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03/05/2017 | CJUE | N°T-36/16

CJUE | CJUE, Arrêt du Tribunal, Enercon GmbH contre Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle., 03/05/2017, T-36/16


ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

3 mai 2017 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne consistant en un dégradé de verts – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑36/16,

Enercon GmbH, établie à Aurich (Allemagne), représentée par M^es S. Overhage, R. Böhm et A. Silverleaf, avocats,

pa

rtie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. A. Folli...

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

3 mai 2017 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne consistant en un dégradé de verts – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑36/16,

Enercon GmbH, établie à Aurich (Allemagne), représentée par M^es S. Overhage, R. Böhm et A. Silverleaf, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

Gamesa Eólica, SL, établie à Sarriguren (Espagne), représentée par M^e A. Sanz Cerralbo, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 28 octobre 2015 (affaire R 597/2015‑2), relative à une procédure de nullité entre Gamesa Eólica et Enercon,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de MM. A. M. Collins, président, R. Barents (rapporteur) et J. Passer, juges,

greffier : M^me M. Marescaux, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 26 janvier 2016,

vu le mémoire en réponse de l’EUIPO déposé au greffe du Tribunal le 20 avril 2016,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 4 avril 2016,

à la suite de l’audience du 12 janvier 2017,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 21 août 2001, la requérante, Enercon GmbH, a présenté une demande de marque de l’Union européenne à l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé correspond au signe suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 7 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Convertisseurs d’énergie éolienne et leurs pièces ».

4        La marque contestée, reproduite au point 2 ci-dessus, est identifiée dans le formulaire de demande en tant que « marque de couleur ». Une description des couleurs demandées a été fournie à l’aide d’un code de couleurs.

5        La demande de marque de l’Union européenne a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 54/2002, du 8 juillet 2002, et a été enregistrée le 30 janvier 2003.

6        Le 26 mars 2009, l’autre partie à la procédure, Gamesa Eólica, SL, a formé une demande en nullité de la marque de l’Union européenne, au titre de l’article 51, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 40/94 [devenu article 52, paragraphe 1, sous a) et b), du règlement n° 207/2009].

7        Par décision du 8 décembre 2010, la division d’annulation a accueilli la demande en nullité, sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. S’agissant, en particulier, de la nature de la marque contestée, la division d’annulation a considéré, en substance, que ladite marque définissait la façon dont les couleurs enregistrées étaient susceptibles de couvrir un mât éolien.

8        Le 28 janvier 2011, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’annulation.

9        Par décision du 1^er mars 2012 (ci-après la « première décision »), la première chambre de recours de l’EUIPO a annulé la décision de la division d’annulation. Premièrement, elle a considéré que la marque contestée était composée d’un signe figuratif consistant en une forme bidimensionnelle comportant des couleurs et non une marque de couleur. Deuxièmement, elle a estimé que la marque contestée avait un caractère distinctif suffisant, dans la mesure où elle ne représentait ni un mât
d’éolienne ni une marque de couleur. Troisièmement, elle a estimé que la marque contestée n’était pas descriptive et que l’article 7, paragraphe 1, sous e), ii), du règlement n° 207/2009 ne s’appliquait pas en l’espèce, car la marque contestée n’était ni une marque de couleur ni une éolienne tridimensionnelle. Quatrièmement, selon la chambre de recours, rien ne prouvait que la marque contestée, telle que requalifiée, avait été demandée de mauvaise foi, dans la mesure où ladite marque ne pouvait
empêcher des concurrents de satisfaire aux règles administratives nationales. À cet égard, la division d’annulation avait, notamment, fondé son argumentation sur le fait que la couleur verte, ou un dégradé de plusieurs nuances de vert, ne pouvait être enregistrée pour les mâts d’éoliennes, dans la mesure où une marque de l’Union européenne ne devait pas faire obstacle aux législations nationales visant à limiter l’impact visuel des éoliennes ou, au contraire, s’agissant de leur partie supérieure, à
ce que les éoliennes soient repérées par les avions.

 Procédure devant le Tribunal et la Cour

10      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 4 juin 2012, Gamesa Eólica a introduit un recours visant à l’annulation de la première décision. Enercon n’a pas participé à la procédure devant le Tribunal au sens de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure de 1991, en sorte qu’elle n’a pas acquis le statut de partie intervenante devant le Tribunal.

