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01/08/2025 | CJUE | N°C-397/23

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, FL contre Jobcenter Arbeitplus Bielefeld., 01/08/2025, C-397/23


 ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

1er août 2025 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Citoyenneté de l’Union – Libre circulation des personnes – Article 18 TFUE – Non-discrimination en raison de la nationalité – Directive 2004/38/CE – Article 24 – Principe d’égalité de traitement – Enfant mineur citoyen de l’Union bénéficiant d’un droit de séjour en vertu de cette directive – Octroi d’un permis de séjour national au parent de cet enfant aux fins de l’exercice de l’autorité parentale sur ce dernier – Distinction s

elon la nationalité de l’enfant – Parent
bénéficiant d’un droit de séjour en tant que demandeur d’emploi – Dérogation au p...

 ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

1er août 2025 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Citoyenneté de l’Union – Libre circulation des personnes – Article 18 TFUE – Non-discrimination en raison de la nationalité – Directive 2004/38/CE – Article 24 – Principe d’égalité de traitement – Enfant mineur citoyen de l’Union bénéficiant d’un droit de séjour en vertu de cette directive – Octroi d’un permis de séjour national au parent de cet enfant aux fins de l’exercice de l’autorité parentale sur ce dernier – Distinction selon la nationalité de l’enfant – Parent
bénéficiant d’un droit de séjour en tant que demandeur d’emploi – Dérogation au principe d’égalité de traitement en matière de droit à une prestation d’assistance sociale – Portée »

Dans l’affaire C‑397/23,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Sozialgericht Detmold (tribunal du contentieux social de Detmold, Allemagne), par décision du 22 juin 2023, parvenue à la Cour le 29 juin 2023, dans la procédure

FL

contre

Jobcenter Arbeitplus Bielefeld,

en présence de :

Stadt Bielefeld,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de Mme M. L. Arastey Sahún, présidente de chambre, MM. D. Gratsias, E. Regan (rapporteur), J. Passer et B. Smulders, juges,

avocat général : M. J. Richard de la Tour,

greffier : Mme R. Şereş, administratrice,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 14 novembre 2024,

considérant les observations présentées :

– pour le gouvernement allemand, par MM. J. Möller et R. Kanitz, en qualité d’agents,

– pour la Commission européenne, par M. B.-R. Killmann et Mme E. Montaguti, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 13 février 2025,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation du droit de l’Union relatif au droit des citoyens de l’Union ainsi que des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres.

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant FL au Jobcenter Arbeitplus Bielefeld (centre pour l’emploi de Bielefeld, Allemagne), (ci-après le « Jobcenter Bielefeld ») au sujet du refus de ce dernier d’octroyer à FL des prestations sociales prévues par la législation allemande.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 2004/38/CE

3 Les considérants 3, 4 et 6 de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (JO 2004, L 158, p. 77, et rectificatif JO 2005, L 197, p. 34),
énoncent :

« (3) La citoyenneté de l’Union devrait constituer le statut de base des ressortissants des États membres lorsqu’ils exercent leur droit de circuler et de séjourner librement. Il est par conséquent nécessaire de codifier et de revoir les instruments communautaires existants qui visent séparément les travailleurs salariés, les non-salariés, les étudiants et autres personnes sans emploi en vue de simplifier et de renforcer le droit à la liberté de circulation et de séjour de tous les citoyens de
l’Union.

(4) En vue de dépasser cette approche sectorielle et fragmentaire du droit de circuler et de séjourner librement et dans le but de faciliter l’exercice de ce droit, il convient d’élaborer un acte législatif unique visant à modifier le [règlement (CEE) no 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de la Communauté (JO 1968, L 257, p. 2)] et à abroger les actes suivants [...]

[...]

(6) En vue de maintenir l’unité de la famille au sens large du terme et sans préjudice de l’interdiction des discriminations fondées sur la nationalité, la situation des personnes qui ne sont pas englobées dans la définition des membres de la famille au titre de la présente directive et qui ne bénéficient donc pas d’un droit automatique d’entrée et de séjour dans l’État membre d’accueil devrait être examinée par ce dernier sur la base de sa législation nationale, afin de décider si le droit
d’entrée ou de séjour ne pourrait pas être accordé à ces personnes, compte tenu de leur lien avec le citoyen de l’Union et d’autres circonstances telles que leur dépendance pécuniaire ou physique envers ce citoyen. »

4 L’article 2 de cette directive, intitulé « Définitions », prévoit :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

2) “membre de la famille” :

a) le conjoint ;

b) le partenaire avec lequel le citoyen de l’Union a contracté un partenariat enregistré, sur la base de la législation d’un État membre, si, conformément à la législation de l’État membre d’accueil, les partenariats enregistrés sont équivalents au mariage, et dans le respect des conditions prévues par la législation pertinente de l’État membre d’accueil ;

c) les descendants directs qui sont âgés de moins de vingt-et-un ans ou qui sont à charge, et les descendants directs du conjoint ou du partenaire tel que visé au point b) ;

d) les ascendants directs à charge et ceux du conjoint ou du partenaire tel que visé au point b) ;

[...] »

5 L’article 3 de ladite directive, intitulé « Bénéficiaires », dispose :

« 1.   La présente directive s’applique à tout citoyen de l’Union qui se rend ou séjourne dans un État membre autre que celui dont il a la nationalité, ainsi qu’aux membres de sa famille, tels que définis à l’article 2, point 2), qui l’accompagnent ou le rejoignent.

