ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre)
30 septembre 2015 ( *1 )
«Marque communautaire — Procédure d’opposition — Demande de marque communautaire figurative BASmALI — Marque antérieure non enregistrée ou signe antérieur BASMATI — Motif relatif de refus — Article 8, paragraphe 4, du règlement (CE) no 207/2009»
Dans l’affaire T‑136/14,
Tilda Riceland Private Ltd, établie à Gurgaon (Inde), représentée par MM. S. Malynicz, barrister, N. Urwin et D. Sills, solicitors,
partie requérante,
contre
Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. P. Geroulakos et P. Bullock, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été
Siam Grains Co. Ltd, établie à Bangkok (Thaïlande),
ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 18 décembre 2013 (affaire R 1086/2012‑4), relative à une procédure d’opposition entre Tilda Riceland Private Ltd et Siam Grains Co. Ltd,
LE TRIBUNAL (sixième chambre),
composé de MM. S. Frimodt Nielsen, président, F. Dehousse (rapporteur) et A. M. Collins, juges,
greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,
vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 24 février 2014,
vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 23 juillet 2014,
à la suite de l’audience du 21 avril 2015,
rend le présent
Arrêt
Antécédents du litige
1 Le 4 novembre 2003, Siam Grains Co. Ltd, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].
2 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :
Image
3 Le produit pour lequel l’enregistrement a été demandé relève de la classe 30 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspond à la description suivante : « Riz à grains longs ».
4 La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 37/2004, du 13 septembre 2004.
5 Le 10 décembre 2004, United Riceland Private Ltd, devenue Tilda Riceland Private Ltd, la requérante, a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement no 40/94 (devenu article 41 du règlement no 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour le produit visé au point 3 ci‑dessus.
6 L’opposition était fondée sur la marque antérieure non enregistrée ou le signe antérieur BASMATI, utilisé dans la vie des affaires en relation avec le riz.
7 Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 40/94 (devenu article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009). La requérante faisait notamment valoir qu’elle pouvait, en vertu du droit applicable au Royaume‑Uni, empêcher l’usage de la marque demandée, au moyen de l’action en usurpation d’appellation (action for passing off).
8 Le 28 janvier 2008, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité. Elle a considéré, en particulier, que la requérante n’avait pas soumis de documents décrivant la manière dont le riz qu’elle exportait vers le Royaume‑Uni était commercialisé. Dans ces conditions, la requérante aurait été en défaut de prouver qu’elle avait acquis le « goodwill » nécessaire pour obtenir gain de cause, en vertu du droit relatif à l’usurpation applicable au Royaume‑Uni.
9 Le 20 mars 2008, la requérante a introduit un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement no 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement no 207/2009), contre la décision de la division d’opposition.
10 Par décision du 19 mars 2009, la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Elle a considéré, en substance, que, au titre de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 40/94, l’opposante devait démontrer qu’elle était titulaire du droit fondant l’opposition. Or, en l’espèce, la requérante n’aurait pas démontré qu’elle était titulaire du droit invoqué. En particulier, la chambre de recours a considéré que le terme « basmati » n’était pas une marque ou un signe couverts par des
droits de propriété, mais simplement la désignation courante d’une variété de riz. Le terme « basmati » serait générique. Par ailleurs, la chambre de recours a souligné que la propriété protégée par l’action en usurpation d’appellation ne se référait pas au signe en cause, mais au « goodwill ». La chambre de recours a conclu que la requérante n’avait pas démontré qu’elle détenait la propriété du terme « basmati » et que, dès lors, l’opposition ne remplissait pas la condition – prévue par le
règlement no 40/94 – relative à l’existence d’un droit de propriété.
11 Par arrêt du 18 janvier 2012, Tilda Riceland Private/OHMI – Siam Grains (BASmALI) (T‑304/09, Rec, EU:T:2012:13), le Tribunal a annulé la décision de la chambre de recours du 19 mars 2009. Le Tribunal a considéré que la chambre de recours avait commis une erreur en rejetant l’opposition au motif que la requérante n’aurait pas démontré qu’elle était titulaire du signe en cause, sans analyser précisément si la requérante avait acquis des droits sur ledit signe en application du droit du Royaume‑Uni
(point 29 de l’arrêt).