11      À l’appui de son recours, Gamesa Eólica soulevait trois moyens. Le premier moyen était tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n^o 207/2009, au motif que la première chambre de recours de l’EUIPO avait à tort requalifié la marque contestée en tant que marque figurative, alors qu’elle avait été enregistrée comme marque de couleur, et l’avait considérée comme ayant un caractère distinctif. Le deuxième moyen était tiré d’une violation de l’article 62 du
règlement n^o 207/2009 ainsi que du principe de continuité fonctionnelle. Le troisième moyen était tiré d’une violation de l’article 52, paragraphe 1, sous b), dudit règlement, en ce que la chambre de recours n’aurait pas tenu compte de la mauvaise foi dont Enercon aurait fait preuve lors du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée.

12      Après avoir écarté le deuxième moyen soulevé par Gamesa Eólica, le Tribunal a, par l’arrêt du 12 novembre 2013, Gamesa Eólica/OHMI – Enercon (Dégradé de verts) (T‑245/12, non publié, EU:T:2013:588, ci-après le « premier arrêt du Tribunal »), annulé la première décision en faisant droit au premier moyen, au motif que ladite chambre s’était fondée sur une perception erronée de la nature et des caractéristiques de la marque contestée et avait commis une erreur d’appréciation en considérant que
la marque contestée était non pas une marque de couleur, mais une marque figurative bidimensionnelle comportant des couleurs. Ayant constaté cette erreur d’appréciation portant sur la nature de la marque contestée, le Tribunal n’a pas procédé à l’examen du caractère distinctif de celle-ci.

13      Par requête déposée au greffe de la Cour le 22 janvier 2014, la requérante a introduit un pourvoi devant la Cour.

14      Dans la mesure où la requérante n’avait pas déposé d’observations devant le Tribunal, la Cour a jugé qu’elle n’avait pas participé à la procédure devant ce dernier, en sorte que, n’ayant pas acquis le statut de partie intervenante devant le Tribunal, elle ne pouvait, en application de l’article 56, deuxième alinéa, du statut de la Cour, former un pourvoi contre le premier arrêt du Tribunal (ordonnance du 12 février 2015, Enercon/Gamesa Eólica, C‑35/14 P, EU:C:2015:158, point 25).

15      La Cour a donc rejeté le pourvoi comme étant manifestement irrecevable.

 Procédure devant la deuxième chambre de recours

16      L’affaire a été renvoyée devant la deuxième chambre de recours (affaire R 597/2015-2), qui a rendu sa décision le 28 octobre 2015 (ci-après la « décision attaquée »). La chambre de recours a considéré, au point 16 de la décision attaquée, que l’objet de la procédure était la marque telle qu’enregistrée, en sorte qu’il s’agissait d’une marque de couleur. La chambre de recours a, en se fondant sur le premier arrêt du Tribunal, confirmé, au point 19 de la décision attaquée, que la marque
contestée ne pouvait être qualifiée de marque figurative et a conclu, aux points 20 et 21 de ladite décision, que cette marque de couleur comportait différents tons de vert et du blanc, et se limitait à la forme et à la disposition spécifiques d’une surface trapézoïdale verticale élancée comportant à la base cinq bandes horizontales de couleur verte graduellement plus claires de bas en haut et dont le reste de la surface était blanc.

17      S’agissant du caractère distinctif de la marque contestée, la chambre de recours a, après avoir rappelé la jurisprudence, considéré, au point 32 de la décision attaquée, que la marque contestée transmettait exclusivement un message esthétique en tant qu’élément de décoration des produits en cause, mais qui ne serait toutefois pas reconnu comme étant une référence à leur origine. La chambre de recours a constaté, au point 33 de la décision attaquée, que le vert, en tant que couleur de la
nature, faisait référence au fait que les convertisseurs d’énergie éolienne étaient écologiques et respectueux de l’environnement. En outre, elle a relevé, au point 34 de ladite décision, qu’il s’agissait d’un dégradé uniforme et logique, et donc tout à fait banal, du vert foncé au vert clair, puis de blanc, et qu’il convenait de prendre en considération le fait que les consommateurs ne conservaient qu’un souvenir incomplet des couleurs. Par ailleurs, la chambre de recours a estimé, au point 36 de
la décision attaquée, que la marque contestée ne contenait aucun élément susceptible d’attirer l’attention du consommateur et que rien n’indiquait qu’elle pourrait être considérée comme étant singulière ou mémorable. Enfin, au point 37 de la décision attaquée, elle a indiqué que, les convertisseurs d’énergie éolienne étant des biens d’investissement de grande valeur, les consommateurs n’identifieraient ni n’acquerraient ces produits sur la base des décorations ou de la finition extérieure, mais sur
des noms commerciaux et des marques verbales, qui leur fournissaient des renseignements précis et compréhensibles sur la provenance des produits. La chambre de recours a donc conclu, au point 38 de la décision attaquée, à l’absence de caractère distinctif de la marque contestée.