2.   Sans préjudice d’un droit personnel à la libre circulation et au séjour de l’intéressé, l’État membre d’accueil favorise, conformément à sa législation nationale, l’entrée et le séjour des personnes suivantes :

[...]

b) le partenaire avec lequel le citoyen de l’Union a une relation durable, dûment attestée.

L’État membre d’accueil entreprend un examen approfondi de la situation personnelle et motive tout refus d’entrée ou de séjour visant ces personnes. »

6 L’article 6 de la même directive, intitulé « Droit de séjour jusqu’à trois mois », prévoit, à son paragraphe 1 :

« Les citoyens de l’Union ont le droit de séjourner sur le territoire d’un autre État membre pour une période allant jusqu’à trois mois, sans autres conditions ou formalités que l’exigence d’être en possession d’une carte d’identité ou d’un passeport en cours de validité. »

7 L’article 14 de la directive 2004/38, intitulé « Maintien du droit de séjour », dispose, à ses paragraphes 2 et 4 :

« 2.   Les citoyens de l’Union et les membres de leur famille ont un droit de séjour tel que prévu aux articles 7, 12 et 13 tant qu’ils répondent aux conditions énoncées dans ces articles.

[...]

4.   À titre de dérogation aux dispositions des paragraphes 1 et 2 et sans préjudice des dispositions du chapitre VI, les citoyens de l’Union et les membres de leur famille ne peuvent en aucun cas faire l’objet d’une mesure d’éloignement lorsque :

[...]

b) les citoyens de l’Union concernés sont entrés sur le territoire de l’État membre d’accueil pour y chercher un emploi. Dans ce cas, les citoyens de l’Union et les membres de leur famille ne peuvent être éloignés tant que les citoyens de l’Union sont en mesure de faire la preuve qu’ils continuent à chercher un emploi et qu’ils ont des chances réelles d’être engagés. »

8 Aux termes de l’article 24 de cette directive, intitulé « Égalité de traitement » :

« 1.   Sous réserve des dispositions spécifiques expressément prévues par le traité et le droit dérivé, tout citoyen de l’Union qui séjourne sur le territoire de l’État membre d’accueil en vertu de la présente directive bénéficie de l’égalité de traitement avec les ressortissants de cet État membre dans le domaine d’application du traité. [...]

2.   Par dérogation au paragraphe 1, l’État membre d’accueil n’est pas obligé d’accorder le droit à une prestation d’assistance sociale pendant les trois premiers mois de séjour ou, le cas échéant, pendant la période plus longue prévue à l’article 14, paragraphe 4, point b), [...] à des personnes autres que les travailleurs salariés, les travailleurs non salariés, les personnes qui gardent ce statut, et les membres de leur famille. »

Le règlement (CE) no 883/2004

9 L’article 4 du règlement (CE) no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO 2004, L 166, p. 1, et rectificatif JO 2004, L 200, p. 1), intitulé « Égalité de traitement », prévoit :

« À moins que le présent règlement n’en dispose autrement, les personnes auxquelles le présent règlement s’applique bénéficient des mêmes prestations et sont soumises aux mêmes obligations, en vertu de la législation de tout État membre, que les ressortissants de celui-ci. »

Le droit allemand

En matière de séjour

10 L’article 28 du Gesetz über den Aufenthalt, die Erwerbstätigkeit und die Integration von Ausländern im Bundesgebiet (loi relative au séjour, à l’activité professionnelle et à l’intégration des ressortissants étrangers sur le territoire fédéral), du 30 juillet 2004 (BGBl. 2004 I, p. 1950), tel que modifié par la loi du 27 juillet 2015 (BGBl. 2015 I, p. 1386) (ci–après l’« AufenthG »), intitulé « Regroupement familial avec des ressortissants allemands », dispose, à son paragraphe 1, première
phrase :

« Un permis de séjour doit être délivré

1.   au conjoint étranger d’un ressortissant allemand,

2.   à l’enfant mineur célibataire étranger d’un ressortissant allemand,

3.   au parent étranger d’un ressortissant allemand mineur et célibataire aux fins d’exercice de l’autorité parentale

si le ressortissant allemand a sa résidence habituelle sur le territoire fédéral. [...] »

