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04/07/2024 | CJUE | N°C-538/22

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, SB contre Agrárminiszter., 04/07/2024, C-538/22


 ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

4 juillet 2024 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Agriculture – Politique agricole commune – Règlement (UE) no 1307/2013 – Article 52 – Règlement délégué (UE) no 639/2014 – Article 53, paragraphe 1 – Définition des critères d’admissibilité au bénéfice des mesures de soutien couplé – Compétence des États membres – Règlement délégué (UE) no 640/2014 – Article 2, paragraphe 1, second alinéa, points 16 et 18 – Distinction entre “animaux déclarés” et “animaux déterminé

s” – Article 30, paragraphe 3 – Soutien calculé sur la base des
animaux déterminés – Article 31, paragraphes 1 à 3 – Sanctions administra...

 ARRÊT DE LA COUR (sixième chambre)

4 juillet 2024 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Agriculture – Politique agricole commune – Règlement (UE) no 1307/2013 – Article 52 – Règlement délégué (UE) no 639/2014 – Article 53, paragraphe 1 – Définition des critères d’admissibilité au bénéfice des mesures de soutien couplé – Compétence des États membres – Règlement délégué (UE) no 640/2014 – Article 2, paragraphe 1, second alinéa, points 16 et 18 – Distinction entre “animaux déclarés” et “animaux déterminés” – Article 30, paragraphe 3 – Soutien calculé sur la base des
animaux déterminés – Article 31, paragraphes 1 à 3 – Sanctions administratives en cas de non-conformité parmi les animaux déclarés – Demande de soutien couplé lié à la détention de vaches allaitantes – Taux de vêlage fixé dans la réglementation nationale non atteint par l’ensemble des animaux déclarés – Taux atteint par un nombre plus restreint de ces animaux – Pratique nationale refusant le soutien »

Dans l’affaire C‑538/22,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Fővárosi Törvényszék (Cour de Budapest-Capitale, Hongrie), par décision du 25 juillet 2022, parvenue à la Cour le 11 août 2022, dans la procédure

SB

contre

Agrárminiszter,

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. T. von Danwitz, président de chambre, M. P. G. Xuereb (rapporteur) et Mme I. Ziemele, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

– pour le gouvernement hongrois, par Mme Zs. Biró-Tóth et M. M. Z. Fehér, en qualité d’agents,

– pour la Commission européenne, par MM. V. Bottka et A. Sauka, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocate générale en ses conclusions à l’audience du 30 novembre 2023,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, points 16 et 18, de l’article 30, paragraphe 3, et de l’article 31, paragraphes 1 à 3, du règlement délégué (UE) no 640/2014 de la Commission, du 11 mars 2014, complétant le règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le système intégré de gestion et de contrôle, les conditions relatives au refus ou au retrait des paiements et les sanctions
administratives applicables aux paiements directs, le soutien au développement rural et la conditionnalité (JO 2014, L 181, p. 48, et rectificatif JO 2015, L 209, p. 48), tel que modifié par le règlement délégué (UE) 2016/1393 de la Commission, du 4 mai 2016 (JO 2016, L 225, p. 41) (ci-après le « règlement délégué no 640/2014 »).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant SB, un agriculteur, à l’Agrárminiszter (ministre de l’Agriculture, Hongrie) au sujet du refus de ce dernier d’accorder à SB un soutien couplé à la production pour la détention de vaches allaitantes.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

Le règlement (UE) no 1306/2013

3 L’article 63 du règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, relatif au financement, à la gestion et au suivi de la politique agricole commune et abrogeant les règlements (CEE) no 352/78, (CE) no 165/94, (CE) no 2799/98, (CE) no 814/2000, (CE) no 1200/2005 et [(CE)] no 485/2008 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 549), intitulé « Paiements indus et sanctions administratives », prévoit, à ses paragraphes 1 et 2 :

« 1.   Lorsqu’il est constaté qu’un bénéficiaire ne respecte pas les critères d’admissibilité, les engagements ou les autres obligations relatifs aux conditions d’octroi de l’aide ou du soutien prévus par la législation agricole sectorielle, l’aide n’est pas payée ou est retirée en totalité ou en partie et, le cas échéant, les droits au paiement correspondants visés à l’article 21 du règlement (UE) no 1307/2013 [du Parlement européen et du Conseil, du 17 décembre 2013, établissant les règles
relatives aux paiements directs en faveur des agriculteurs au titre des régimes de soutien relevant de la politique agricole commune et abrogeant le règlement (CE) no 637/2008 du Conseil et le règlement (CE) no 73/2009 du Conseil (JO 2013, L 347, p. 608),] ne sont pas alloués ou sont retirés.

[...]

2.   De surcroît, lorsque la législation agricole sectorielle le prévoit, les États membres imposent également des sanctions administratives [...] »

Le règlement no 1307/2013

4 Le considérant 4 du règlement no 1307/2013, tel que modifié par le règlement (UE) 2017/2393 du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2017 (JO 2017, L 350, p. 15) (ci-après le « règlement no 1307/2013 »), énonce :

« Il y a lieu de préciser que le règlement [no 1306/2013] et les dispositions adoptées conformément à celui-ci doivent s’appliquer aux mesures prévues par le présent règlement. [...] »

5 Le titre IV du règlement no 1307/2013 contient un chapitre 1, intitulé « Soutien couplé facultatif », qui comporte l’article 52, intitulé « Règles générales ». Cet article 52 prévoit :

« 1.   Les États membres peuvent accorder un soutien couplé aux agriculteurs dans les conditions énoncées au présent chapitre (ci-après dénommé au présent chapitre “soutien couplé”).

[...]

6.   Le soutien couplé est un régime de limitation de la production qui prend la forme d’un paiement annuel fondé sur des surfaces et des rendements fixes ou sur un nombre fixe d’animaux et qui respecte les plafonds financiers que les États membres fixent pour chaque mesure et notifient à la Commission [européenne].

[...]

9.   Afin d’assurer une utilisation efficace et ciblée des fonds de l’Union [européenne] et d’éviter les doubles financements au titre d’autres instruments de soutien similaires, la Commission est habilitée à adopter, en conformité avec l’article 70, des actes délégués fixant :

a) les conditions relatives à l’octroi du soutien couplé ;

b) les règles relatives à la cohérence avec d’autres mesures de l’Union et au cumul d’aides.