18      S’agissant de l’acquisition du caractère distinctif de la marque contestée en raison de l’usage qui en aurait été fait, la chambre de recours a, au point 40 de la décision attaquée, renvoyé l’affaire devant la division d’annulation afin que cette dernière apprécie l’ensemble des preuves de l’usage produites par la requérante.

 Conclusions des parties

19      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO aux dépens.

20      L’EUIPO et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 Sur la recevabilité de nouveaux éléments de preuve soumis par la requérante

21      Lors de l’audience, la requérante a souhaité verser au dossier de nouveaux éléments de preuve en vue de démontrer que la classification des marques par type de marque ne pouvait pas, en droit, avoir un impact sur l’analyse du caractère distinctif ou sur la possibilité d’enregistrer une marque. Par ailleurs, elle a prétendu que, en l’espèce, le code d’enregistrement utilisé par l’EUIPO ne correspondait pas au code attribué aux « marques de couleur ».

22      À cet égard, il convient de rappeler que le recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’EUIPO au sens de l’article 65 du règlement n° 207/2009. Dès lors, la fonction du Tribunal n’est pas celle de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui [voir ordonnance du 13 septembre 2011, Wilfer/OHMI, C‑546/10 P, non publiée, EU:C:2011:574, point 41 et jurisprudence citée, et
arrêt du 7 novembre 2014, Kaatsu Japan/OHMI (KAATSU), T‑567/12, non publié, EU:T:2014:937, point 19 et jurisprudence citée].

23      Au demeurant, il y a lieu de relever que la requérante n’a invoqué aucune raison qui l’aurait empêchée, d’une part, de produire de nouveaux éléments de preuve et, d’autre part, de faire valoir les arguments fondés sur ces éléments dans le cadre de la procédure administrative. Par ailleurs, la requérante n’a pas non plus prétendu que ces nouveaux éléments de preuve, ainsi que les arguments développés à leur soutien, n’auraient pu être produits qu’au stade du recours devant le Tribunal, voire
de l’audience.

24      Il s’ensuit que les nouveaux éléments de preuve mentionnés au point 21 ci-dessus, qui ne figurent nullement dans le dossier de la procédure administrative, ainsi que les arguments fondés sur ceux-ci doivent être déclarés irrecevables.

 Sur le fond

25      À l’appui de son recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

26      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif.

27      Le caractère distinctif d’une marque au sens de cette disposition signifie que cette marque permet d’identifier le produit ou le service pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit ou ce service de ceux d’autres entreprises [arrêts du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C‑456/01 P et C‑457/01 P, EU:C:2004:258, point 34, et du 28 janvier 2015, Enercon/OHMI (Dégradé de cinq nuances de la couleur verte), T‑655/13, non publié,
EU:T:2015:49, point 22].

28      Il y a lieu, en outre, de rappeler que, pour constituer une marque, des couleurs, ou des combinaisons de couleurs, doivent remplir trois conditions. Premièrement, elles doivent constituer un signe. Deuxièmement, ce signe doit être susceptible d’une représentation graphique. Troisièmement, ledit signe doit être propre à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises (arrêts du 6 mai 2003, Libertel, C‑104/01, EU:C:2003:244, point 23, et du 28 janvier
2015, Dégradé de cinq nuances de la couleur verte, T‑655/13, non publié, EU:T:2015:49, point 23 ; voir également, en ce sens, arrêt du 24 juin 2004, Heidelberger Bauchemie, C‑49/02, EU:C:2004:384, point 22).