11 L’article 11, paragraphe 14, première phrase, du Gesetz über die allgemeine Freizügigkeit von Unionsbürgern (loi sur la libre circulation des citoyens de l’Union), du 30 juillet 2004 (BGBl. 2004 I, p. 1986), tel que modifié par la loi du 12 novembre 2020 (BGBl. 2020 I, p. 2416) (ci-après le « FreizügG/EU »), est libellé comme suit :

« L’[AufenthG] s’applique également lorsqu’il confère un statut juridique plus favorable que la présente loi. »

En matière de prestation d’assistance sociale

12 L’article 7 du livre II du Sozialgesetzbuch (code social), dans sa version en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020 (ci-après le « SGB II »), intitulé « Bénéficiaires des prestations », disposait, à son paragraphe 1 :

« Les prestations prévues dans le présent livre sont octroyées aux personnes qui :

1. ont atteint l’âge de 15 ans et n’ont pas encore atteint la limite d’âge prévue à l’article 7 a,

2. sont aptes à travailler,

3. sont indigentes et

4. séjournent habituellement en République fédérale d’Allemagne (bénéficiaires aptes à travailler).

Sont exclus :

1. pendant les trois premiers mois de leur séjour, les ressortissants étrangers qui n’ont en République fédérale d’Allemagne ni la qualité de travailleur salarié ou non salarié ni un droit à la libre circulation en vertu de l’article 2, paragraphe 3, du [FreizügG/EU] ainsi que les membres de leur famille,

2. les ressortissants étrangers

a) qui n’ont pas de droit de séjour,

b) dont le droit de séjour résulte uniquement de l’objectif consistant à rechercher un travail [...]

[...]

ainsi que les membres de leur famille,

[...]

Par dérogation à la deuxième phrase, point 2, les prestations au titre du présent livre sont octroyées aux ressortissants étrangers ainsi qu’aux membres de leur famille s’ils ont leur résidence habituelle sur le territoire fédéral depuis au moins cinq ans [...] »

Le litige au principal et la question préjudicielle

13 FL, le requérant au principal, de nationalité polonaise, est entré en Allemagne le 30 mai 2020, en provenance des Pays-Bas. Sa compagne, également de nationalité polonaise, était entrée auparavant en Allemagne, à savoir le 30 août 2015, en provenance de Pologne. Leur fils commun est né le 27 novembre 2020 en Allemagne et est, lui aussi, de nationalité polonaise.

14 FL, sa compagne et leur enfant commun ont demandé au Jobcenter Bielefeld de leur accorder le bénéfice de prestations d’assistance sociale de base au titre du SGB II. Par décisions des 3 et 21 décembre 2020, ce dernier a accordé le bénéfice de ces prestations, respectivement, à la compagne de FL à compter du 30 mai 2020, et à leur enfant commun à compter de la date de sa naissance. En revanche, par décision du 21 avril 2021, la demande de FL a été rejetée pour la période du 30 mai 2020 au
28 février 2021, au motif qu’il ne disposait d’aucun droit de séjour sur le territoire allemand susceptible de lui ouvrir le droit à des prestations sociales au titre du SGB II, son droit de séjour ne lui étant reconnu qu’aux fins de la recherche d’un emploi.

15 Par décision du 19 juillet 2021, le Jobcenter Bielefeld a rejeté comme non fondée la réclamation que FL avait introduite contre cette décision de rejet pour les mêmes motifs, en substance, que ceux qui avaient fondé sa décision initiale.

16 En particulier, pour conclure que FL ne bénéficiait, sur le territoire allemand, d’aucun droit de séjour susceptible de lui ouvrir le droit à des prestations sociales au titre du SGB II, le Jobcenter Bielefeld a considéré, en premier lieu, que FL ne pouvait pas prétendre, en vertu du droit national, à un droit de séjour en tant que membre de la famille ou proche de sa compagne qui jouissait d’un droit de séjour permanent.

17 En deuxième lieu, il a constaté que FL ne pouvait pas non plus bénéficier d’un permis de séjour au titre de l’exercice de l’autorité parentale à l’égard de son enfant mineur, en vertu de l’article 28, paragraphe 1, première phrase, point 3, de l’AufenthG, pris isolément ou en combinaison avec l’article 11, paragraphe 14, première phrase, du FreizügG/EU, étant donné que la délivrance d’un tel permis de séjour était soumise à la condition que l’enfant soit de nationalité allemande, alors que
l’enfant de FL était de nationalité polonaise.

18 En troisième lieu, le Jobcenter Bielefeld a estimé qu’un droit de séjour ne découlait pas non plus du règlement (UE) no 492/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2011, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de l’Union (JO 2011, L 141, p. 1), ni de l’article 4 du règlement no 883/2004, tels qu’interprétés par la Cour dans l’arrêt du 6 octobre 2020, Jobcenter Krefeld (C‑181/19, EU:C:2020:794). En effet, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, les enfants
mineurs auraient été soumis à l’obligation scolaire, ce qui ne serait pas le cas de l’enfant de FL.