[...] »

6 L’article 53 de ce règlement, intitulé « Dispositions financières », énumère les décisions relatives au soutien couplé facultatif que peuvent adopter les États membres.

7 L’article 54 dudit règlement, intitulé « Notification », dispose, à son paragraphe 1 :

« Les États membres notifient à la Commission les décisions visées à l’article 53 au plus tard aux dates prévues audit article. [...] »

Le règlement délégué no 639/2014

8 L’article 53 du règlement délégué (UE) no 639/2014 de la Commission, du 11 mars 2014, complétant le règlement (UE) no 1307/2013 du Parlement européen et du Conseil établissant les règles relatives aux paiements directs en faveur des agriculteurs au titre des régimes de soutien relevant de la politique agricole commune et modifiant l’annexe X dudit règlement (JO 2014, L 181, p. 1), tel que modifié par le règlement délégué (UE) 2018/1784 de la Commission, du 9 juillet 2018 (JO 2018, L 293, p. 1)
(ci-après le « règlement délégué no 639/2014 »), intitulé « Conditions d’octroi du soutien », prévoit, à son paragraphe 1 :

« Les États membres définissent les critères d’admissibilité au bénéfice des mesures de soutien couplé conformément au cadre établi par le [règlement no 1307/2013] et aux conditions énoncées dans le présent règlement. »

9 L’article 67 du règlement délégué no 639/2014, intitulé « Notifications relatives au soutien couplé facultatif », énonce, à son paragraphe 1 :

« Les notifications visées à l’article 54, paragraphe 1, du [règlement no 1307/2013] comprennent les éléments énumérés à l’annexe I du présent règlement. »

10 Aux termes de l’annexe I du règlement délégué no 639/2014, intitulée « Contenu des informations à soumettre à la Commission conformément à l’article 67, paragraphe 1 » :

« Ces informations comprennent :

[...]

3) une description de chaque mesure de soutien, comprenant au moins :

[...]

f) les conditions d’admissibilité applicables ;

[...] »

Le règlement délégué no 640/2014

11 Les considérants 1, 28 et 31 du règlement délégué no 640/2014 énoncent :

« (1) [...] Le règlement [no 1306/2013] confère à la Commission le pouvoir d’adopter des actes délégués et des actes d’exécution. En vue d’assurer le bon fonctionnement du système dans le nouveau cadre juridique, certaines règles doivent être adoptées au moyen de tels actes. [...]

[...]

(28) En ce qui concerne les demandes d’aide au titre des régimes d’aide “animaux” ou les demandes de paiement au titre des mesures de soutien liées aux animaux, les cas de non‑conformité entraînent l’inadmissibilité de l’animal concerné. Il convient de prévoir des réductions dès le premier animal concerné par un cas de non‑conformité mais, quel que soit le niveau de la réduction, il importe de prévoir une sanction administrative moins sévère lorsque les cas de non‑conformité portent sur trois
animaux ou moins. Dans tous les autres cas, il importe que la sévérité de la sanction administrative dépende du pourcentage d’animaux pour lesquels des cas de non‑conformité sont constatés.

[...]

(31) Il convient d’appliquer les refus et les retraits du soutien ainsi que les sanctions administratives en ce qui concerne les mesures de soutien en faveur du développement rural en tenant compte des principes de dissuasion et de proportionnalité. Il y a lieu de pondérer les refus et les retraits du soutien en fonction de la gravité, de l’étendue, de la durée et de la répétition de la non‑conformité constatée. Il importe que les refus et les retraits du soutien ainsi que les sanctions
administratives tiennent compte, en ce qui concerne les critères d’admissibilité, les engagements et les autres obligations, des spécificités des différentes mesures de soutien. En cas de non‑conformité grave ou si le bénéficiaire a fourni de faux éléments de preuve aux fins de recevoir l’aide, il convient de refuser le soutien et d’imposer une sanction administrative. Il convient de prévoir que les sanctions administratives aillent jusqu’à l’exclusion totale d’une ou de plusieurs mesures de
soutien ou types d’opérations pendant une période déterminée. »

12 L’article 2 du règlement délégué no 640/2014, intitulé « Définitions », dispose, à son paragraphe 1 :

« [...]

De plus, on entend par :

[...]

(2) “non‑conformité”,

a) pour les critères d’admissibilité, les engagements ou les autres obligations relatifs aux conditions d’octroi de l’aide ou du soutien visés à l’article 67, paragraphe 2, du règlement [no 1306/2013], tout non-respect de ces critères d’admissibilité, engagements ou autres obligations ; [...]

[...]

(13) “régime d’aide liée aux animaux”, une mesure de soutien couplé facultatif, prévue au titre IV, chapitre 1, du [règlement no 1307/2013] lorsque le paiement annuel à accorder dans des limites quantitatives définies se fonde sur un nombre fixe d’animaux ;

[...]

(15) “demande d’aide liée aux animaux”, toute demande de paiement d’une aide dans le cas où le paiement annuel à accorder dans des limites quantitatives définies se fonde sur un nombre fixe d’animaux dans le cadre du soutien couplé facultatif prévu au titre IV, chapitre 1, du [règlement no 1307/2013] ;

(16) “animaux déclarés”, les animaux faisant l’objet d’une demande d’aide liée aux animaux au titre du régime d’aides liées aux animaux ou faisant l’objet d’une demande de paiement au titre d’une mesure de soutien lié aux animaux ;

[...]

