’intervenante, notamment de nombreux briquets à réservoir/partie rechargeable cylindrique créés au cours du XX^e siècle.
7 Par décision du 22 mars 2013, la division d’annulation a rejeté la demande en nullité de la marque contestée.
8 Le 21 mai 2013, l’intervenante a formé un recours contre la décision de la division d’annulation en faisant valoir des erreurs d’interprétation et d’analyse des éléments de preuve et de fait au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et sous e), i) et ii), du règlement n° 207/2009. Le 22 juillet 2013, l’intervenante a déposé des observations exposant ses arguments, auquel étaient joints divers éléments de preuve. Parmi ceux-ci figuraient la preuve de l’enregistrement, par la
requérante, de deux modèles d’utilité espagnols datant de 1971, le premier sous le numéro U0170551, et le second, sous le numéro U0175088.
9 À l’appui de son affirmation selon laquelle la marque contestée était dépourvue d’« inventivité » et d’« unicité », l’intervenante a également produit les détails de l’enregistrement du dessin ou modèle communautaire n° 000194899-0001 pour le produit « briquets pour fumeurs », déposé le 23 juin 2004.
10 Par décision du 30 juillet 2015 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’EUIPO a accueilli le recours dans son intégralité. Elle a conclu que la marque contestée devait être déclarée nulle sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), sous b) et sous a), du règlement n° 207/2009. De même, elle a considéré qu’il n’était pas nécessaire d’examiner si l’intervenante aurait pu demander que la requérante fournisse une déclaration dans laquelle
elle renoncerait à d’éventuels droits d’exclusivité sur les éléments de forme, en application, par analogie, de l’article 37, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009.
11 Plus précisément, la chambre de recours a considéré, en premier lieu, que la marque contestée devait être déclarée nulle au motif qu’elle était composée d’un signe constitué exclusivement par la forme du produit nécessaire à l’obtention du résultat technique au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009. Selon la chambre de recours, ce motif de refus s’applique aux produits relevant des classes 4 et 34 visés par la marque contestée. En deuxième lieu, elle
a estimé que la marque contestée devait être également déclarée nulle en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, dès lors que la forme concernée ne pouvait être perçue comme divergeant de la norme ou des habitudes du secteur des briquets, ce qui l’empêcherait d’exercer sa fonction première d’indication de l’origine des produits et services visés par celle-ci, relevant des classes 4, 34 et 35.
12 Au surplus, la chambre de recours a considéré, en troisième lieu, que la représentation graphique de la marque contestée n’était pas suffisamment claire au sens de l’article 4 du règlement n° 207/2009, auquel renvoie l’article 7, paragraphe 1, sous a), de ce règlement, dans la mesure où la présence d’un élément verbal, sans autre précision, sur une marque dont l’enregistrement avait été demandé en tant que « marque tridimensionnelle » créerait une confusion quant aux limites de la
protection demandée. En quatrième lieu, la chambre de recours a constaté qu’il n’était pas nécessaire d’examiner les possibilités offertes par l’article 37, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, appliqué par analogie, au motif, d’une part, qu’il serait impossible d’introduire une autre demande si la demande principale, en l’occurrence, la demande en nullité de la marque contestée, a été accueillie, et d’autre part, que l’intervenante n’a pas introduit explicitement de demande de déclaration
telle que prévue à l’article 37, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, appliqué par analogie. De même, la chambre de recours a conclu qu’il ressortirait d’une décision de la grande chambre de recours de l’EUIPO du 4 mars 2015 qu’il n’existe aucune base juridique pour une renonciation à d’éventuels droits d’exclusivité sur les éléments de forme, en application, par analogie, de l’article 37, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009.
13 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 6 octobre 2015, la requérante a introduit le présent recours. La requérante conteste la décision attaquée aux motifs, en substance, que, contrairement à ce qu’a conclu la chambre de recours, la marque contestée ne serait pas constituée exclusivement par la forme du produit nécessaire à l’obtention d’un résultat technique et qu’elle posséderait un caractère distinctif. La requérante fait également valoir que la marque contestée a été présentée
d’une manière permettant de déterminer précisément et clairement l’objet de la protection demandée.
Conclusions des parties
14 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– déclarer le présent recours recevable ;
– annuler la décision attaquée ;
– confirmer la décision de la division d’annulation ;
– condamner l’intervenante aux dépens de la présente procédure.
15 L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens exposés par l’EUIPO aux fins de la présente procédure.
16 L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter dans son intégralité le recours ;
– en conséquence, confirmer dans son intégralité la décision attaquée ;
– condamner la requérante aux dépens de la procédure.
En droit
17 À l’appui de son recours, la requérante invoque trois moyens tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009, le deuxième, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement et, le troisième, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous a), lu conjointement avec l’article 4 dudit règlement.
Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009
18 La requérante articule son premier moyen autour de deux griefs relatifs, respectivement, à une erreur d’appréciation de la chambre de recours dans la détermination des caractéristiques essentielles de la marque contestée et à une erreur d’appréciation de la chambre de recours dans l’évaluation des fonctions desdites caractéristiques.