19 Le 12 août 2021, FL a saisi le Sozialgericht Detmold (tribunal du contentieux social de Detmold, Allemagne), qui est la juridiction de renvoi, d’un recours contentieux contre la décision du Jobcenter Bielefeld du 19 juillet 2021. À l’appui de ce recours, FL soutient, en substance, qu’un droit de séjour doit lui être accordé au titre des dispositions combinées de l’article 28, paragraphe 1, première phrase, point 3, de l’AufenthG, de l’article 6 du Grundgesetz für die Bundesrepublik Deutschland
(loi fondamentale de la République fédérale d’Allemagne), lequel prévoit, notamment, la protection de la famille et l’égalité entre les enfants nés du mariage et les enfants nés hors mariage, et de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, relatif au droit au respect de la vie privée et familiale. Selon FL, il est contraire au droit de l’Union de limiter le regroupement familial aux fins de
l’exercice de l’autorité parentale aux situations dans lesquelles cette autorité est exercée sur un enfant mineur qui possède la nationalité allemande, dès lors que cela constitue non seulement une restriction à la libre circulation, mais également une atteinte au droit à l’égalité de traitement.

20 Le Jobcenter Bielefeld fait valoir qu’un permis de séjour ne saurait être octroyé à FL sur le fondement de l’article 28, paragraphe 1, première phrase, point 3, de l’AufenthG, étant donné que, selon son libellé même, cette disposition ne vise que les enfants mineurs qui possèdent la nationalité allemande. Le fait qu’une disposition nationale en matière d’immigration et de séjour opère une distinction entre ressortissants nationaux et étrangers serait inhérent à ce type de réglementation, sans
pour autant que la disposition concernée soit contraire au droit de l’Union.

21 La juridiction de renvoi indique que, en Allemagne, il existe une controverse tant doctrinale que jurisprudentielle quant au point de savoir si l’article 11, paragraphe 14, première phrase, du FreizügG/EU, lu en combinaison avec l’article 28, paragraphe 1, première phrase, point 3, de l’AufenthG et avec l’article 18, premier alinéa, TFUE, est susceptible de fonder un droit de séjour au parent exerçant l’autorité parentale sur un citoyen de l’Union mineur qui, bien que ne possédant pas la
nationalité allemande, bénéficie, sur le territoire allemand, d’un droit de séjour dérivé de celui de son autre parent. Dans ces conditions, la juridiction de renvoi estime nécessaire, pour la solution du litige qui lui est soumis, de saisir la Cour d’une demande de décision préjudicielle aux fins de l’examen de la conformité de la réglementation allemande pertinente au regard du droit de l’Union.

22 En effet, si FL devait se voir reconnaître un droit de séjour sur le territoire allemand pour un motif autre que celui lié à la recherche d’un emploi, il devrait, en principe, se voir également reconnaître le droit au versement de prestations sociales au titre du SGB II.

23 Dans ces conditions, le Sozialgericht Detmold (tribunal du contentieux social de Detmold) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« Le droit de l’Union doit-il être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une législation nationale en vertu de laquelle un permis de séjour aux fins de l’exercice de l’autorité parentale peut uniquement être délivré au parent étranger d’un enfant mineur célibataire ressortissant national lorsque ce dernier a sa résidence habituelle sur le territoire national, ce qui a pour conséquence que les citoyens de l’Union d’un État membre n’ont pas un tel droit à la délivrance d’un permis de séjour afin
d’exercer l’autorité parentale sur un citoyen de l’Union mineur qui a la nationalité d’un État membre autre que celui dont la législation nationale est en cause ? »

Sur la question préjudicielle

24 À titre liminaire, il convient, premièrement, d’observer que la Commission européenne a évoqué la possibilité pour le requérant au principal de se prévaloir d’un droit de séjour sur le territoire allemand en tant que « partenaire » de la mère de leur enfant commun, au sens de l’article 3, paragraphe 2, sous b), de la directive 2004/38, en précisant que, si celui-ci avait un tel droit, il ne serait plus nécessaire de répondre à la question posée aux fins de la résolution du litige au principal.

25 À cet égard, il y a lieu de rappeler que les questions portant sur le droit de l’Union bénéficient d’une présomption de pertinence. Le refus de la Cour de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n’est possible que s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation sollicitée d’une règle de l’Union n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des
éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (arrêt du 10 avril 2025, Amilla, C‑723/23, EU:C:2025:262, point 38 et jurisprudence citée).

26 En l’occurrence, le requérant au principal prétend non pas à un droit de séjour, au sens de l’article 3, paragraphe 2, sous b), de la directive 2004/38, mais à un droit de séjour prévu par le droit national aux fins de l’exercice de l’autorité parentale, l’appréciation du bien‑fondé de cette prétention nécessitant, de l’avis de la juridiction de renvoi, une interprétation du droit de l’Union. Or, la simple possibilité que l’intéressé puisse, le cas échéant, également bénéficier d’un autre droit
de séjour n’est pas de nature à faire apparaître de manière manifeste que les dispositions du droit de l’Union dont l’interprétation est demandée n’ont aucun rapport avec la réalité du litige au principal ou que le problème soulevé par cette question est hypothétique.