29      Quant à la question de savoir si les couleurs ou les combinaisons de couleurs sont propres à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises, il faut apprécier si elles sont aptes ou non à véhiculer des informations précises, notamment quant à l’origine d’un produit ou d’un service [arrêts du 24 juin 2004, Heidelberger Bauchemie, C‑49/02, EU:C:2004:384, point 37 ; du 25 septembre 2002, Viking-Umwelttechnik/OHMI (Juxtaposition de vert et de gris),
T‑316/00, EU:T:2002:225, point 23 ; du 9 juillet 2003, Stihl/OHMI (Combinaison d’orange et de gris), T‑234/01, EU:T:2003:202, point 26, et du 28 janvier 2015, Dégradé de cinq nuances de la couleur verte, T‑655/13, non publié, EU:T:2015:49, point 24].

30      À cet égard, il convient de rappeler que, si les couleurs sont propres à susciter certaines associations d’idées et à générer des sentiments, en revanche, de par leur nature, elles sont peu aptes à véhiculer des informations précises. Elles le sont d’autant moins qu’elles sont habituellement et largement utilisées dans la publicité et dans la commercialisation des produits et des services pour leur pouvoir attractif, en dehors de tout message précis (arrêts du 24 juin 2004, Heidelberger
Bauchemie, C‑49/02, EU:C:2004:384, point 38, et du 28 janvier 2015, Dégradé de cinq nuances de la couleur verte, T‑655/13, non publié, EU:T:2015:49, point 25).

31      Sauf dans des circonstances exceptionnelles, les couleurs n’ont pas un caractère distinctif ab initio, mais peuvent éventuellement l’acquérir à la suite d’un usage lié aux produits ou aux services visés par la demande de marque de l’Union européenne (voir ordonnance du 21 janvier 2016, Enercon/OHMI, C‑170/15 P, non publiée, EU:C:2016:53, point 31 et jurisprudence citée). Ainsi, une couleur en elle-même peut acquérir, pour les produits ou les services pour lesquels est demandé
l’enregistrement, un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait, en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009. En revanche, s’agissant de la couleur en elle-même, l’existence d’un caractère distinctif avant tout usage ne pourrait se concevoir que dans des circonstances exceptionnelles, et notamment lorsque le nombre des produits ou des services pour lesquels la marque est demandée est très limité et le marché pertinent très spécifique (voir arrêt du 28 janvier 2015,
Dégradé de cinq nuances de la couleur verte, T‑655/13, non publié, EU:T:2015:49, point 26 et jurisprudence citée).

32      Par ailleurs, pour apprécier le caractère distinctif qu’une couleur ou une combinaison de couleurs déterminée peut présenter en tant que marque, il est nécessaire de tenir compte de l’intérêt général à ne pas restreindre indûment la disponibilité des couleurs pour les autres opérateurs offrant des produits ou des services du type de ceux pour lesquels l’enregistrement est demandé (arrêts du 6 mai 2003, Libertel, C‑104/01, EU:C:2003:244, point 60 ; du 24 juin 2004, Heidelberger Bauchemie,
C‑49/02, EU:C:2004:384, point 42, et du 28 janvier 2015, Dégradé de cinq nuances de la couleur verte, T‑655/13, non publié, EU:T:2015:49, point 27).

33      Enfin, il y a lieu de rappeler que le caractère distinctif d’un signe ne peut être apprécié que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent [arrêts du 12 novembre 2008, GretagMacbeth/OHMI (Combinaison de 24 carrés de couleur), T‑400/07, non publié, EU:T:2008:492, point 37, et du 28 janvier 2015, Dégradé de cinq nuances de la couleur verte, T‑655/13, non publié,
EU:T:2015:49, point 28].

34      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner l’argumentation de la requérante selon laquelle la marque contestée serait pourvue d’un caractère distinctif.

35      S’agissant du public pertinent, la chambre de recours a estimé, à juste titre, au point 31 de la décision attaquée, que les produits couverts par la marque contestée, relevant de la classe 7, à savoir des « convertisseurs d’énergie éolienne et leurs pièces », étaient achetés par des sociétés ou des particuliers désireux de les revendre ou de produire de l’énergie éolienne grâce à eux, en sorte qu’il s’agissait de professionnels de l’énergie hautement qualifiés sur le plan technique ou de
personnes qui étaient conseillées par des professionnels de l’énergie éolienne. Même si la chambre de recours ne l’a pas énoncé spécifiquement, le public pertinent est donc constitué de consommateurs professionnels manifestant un degré d’attention accru (voir, en ce sens, arrêt du 28 janvier 2015, Dégradé de cinq nuances de la couleur verte, T‑655/13, non publié, EU:T:2015:49, point 30). Cette constatation n’est, au demeurant, pas contestée par la requérante.