12 À la suite de l’arrêt BASmALI, point 11 supra (EU:T:2012:13), l’affaire a été renvoyée devant la quatrième chambre de recours de l’OHMI.
13 Par décision du 18 décembre 2013 (ci‑après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Elle a considéré, en substance, que la requérante n’avait pas apporté la preuve de l’usage du nom « basmati » comme signe distinctif dans la vie des affaires. Dans ces conditions, la chambre de recours n’a pas examiné si la requérante avait acquis des droits sur ce signe conformément au droit du Royaume‑Uni.
Conclusions des parties
14 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
— annuler la décision attaquée ;
— condamner l’OHMI aux dépens.
15 L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
— rejeter le recours ;
— condamner la requérante aux dépens.
En droit
16 À l’appui du recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009.
17 Premièrement, la requérante soutient que le signe BASMATI est distinctif dans la mesure où il désignerait un type de riz spécifique qui jouirait d’une renommée en raison de sa qualité, de son parfum et d’autres propriétés. La requérante aurait produit des éléments de preuve à cet égard devant l’OHMI. La chambre de recours semblerait ajouter un critère aux termes duquel la propriété sur le signe devrait être exclusive. Dans ce contexte, le signe BASMATI ne serait pas différent des signes CHAMPAGNE
ou SWISS CHOCOLATE et pourrait bénéficier tout autant d’une protection au titre de l’action en usurpation d’appellation. Compte tenu des éléments du cas d’espèce, la requérante soutient que le signe BASMATI remplit tous les critères pour bénéficier d’une protection selon le droit du Royaume‑Uni. Deuxièmement, la requérante estime que, en tant que producteur étranger et exportateur du produit en question, elle serait titulaire du « goodwill » sur le signe BASMATI (avec d’autres opérateurs), même
si une autre société commercialise effectivement le produit au Royaume‑Uni. La chambre de recours aurait négligé les éléments avancés par la requérante durant la procédure administrative. Troisièmement, le fait que plusieurs opérateurs utilisent leurs propres marques distinctives associées au signe BASMATI ne porterait pas atteinte au caractère distinctif de ce signe.
18 L’OHMI concède que l’approche suivie par la chambre de recours, bien que conforme à la notion de caractère distinctif applicable en vertu du droit de l’Union européenne, est difficile à concilier avec les spécificités de la forme dite « extensive » de l’usurpation d’appellation ainsi qu’avec les décisions adoptées par les juridictions du Royaume‑Uni. Néanmoins, les éléments versés par la requérante au dossier ne montreraient pas que le riz basmati serait perçu par le public du Royaume‑Uni comme
jouissant d’une « réputation manifeste » du fait de ses qualités spéciales, critère qui découlerait de la jurisprudence du Royaume‑Uni. L’OHMI admet que la chambre de recours n’a formulé aucune référence explicite à cet égard. Toutefois, il ressortirait de l’examen de la chambre de recours que, si elle avait explicitement abordé cette question, elle aurait conclu que les éléments de preuve du dossier ne permettaient pas d’associer le signe BASMATI à une « réputation manifeste ». Enfin, par souci
d’exhaustivité, l’OHMI soutient que la requérante n’aurait pas démontré qu’elle était titulaire d’un « goodwill », ni qu’elle souffrirait d’un préjudice à cet égard. L’OHMI en conclut que, à supposer que la position de la chambre de recours ne soit pas la bonne quant à la question de savoir si la notion traditionnelle de caractère distinctif en tant qu’élément permettant d’identifier l’origine commerciale des produits s’applique également dans un cas de la forme dite « extensive » de l’usurpation
d’appellation, les éléments de preuve versés au dossier ne suffisent pas à démontrer que le public du Royaume‑Uni pertinent perçoit le signe BASMATI comme jouissant d’une « réputation manifeste ».