27 Deuxièmement, les interrogations de la juridiction de renvoi portent, plus spécifiquement, sur la possibilité, pour un ressortissant polonais qui est le père d’un enfant mineur, également de nationalité polonaise et ayant sa résidence habituelle sur le territoire allemand, de bénéficier d’un permis de séjour national aux fins de l’exercice de l’autorité parentale sur cet enfant, lorsque ledit enfant séjourne sur ce territoire en vertu de la directive 2004/38, en tant que membre de la famille de
sa mère, elle aussi de nationalité polonaise et y jouissant d’un droit de séjour permanent en application de cette directive. Par ailleurs, il découle de la demande de décision préjudicielle que cette question se fonde sur la prémisse que FL ne bénéficie pas d’un droit de séjour en Allemagne autre que celui fondé sur son statut de chercheur d’emploi, au titre de l’article 14, paragraphe 4, sous b), de la directive 2004/38.

28 Il est également constant que le permis de séjour auquel FL prétend aux fins de l’exercice de l’autorité parentale lui ouvrirait le droit à des prestations sociales, alors que, en vertu du droit allemand, le droit de séjour en Allemagne aux seules fins de la recherche d’un emploi ne lui donne pas droit à ces prestations. C’est la raison pour laquelle, ainsi qu’il ressort de la demande de décision préjudicielle, FL soutient, devant la juridiction de renvoi, qu’il doit se voir délivrer un tel
permis de séjour national et, par voie de conséquence, se voir octroyer des prestations sociales au titre du SGB II.

29 Dans ces conditions, il revient à la Cour de se fonder également sur la prémisse exposée au point 27 du présent arrêt afin de répondre à la question posée.

30 Troisièmement, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, lorsqu’une question préjudicielle se borne à renvoyer au droit de l’Union, sans mentionner les dispositions de ce droit auxquelles il est fait référence, il appartient à la Cour d’extraire de l’ensemble des éléments fournis par la juridiction de renvoi, et notamment de la motivation de la décision de renvoi, les dispositions de droit de l’Union qui nécessitent une interprétation, compte tenu de l’objet du litige au
principal (arrêt du 12 février 2015, Surgicare, C‑662/13, EU:C:2015:89, point 17 et jurisprudence citée).

31 En l’occurrence, si la juridiction de renvoi mentionne, dans la motivation de la décision de renvoi, plusieurs dispositions du droit de l’Union, c’est uniquement à l’égard de l’article 18 TFUE qu’elle fournit la raison, exposée au point 21 du présent arrêt, pour laquelle elle s’interroge sur le point de savoir si la réglementation nationale en cause au principal viole le droit de l’Union, étant précisé, comme cela ressort du point 27 de cet arrêt, que cette juridiction part de la prémisse selon
laquelle la directive 2004/38 est également applicable en l’espèce.

32 Dans ces conditions, il y a lieu de considérer que, par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 18 TFUE et/ou la directive 2004/38 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation d’un État membre en vertu de laquelle un permis de séjour, prévu par le droit national aux fins de l’exercice de l’autorité parentale, ne peut pas être délivré à un citoyen de l’Union qui est titulaire de l’autorité parentale sur son enfant mineur, au seul
motif que ce dernier, bien qu’étant également citoyen de l’Union et séjournant sur le territoire de cet État membre en vertu de cette directive, n’en possède pas la nationalité.

33 À cet égard, il y a lieu de relever, d’emblée, qu’il découle des éléments du dossier dont dispose la Cour que les conditions d’octroi du permis de séjour national en cause au principal créent une différence de traitement en fonction de la nationalité entre les enfants mineurs résidant sur le territoire allemand. En particulier, en vertu de la réglementation allemande, un permis de séjour aux fins de l’exercice de l’autorité parentale ne peut être octroyé à un ressortissant d’un autre État membre
que si cette autorité est exercée à l’égard d’un enfant mineur célibataire ayant sa résidence habituelle sur le territoire allemand et possédant la nationalité allemande. Par conséquent, dans le cas d’un enfant mineur citoyen de l’Union qui n’a pas la nationalité allemande, un tel permis de séjour national ne pourrait pas être accordé à son parent ressortissant d’un autre État membre, quand bien même l’enfant concerné aurait-il également sa résidence habituelle sur le territoire allemand.

34 Or, il convient de rappeler que l’article 20, paragraphe 1, TFUE confère à toute personne ayant la nationalité d’un État membre le statut de citoyen de l’Union et que ce statut a vocation à être le statut fondamental des ressortissants des États membres permettant à ceux qui, parmi ces derniers, se trouvent dans la même situation d’obtenir, dans le domaine d’application ratione materiae du traité FUE, indépendamment de leur nationalité et sans préjudice des exceptions expressément prévues à cet
égard, le même traitement juridique (arrêt du 15 juillet 2021, The Department for Communities in Northern Ireland, C‑709/20, EU:C:2021:602, point 62).