(18) “animal déterminé”,

a) dans le cadre d’un régime d’aide liée aux animaux, un animal pour lequel l’ensemble des conditions applicables à l’octroi d’une aide sont remplies ; ou

b) dans le cadre d’une mesure de soutien lié aux animaux, un animal identifié au moyen de contrôles administratifs ou sur place ;

[...] »

13 Le titre II du règlement délégué no 640/2014, intitulé « Système intégré de gestion et de contrôle », comprend un chapitre IV, intitulé « Calcul de l’aide et des sanctions administratives en ce qui concerne les régimes de paiements directs et les mesures de développement rural relevant du système intégré », qui contient une section 4, elle-même intitulée « Soutien couplé facultatif fondé sur les demandes d’aide liée aux animaux introduites au titre des régimes d’aide liée aux animaux ou des
mesures de soutien au développement rural reposant sur les demandes de paiement introduites au titre des mesures de soutien lié aux animaux », laquelle section comporte un article 30, intitulé « Base de calcul ». Cet article 30 prévoit, à ses paragraphes 1 à 3 :

« 1.   L’aide ou le soutien ne sont en aucun cas octroyés pour un nombre d’animaux supérieur à celui qui est indiqué dans la demande d’aide ou de paiement.

2.   Les animaux présents dans l’exploitation ne sont considérés comme déterminés que s’ils sont identifiés dans la demande d’aide ou de paiement. Les animaux identifiés peuvent être remplacés sans que le droit au paiement de l’aide ou du soutien ne soit perdu, à condition que l’autorité compétente n’ait pas encore informé le bénéficiaire d’un cas de non-conformité constaté dans la demande d’aide ou de paiement ou qu’elle n’ait pas encore prévenu le bénéficiaire de son intention d’effectuer un
contrôle sur place. Lorsqu’un État membre ne fait pas usage de la possibilité de disposer d’un système “sans demande”, conformément aux règles établies par la Commission sur la base de l’article 78, point b), du règlement [no 1306/2013], il s’assure par tous les moyens qu’il n’existe aucun doute en ce qui concerne les animaux faisant l’objet des demandes d’aide ou de paiement des bénéficiaires.

3.   Sans préjudice de l’article 31, si le nombre d’animaux déclarés dans une demande d’aide ou de paiement est supérieur au nombre d’animaux déterminés à la suite de contrôles administratifs ou de contrôles sur place, le montant de l’aide ou du soutien est calculé sur la base du nombre d’animaux déterminés. »

14 Aux termes de l’article 31 du règlement délégué no 640/2014, intitulé « Sanctions administratives en ce qui concerne les animaux déclarés au titre des régimes d’aide liée aux animaux ou des mesures de soutien lié aux animaux » :

« 1.   Lorsqu’une différence est constatée entre le nombre d’animaux déclarés et le nombre d’animaux déterminés conformément à l’article 30, paragraphe 3, dans une demande d’aide introduite au titre d’un régime d’aide liée aux animaux ou dans une demande de paiement au titre d’une mesure de soutien lié aux animaux ou d’un type d’opération liée à cette mesure de soutien, le montant total de l’aide ou du soutien auquel le bénéficiaire peut prétendre au titre de ce régime d’aide ou de cette mesure
de soutien ou de ce type d’opération liée à cette mesure de soutien pour l’année de demande considérée est réduit du pourcentage à fixer conformément au paragraphe 3 du présent article, si les cas de non-conformité ne concernent pas plus de trois animaux.

2.   Si les cas de non-conformité concernent plus de trois animaux, le montant total de l’aide ou du soutien auquel le bénéficiaire peut prétendre au titre du régime d’aide ou de la mesure de soutien ou du type d’opération liée à cette mesure de soutien, visé au paragraphe 1 pour l’année de demande considérée, est réduit :

a) du pourcentage à fixer conformément au paragraphe 3, s’il n’excède pas 10 % ;

b) de deux fois le pourcentage à fixer conformément au paragraphe 3, s’il est supérieur à 10 % mais inférieur ou égal à 20 %.

Si le pourcentage fixé conformément au paragraphe 3 dépasse 20 %, l’aide ou le soutien auquel le bénéficiaire aurait pu prétendre en application de l’article 30, paragraphe 3, n’est pas octroyé au titre du régime d’aide ou de la mesure de soutien ou du type d’opération liée à cette mesure de soutien pour l’année de demande considérée.

Si le pourcentage fixé conformément au paragraphe 3 dépasse 50 %, l’aide ou le soutien auquel le bénéficiaire aurait pu prétendre en application de l’article 30, paragraphe 3, n’est pas octroyé au titre du régime d’aide ou de la mesure de soutien ou du type d’opération liée à cette mesure de soutien pour l’année de demande considérée. En outre, le bénéficiaire se voit imposer une sanction supplémentaire d’un montant équivalent à celui correspondant à la différence entre le nombre d’animaux
déclarés et le nombre d’animaux déterminés conformément à l’article 30, paragraphe 3. Si ce montant ne peut être entièrement recouvré au cours des trois années civiles suivant celle de la constatation, conformément à l’article 28 du règlement d’exécution (UE) no 908/2014 [de la Commission, du 6 août 2014, portant modalités d’application du règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les organismes payeurs et autres entités, la gestion financière, l’apurement
des comptes, les règles relatives aux contrôles, les garanties et la transparence (JO 2014, L 255, p. 59)], le solde est annulé.

En ce qui concerne les espèces autres que celles mentionnées à l’article 30, paragraphes 4 et 5, du présent règlement, les États membres peuvent décider de déterminer un nombre d’animaux différent du seuil de trois animaux prévu aux paragraphes 1 et 2 du présent article. Lors de la détermination de ce nombre, les États membres s’assurent qu’il équivaut en substance à ce seuil, en prenant en considération, notamment, le nombre d’unités de gros bétail et/ou le montant de l’aide ou du soutien
octroyés.

3.   Afin de fixer les pourcentages visés aux paragraphes 1 et 2, le nombre d’animaux déclarés au titre d’un régime d’aide liée aux animaux ou d’une mesure de soutien lié aux animaux ou d’un type d’opération et pour lesquels des cas de non-conformité ont été constatés est divisé par le nombre d’animaux déterminés pour ce régime d’aide ou cette mesure de soutien ou ce type d’opération liée à cette mesure de soutien, en ce qui concerne la demande d’aide ou de paiement ou le type d’opération liée à
cette mesure de soutien pour l’année de demande considérée.