19 L’EUIPO, soutenu par l’intervenante, conteste les arguments de la requérante.
20 En vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009, sont refusés à l’enregistrement les signes constitués exclusivement par la forme du produit nécessaire à l’obtention d’un résultat technique. Ladite disposition est un obstacle préliminaire susceptible d’empêcher qu’un signe constitué exclusivement par la forme d’un produit puisse être enregistré (voir, par analogie, arrêt du 12 février 2004, Henkel, C‑218/01, EU:C:2004:88, point 36 et jurisprudence citée).
21 Selon une jurisprudence constante, chacun des motifs de refus d’enregistrement énumérés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 doit être interprété à la lumière de l’intérêt général qui le sous-tend. Dans ce contexte, la Cour a relevé que l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), dudit règlement vise à empêcher que le droit des marques aboutisse à conférer à une entreprise un monopole sur des solutions techniques ou des caractéristiques utilitaires d’un produit (voir
arrêts du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 43 et jurisprudence citée, et du 10 novembre 2016, Simba Toys/EUIPO, C‑30/15 P, EU:C:2016:849, points 38 et 39 et jurisprudence citée).
22 En particulier, lorsque la forme d’un produit ne fait qu’incorporer la solution technique mise au point par le fabricant de ce produit et brevetée à sa demande, une protection de cette forme en tant que marque après l’expiration du brevet réduirait considérablement et perpétuellement la possibilité pour les autres entreprises d’utiliser ladite solution technique. Or, dans le système des droits de propriété intellectuelle tel que développé dans l’Union européenne, les solutions
techniques sont seulement susceptibles de faire l’objet d’une protection de durée limitée, de sorte qu’elles puissent être librement utilisées par la suite par l’ensemble des opérateurs économiques (arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 46).
23 En limitant le motif de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009 aux signes constitués « exclusivement » par la forme du produit « nécessaire » à l’obtention d’un résultat technique, le législateur a dûment considéré que toute forme de produit était, dans une certaine mesure, fonctionnelle et qu’il serait, par conséquent, inapproprié de refuser à l’enregistrement en tant que marque une forme de produit au simple motif qu’elle présente des
caractéristiques utilitaires. Par les termes « exclusivement » et « nécessaire », ladite disposition assure que seules soient refusées à l’enregistrement les formes de produit qui ne font qu’incorporer une solution technique et dont l’enregistrement en tant que marque gênerait donc réellement l’utilisation de cette solution technique par d’autres entreprises (arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 48).
24 S’agissant de la forme « nécessaire » à l’obtention du résultat technique visé, cette condition ne signifie pas que la forme en cause doit être la seule permettant d’obtenir ce résultat (voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 83). Il peut ainsi y avoir des formes alternatives, ayant d’autres dimensions ou un autre dessin, permettant d’obtenir le même résultat. L’enregistrement d’une forme exclusivement fonctionnelle en tant que
marque permet en effet d’interdire aux autres entreprises non seulement l’utilisation de la même forme, mais également celle des formes similaires (voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 56, et conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire Simba Toys/EUIPO, C‑30/15 P, EU:C:2016:350, point 55 et jurisprudence citée).
25 Il ressort également d’une jurisprudence constante qu’une application correcte de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009 implique que les caractéristiques essentielles du signe tridimensionnel en cause soient dûment identifiées par l’autorité statuant sur la demande d’enregistrement de celui-ci en tant que marque (arrêt du 6 mars 2014, Pi-Design e.a./Yoshida Metal Industry, C‑337/12 P à C‑340/12 P, non publié, EU:C:2014:129, point 46). L’expression
« caractéristiques essentielles » doit être comprise comme visant les éléments les plus importants du signe [arrêts du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 69, et du 19 septembre 2012, Reddig/OHMI – Morleys (Manche de couteau), T‑164/11, non publié, EU:T:2012:443, point 25].
26 L’identification des caractéristiques essentielles d’un signe doit être opérée au cas par cas, sans qu’il existe aucune hiérarchie systématique entre les différents types d’éléments qu’un signe peut comporter. Dans sa recherche des caractéristiques essentielles d’un signe, l’autorité compétente peut soit se fonder directement sur l’impression globale dégagée par le signe, soit procéder, dans un premier temps, à un examen successif de chacun des éléments constitutifs du signe (voir arrêt
du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 70 et jurisprudence citée).
27 Dès que les caractéristiques essentielles du signe sont identifiées, il incombe encore à l’EUIPO de vérifier si ces caractéristiques répondent toutes à une fonction technique à l’égard du produit en cause. En effet, l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009 ne saurait s’appliquer lorsque la demande d’enregistrement en tant que marque porte sur une forme de produit dans laquelle un élément non fonctionnel, tel qu’un élément ornemental ou fantaisiste, joue un rôle
important (arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, points 52 et 72).
28 L’examen de la fonctionnalité des caractéristiques essentielles d’un signe constitué par la forme d’un produit doit être fait en analysant le signe déposé en vue de son enregistrement en tant que marque, et non les signes constitués d’autres formes de produit. La fonctionnalité technique peut être appréciée, notamment, en tenant compte de la documentation relative aux brevets antérieurs qui décrivent les éléments fonctionnels de la forme concernée (voir, en ce sens, arrêt du
14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, points 84 et 85).