35 Tout citoyen de l’Union peut donc se prévaloir de l’interdiction de discrimination en raison de la nationalité figurant à l’article 18 TFUE dans toutes les situations relevant du domaine d’application ratione materiae du droit de l’Union. Ces situations comprennent celles relevant de l’exercice de la liberté de circuler et de séjourner sur le territoire des États membres conférés par l’article 20, paragraphe 2, sous a), TFUE et l’article 21 TFUE (arrêt du 15 juillet 2021, The Department for
Communities in Northern Ireland, C‑709/20, EU:C:2021:602, point 63).

36 L’enfant du requérant au principal étant un citoyen de l’Union qui séjourne dans un État membre autre que celui dont il possède la nationalité, sa situation relève du domaine d’application ratione materiae du droit de l’Union, de sorte qu’il peut, en principe, se prévaloir de l’interdiction de discrimination en raison de la nationalité figurant à l’article 18 TFUE (voir, par analogie, arrêt du 15 juillet 2021, The Department for Communities in Northern Ireland, C‑709/20, EU:C:2021:602, point 64).

37 Toutefois, conformément à une jurisprudence constante, l’article 18, premier alinéa, TFUE n’a vocation à s’appliquer de manière autonome que dans des situations régies par le droit de l’Union pour lesquelles le traité FUE ne prévoit pas de règles spécifiques de non-discrimination (arrêt du 15 juillet 2021, The Department for Communities in Northern Ireland, C‑709/20, EU:C:2021:602, point 65).

38 À cet égard, il y a lieu de relever que le principe de non-discrimination est concrétisé à l’égard des citoyens de l’Union qui exercent leur liberté de circuler et de séjourner sur le territoire des États membres à l’article 24 de la directive 2004/38 (voir, en ce sens, arrêt du 15 juillet 2021, The Department for Communities in Northern Ireland, C‑709/20, EU:C:2021:602, point 66).

39 Conformément à l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2004/38, relèvent du champ d’application de cette directive et sont bénéficiaires des droits conférés par celle-ci les citoyens de l’Union qui se rendent ou séjournent dans un État membre autre que celui dont ils ont la nationalité, ainsi que les membres de leur famille, tels que définis à l’article 2, point 2, de cette directive, qui les accompagnent ou les rejoignent. Or, tel est le cas d’une personne telle que l’enfant du requérant au
principal, qui, ainsi que cela ressort du point 27 du présent arrêt, est ressortissant polonais et séjourne sur le territoire allemand en tant que membre de la famille de sa mère, laquelle est également de nationalité polonaise et jouit d’un droit de séjour permanent sur le territoire de l’État membre concerné.

40 Dans ces conditions, il y a lieu de procéder à l’interprétation de l’article 24 de la directive 2004/38.

41 S’agissant ainsi de cet article 24, en premier lieu, le paragraphe 1 de cet article dispose que tout citoyen de l’Union qui séjourne sur le territoire de l’État membre d’accueil en vertu de ladite directive bénéficie de l’égalité de traitement avec les ressortissants de cet État membre dans le domaine d’application du traité FUE.

42 À cet égard, d’une part, ainsi qu’il ressort du point 39 du présent arrêt, en l’occurrence, l’enfant du requérant au principal est un citoyen de l’Union séjournant sur le territoire allemand « en vertu de la directive 2004/38 », au sens de l’article 24, paragraphe 1, de cette directive.

43 D’autre part, l’octroi d’un droit de séjour national au parent d’un enfant mineur citoyen de l’Union ayant exercé sa liberté de circulation et de séjour relève du « domaine d’application du traité », au sens dudit article 24, paragraphe 1, dans la mesure où l’octroi d’un tel droit est de nature à favoriser l’exercice, par l’enfant mineur concerné, de son droit de circuler et de séjourner librement dans l’État membre d’accueil.

44 En effet, ainsi que la Cour l’a déjà jugé, il ressort des considérants 3 et 4 de la directive 2004/38 que cette dernière vise à faciliter l’exercice du droit fondamental et individuel de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres qui est conféré directement aux citoyens de l’Union par l’article 21, paragraphe 1, TFUE et à renforcer ce droit fondamental. La protection de la vie de famille de ces citoyens et, en particulier, l’adoption de mesures favorisant l’intégration
de leur famille dans l’État membre d’accueil s’inscrivent dans la poursuite de cet objectif [voir, en ce sens, arrêt du 2 septembre 2021, État belge (Droit de séjour en cas de violence domestique), C‑930/19, EU:C:2021:657, points 81 et 82 ainsi que jurisprudence citée]. Or, l’octroi d’un permis de séjour national au parent d’un enfant citoyen de l’Union séjournant de manière habituelle dans un État membre répond à ces objectifs, en ce qu’il permet de préserver la vie de famille de cet enfant sur
le territoire de cet État membre et de favoriser l’intégration de sa famille dans celui-ci, d’autant plus lorsqu’un tel permis de séjour vise à permettre l’exercice de l’autorité parentale sur ledit enfant, et donc, en principe, aussi longtemps que ce dernier reste soumis à cette autorité.