[...] »

Le règlement d’exécution no 809/2014

15 L’article 15 du règlement d’exécution (UE) no 809/2014 de la Commission, du 17 juillet 2014, établissant les modalités d’application du règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le système intégré de gestion et de contrôle, les mesures en faveur du développement rural et la conditionnalité (JO 2014, L 227, p. 69), tel que modifié par le règlement d’exécution (UE) 2015/2333 de la Commission du 14 décembre 2015 (JO 2015, L 329, p. 1) (ci-après le « règlement
d’exécution no 809/2014 »), intitulé « Modifications apportées à la demande unique ou à la demande de paiement et modifications apportées à la suite des contrôles préliminaires », prévoit :

« 1.   Après la date limite de dépôt de la demande unique ou de la demande de paiement, des parcelles agricoles individuelles ou des droits au paiement individuels peuvent être ajoutés ou ajustés dans la demande unique ou la demande de paiement, pour autant que les exigences prévues par les régimes de paiements directs ou les mesures de développement rural concernés soient respectées.

[...]

3.   Lorsque l’autorité compétente a déjà informé le bénéficiaire des non-conformités que comporte la demande unique ou la demande de paiement ou lorsqu’elle l’a averti de son intention de procéder à un contrôle sur place ou que ce contrôle révèle des cas de non-conformité, les modifications visées au paragraphe 1 ne sont pas autorisées pour les parcelles agricoles concernées par la non-conformité.

[...] »

16 L’article 21 de ce règlement d’exécution, intitulé « Exigences relatives aux demandes d’aide liée aux animaux et aux demandes de paiement au titre de mesures de soutien lié aux animaux », dispose, à son paragraphe 1 :

« Une demande d’aide liée aux animaux au sens de l’article 2, paragraphe 1, deuxième alinéa, point (15), du [règlement délégué no 640/2014] ou une demande de paiement dans le cadre de mesures de soutien lié aux animaux au sens de l’article 2, paragraphe 1, deuxième alinéa, point (14), dudit règlement contiennent toutes les informations nécessaires pour déterminer l’admissibilité à l’aide et/ou au soutien, et notamment :

a) l’identité du bénéficiaire ;

b) une référence à la demande unique si celle-ci a déjà été présentée ;

c) le nombre d’animaux de chaque espèce faisant l’objet d’une demande d’aide ou de paiement liés aux animaux et, en ce qui concerne les bovins, leur code d’identification ;

[...] »

Le droit hongrois

17 L’article 4 de l’a termeléshez kötött közvetlen támogatások igénybevételének szabályairól szóló 9/2015. FM rendelet (décret no 9 du ministère de l’Agriculture et du Développement rural relatif aux modalités de recours aux aides directes couplées à la production), du 13 mars 2015 (ci-après le « décret ministériel no 9/2015 »), est libellé comme suit :

« [...]

2.   Le Trésor public rend ses décisions sur les aides après réalisation des contrôles prévus par [...] le règlement délégué (UE) no 640/2014 de la Commission [...], et en tenant compte des règles relatives aux réductions et autres sanctions qui y sont prévues.

[...]

4.   En cas de non‑respect des conditions d’octroi de l’aide, y compris des conditions de la conditionnalité, constaté lors des contrôles, il y a lieu, en déterminant le montant de l’aide, d’appliquer les conséquences juridiques prévues aux articles 13, 15, 30 à 32, 34 et 37 à 41 du règlement délégué (UE) no 640/2014 de la Commission en ce qui concerne les aides prévues au chapitre II [...]

[...] »

18 Aux termes de l’article 7, paragraphe 3, de ce décret :

« Compte tenu de la condition imposée par l’article 2, paragraphe 2, du décret no 8 du ministère de l’Agriculture et du Développement rural, du 13 mars 2015, relatif aux modalités de recours aux aides directes aux producteurs agricoles, le nombre minimal d’animaux pour lesquels l’aide peut être octroyée est d’un individu. »

19 L’article 11, paragraphe 1, sous e), dudit décret dispose :

« Un producteur agricole a droit à un soutien lié à la détention de vaches allaitantes [...] s’il détient, dans son bétail déclaré en vue de l’octroi de l’aide, des veaux destinés à la production de viande dans une proportion supérieure à 50 % et que, dans son bétail, 30 % au moins des animaux pour lesquels l’aide a été demandée ont vêlé au cours de l’année considérée, et s’il garde les veaux nés, sur l’exploitation, des animaux pour lesquels l’aide a été demandée dans le même troupeau que leurs
mères pendant au moins un mois à compter du jour de leur naissance, [...] »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

20 Le 9 mai 2019, SB a introduit, auprès de l’autorité compétente en matière d’aides agricoles, une demande d’octroi d’un soutien couplé à la production pour la détention de onze vaches allaitantes.

21 Par décision du 25 juin 2020, cette autorité a rejeté la demande de SB au motif que, pour la période couverte par cette demande, seules trois des onze vaches visées par celle-ci avaient vêlé, ce qui correspondait à un taux de vêlage de 27 %. Ainsi, l’exigence d’un taux de vêlage minimal de 30 % des animaux visés par une telle demande, prévue à l’article 11, paragraphe 1, sous e), du décret ministériel no 9/2015, n’était pas remplie. Elle a, dès lors, estimé que l’aide ne pouvait être octroyée
pour aucun des animaux déclarés dans ladite demande et que l’article 31 du règlement délégué no 640/2014 n’était pas applicable.

22 Par décision du 16 novembre 2020, le ministre de l’Agriculture a confirmé la décision du 25 juin 2020.

23 SB a formé un recours contre la décision du 16 novembre 2020 devant la Fővárosi Törvényszék (Cour de Budapest-Capitale, Hongrie), qui est la juridiction de renvoi, en faisant valoir que le ministre de l’Agriculture avait commis une erreur de droit, d’une part, en omettant d’appliquer les conséquences juridiques, sanctions et réductions prévues aux articles 30 et 31 du règlement délégué no 640/2014, auxquels renvoie l’article 4, paragraphes 1 à 3, du décret ministériel no 9/2015, et, d’autre part,
en tenant compte non pas du nombre d’animaux déterminés, au sens de l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, point 18, de ce règlement délégué, ni du nombre d’animaux non conformes, mais seulement du nombre d’animaux déclarés, au sens de l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, point 16, dudit règlement délégué. Or, selon les termes de l’article 30, paragraphe 3, du même règlement délégué, le montant du soutien devrait être calculé sur la base du nombre d’animaux déterminés.