29 C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner les deux griefs soulevés dans le cadre du premier moyen, étant rappelé que la décision attaquée a déclaré la nullité de la marque contestée sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009 uniquement en ce qui concerne les produits relevant des classes 4 et 34.
Sur l’erreur d’appréciation dans la détermination des caractéristiques essentielles de la marque contestée
30 Selon la requérante, la chambre de recours aurait dû prendre en compte l’élément verbal « clipper » lors de la détermination des caractéristiques essentielles de la marque contestée. La chambre de recours aurait ainsi commis une erreur en appliquant, en l’espèce, les principes et les solutions tirés de l’arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI (C-48/09 P, EU:C:2010:516), lequel concernerait une marque tridimensionnelle « pure », alors que la marque contestée contiendrait, en outre,
l’élément verbal « clipper ». Partant, selon la requérante, cette jurisprudence ne serait pas pertinente en l’espèce.
31 L’EUIPO, soutenu par l’intervenante, répond que l’élément verbal « clipper » ne peut être perçu comme un élément non fonctionnel majeur. En effet, d’une part, cet élément serait de très petite taille et, d’autre part, la requérante aurait fait le choix délibéré d’insister sur la forme de la marque contestée dans sa demande d’enregistrement.
32 En l’espèce, il ressort des points 25 à 32 de la décision attaquée que la marque contestée, à savoir la forme tridimensionnelle d’un briquet, est décrite comme suit par la chambre de recours : i) le briquet a la forme d’un conteneur pour le réservoir à combustible ; la forme cylindrique oblongue, arrondie et fermée (à l’exception de la valve) est commune à tous les réservoirs et a une fonction purement utilitaire, permettant au briquet de contenir du gaz combustible comprimé ; le
conteneur de gaz n’a pas de forme propre ; ii) la base plate permet au briquet de tenir debout ; iii) les quatre fentes disposées parallèlement, alignées de chaque côté de la partie supérieure du briquet, de la plus longue à la plus courte, permettent à l’air de pénétrer dans le briquet afin de nourrir la flamme par le bas, selon les explications convaincantes de l’intervenante à cet égard ; iv) le bouton situé sur le dessus du briquet, agit en tant que levier contrôlant la valve de gaz et, une
fois pressé, pénètre dans l’ailette ; v) le système d’allumage, est composé d’un capot et d’un bouton poussoir, nécessairement placé au-dessus du réservoir, puisque la flamme brûle normalement du bas vers le haut ; vi) l’ailette ressortant du corps du briquet et se terminant presque en bas du briquet, a pour fonctions, d’une part, de permettre à l’utilisateur d’identifier l’orientation du briquet sans le regarder et, d’autre part, de soutenir, protéger et commander le levier ouvrant la valve de
gaz, étant entendu qu’elle peut également servir de surface permettant de fixer un aimant ; et vii) les nuances de couleur de la partie inférieure et les éléments supérieurs correspondent à différents matériaux, comme le plastique et le métal.
33 Le caractère essentiel des caractéristiques de la marque contestée telles que décrites par la chambre de recours n’est contesté par aucune des parties. Néanmoins, la requérante considère que la description ainsi établie par la chambre de recours n’est pas complète, au motif que l’élément verbal « clipper » n’est pas pris en compte, alors qu’il s’agirait d’une caractéristique essentielle de la forme du briquet en cause, revêtant une fonction esthétique.
34 Il y a lieu de constater que le formulaire de la demande d’enregistrement de la marque contestée ne contient aucune description du signe concerné et que seule la case « marque tridimensionnelle » a été cochée. En particulier, l’élément verbal « clipper », de très petite taille, n’apparaît que sur l’une des cinq images jointes à la demande d’enregistrement. À cet égard, la requérante n’a nullement indiqué que l’élément verbal « clipper » constituait un élément important de la marque
contestée auquel la protection conférée à ladite marque devait s’étendre. Ce manque de précision constitue un indice certain de la valeur et de l’importance limitées que la requérante accordait à cet élément verbal lors du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée.
35 En outre, conformément à la jurisprudence, il est constant qu’en déposant une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne auprès de l’EUIPO, le demandeur opère un choix délimitant le champ de la protection accordée en fonction de la nature de la marque demandée. À cet égard, l’EUIPO ne peut pas ne pas tenir compte du choix fait par le titulaire dans sa demande et doit, par conséquent, en tirer les conséquences qui s’imposent au regard de ladite demande [voir, en ce sens,
arrêt du 12 novembre 2013, Gamesa Eólica/OHMI – Enercon (Dégradé de verts), T‑245/12, non publié, EU:T:2013:588, points 35 et 39].