19 Il y a lieu de relever que, en vertu de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, le titulaire d’une marque non enregistrée ou d’un autre signe utilisé dans la vie des affaires dont la portée n’est pas seulement locale peut former opposition à l’enregistrement d’une marque communautaire, lorsque et dans la mesure où, selon la législation communautaire ou le droit de l’État membre qui est applicable à ce signe, d’une part, des droits à ce signe ont été acquis avant la date de dépôt de
la demande de marque communautaire ou, le cas échéant, avant la date de la priorité invoquée à l’appui de la demande de marque communautaire et, d’autre part, ce signe donne à son titulaire le droit d’interdire l’utilisation d’une marque plus récente.
20 Par ailleurs, et dans la mesure où la requérante invoque au soutien de son opposition l’action en usurpation d’appellation prévue par le droit du Royaume‑Uni, il y a lieu de rappeler que le droit de l’État membre applicable, en l’espèce, est le Trade Marks Act, 1994 (loi du Royaume‑Uni sur les marques), dont l’article 5, paragraphe 4, dispose notamment :
« Une marque ne peut être enregistrée si, ou dans la mesure où, son usage au Royaume‑Uni est susceptible d’être empêché :
a) en raison de toute règle de droit [notamment en vertu du droit relatif à l’usurpation d’appellation (law of passing off)] protégeant une marque non enregistrée ou tout autre signe utilisé dans la vie des affaires […] »
21 Il résulte de ce texte, tel qu’interprété par les juridictions nationales, que l’opposant doit établir, conformément au régime juridique de l’action en usurpation d’appellation prévue par le droit du Royaume‑Uni, que trois conditions sont satisfaites, à savoir, premièrement, le « goodwill » acquis (c’est‑à‑dire la force d’attraction de la clientèle) par la marque non enregistrée ou le signe en cause, deuxièmement, la présentation trompeuse de la part du titulaire de la marque plus récente et,
troisièmement, le préjudice causé au « goodwill » (voir arrêt BASmALI, point 11 supra, EU:T:2012:13, point 19 et jurisprudence citée).
22 Par ailleurs, il résulte des décisions des juridictions du Royaume‑Uni qu’un signe servant à désigner des biens ou des services peut avoir acquis une réputation sur le marché, au sens du droit applicable à l’usurpation d’appellation, alors même qu’il est utilisé par plusieurs opérateurs dans le cadre de leur activité commerciale (Chocosuisse Union des fabricants suisses de chocolat & Ors v Cadbury Ltd. [1999] EWCA Civ 856). Cette forme dite « extensive » de l’usurpation d’appellation, reconnue
par les juridictions du Royaume‑Uni, permet ainsi à plusieurs opérateurs de disposer de droits sur un signe ayant acquis une réputation sur le marché (arrêt BASmALI, point 11 supra, EU:T:2012:13, point 28).
23 La chambre de recours a relevé que les conditions relatives à l’usage du nom « basmati » dans la vie des affaires et à la portée dudit signe devaient être interprétées à la lumière des standards uniformes du droit de l’Union. À cet égard, la chambre de recours a retenu que, pour satisfaire à l’exigence d’utilisation dans la vie des affaires, une marque non enregistrée ou un signe devait être utilisé comme élément distinctif en ce sens qu’il devait servir à identifier une activité économique
exercée par son titulaire. En l’espèce, la chambre de recours a conclu que les éléments versés au dossier ne permettaient pas de considérer que la requérante avait utilisé le nom « basmati » comme signe distinctif dans la vie des affaires et que, dès lors, une des conditions d’application de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 n’était pas remplie.