45 Ainsi, le principe d’égalité de traitement concrétisé à l’article 24, paragraphe 1, de la directive 2004/38, qui exige que les personnes se trouvant dans des situations comparables soient traitées de la même manière sur le plan juridique, trouve à s’appliquer dans une situation telle que celle en cause au principal.

46 Dans le cadre de l’affaire au principal, il est constant que le permis de séjour auquel prétend FL ne lui a pas été octroyé pour la seule raison que son enfant n’a pas la nationalité allemande, FL remplissant, par ailleurs, les autres conditions prévues par le droit allemand aux fins de l’octroi d’un permis sur le fondement de l’article 28, paragraphe 1, première phrase, point 3, de l’AufenthG. Il s’ensuit que la réglementation nationale en cause au principal produit une discrimination directe
fondée sur la nationalité de l’enfant et est donc contraire à l’article 24, paragraphe 1, de la directive 2004/38, en ce qu’elle ne reconnaît pas à son parent ressortissant d’un autre État membre un droit de séjour afin de lui permettre d’exercer l’autorité parentale sur cet enfant, alors qu’un enfant allemand se trouvant dans une telle situation peut bénéficier de la présence sur le territoire allemand de son parent ressortissant d’un autre État membre à ces mêmes fins.

47 Ce constat n’est pas remis en cause par l’argumentation avancée par le gouvernement allemand lors de l’audience, selon laquelle le droit de séjour prévu à l’article 28, paragraphe 1, première phrase, point 3, de l’AufenthG vise à protéger le droit constitutionnel des citoyens allemands de séjourner et de résider librement en Allemagne, objectif qui s’opposerait à ce qu’un enfant allemand doive, le cas échéant, quitter son pays d’origine si le parent étranger n’a pas le droit de séjour et au
regard duquel les citoyens de l’Union n’ayant pas la nationalité allemande se trouveraient dans une situation différente, le non-octroi de ce droit de séjour ne pouvant pas impliquer qu’ils doivent quitter leur pays d’origine.

48 En effet, même si un citoyen de l’Union n’ayant pas la nationalité allemande ne jouit pas d’un tel droit constitutionnel et doit, pour bénéficier d’un droit de séjour en vertu de la directive 2004/38, respecter les conditions d’exercice de ce droit prévues par cette directive, il n’en demeure pas moins que, aussi longtemps que ces conditions sont respectées, celui-ci bénéficie, à l’instar d’un citoyen de l’Union de nationalité allemande, du droit de séjourner librement sur le territoire allemand,
de sorte que leurs situations sont comparables, étant précisé que, aux fins de l’application du principe de l’égalité de traitement, l’exigence tenant au caractère comparable des situations ne requiert pas que les situations soient identiques, mais seulement qu’elles soient similaires [voir, en ce sens, arrêt du 26 juin 2018, MB (Changement de sexe et pension de retraite), C‑451/16, EU:C:2018:492, point 41].

49 Ainsi, en présence d’une réglementation telle que celle visée au point 46 du présent arrêt, le parent de l’enfant n’ayant pas la nationalité allemande dispose, sur le fondement de l’article 24, paragraphe 1, de la directive 2004/38, d’un droit d’obtenir un permis de séjour aux fins de l’exercice de l’autorité parentale sur son enfant aux mêmes conditions que celles applicables, en vertu de cette réglementation, aux parents étrangers d’enfants ayant la nationalité allemande.

50 En l’occurrence, le permis de séjour dont FL revendique l’octroi vise, en fin de compte, ainsi qu’il ressort des points 43 et 44 du présent arrêt, à lui permettre, en sa qualité de parent non ressortissant de l’État membre d’accueil, d’exercer son autorité parentale sur son enfant qui y réside de manière habituelle et, de ce fait, à préserver la vie de famille de cet enfant en Allemagne ainsi que sa liberté de circuler et de séjourner sur le territoire allemand, dès lors que ledit enfant ne
possède pas non plus la nationalité allemande, mais celle d’un autre État membre. Or, si le parent d’un tel enfant ne pouvait pas se voir accorder le permis de séjour national auquel peuvent prétendre les parents d’un ressortissant national, il en résulterait une atteinte à l’égalité de traitement de cet enfant (voir, par analogie, arrêt du 21 décembre 2023, Chief Appeals Officer e.a., C‑488/21, EU:C:2023:1013, points 66 à 69).

51 Une discrimination telle que celle visée au point 46 du présent arrêt n’est, par ailleurs, pas susceptible d’être justifiée au regard de la dérogation prévue à l’article 24, paragraphe 2, de la directive 2004/38, dans la mesure où le droit de séjour de l’enfant concerné ne relève pas des hypothèses visées à cette disposition.