24 SB soutient également, devant la juridiction de renvoi, que le règlement délégué no 640/2014 n’exige pas du demandeur d’une aide qu’il respecte les conditions d’octroi de cette aide pour tous les animaux déclarés. Ce règlement délégué prévoirait, en cas de défaillances mineures, une réduction de ladite aide. SB est d’avis que, en l’occurrence, dix de ses animaux auraient dû être considérés comme « déterminés », c’est-à-dire comme étant conformes aux conditions d’octroi de l’aide, au sens de
l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, point 18, dudit règlement délégué. En effet, étant donné que trois de ces animaux avaient vêlé, le taux de vêlage requis de 30 % était atteint au regard de dix de ses vaches.

25 Ainsi, SB aurait eu droit à une aide pour dix vaches, en vertu de l’article 30, paragraphe 3, et de l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, point 18, du règlement délégué no 640/2014, même si, en vertu de l’article 31, paragraphes 1 et 3, de ce règlement délégué, le montant de l’aide aurait dû, dans ce cas, être réduit en tenant compte du nombre d’animaux non conformes.

26 Le ministre de l’Agriculture soutient, devant la juridiction de renvoi, que l’article 31 du règlement délégué no 640/2014 est inapplicable. Selon ce ministre, la circonstance que le taux de vêlage ne respecte pas celui prescrit par l’article 11, paragraphe 1, sous e), du décret ministériel no 9/2015 affecte tous les animaux déclarés pour lesquels une demande de paiement de l’aide a été présentée. Il fait également valoir que l’article 31 de ce règlement délégué fixe les règles à appliquer en cas
de non‑conformité de certains animaux, alors que, en l’occurrence, SB lui-même n’aurait pas respecté les conditions d’octroi de l’aide puisque le taux de vêlage minimal requis n’avait pas été atteint par son bétail. Enfin, en s’appuyant sur l’article 53, paragraphe 1, du règlement délégué no 639/2014, le ministre de l’Agriculture indique que la détermination des critères d’admissibilité des demandes de soutien relève de la compétence des États membres.

27 La juridiction de renvoi se demande, en premier lieu, si l’article 30, paragraphe 3, et l’article 31, paragraphe 3, du règlement délégué no 640/2014 s’opposent à la pratique d’un État membre consistant à rejeter, dans son intégralité, une demande de paiement d’un soutien couplé lié à la détention de vaches allaitantes lorsque le taux de vêlage requis par la réglementation de cet État membre n’est pas atteint par les animaux déclarés, même si ce taux est atteint pour un nombre plus restreint de
ces animaux.

28 À cet égard, la juridiction de renvoi estime, à l’instar de SB, que l’intention du législateur de l’Union, qui se refléterait dans les considérants 28 et 31 du règlement délégué no 640/2014, était que le respect partiel des conditions d’octroi de l’aide entraîne non pas le non‑paiement de l’aide, mais le paiement d’une aide réduite.

29 La juridiction de renvoi relève également qu’il semble ressortir de l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, point 18, du règlement délégué no 640/2014 que ce dernier établit une distinction entre la catégorie des animaux déclarés par le demandeur de l’aide et celle des animaux déterminés, étant donné que, en vertu de la définition figurant à cette disposition, un animal déterminé est un animal pour lequel l’ensemble des conditions applicables à l’octroi d’une aide sont remplies.

30 Il découlerait de cette définition figurant à ladite disposition, de la base du calcul de l’aide, qui est déterminée en vertu de l’article 30 du règlement délégué no 640/2014, ainsi que du montant de la sanction en cas de non-conformité de certains animaux déclarés, qui est déterminé en vertu de l’article 31 de ce règlement délégué, que le législateur de l’Union a donné sa préférence à un examen de la conformité des animaux considérés individuellement.

31 Or, selon la juridiction de renvoi, la pratique nationale en cause ne permet pas de distinguer les animaux déclarés des animaux déterminés, ce qui serait contraire aux dispositions du règlement délégué no 640/2014, fondées sur les principes de pondération et de proportionnalité, qui sanctionnent, à titre de dissuasion, les défaillances par une réduction de l’aide et, seulement en cas de non‑conformité grave, par le rejet de la demande.

32 En deuxième lieu, la juridiction de renvoi se demande quelle est la méthode qu’il convient de suivre pour déterminer le quotient qui permet d’établir la réduction de l’aide, conformément à l’article 31, paragraphe 3, du règlement délégué no 640/2014.

33 En troisième lieu, la juridiction de renvoi se demande, en substance, si ce quotient doit être multiplié par 100.

34 Dans ces conditions, la Fővárosi Törvényszék (Cour de Budapest-Capitale) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) Une pratique d’un État membre en vertu de laquelle une demande de paiement d’un soutien couplé à la production pour des vaches allaitantes doit – lorsque, du point de vue du critère déterminant le droit à l’aide qui est imposé par l’État membre en question, le taux de vêlage constaté pour les animaux déclarés est, compte tenu de leur nombre, inférieur à celui qui est exigé – être rejetée dans son intégralité, même dans le cas où le taux de vêlage requis a, parmi les animaux déclarés, été
atteint par un groupe d’animaux moins nombreux – puisqu’un pourcentage de vêlage inférieur au taux exigé par la réglementation nationale a pour conséquence que l’ensemble des animaux déclarés est considéré comme non admis en vue de l’octroi de l’aide – est-elle une pratique conforme à l’article 30, paragraphe 3, du [règlement délégué no 640/2014], si l’on tient compte également des considérants 28 et 31, de l’article 2, paragraphe 1, deuxième alinéa, points 16 et 18, et de l’article 31,
paragraphes 1 à 3, de ce règlement ?