36 De surcroît, les exigences de clarté et d’absence d’ambiguïté découlant de l’article 4 du règlement n° 207/2009 ont pour objectif primordial de garantir le respect de la sécurité juridique, dès lors qu’elles visent à s’assurer que les limites de la protection accordée par l’EUIPO sont claires, tangibles et inamovibles, tant à l’égard des autorités compétentes et des concurrents de la requérante, que vis-à-vis des consommateurs. Ces exigences s’imposent d’autant plus qu’il s’agit,
conformément à l’intérêt public poursuivi par l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009, d’éviter l’instauration d’un monopole sur une solution technique.
37 Dès lors que, dans la demande d’enregistrement, la requérante a indiqué que l’élément prédominant et essentiel de la marque contestée est sa forme et qu’elle n’a pas clairement souligné l’importance de l’élément verbal et de petite taille « clipper » pour l’enregistrement de la marque contestée, il convient, à la lumière notamment de l’article 4 du règlement n° 207/2009, de considérer que les caractéristiques essentielles de la marque contestée doivent être limitées aux éléments
constitutifs de la forme elle-même, c’est-à-dire aux éléments qui sont eux-mêmes de nature tridimensionnelle ou qui définissent les contours de la forme tridimensionnelle.
38 En tout état de cause, même s’il y avait lieu de considérer que la requérante a souligné l’importance de l’élément verbal « clipper » dans la demande d’enregistrement de la marque contestée, force serait de constater, à l’instar de la chambre de recours, que cet élément verbal est d’une couleur gris foncé, qu’il est apposé sur un fond gris clair et occupe moins d’un dixième de la surface avant du briquet en cause. Un tel élément, placé sur un produit de petite taille comme un briquet,
est donc peu visible pour le consommateur. Par conséquent, même en faisant abstraction du manque de précision dans la demande d’enregistrement s’agissant de l’élément verbal « clipper », celui-ci ne saurait constituer une caractéristique essentielle de la marque contestée, vu son caractère mineur et secondaire par rapport à la forme du briquet concerné.
39 Dans ce contexte, l’argument de la requérante tiré du libellé des directives relatives à l’examen pratiqué par l’EUIPO sur les marques de l’Union européenne et les dessins ou modèles communautaires enregistrés ne saurait prospérer. Certes, il ressort de la partie B, section 4, chapitre 3, point 12, de ces directives que l’examinateur doit vérifier si la représentation de la marque tridimensionnelle contient d’autres éléments – par exemple des mots ou des étiquettes – qui peuvent lui
conférer un caractère distinctif. Toutefois, il ressort également dudit point 12 que pour être suffisants pour qu’une marque tridimensionnelle soit susceptible d’être enregistrée, les éléments verbaux présents sur la forme tridimensionnelle en cause doivent être clairement visibles. De tels éléments doivent se distinguer, attirer immédiatement l’attention et le regard du consommateur, sans nécessiter une attention ou une recherche particulière de celui-ci.
40 Tel n’étant pas le cas en l’espèce, dès lors, les arguments de la requérante ne sont pas de nature à remettre en cause le constat de la chambre de recours excluant l’élément verbal « clipper » des caractéristiques essentielles à prendre en compte pour l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009.
41 En outre, l’argument de la requérante relatif à l’application inappropriée, par la chambre de recours, de l’arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI (C‑48/09 P, EU:C:2010:516), en raison du fait que cet arrêt ne concernerait qu’une marque purement tridimensionnelle, doit être également rejeté, dès lors que les caractéristiques essentielles de la marque contestée sont également de nature tridimensionnelle. Au demeurant, il importe de constater que l’argument de la requérante repose
sur une prémisse erronée, étant précisé que la marque dont l’enregistrement était demandé dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI (C‑48/09 P, EU:C:2010:516), n’était pas purement tridimensionnelle, la couleur rouge de la brique Lego faisant aussi partie des éléments visés par la demande d’enregistrement de ladite marque.
42 Par conséquent, le premier grief doit être rejeté.
Sur l’erreur d’appréciation dans l’évaluation des fonctions des caractéristiques essentielles de la marque contestée
43 Selon la requérante, la chambre de recours aurait également commis une erreur d’appréciation, d’une part, en qualifiant l’ailette latérale et les fentes sur le capot fermé du briquet de caractéristiques essentielles revêtant une fonction technique et, d’autre part, en refusant d’évaluer la fonctionnalité de l’élément verbal « clipper ». À l’appui de son argumentation, la requérante fait valoir qu’il n’existerait pas de briquets « très similaires » sur le marché, mais seulement des
briquets partageant l’une ou l’autre caractéristique avec la forme protégée par la marque contestée, en raison, notamment, des trois caractéristiques essentielles que seraient les fentes, l’ailette et l’élément verbal « clipper ». À cet égard, la requérante fait grief à la chambre de recours d’avoir pris en compte des modèles d’utilité espagnols. En effet, le fait que la requérante soit titulaire de la marque contestée depuis 2006, sans pour autant que, « dans les faits », ait été instauré un
monopole sur une solution technique ou des caractéristiques utilitaires, prouverait, comme le démontrerait l’expertise technique établie en 2007 qu’elle a jointe en annexe à la requête, que la marque contestée n’est pas constituée uniquement d’éléments fonctionnels nécessaires à l’obtention du résultat technique.