52 En second lieu, s’agissant des conséquences découlant de l’octroi d’un permis de séjour sur le seul fondement du droit national, il a été rappelé au point 28 du présent arrêt que, en l’occurrence, en vertu du droit allemand, le titulaire d’un permis de séjour délivré sur le fondement de l’article 28, paragraphe 1, première phrase, point 3, de l’AufenthG peut, de ce fait, prétendre également à l’octroi de prestations sociales au titre du SGB II. Ces prestations ont toutefois été refusées à FL au
motif qu’il ne jouit pas d’un droit de séjour sur le territoire allemand autre que celui auquel il peut prétendre en tant que chercheur d’emploi.

53 Certes, FL séjourne, lui–même, sur le territoire de cet État membre « en vertu de la directive 2004/38 » et, plus spécifiquement, en vertu de l’article 14, paragraphe 4, sous b), de celle–ci, en tant que chercheur d’emploi. Or, l’article 24, paragraphe 2, de cette directive permet expressément aux États membres de déroger au principe d’égalité de traitement et de refuser d’octroyer des prestations sociales à un demandeur dont le droit de séjour se fonde sur cet article 14, paragraphe 4, sous b).

54 Toutefois, si FL se voit octroyer le permis de séjour qu’il revendique sur le fondement de l’article 28, paragraphe 1, première phrase, point 3, de l’AufenthG, les considérations exposées au point précédent ne seraient, pour autant, pas de nature à remettre en cause son droit de se voir octroyer des prestations sociales au titre du SGB II.

55 En effet, si, en sa qualité de titulaire d’un droit de séjour sur le territoire national aux seules fins d’y chercher un emploi, ces prestations peuvent être refusées à FL par le législateur national sur le fondement de la dérogation que prévoit l’article 24, paragraphe 2, de la directive 2004/38, il n’en demeure pas moins que celui-ci peut, le cas échéant, prétendre au versement desdites prestations à un autre titre (voir, en ce sens, arrêt du 6 octobre 2020, Jobcenter Krefeld, C‑181/19,
EU:C:2020:794, point 70).

56 De fait, le champ d’application de cette dérogation est limité, s’agissant des prestations d’assistance sociale, aux personnes qui disposent d’un droit de séjour dans l’État membre d’accueil, sur le fondement, d’une part, de l’article 6, paragraphe 1, de cette directive, pour une période maximum de trois mois, et, d’autre part, de l’article 14, paragraphe 4, sous b), de ladite directive, au-delà de cette période, aux fins de la recherche d’un emploi.

57 Il s’ensuit que ladite dérogation ne trouve pas à s’appliquer lorsque l’enfant de l’intéressé jouit d’un droit de séjour au titre de la directive 2004/38 qui n’est pas l’un de ceux visés au point précédent.

58 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée que l’article 24 de la directive 2004/38 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation d’un État membre en vertu de laquelle un permis de séjour, prévu par le droit national aux fins de l’exercice de l’autorité parentale, ne peut pas être délivré à un citoyen de l’Union qui est titulaire de l’autorité parentale sur son enfant mineur, au seul motif que ce dernier, bien qu’étant également
citoyen de l’Union et séjournant sur le territoire de cet État membre en vertu de cette directive, n’en possède pas la nationalité.

Sur les dépens

59 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :

  L’article 24 de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE,

  doit être interprété en ce sens que :

  il s’oppose à une réglementation d’un État membre en vertu de laquelle un permis de séjour, prévu par le droit national aux fins de l’exercice de l’autorité parentale, ne peut pas être délivré à un citoyen de l’Union qui est titulaire de l’autorité parentale sur son enfant mineur, au seul motif que ce dernier, bien qu’étant également citoyen de l’Union et séjournant sur le territoire de cet État membre en vertu de cette directive, n’en possède pas la nationalité.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : l’allemand.


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : C-397/23
Date de la décision : 01/08/2025
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par le Sozialgericht Detmold.

Renvoi préjudiciel – Citoyenneté de l’Union – Libre circulation des personnes – Article 18 TFUE – Non-discrimination en raison de la nationalité – Directive 2004/38/CE – Article 24 – Principe d’égalité de traitement – Enfant mineur citoyen de l’Union bénéficiant d’un droit de séjour en vertu de cette directive – Octroi d’un permis de séjour national au parent de cet enfant aux fins de l’exercice de l’autorité parentale sur ce dernier – Distinction selon la nationalité de l’enfant – Parent bénéficiant d’un droit de séjour en tant que demandeur d’emploi – Dérogation au principe d’égalité de traitement en matière de droit à une prestation d’assistance sociale – Portée.


Parties
Demandeurs : FL
Défendeurs : Jobcenter Arbeitplus Bielefeld.

Composition du Tribunal
Avocat général : Richard de la Tour
Rapporteur ?: Regan

Origine de la décision
Date de l'import : 18/08/2025
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2025:602

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