2) En cas de réponse négative à la question précédente, le nombre d’animaux admis en vue de l’octroi de l’aide, au sens de l’article 2, paragraphe 1, deuxième alinéa, point 18, ainsi que de l’article 30, paragraphe 3, du [règlement délégué no 640/2014], doit-il en l’espèce être déterminé, compte tenu des exigences de pondération et de proportionnalité énoncées aux considérants 28 et 31 [de ce] règlement – et compte tenu également des dispositions de droit communautaire énumérées dans la question
précédente –, de telle manière que, lorsque le pourcentage de vêlage est inférieur au taux exigé par la réglementation nationale,

a) le nombre d’animaux admis corresponde exclusivement au nombre d’individus ayant vêlé, ou

b) le nombre d’animaux admis corresponde au groupe qui, au sein des animaux déclarés, a atteint le taux de vêlage imposé par la réglementation nationale ?

3) Eu égard à l’article 30, paragraphe 3, et à l’article 31, paragraphes 1 et 2, du [règlement délégué no 640/2014], ainsi qu’à l’exigence de proportionnalité énoncée au considérant 31 dudit règlement, l’article 31, paragraphe 3, de celui-ci doit-il être interprété en ce sens que, pour déterminer la base de la sanction, il faut établir soit le rapport entre les animaux conformes et les animaux non conformes, soit celui entre les animaux conformes et les animaux déclarés, et faut-il, en outre, que
la fraction obtenue comme quotient soit encore multipliée par 100 pour calculer le pourcentage ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

35 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 30, paragraphe 3, du règlement délégué no 640/2014, lu à la lumière des considérants 28 et 31, de l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, points 16 et 18, et de l’article 31, paragraphes 1 à 3, de ce règlement délégué, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à la pratique d’un État membre qui consiste à rejeter, dans son intégralité, une demande de soutien couplé, lorsqu’une condition d’octroi de ce
soutien prévue par la réglementation nationale, à savoir l’exigence qu’un taux de vêlage de 30 % soit atteint par les animaux déclarés dans la demande d’octroi dudit soutien, n’est pas remplie, au lieu de se limiter à réduire le montant du soutien en appliquant les sanctions administratives prévues à l’article 31, paragraphes 1 à 3, dudit règlement délégué.

36 À titre liminaire, il convient de relever que, dans ses observations écrites, le gouvernement hongrois soutient que la pratique nationale en cause est contraire à l’article 11, paragraphe 1, sous e), du décret ministériel no 9/2015, qui prévoit qu’un taux de vêlage minimal de 30 % doit être atteint pour les animaux pour lesquels le soutien couplé a été demandé, au motif que l’intention du législateur national était non pas d’ériger ce taux en une condition d’octroi de ce soutien, mais d’en faire
une méthode de calcul.

37 À cet égard, il importe de rappeler que, en ce qui concerne l’interprétation des dispositions de l’ordre juridique national, la Cour est en principe tenue de se fonder sur les qualifications résultant de la décision de renvoi. En effet, selon une jurisprudence constante, la Cour n’est pas compétente pour interpréter le droit interne d’un État membre (arrêt du 5 décembre 2023, Deutsche Wohnen, C‑807/21, EU:C:2023:950, point 36 et jurisprudence citée).

38 Or, il ressort de la décision de renvoi que, en vertu de la pratique administrative en cause, le total des animaux déclarés doit atteindre un taux de vêlage minimal de 30 % pour l’année de la demande. Ce taux, qui est prévu à l’article 11, paragraphe 1, sous e), du décret ministériel no 9/2015, est considéré comme étant une condition d’octroi du soutien couplé de sorte que, si cette condition n’est pas remplie par les animaux déclarés dans la demande de ce soutien, la demande est rejetée dans son
intégralité. Il convient donc de partir de la prémisse selon laquelle le taux de vêlage minimal de 30 % prévu par ce décret est une condition d’octroi du soutien couplé qui est liée au nombre d’animaux déclarés dans la demande d’octroi du soutien.

39 Dès lors que l’interprétation défendue par la juridiction de renvoi et par SB pourrait être considérée comme remettant en cause la possibilité, pour les États membres, de définir les conditions d’octroi du soutien couplé devant être remplies par l’ensemble des animaux déclarés, il convient de relever que le règlement délégué no 639/2014, qui a été adopté sur le fondement de l’article 52, paragraphe 9, du règlement no 1307/2013, prévoit, à son article 53, paragraphe 1, lequel est précisément
intitulé « Conditions d’octroi du soutien », que les États membres définissent les critères d’admissibilité au bénéfice des mesures de soutien couplé conformément au cadre établi par le règlement no 1307/2013 et aux conditions énoncées dans ce règlement délégué.

40 Les États membres qui prennent une décision d’octroi d’un soutien couplé facultatif ou réexaminent cette décision sont tenus, en vertu de l’article 54 du règlement no 1307/2013, lu en combinaison avec l’article 53, paragraphe 6, de ce règlement et l’article 67, paragraphe 1, du règlement délégué no 639/2014, de notifier les décisions adoptées à cet égard à la Commission. Conformément à l’annexe I, point 3, sous f), du règlement délégué no 639/2014, ils doivent préciser, dans les notifications
soumises à la Commission, les conditions d’admissibilité de chaque mesure de soutien.

41 Il découle des dispositions mentionnées aux deux points précédents du présent arrêt que les États membres disposent, sous réserve du respect du cadre établi par le règlement no 1307/2013 et des conditions énoncées dans le règlement délégué no 639/2014, d’un pouvoir d’appréciation pour définir les critères ou conditions d’admissibilité au bénéfice des mesures de soutien couplé, ainsi que l’a relevé en substance Mme l’avocate générale au point 28 de ses conclusions.

42 Or, si un État membre, dans le cadre de son pouvoir d’appréciation, définit comme « critère d’admissibilité », au sens de l’article 53, paragraphe 1, du règlement délégué no 639/2014, un critère devant être rempli par l’ensemble des animaux déclarés, tel que celui en cause, et si ce critère n’est pas rempli, aucun animal déclaré ne peut, en principe, être considéré comme un « animal déterminé », au sens de l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, point 18, de ce règlement délégué.

43 Par ailleurs, un taux de vêlage minimal de 30 %, qui vise, ainsi que cela ressort des observations du gouvernement hongrois, à inciter les agriculteurs à conserver durablement, voire à accroître, leur troupeau paraît propre à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi.