44 L’EUIPO, soutenu par l’intervenante, répond que les fentes et l’ailette du briquet sont de nature purement technique, comme le démontreraient notamment les reproductions des deux modèles d’utilité espagnols n^os U0170551 et U0175088, ainsi qu’un clip vidéo fourni par la requérante elle-même.
45 S’agissant, tout d’abord, de l’absence de prise en compte de l’élément verbal « clipper », c’est à bon droit que la chambre de recours n’a pas analysé les fonctions d’un tel élément, celui-ci ne faisant pas partie des caractéristiques essentielles de la marque contestée, ainsi qu’il a été constaté aux points 35 à 43 du présent arrêt.
46 S’agissant, ensuite, des fonctions des caractéristiques essentielles identifiées par la chambre de recours, y compris de l’ailette latérale et des fentes sur le capot fermé du briquet, il convient d’examiner si toutes ces caractéristiques ont une utilité fonctionnelle à l’égard du produit en cause.
47 À cet égard, il convient de relever que, comme l’a indiqué la chambre de recours au point 29 de la décision attaquée, l’existence d’un modèle d’utilité espagnol est quasiment une preuve irréfutable que les caractéristiques qu’il divulgue ou revendique sont fonctionnelles (voir, par analogie pour un brevet, arrêt du 19 septembre 2012, Manche de couteau, T‑164/11, non publié, EU:T:2012:443, point 31).
48 En l’espèce, lors de l’appréciation des éléments essentiels du signe contesté, la chambre de recours s’est fondée, d’une part, sur les modèles d’utilité espagnols de la requérante et, notamment, sur les modèles n°^s U0170551 et U0175088, invoqués par l’intervenante. Ces deux modèles présentent des caractéristiques très semblables à celles de la marque contestée, notamment quant à la forme cylindrique, à l’ailette latérale et à la position du système d’allumage du briquet. D’autre part,
la chambre de recours a pris en compte le contenu d’un clip vidéo fourni par la requérante, qui présente les aspects utilitaires et de sécurité du briquet concerné, y compris les parties internes de celui-ci, ainsi que les éléments constitutifs du levier. En procédant de la sorte, la chambre de recours a constaté que les caractéristiques essentielles du signe contesté exerçaient toutes une fonction technique à l’égard du produit en cause et étaient nécessaires pour obtenir le résultat
technique, à savoir la génération d’une flamme.
49 En ce qui concerne, d’une part, l’argument de la requérante visant à conférer à l’ailette latérale une fonction esthétique, il ressort des descriptions figurant dans la demande d’enregistrement de l’un des modèles d’utilité espagnols invoqués par l’intervenante, ainsi qu’il est rappelé au point 30 de la décision attaquée, que cette ailette latérale revêt une fonction particulière :
– soutenir et maintenir l’aile inférieure d’une lame souple qui pousse en permanence le levier chargé de contrôler la valve de gaz, le remontant jusqu’au point de coupure ;
– protéger le levier de manœuvre de la valve de gaz ou en maintenir les dimensions et limiter ses mouvements durant la phase d’ouverture du conteneur de gaz, tout en empêchant la détérioration du dispositif durant le transport, par exemple lors d’une décharge et d’une utilisation accidentelles, conférant également au briquet une forme externe qui améliore son apparence et sa configuration ;
– améliorer et faciliter la manipulation du briquet ;
– renforcer le boîtier dans lequel le corps cylindrique est inséré ;
– permettre l’ajout d’autres détails ou de petits dispositifs complémentaires au briquet, comme des éléments magnétiques.
50 Il convient de relever que l’expertise technique produite par la requérante au cours de la procédure administrative devant l’EUIPO et une nouvelle fois devant le Tribunal ne permet pas d’infirmer le constat de la chambre de recours sur la fonction technique de l’ailette latérale. En effet, il est aussi retenu dans cette expertise que l’ailette latérale contient « le ressort de la fourche » du briquet en cause.
51 C’est donc à bon droit que la chambre de recours a considéré que l’ailette latérale du briquet en cause répondait à une fonction technique.
52 En ce qui concerne, d’autre part, l’argument de la requérante qualifiant les fentes du capot du briquet en cause d’éléments esthétiques, il convient de relever que celui-ci a été développé au point 38 de la requête sur une considération contenue au point 25 de la décision attaquée, aux termes de laquelle l’intervenante aurait soutenu de façon convaincante que les fentes du capot du briquet en cause permettent à l’air de pénétrer dans le briquet afin de nourrir la flamme par le bas (voir
point 32 ci-dessus). À cet égard, sans qu’il soit nécessaire de s’interroger sur la recevabilité de l’argument de la requérante devant le Tribunal, il suffit de constater qu’il est notoire que, afin de pouvoir allumer et entretenir une flamme dans un espace confiné, tel qu’un système d’allumage composé d’un capot fermé, comme en l’espèce, le besoin d’alimentation en air est nécessaire pour atteindre le résultat technique recherché, ce que permet précisément la présence desdites fentes.