24 Bien que la décision attaquée soit rédigée de façon équivoque, il résulte de celle‑ci que la chambre de recours a estimé que le caractère distinctif éventuel du signe BASMATI devait permettre à la requérante de distinguer son produit de celui des autres entreprises, en ce incluses celles commercialisant également du riz basmati. Cela ressort, en particulier, du point 33 de la décision attaquée où la chambre de recours indique clairement que le fait que le riz basmati soit commercialisé sous des
marques différentes « exclut la possibilité » que le terme « basmati » en tant que tel puisse être perçu comme un élément « qui distingue le riz d’une entreprise de celui des autres entreprises ». De plus, aux points 25 et 31 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que le riz basmati exporté par la requérante vers le Royaume‑Uni n’était pas commercialisé par la requérante, mais par une autre société. Par ailleurs, au point 27 de la décision attaquée, la chambre de recours a
souligné que le nom d’un produit agricole, dont l’importation était soumise à certaines réglementations en application de la politique agricole commune de l’Union, était compris comme désignant les caractéristiques du produit « et non […] son origine commerciale ». La chambre de recours a également fait référence à l’« origine commerciale » du produit en cause aux points 29 et 32 de la décision attaquée. En outre, au point 31 de la décision attaquée, la chambre de recours a retenu que la « marque
utilisée » pour « identifier » le riz produit par la requérante serait TILDA et non le terme « basmati ». Pour asseoir sa considération, la chambre de recours a relevé que les éléments versés aux débats montraient que le terme « basmati » avait été utilisé en combinaison avec des marques ou des noms de sociétés.
25 En d’autres termes, la chambre de recours a considéré que le caractère distinctif du signe en cause devait résulter de la fonction de celui‑ci à identifier l’origine commerciale des produits. L’OHMI a confirmé cette lecture de la décision attaquée lors de l’audience.
26 Or, l’approche suivie par la chambre de recours dans la décision attaquée est, à cet égard, contraire à l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009.
27 Certes, il est exact, comme le relève la chambre de recours, que, dans le cadre de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, le signe en cause doit être utilisé comme élément distinctif en ce sens qu’il doit servir à identifier une activité économique exercée par son titulaire (arrêt du 29 mars 2011, Anheuser‑Busch/Budějovický Budvar, C‑96/09 P, Rec, EU:C:2011:189, point 149).
28 Toutefois, cela ne saurait signifier que la fonction de l’usage d’un signe, dans le cadre de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, devrait tendre exclusivement à identifier l’origine commerciale des produits ou des services en cause. En concluant de la sorte, la chambre de recours a posé une condition qui n’est pas prévue par l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009, comme le soutient, en substance, la requérante dans ses écritures.
29 Il y a lieu de relever, à cet égard, que l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 couvre les marques non enregistrées et tout « autre signe » utilisé dans la vie des affaires. Dans ce cadre, et à défaut d’indication contraire, la fonction de l’usage du signe en cause peut résider, en fonction de la nature dudit signe, non seulement dans l’identification par le public pertinent de l’origine commerciale du produit concerné, mais aussi, notamment, dans l’identification de son origine
géographique et des qualités particulières qui lui sont intrinsèques (voir, en ce sens, arrêt Anheuser‑Busch/Budějovický Budvar, point 27 supra, EU:C:2011:189, point 147) ou des caractéristiques qui fondent sa réputation, ce que relève d’ailleurs l’OHMI dans ses écritures. Le signe en cause, en fonction de sa nature, peut ainsi être qualifié d’élément distinctif lorsqu’il sert à identifier les produits ou services d’une entreprise par rapport à ceux d’une autre entreprise, mais également,
notamment, lorsqu’il sert à identifier certains produits ou services par rapport à d’autres produits ou services similaires. L’approche retenue par la chambre de recours revient, ainsi, à exclure du bénéfice de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009 les signes qui sont utilisés par plusieurs opérateurs ou qui sont utilisés en association avec des marques, alors même que cette disposition ne prévoit pas une telle exclusion. Tel est le cas, par exemple, des indications géographiques
qui ne sont pas enregistrées dans l’Union et qui peuvent bénéficier des dispositions de l’article 8, paragraphe 4, du règlement no 207/2009. Tel est le cas, également, des signes qui, bien que ne faisant pas l’objet d’un enregistrement, peuvent être protégés au titre de l’action en usurpation. La chambre de recours a d’ailleurs elle‑même relevé que l’action en usurpation d’appellation concernait des signes qui permettaient de distinguer une catégorie de produits par rapport aux « autres produits
similaires » (point 19 de la décision attaquée). Il y a lieu de rappeler, également, que la forme dite « extensive » de l’usurpation d’appellation, reconnue par les juridictions du Royaume‑Uni, permet à plusieurs opérateurs de disposer de droits sur un signe ayant acquis une réputation sur le marché.
