T‑235/1662016TJ0235EU:T:2017:41300011144T
DOCUMENT DE TRAVAIL
ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)
21 juin 2017 ( 1 )
«Marque de l’Union européenne — Procédure d’opposition — Demande de marque de l’Union européenne figurative GPTech — Marques de l’Union européenne verbales antérieures GP JOULE — Défaut de production devant la division d’opposition des preuves de l’habilitation à former opposition — Production de preuves pour la première fois devant la chambre de recours — Absence de prise en considération — Pouvoir d’appréciation de la chambre de recours — Circonstances s’opposant à la prise en compte de preuves
nouvelles ou supplémentaires — Article 76, paragraphe 2, du règlement (CE) no 207/2009 — Règle 17, paragraphe 4, règle 19, paragraphe 2, règle 20, paragraphe 1, et règle 50, paragraphe 1, du règlement (CE) no 2868/95»
Dans l’affaire T‑235/16,
GP Joule PV GmbH & Co. KG, établie à Reußenköge (Allemagne), représentée par Me F. Döring, avocat,
partie requérante,
contre
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme E. Zaera Cuadrado, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO ayant été
Green Power Technologies, SL, établie à Bollullos de la Mitación (Espagne),
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 9 février 2016 (affaire R 848/2015-2), relative à une procédure d’opposition entre GP Joule PV et Green Power Technologies,
LE TRIBUNAL (septième chambre),
composé de Mmes V. Tomljenović, président, A. Marcoulli et M. A. Kornezov (rapporteur), juges,
greffier : M. E. Coulon,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 10 mai 2016,
vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 29 juillet 2016,
vu la modification de la composition des chambres du Tribunal,
vu la réattribution de l’affaire à la septième chambre et à un nouveau juge rapporteur,
vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties principales dans le délai de trois semaines à compter de la signification de la clôture de la phase écrite de la procédure et ayant décidé, en application de l’article 106, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,
rend le présent
Arrêt
[omissis]
Conclusions des parties
15 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
— réformer la décision attaquée et refuser l’enregistrement de la marque demandée ;
— à titre subsidiaire, annuler la décision attaquée.
16 L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
— rejeter le recours ;
— condamner la requérante aux dépens.
En droit
[omissis]
Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision attaquée
23 La requérante invoque au soutien de sa demande d’annulation de la décision attaquée, en substance, deux moyens. Le premier moyen est tiré d’une application erronée des règles régissant la procédure d’opposition et, le second, d’une application erronée de la règle 50, paragraphe 1, du règlement no 2868/95 et de l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009.
[omissis]
Sur le second moyen, tiré d’une application erronée de la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement no 2868/95 et de l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009
[omissis]
39 Il convient de rappeler, d’emblée, que la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement no 2868/95 prévoit que, « [l]orsque le recours est dirigé contre une décision d’une division d’opposition, la chambre de recours limite l’examen du recours aux faits et aux preuves présentés dans les délais fixés ou précisés par la division d’opposition conformément au règlement et aux présentes règles, à moins que la chambre ne considère que des faits et preuves nouveaux ou supplémentaires doivent
être pris en compte conformément à l’article [76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009] ».
40 L’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 dispose que l’EUIPO peut ne pas tenir compte des faits que les parties n’ont pas invoqués ou des preuves qu’elles n’ont pas produites en temps utile.
41 Le règlement no 207/2009 prévoit ainsi expressément que la chambre de recours dispose, lors de l’examen d’un recours dirigé contre une décision d’une division d’opposition, du pouvoir d’appréciation découlant de la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement no 2868/95 et de l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, à l’effet de décider s’il y a lieu ou non de prendre en compte des faits et des preuves nouveaux ou supplémentaires qui n’ont pas été présentés dans les délais
fixés ou précisés par la division d’opposition (arrêts du 3 octobre 2013, Rintisch/OHMI, C‑122/12 P, EU:C:2013:628, point 33 ; du 3 octobre 2013, Rintisch/OHMI, C‑120/12 P, EU:C:2013:638, point 32, et du 3 octobre 2013, Rintisch/OHMI, C‑121/12 P, EU:C:2013:639, point 33).
42 À cet égard, la Cour a déjà eu l’occasion de relever que la version française de la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement no 2868/95 se distinguait des versions espagnole, allemande et anglaise en un élément essentiel. En effet, alors que ces dernières versions prévoient que la chambre de recours ne peut prendre en considération que des faits et des preuves « additionnels ou complémentaires », la version française qualifie ces mêmes faits et preuves de « nouveaux ou
supplémentaires » (arrêt du 21 juillet 2016, EUIPO/Grau Ferrer, C‑597/14 P, EU:C:2016:579, point 23).