53 Par conséquent, en l’absence d’éléments probants fournis par la requérante permettant de remettre en cause les conclusions de la chambre de recours à cet égard, c’est à bon droit que celle-ci a considéré que les fentes du capot fermé du briquet en cause revêtaient une fonction technique. Partant, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en concluant que la marque contestée est constituée exclusivement par la forme d’un briquet nécessaire à l’obtention d’un résultat
technique.
54 Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours aurait tenu compte, à tort, de la perception de la forme en cause par le public pertinent, alors qu’il n’existerait aucune obligation de prendre cet élément en compte dans le cadre de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009.
55 Certes, il a été jugé que la perception présumée du signe par le consommateur moyen n’est pas un élément décisif dans le cadre de l’application du motif de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009, mais peut, tout au plus, constituer un élément d’appréciation utile pour l’autorité compétente lorsque celle-ci identifie les caractéristiques essentielles du signe (arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 76).
56 Toutefois, il ressort de la décision attaquée que la perception de la marque contestée par le consommateur moyen ne constitue pas le motif principal fondant la conclusion de la chambre de recours. Il s’agit d’un indice supplémentaire confirmant l’identification des caractéristiques essentielles du produit en cause ainsi que leur évaluation.
57 Il y a donc lieu de considérer que la chambre de recours a fait, à bon droit, référence à la perception de la marque contestée par le public pertinent en tant qu’élément d’appréciation utile et n’a pas commis d’erreur en appliquant, à cet égard, l’arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI (C‑48/09 P, EU:C:2010:516).
58 Les conclusions quant à la fonctionnalité des caractéristiques essentielles de la marque contestée ne sauraient davantage être remises en cause par l’argument de la requérante tiré des différences que présente la forme du briquet en cause par rapport à celles des autres briquets présents sur le marché. En effet, la fonctionnalité d’une forme particulière n’est pas altérée par la disponibilité de formes alternatives remplissant la même fonction (voir, en ce sens, arrêt du 21 mai 2015,
Yoshida Metal Industry/OHMI, T‑331/10 RENV et T‑416/10 RENV, non publié, EU:T:2015:302, point 62), de sorte que l’argument est inopérant.
59 En outre, l’argumentation de la requérante relative à l’absence d’instauration, dans les faits, d’un monopole sur une solution technique ne constitue pas un critère pertinent d’évaluation au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009. En effet, l’enregistrement d’une forme exclusivement fonctionnelle d’un produit en tant que marque est susceptible de permettre au titulaire de cette marque d’interdire aux autres entreprises non seulement l’utilisation de
la même forme, mais aussi l’utilisation de formes similaires. Un nombre important de formes alternatives risquent ainsi de devenir inutilisables pour les concurrents dudit titulaire (arrêt du 14 septembre 2010, Lego Juris/OHMI, C‑48/09 P, EU:C:2010:516, point 56). À cet égard, le fait que des produits concurrents de ceux de la requérante présentent actuellement une forme identique ou similaire à la marque contestée n’exclut donc nullement que la requérante se réclame, à l’avenir, de la
protection conférée par sa marque pour interdire toute commercialisation desdits produits concurrents.
60 Enfin, dans la mesure où la requérante souligne l’usage, depuis 45 ans, de la forme du briquet concerné et la notoriété acquise par la marque contestée, il convient de rappeler qu’un signe constitué exclusivement par la forme d’un produit ne peut jamais acquérir un caractère distinctif par l’usage qui en a été fait au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009 [voir arrêt du 6 octobre 2011, Bang & Olufsen/OHMI (Représentation d'un haut-parleur), T‑508/08, EU:T:2011:575,
point 42 et jurisprudence citée].
61 Par conséquent, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a déclaré la nullité de la marque contestée pour les produits relevant des classes 4 et 34, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009.
62 Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté en ce qui concerne les produits visés par la marque contestée relevant des classes 4 et 34.
63 Dans la mesure où, comme il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, il suffit qu’un des motifs absolus de refus énumérés dans cette disposition s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré en tant que marque de l’Union européenne, il y a lieu de rejeter le recours en tant qu’il est dirigé contre la décision attaquée déclarant nulle la marque contestée pour les produits relevant des classes 4 et 34, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les deuxième et
troisième moyens à l’égard de ces produits.
64 Néanmoins, il convient encore d’examiner le deuxième moyen, dans la mesure où il concerne la décision attaquée en tant que celle-ci déclare nulle la marque contestée pour les services relevant de la classe 35.
Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009
65 Par son deuxième moyen, tiré en substance du caractère distinctif de la marque contestée, et en ce qui concerne les services de la classe 35, la requérante reproche à la chambre de recours, premièrement, d’avoir procédé à une évaluation incorrecte de l’impression engendrée par la forme de la marque contestée, deuxièmement, d’avoir minimisé l’impact de l’élément verbal « clipper » sur ladite impression et, troisièmement, de ne pas avoir pris en compte la notoriété de la marque contestée.