44 S’agissant de l’article 30, paragraphe 3, du règlement délégué no 640/2014 visé par la première question préjudicielle, cette disposition prévoit que, sans préjudice de l’article 31 de ce règlement délégué, si le nombre d’animaux déclarés dans une demande d’aide ou de paiement est supérieur au nombre d’animaux déterminés à la suite de contrôles administratifs ou de contrôles sur place, le montant de l’aide ou du soutien est calculé sur la base du nombre d’animaux déterminés.

45 Il découle du libellé de cette disposition que, dans l’hypothèse où le nombre d’animaux déterminés est inférieur au nombre d’animaux déclarés dans la demande, le montant du soutien doit être calculé sur la base du nombre d’animaux déterminés. Partant, l’aide demandée peut être octroyée pour un nombre d’animaux inférieur à celui qui est déclaré dans la demande d’aide.

46 Cependant, l’article 30, paragraphe 3, du règlement délégué no 640/2014 ne s’applique pas lorsque, comme en l’occurrence, il n’y a aucun animal déterminé. En particulier, cette disposition ne fixe pas les conditions d’octroi d’un soutien couplé, la détermination de celles-ci relevant, conformément à ce qui a été constaté aux points 39 à 41 du présent arrêt, de la compétence des États membres. Ledit article 30, paragraphe 3, détermine uniquement, ainsi que l’a relevé Mme l’avocate générale au
point 30 de ses conclusions, les critères dont il convient de tenir compte aux fins du calcul d’un soutien couplé. Cette interprétation est confirmée par l’intitulé de cet article 30, à savoir « Base de calcul ».

47 L’article 30, paragraphe 3, du règlement délégué no 640/2014 ne peut donc pas être interprété comme imposant une obligation d’appliquer une condition d’octroi du soutien, qui vise l’ensemble des animaux déclarés dans la demande, à un nombre plus restreint de ces mêmes animaux.

48 S’agissant de l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, du règlement délégué no 640/2014 visé par la première question préjudicielle, cette disposition se limite à définir, à son point 16, la catégorie des « animaux déclarés » comme étant ceux faisant l’objet d’une demande d’aide et, à son point 18, la catégorie des animaux déterminés. Un « animal déterminé » est, en vertu de l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, point 18, sous a), de ce règlement délégué, dans le cadre d’un régime d’aide
liée aux animaux, un animal pour lequel l’ensemble des conditions applicables à l’octroi d’une aide sont remplies et, en vertu de l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, point 18, sous b), dudit règlement délégué, dans le cadre d’une mesure de soutien lié aux animaux, un animal identifié au moyen de contrôles administratifs ou sur place. Ladite disposition n’impose, cependant, pas une obligation d’appliquer une condition d’octroi du soutien devant être remplie par l’ensemble des animaux
déclarés, tel que le taux de vêlage minimal en cause, à un nombre plus restreint d’animaux, de façon à ce que certains animaux déclarés soient déterminés.

49 En ce qui concerne l’article 31 du règlement délégué no 640/2014 auquel fait référence la première question, cet article est intitulé « Sanctions administratives en ce qui concerne les animaux déclarés au titre des régimes d’aide liée aux animaux ou des mesures de soutien lié aux animaux », et prévoit, à ses paragraphes 1 à 3, que le montant de l’aide est réduit lorsqu’une différence est constatée entre les animaux déclarés et les animaux déterminés conformément à l’article 30, paragraphe 3, de
ce règlement délégué dans une demande d’aide.

50 Il ressort du libellé de l’article 31, paragraphe 1, dudit règlement délégué que les réductions prévues à cet article 31 n’ont vocation à être appliquées que dans l’hypothèse visée à l’article 30, paragraphe 3, du même règlement délégué. En outre, ainsi que le confirme son intitulé, ledit article 31 vise à régir les sanctions applicables en cas de non-conformité d’une demande d’aide. En particulier, l’application des réductions prévues à cet article suppose que le droit à l’aide existe et donc
que les critères d’admissibilité soient, ainsi que l’a relevé Mme l’avocate générale aux points 44 et 46 de ses conclusions, en principe remplis et n’a, donc, comme l’article 30, paragraphe 3, du règlement délégué no 640/2014, pas vocation à régir les conditions d’octroi du soutien elles-mêmes.

51 Il s’ensuit que ni l’article 30, paragraphe 3, du règlement délégué no 640/2014 ni l’article 31 de ce règlement ne s’opposent à la pratique administrative en cause visée au point 38 du présent arrêt.

52 Les considérants 28 et 31 du règlement délégué no 640/2014, auxquels se réfère la première question, ne remettent pas en cause cette interprétation.

53 D’une part, s’il ressort du considérant 28 de ce règlement délégué que les cas de non‑conformité entraînent seulement l’inadmissibilité de l’animal concerné, l’emploi de l’expression « animal concerné » au singulier, dans certaines versions linguistiques, ne saurait être interprété comme imposant d’appliquer une condition d’octroi du soutien, qui vise l’ensemble des animaux déclarés dans la demande, à un nombre plus restreint de ces mêmes animaux. Cette expression générique doit être comprise
comme « le ou les animaux concernés », le nombre d’animaux concernés dépendant des critères d’admissibilité et des animaux déclarés dans les demandes de soutien en cause.

54 D’autre part, s’il ressort du considérant 31 du règlement délégué no 640/2014 que les refus d’octroyer les mesures de soutien en faveur du développement rural doivent être appliqués en tenant compte des principes de dissuasion et de proportionnalité, l’exclusion du bénéfice du soutien couplé ne saurait être considérée comme disproportionnée dès lors qu’il s’agit non pas d’une sanction, mais de la simple conséquence du non-respect des critères d’admissibilité pour l’octroi du soutien [voir, en ce
sens, arrêts du 24 mai 2007, Maatschap Schonewille-Prins, C‑45/05, EU:C:2007:296, point 58, ainsi que du 29 février 2024, Eesti Vabariik (Põllumajanduse Registrite ja Informatsiooni Amet), C‑437/22, EU:C:2024:176, point 56 et jurisprudence citée].

55 Par ailleurs, l’interprétation de l’article 30, paragraphe 3, du règlement délégué no 640/2014 défendue par la juridiction de renvoi et par SB, selon laquelle ce dernier devrait avoir droit à un soutien pour dix vaches, pourrait être considérée, ainsi que l’a souligné, en substance, Mme l’avocate générale au point 34 de ses conclusions, comme permettant au demandeur de réduire a posteriori le nombre d’animaux déclarés dans la demande de soutien.