43 Se fondant sur l’économie générale et la finalité de la réglementation dont cette disposition constitue un élément et, notamment, l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, qui constitue le fondement juridique de la règle 50, paragraphe 1, du règlement no 2868/95, la Cour a conclu que, en ce qui concerne la preuve de l’usage d’une marque, lorsque aucune preuve à cet égard n’était produite dans le délai imparti par l’EUIPO, le rejet de l’opposition devait être prononcé d’office par ce
dernier. En revanche, lorsque des éléments de preuve ont été produits dans le délai imparti par l’EUIPO, la production de preuves supplémentaires demeure possible (voir arrêt du 21 juillet 2016, EUIPO/Grau Ferrer, C‑597/14 P, EU:C:2016:579, points 24 à 26 et jurisprudence citée).
44 La Cour a souligné que la même interprétation de l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009 devait être retenue pour ce qui est de la preuve de l’existence, de la validité et de l’étendue de la protection de la marque, ladite disposition contenant une règle dotée d’un rôle horizontal dans le système dudit règlement, en ce qu’elle s’applique indépendamment de la nature de la procédure concernée. Il s’ensuit que la règle 50 du règlement no 2868/95 ne saurait être interprétée en ce sens
qu’elle élargit les pouvoirs d’appréciation des chambres de recours à des preuves nouvelles (arrêt du 21 juillet 2016, EUIPO/Grau Ferrer, C‑597/14 P, EU:C:2016:579, point 27), mais seulement aux preuves dites « complémentaires » ou « supplémentaires », venant s’ajouter à des éléments de preuve pertinents, déposés dans le délai imparti [voir arrêt du 11 décembre 2014, CEDC International/OHMI – Underberg (Forme d’un brin d’herbe dans une bouteille), T‑235/12, EU:T:2014:1058, point 89 et
jurisprudence citée].
45 Dès lors, il y a lieu de déterminer si la déclaration du 15 juillet 2015, présentée pour la première fois devant la chambre de recours, peut être qualifiée de preuve « complémentaire » ou « supplémentaire » au sens de la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement no 2868/95 et de l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, tels qu’interprétés par la jurisprudence citée aux points 41 à 44.
46 Il est constant que la requérante n’a présenté aucun élément de preuve de son habilitation au titre de la règle 19, paragraphe 2, du règlement no 2868/95 ni dans le délai imparti, ni, de surcroît, à aucun moment durant la procédure devant la division d’opposition, et ce malgré le fait que, ainsi qu’il a été relevé au point 6 ci-dessus, la requérante a été clairement informée par l'EUIPO qu’elle devait présenter des documents pour prouver, d’une part, sa qualité de licenciée et, d’autre part,
qu’elle était autorisée par le titulaire des marques antérieures à former opposition. Par ailleurs, il est constant entre les parties que l’octroi d’une licence pour les marques antérieures n’a pas été inscrit au registre de l'EUIPO au titre de l’article 22 du règlement no 207/2009.
47 En outre, les propos contenus dans ses observations du 20 février 2015, selon lesquels la requérante était la licenciée exclusive du titulaire des marques antérieures, ne constituent qu’une simple affirmation non étayée par un élément de preuve. Dans ces circonstances, la déclaration du 15 juillet 2015 ne saurait être considérée comme une preuve « complémentaire » ou « supplémentaire » venant s’ajouter à des preuves déjà présentées par la requérante.
48 S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel son habilitation à former opposition découlerait de manière évidente du fait que sa dénomination était identique à celle figurant dans les marques antérieures qui sont à la base de l’opposition, il suffit d’observer, à l’instar de l’EUIPO, que cette circonstance ne saurait permettre de présumer que la requérante disposait d’une habilitation. Le simple fait qu’un signe coïncide, entièrement ou en partie, avec la dénomination d’une entreprise
peut être dû à diverses circonstances dans la vie des affaires, et ne peut évidemment pas se substituer à un document probatoire, tel qu’un contrat de licence, démontrant tant la qualité de licencié que l’étendue de ses droits. À cet égard, les droits du licencié peuvent faire l’objet de diverses limitations, visant, notamment, les produits et les services faisant l’objet de la licence en cause, le territoire pour lequel la licence a été octroyée et les conditions de l’autorisation de former
opposition.
49 Dès lors, la chambre de recours a conclu à bon droit que la déclaration du 15 juillet 2015 ne saurait être qualifiée de preuve « complémentaire » ou « supplémentaire » et ne pouvait, par conséquent, être prise en compte au titre de la règle 50, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement no 2868/95 et de l’article 76, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, tels qu’interprétés par la jurisprudence citée aux points 41 à 44.
50 Partant, le second moyen de la requérante doit être rejeté comme non fondé.
[omissis]
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (septième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) GP Joule PV GmbH & Co. KG est condamnée aux dépens.
Tomljenović
Marcoulli
Kornezov
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 21 juin 2017.
Signatures
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
( 1 ) Langue de procédure : l’anglais.