66 L’EUIPO, soutenu par l’intervenante, conteste ces arguments.
67 Il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le caractère distinctif d’une marque au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 désigne la capacité de la marque en question d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises (arrêts du 29 avril 2004, Procter & Gamble/OHMI, C‑473/01 P et C‑474/01 P, EU:C:2004:260, point 32 ;
du 4 octobre 2007, Henkel/OHMI, C‑144/06 P, EU:C:2007:577, point 34, et du 25 octobre 2007, Develey/OHMI, C‑238/06 P, EU:C:2007:635, point 79).
68 Ce caractère distinctif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (arrêts du 29 avril 2004, Procter & Gamble/OHMI, C‑473/01 P et C‑474/01 P, EU:C:2004:260, point 33, et du 22 juin 2006, Storck/OHMI, C‑25/05 P, EU:C:2006:422, point 25).
69 S’agissant des marques tridimensionnelles, il ressort de la jurisprudence que seule une marque qui, de manière significative, diverge de la norme ou des habitudes du secteur et, de ce fait, est susceptible de remplir sa fonction essentielle d’origine, n’est pas dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009 (arrêts du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi‑Werke/OHMI, C‑173/04 P, EU:C:2006:20, point 31, et du 22 juin 2006, Storck/OHMI,
C‑25/05 P, EU:C:2006:422, point 28).
70 Ainsi, aux fins de considérer une marque tridimensionnelle comme pourvue d’un caractère distinctif, il ne faut notamment pas qu’elle apparaisse comme une simple variante des formes de base du produit en cause, communément utilisées dans le commerce [voir, en ce sens, arrêt du 31 mai 2006, De Waele/OHMI (Forme d’une saucisse), T‑15/05, EU:T:2006:142, point 38 et jurisprudence citée].
71 En ce qui concerne les services liés aux entreprises relevant de la classe 35 désignés par la marque contestée, la décision attaquée a défini le public pertinent commepossédant souvent un niveau d’éducation et d’expérience différent de celui du public concerné par les produits relevant des classes 4 et 34 désignés par la marque contestée et prêtant attention à d’autres aspects que ceux relevés par ledit public, tels que l’aspect financier, la fiabilité et l’expertise dans un domaine
d’activités pertinent, par exemple, dans la commercialisation de briquets. La requérante ne conteste pas cette définition du public pertinent retenue par la chambre de recours.
72 S’agissant, ensuite, de la perception de la marque contestée par le public pertinent, la chambre de recours a conclu que la forme sera perçue simplement comme une référence au domaine de compétence et de spécialisation des services publicitaires ou liés aux entreprises qui concernent tous spécifiquement la commercialisation des briquets. En outre, elle a estimé que la forme peut être vue comme un outil standard de marketing dans le cas de briquets arborant des marques offerts en
cadeaux.
73 Il convient de relever que, comme le montre l’expertise soumise par la requérante, les formes ovales et cylindriques ne sont que des variantes possibles pour un briquet. De même, l’intervenante a fourni des exemples d’autres produits très ressemblants au briquet en cause, mentionnés aux points 6, 8 et 9 du présent arrêt.
74 Ainsi, l’apparence de la forme de la marque contestée ne se distingue pas de manière significative des normes et habitudes du secteur des briquets et produit une impression d’ensemble qui renvoie au domaine de compétence et de spécialisation des services visés par la marque contestée. Cette impression ne permet pas au public pertinent d’identifier l’origine commerciale d’un service de publicité, de gestion d’affaires commerciales, d’administration commerciale ou de travaux de bureau,
d’autant plus lorsque ce service porte précisément sur la publicité ou la commercialisation de briquets.
75 De même, la requérante n’a nullement démontré le caractère erroné de l’affirmation de la chambre de recours selon laquelle les briquets constituent des outils de marketing utilisés pour promouvoir une marque particulière, notamment dans le cas de briquets arborant des marques offerts en cadeaux. Eu égard à l’utilisation de briquets dans le cadre de campagnes de publicité, la forme d’un briquet qui ne se distingue nullement de l’apparence courante d’un tel produit ne saurait amener le
consommateur à y voir l’origine d’un service de publicité. Tout au plus le public pertinent percevra-t-il une indication du type de produits utilisé par la requérante dans le cadre des services visés par la marque contestée.
76 Partant, c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu que l’élément de forme de la marque contestée ne possédait aucun élément autre que l’apparence habituelle d’un briquet, à l’exception de l’élément verbal « clipper », de sorte que le consommateur professionnel des services liés aux briquets visés par la marque contestée ne percevrait pas l’origine spécifique de tels services, mais seulement une référence à l’objet des services visés par la marque contestée ou au domaine
d’activités dans lesquelles ils s’inscrivent.
77 Par conséquent, l’argument tendant à qualifier la forme de la marque contestée comme divergeant de la norme du marché, de sorte qu’elle revêtirait un caractère distinctif, doit être rejeté comme étant non fondé.
78 Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante relatif à l’appréciation prétendument erronée, par la chambre de recours, de l’impact de l’élément verbal « clipper », lequel ajouterait une valeur significative à la marque contestée et la rendrait distinctive.