30 Dans ce contexte, certains signes, bien qu’étant utilisés par plusieurs opérateurs ou en association avec des marques, peuvent être des éléments distinctifs dès lors qu’ils permettent d’identifier l’activité économique exercée par leur titulaire. Il convient d’ailleurs de relever, à cet égard, que la chambre de recours a indiqué, en citant l’Oxford English Dictionary, que le riz basmati était « une variété supérieure de riz indien, qui se caractéris[ait] par sa blancheur et son parfum une fois
qu’il [était] cuit ».
31 Il y a lieu d’ajouter que, si les produits de la requérante ont bien été commercialisés sous la marque TILDA, comme l’a relevé la chambre de recours au point 25 de la décision attaquée, le dossier de l’OHMI montre que le terme « basmati » apparaît également de façon très claire sur les emballages desdits produits. Il est constant à cet égard, comme l’a relevé la chambre de recours au point 25 de la décision attaquée, que la requérante a vendu à une autre société du « riz basmati indien ». Par
ailleurs, dans ce contexte, il est inopérant, pour les raisons qui viennent d’être indiquées précédemment, que les produits de la requérante exportés vers le Royaume‑Uni aient été commercialisés sur ce territoire par cette autre société et non par la requérante elle‑même, dès lors que l’usage du signe en cause n’a pas nécessairement pour fonction d’identifier l’origine commerciale du produit concerné. En outre, aucun élément ne permet de considérer que, dans le cadre de l’article 8, paragraphe 4,
du règlement no 207/2009, l’opposant devrait démontrer qu’il a lui‑même commercialisé ses produits sur le territoire concerné.
32 Dès lors, les éléments avancés par la chambre de recours au soutien du rejet de l’opposition ne permettent pas de considérer que le signe en cause n’a pas été utilisé comme un élément distinctif servant à identifier une activité économique exercée par la requérante.
33 Les autres arguments de l’OHMI ne sont pas susceptibles d’infirmer cette conclusion. En particulier, pour ce qui est de l’affirmation avancée par l’OHMI dans ses écritures que les éléments versés aux débats n’auraient en tout état de cause pas permis à la chambre de recours de conclure que le signe BASMATI aurait acquis une « réputation manifeste » sur le territoire concerné, ni que la requérante serait titulaire d’un « goodwill » ou qu’elle souffrirait d’un préjudice à cet égard, il est constant
que ces questions n’ont pas été examinées par la chambre de recours. Or, il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 65, paragraphe 2, du règlement no 207/2009, le Tribunal effectue un contrôle de légalité des décisions de l’OHMI (voir, en ce sens, arrêt du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI, C‑263/09 P, Rec, EU:C:2011:452, point 52). S’il conclut qu’une telle décision, mise en cause dans un recours formé devant lui, est entachée d’une illégalité, il doit l’annuler. Il ne peut cependant pas
rejeter le recours en substituant sa propre motivation à celle de l’instance compétente de l’OHMI, qui est l’auteur de l’acte attaqué [arrêts du 25 mars 2009, Kaul/OHMI – Bayer (ARCOL), T‑402/07, Rec, EU:T:2009:85, point 49, et du 9 septembre 2010, Axis/OHMI – Etra Investigación y Desarrollo (ETRAX), T‑70/08, Rec, EU:T:2010:375, point 29]. Il en résulte que les arguments développés par l’OHMI dans ses écritures ne sauraient aboutir au rejet du recours.
34 Au vu de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu d’accueillir le moyen unique de la requérante et, en conséquence, d’annuler la décision attaquée.
Sur les dépens
35 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
36 L’OHMI ayant succombé, dans la mesure où la décision attaquée est annulée, et la requérante ayant conclu à sa condamnation aux dépens, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que les dépens exposés par la requérante.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (sixième chambre)
déclare et arrête :
1) La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 18 décembre 2013 (affaire R 1086/2012‑4) est annulée.
2) L’OHMI supportera ses propres dépens ainsi que les dépens exposés par Tilda Riceland Private Ltd.
Frimodt Nielsen
Dehousse
Collins
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 septembre 2015.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.