36      S’agissant de la marque contestée, il convient de relever que, ainsi qu’il a été jugé au point 35 du premier arrêt du Tribunal, il ressort autant du formulaire de demande que de l’accusé de réception de la demande d’enregistrement envoyée par l’EUIPO à l’intervenante que la marque contestée a été enregistrée comme marque de couleur, ce que la requérante ne conteste d’ailleurs pas. Or, elle aurait pu demander l’enregistrement de sa marque en tant que marque figurative si telle avait été
effectivement son intention.

37      Il s’ensuit que l’examen du caractère distinctif de la marque contestée devait, ainsi que l’a fait la chambre de recours et contrairement à ce que prétend la requérante, s’effectuer au regard de la catégorie qui avait été choisie par elle, sans possibilité de requalification (voir, en ce sens, ordonnance du 21 janvier 2016, Enercon/OHMI, C‑170/15 P, non publiée, EU:C:2016:53, points 14 à 24).

38      Si le Tribunal devait examiner le caractère distinctif de la marque dont l’enregistrement est demandé non pas au regard de la catégorie de la marque choisie par le demandeur dans sa demande d’enregistrement, mais également au regard de toute autre catégorie qui pourrait paraître pertinente, l’obligation, pour ce demandeur, d’indiquer la catégorie de marque dont l’enregistrement est demandé et l’impossibilité, découlant de l’article 43, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, de modifier
ultérieurement cette catégorie seraient dépourvues de tout effet utile (ordonnance du 21 janvier 2016, Enercon/OHMI, C‑170/15 P, non publiée, EU:C:2016:53, point 29).

39      Dès lors, c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a apprécié le caractère distinctif de la marque contestée en fonction de la catégorie telle que choisie et indiquée dans la demande d’enregistrement, et non pas, ainsi que le prétend la requérante, en fonction de la catégorie telle que perçue par le public pertinent (voir, en ce sens, ordonnance du 21 janvier 2016, Enercon/OHMI, C‑170/15 P, non publiée, EU:C:2016:53, point 26).

40      Par conséquent, ainsi que le relève à juste titre l’EUIPO, la forme trapézoïdale verticale ne fait pas partie de l’objet de la protection demandée et cet élément ne délimite pas les couleurs des contours, mais sert uniquement à indiquer la manière dont les couleurs seront appliquées sur les produits en cause. La protection demandée concerne donc une combinaison de couleurs particulière appliquée sur la partie inférieure d’un essieu, indépendamment de la forme de ce dernier, qui ne fait pas
l’objet de la protection demandée.

41      C’est donc à l’aune de la jurisprudence relative aux marques de couleur qu’il convient, désormais, d’examiner si c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré que la marque contestée était dépourvue de caractère distinctif au regard des produits en cause.

42      À cet égard, la chambre de recours a relevé, au point 32 de la décision attaquée, que la marque contestée se composait de cinq tons différents de la couleur primaire simple et répandue qu’est le vert ainsi que de blanc. Selon la chambre de recours, le vert serait associé à la nature, dans la mesure où c’est la couleur principale de la végétation. Les convertisseurs d’énergie éolienne étant souvent placés dans des zones vertes, l’utilisation de la couleur verte devrait permettre de réduire le
contraste entre la végétation et les produits en cause. La marque contestée transmettrait donc exclusivement un message esthétique, lequel ne serait pas reconnu comme étant une référence à leur origine.

43      En outre, la chambre de recours a considéré, au point 33 de la décision attaquée, que le vert faisait référence au fait que les convertisseurs d’énergie éolienne étaient écologiques ou respectueux de l’environnement, en sorte qu’elle a estimé que le fait que le vert soit représenté de manière uniforme ou dans différents tons et en blanc n’empêcherait pas le public pertinent de comprendre ces couleurs comme faisant référence au caractère écologique des convertisseurs d’énergie éolienne.
Enfin, au point 34 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué qu’il s’agissait d’un dégradé uniforme et logique, donc tout à fait banal, du vert foncé au vert clair, puis de blanc.