79 En effet, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, ainsi que cela a été relevé au point 37 ci-dessus, qu’en mentionnant sa volonté d’enregistrer la forme tridimensionnelle comme marque de l’Union européenne, sans autre précision, dans la demande d’enregistrement de la marque contestée, la requérante avait indiqué que l’élément essentiel et prédominant de la marque contestée était la forme du briquet.
80 En tout état de cause, l’impact de l’élément verbal « clipper » sur l’impression d’ensemble de la forme en cause demeure insignifiant. En effet, comme il est constaté au point 39 du présent arrêt, cet élément verbal, d’une couleur gris foncé et apposé sur un fond gris clair, est de petite taille et occupe moins d’un dixième de la surface avant du briquet. Dans le cas de services relevant de la classe 35, le briquet sera uniquement perçu comme un petit objet servant couramment de support
publicitaire, utilisé dans une démarche de marketing. La présence du mot « clipper » n’aura aucune incidence sur la perception du public ciblé, dans la mesure où cet élément verbal est secondaire par rapport à la forme non distinctive du briquet.
81 Dans une telle hypothèse, il convient de conclure que l’élément verbal est extrêmement mineur et, par conséquent, d’une nature tellement superficielle qu’il n’apporte aucun caractère distinctif à l’ensemble de la marque contestée [voir, en ce sens, arrêt du 26 novembre 2015, Établissement Amra/OHMI (KJ Kangoo Jumps XR), T‑390/14, non publié, EU:T:2015:897 point 27]. Dès lors, un tel élément ne permet pas à la marque contestée de remplir sa fonction essentielle d’identification de
l’origine des services visés par celle-ci.
82 S’agissant, enfin, de l’argument de la requérante tiré de la notoriété de la marque contestée, acquise grâce à l’usage qui en a été fait depuis les années 70, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, pour pouvoir bénéficier de l’article 52, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, lu conjointement avec l’article 7, paragraphe 3, de ce règlement, la marque dont la nullité est demandée doit avoir acquis un caractère distinctif entre la date de son enregistrement et
celle de la demande de nullité. Il appartient au titulaire de la marque de produire les preuves appropriées et suffisantes pour démontrer que celle-ci a acquis un tel caractère [voir, en ce sens, ordonnance du 2 décembre 2009, Powerserv Personalservice/OHMI, C‑553/08 P, EU:C:2009:745, points 90 et 91, et arrêt du 23 février 2016, Consolidated Artists/OHMI – Body Cosmetics International (MANGO), T‑761/14, non publié, EU:T:2016:91, point 42].
83 À cet égard, l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage de la marque exige qu’au moins une fraction significative du public pertinent identifie, grâce à la marque, les produits et les services concernés comme provenant d’une entreprise déterminée [voir arrêt du 26 mars 2015, Bateaux mouches/OHMI (BATEAUX MOUCHES), T‑72/14, non publié, EU:T:2015:194, point 65 et jurisprudence citée ; arrêt du 23 février 2016, MANGO, T‑761/14, non publié, EU:T:2016:91, point 17]. En outre, le
caractère distinctif acquis par l’usage d’une marque doit être démontré dans la partie de l’Union dans laquelle elle n’avait pas ab initio un tel caractère (arrêt du 24 mai 2012, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli/OHMI, C‑98/11 P, EU:C:2012:307, point 60).
84 Or, les quelques éléments de preuve apportés par la requérante à l’appui de son argument tiré de la notoriété de la marque contestée ne permettent pas de démontrer à suffisance de droit que la marque contestée a acquis, dans l’Union, un caractère distinctif lié à l’usage qui en a été fait. À cet égard, les attestations de l’association nationale espagnole pour la défense des marques et du directeur général de l’association des marques espagnoles renommées, ainsi que la déclaration du
directeur d’une société britannique n’attestent pas à suffisance, par exemple, de la part de marché détenue par la marque contestée dans l’Union, de l’intensité de son usage dans l’Union, de l’importance des investissements faits par la requérante pour la promouvoir, ou de la proportion des milieux intéressés, dans l’Union, qui identifie le produit comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque (voir, en ce sens, arrêt du 18 juin 2002, Philips, C‑299/99, EU:C:2002:377, point 60).
85 Par conséquent, l’argument tiré de la notoriété de la marque contestée doit être rejeté.
86 Il résulte des considérations qui précèdent que le deuxième moyen doit être rejeté en ce qui concerne les services visés par la marque contestée relevant de la classe 35. En outre, dans la mesure où, comme il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, il suffit qu’un des motifs absolus de refus énumérés dans cette disposition s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré en tant que marque de l’Union européenne, il y a lieu de rejeter le recours en tant
qu’il est dirigé contre la décision attaquée déclarant nulle la marque contestée pour les services relevant de la classe 35, sans qu’il soit nécessaire d’examiner le troisième moyen à l’égard de ces services.
87 Par conséquent, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la recevabilité du troisième chef de conclusions de la requérante et du deuxième chef de conclusions de l’intervenante.
Sur les dépens
88 En application de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (quatrième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Flamagas, SA est condamnée aux dépens.
Kanninen Calvo-Sotelo Ibáñez-Martin Reine
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 juin 2017.
Signatures
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* Langue de procédure : l’anglais