56 À cet égard, il convient de relever qu’il ressort du dossier dont dispose la Cour que la Hongrie applique, s’agissant du soutien lié à la détention de vaches allaitantes, le régime fondé sur des demandes, visé à l’article 21, paragraphe 1, du règlement d’exécution no 809/2014. Partant, le demandeur doit indiquer, en vertu du point c) de cette disposition, le nombre d’animaux déclarés et, en ce qui concerne les bovins, le code d’identification exact de chacun d’entre eux. Étant donné qu’il a
l’initiative de la demande, ce demandeur peut déclarer dans celle-ci non pas tous les animaux qu’il détient, mais uniquement ceux qui remplissent les critères d’admissibilité. Cependant, une fois les animaux déclarés indiqués dans cette demande, ainsi que l’a relevé Mme l’avocate générale au point 36 de ses conclusions, les dispositions combinées de l’article 15, paragraphe 3, et de l’article 21, paragraphe 1, sous c), du règlement d’exécution no 809/2014 interdisent de modifier la demande de
paiement, y compris le nombre d’animaux qui y est déclaré, lorsque l’autorité compétente a déjà informé le bénéficiaire des non‑conformités que comporte cette demande. Selon l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, point 2, sous a), du règlement délégué no 640/2014, une non‑conformité résulte de tout non‑respect des critères d’admissibilité.

57 Or, en l’occurrence, l’autorité compétente a informé SB des non-conformités le 25 juin 2020 lorsqu’elle a rejeté la demande de soutien en indiquant que le taux de vêlage de 30 % n’avait pas été atteint. Dans une telle hypothèse, il n’est, conformément aux considérations qui précèdent, pas possible de réduire a posteriori le nombre d’animaux déclarés dans la demande.

58 L’interprétation de l’article 30, paragraphe 3, du règlement délégué no 640/2014 défendue par la juridiction de renvoi et SB irait donc à l’encontre de l’article 15, paragraphe 3, du règlement d’exécution no 809/2014, lu en combinaison avec l’article 21, paragraphe 1, sous c), de ce règlement d’exécution.

59 Il résulte de ce qui précède qu’il convient de répondre à la première question que l’article 30, paragraphe 3, du règlement délégué no 640/2014, lu à la lumière des considérants 28 et 31, de l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, points 16 et 18, et de l’article 31, paragraphes 1 à 3, de ce règlement délégué, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à la pratique d’un État membre qui consiste à rejeter, dans son intégralité, une demande de soutien couplé, lorsqu’une condition
d’octroi de ce soutien prévue par la réglementation nationale, à savoir l’exigence qu’un taux de vêlage de 30 % soit atteint par les animaux déclarés dans la demande d’octroi dudit soutien, n’est pas remplie, au lieu de se limiter à réduire le montant du soutien en appliquant les sanctions administratives prévues à l’article 31, paragraphes 1 à 3, dudit règlement délégué.

Sur les deuxième et troisième questions

60 Étant donné que les deuxième et troisième questions ne sont posées par la juridiction de renvoi que si, en substance, l’article 30, paragraphe 3, du règlement délégué no 640/2014 s’oppose à la pratique nationale en cause, il n’y a pas lieu de répondre à ces questions, eu égard à la réponse apportée à la première question.

Sur les dépens

61 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) dit pour droit :

  L’article 30, paragraphe 3, du règlement délégué (UE) no 640/2014 de la Commission, du 11 mars 2014, complétant le règlement (UE) no 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne le système intégré de gestion et de contrôle, les conditions relatives au refus ou au retrait des paiements et les sanctions administratives applicables aux paiements directs, le soutien au développement rural et la conditionnalité, tel que modifié par le règlement délégué (UE) 2016/1393 de la
Commission, du 4 mai 2016, lu à la lumière des considérants 28 et 31, de l’article 2, paragraphe 1, second alinéa, points 16 et 18, et de l’article 31, paragraphes 1 à 3, du règlement délégué no 640/2014, tel que modifié par le règlement délégué 2016/1393,

  doit être interprété en ce sens que :

  il ne s’oppose pas à la pratique d’un État membre qui consiste à rejeter, dans son intégralité, une demande de soutien couplé, lorsqu’une condition d’octroi de ce soutien prévue par la réglementation nationale, à savoir l’exigence qu’un taux de vêlage de 30 % soit atteint par les animaux déclarés dans la demande d’octroi dudit soutien, n’est pas remplie, au lieu de se limiter à réduire le montant du soutien en appliquant les sanctions administratives prévues à l’article 31, paragraphes 1 à 3, de
ce règlement délégué, tel que modifié.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : le hongrois.


Synthèse
Formation : Sixième chambre
Numéro d'arrêt : C-538/22
Date de la décision : 04/07/2024
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par Fővárosi Törvényszék.

Renvoi préjudiciel – Agriculture – Politique agricole commune – Règlement (UE) no 1307/2013 – Article 52 – Règlement délégué (UE) no 639/2014 – Article 53, paragraphe 1 – Définition des critères d’admissibilité au bénéfice des mesures de soutien couplé – Compétence des États membres – Règlement délégué (UE) no 640/2014 – Article 2, paragraphe 1, second alinéa, points 16 et 18 – Distinction entre “animaux déclarés” et “animaux déterminés” – Article 30, paragraphe 3 – Soutien calculé sur la base des animaux déterminés – Article 31, paragraphes 1 à 3 – Sanctions administratives en cas de non-conformité parmi les animaux déclarés – Demande de soutien couplé lié à la détention de vaches allaitantes – Taux de vêlage fixé dans la réglementation nationale non atteint par l’ensemble des animaux déclarés – Taux atteint par un nombre plus restreint de ces animaux – Pratique nationale refusant le soutien.

Structures agricoles

Agriculture et Pêche


Parties
Demandeurs : SB
Défendeurs : Agrárminiszter.

Composition du Tribunal
Avocat général : Kokott
Rapporteur ?: Xuereb

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2024
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2024:568

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