44      La requérante considère, au contraire, que, compte tenu de la combinaison spécifique de cinq couleurs différentes et en raison de sa forme d’ensemble consistant en une surface trapézoïdale verticale élancée, la marque contestée est apte à indiquer au public pertinent la provenance des produits en cause. Par ailleurs, elle fait valoir que le caractère distinctif d’une marque ne doit pas être assimilé à son originalité.

45      À cet égard, il y lieu de constater que c’est sans commettre d’erreur que la chambre de recours a considéré que la marque contestée, composée de cinq tons de la couleur verte ainsi que de blanc, appliqués aux convertisseurs d’énergie éolienne et à leurs pièces, transmettait exclusivement un message esthétique en tant qu’élément de décoration desdits produits et ne pourrait pas, de ce fait, servir en tant qu’indication de l’origine commerciale d’un produit au sens de la jurisprudence citée au
point 29 ci-dessus.

46      En outre, il est exact que le vert, en tant que couleur de la nature, fait référence au fait que les produits en cause sont écologiques ou respectueux de la nature.

47      Il convient donc de considérer que, même si la marque contestée, constituée de cinq tons de la couleur verte ainsi que de blanc, ne peut être exclusivement considérée comme faisant référence au caractère écologique des produits qu’elle couvre, il n’en demeure pas moins que cet usage de la couleur verte est connu par le public pertinent et l’empêchera de la considérer comme indiquant l’origine des produits (voir, en ce sens, arrêt du 28 janvier 2015, Dégradé de cinq nuances de la couleur
verte, T‑655/13, non publié, EU:T:2015:49, point 40).

48      Par ailleurs, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la marque contestée comprend cinq tons de la même couleur verte ainsi que du blanc, et non pas cinq couleurs différentes et du blanc. Il s’ensuit que cette gradation sera considérée comme un dégradé plutôt que comme une combinaison de cinq couleurs différentes (arrêt du 28 janvier 2015, Dégradé de cinq nuances de la couleur verte, T‑655/13, non publié, EU:T:2015:49, point 36).

49      En outre, ainsi que le Tribunal l’a déjà jugé, la couleur verte, même en cinq nuances différentes, permettra, contrairement à ce que prétend la requérante, d’atténuer le contraste existant entre la végétation et les éoliennes (arrêt du 28 janvier 2015, Dégradé de cinq nuances de la couleur verte, T‑655/13, non publié, EU:T:2015:49, point 35). La présence de la couleur blanche n’affecte nullement cette conclusion, en raison de sa neutralité.

50      De surcroît, la disposition des couleurs sur la partie inférieure de l’essieu est également dénuée de caractère distinctif, mais répond uniquement à la considération esthétique de permettre aux produits en cause de se fondre plus aisément dans l’environnement qui les entoure (voir, en ce sens, arrêt du 28 janvier 2015, Dégradé de cinq nuances de la couleur verte, T‑655/13, non publié, EU:T:2015:49, point 38). En effet, il est constant que les éoliennes ne sont pas installées dans des zones
urbaines, mais dans des zones agricoles ou forestières.

51      Enfin, il convient de constater, à l’instar de la chambre de recours, que, étant donné que les convertisseurs d’énergie éolienne ainsi que leurs pièces constituent des biens d’investissement de grande valeur, les consommateurs professionnels, constituant le public pertinent pour les produits relevant de la classe 7, n’identifieront ni n’acquerront ces installations sur la base des décorations ou de la finition extérieure, mais se fonderont sur des renseignements précis et véritables sur la
provenance des produits (arrêt du 28 janvier 2015, Dégradé de cinq nuances de la couleur verte, T‑655/13, non publié, EU:T:2015:49, point 41).

52      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le moyen unique doit être rejeté ainsi que le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

53      Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Enercon GmbH est condamnée aux dépens.

Collins Barents Passer

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 3 mai 2017.

Signatures

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*      Langue de procédure : l’anglais.


Synthèse
Formation : Huitième chambre
Numéro d'arrêt : T-36/16
Date de la décision : 03/05/2017
Type de recours : Recours en annulation - non fondé

Analyses

Marque de l’Union européenne – Procédure de nullité – Marque de l’Union européenne consistant en un dégradé de verts – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 – Article 52, paragraphe 1, sous a), du règlement no 207/2009.

Marques

Propriété intellectuelle, industrielle et commerciale


Parties
Demandeurs : Enercon GmbH
Défendeurs : Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle.

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Barents

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:T:2017:295

Source

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