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02/02/2023 | CJUE | N°C-833/21

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Endesa Generación SAU contre Tribunal Económico Administrativo Central., 02/02/2023, C-833/21


 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. ATHANASIOS RANTOS

présentées le 2 février 2023 ( 1 )

Affaire C‑833/21

Endesa Generación SA

contre

Tribunal Económico Administrativo Central

[demande de décision préjudicielle formée par l’Audiencia Nacional (Cour centrale, Espagne)]

« Renvoi préjudiciel – Fiscalité – Directive 2003/96/CE – Taxation des produits énergétiques et de l’électricité – Article 14, paragraphe 1, sous a) – Exonération des produits énergétiques et de l’

électricité utilisés pour produire de l’électricité ainsi que de l’électricité utilisée pour maintenir la capacité de produire de l’électricité – Fac...

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. ATHANASIOS RANTOS

présentées le 2 février 2023 ( 1 )

Affaire C‑833/21

Endesa Generación SA

contre

Tribunal Económico Administrativo Central

[demande de décision préjudicielle formée par l’Audiencia Nacional (Cour centrale, Espagne)]

« Renvoi préjudiciel – Fiscalité – Directive 2003/96/CE – Taxation des produits énergétiques et de l’électricité – Article 14, paragraphe 1, sous a) – Exonération des produits énergétiques et de l’électricité utilisés pour produire de l’électricité ainsi que de l’électricité utilisée pour maintenir la capacité de produire de l’électricité – Faculté pour les États membres de déroger à cette exonération pour des “raisons ayant trait à la protection de l’environnement” – Taxe nationale sur le charbon
utilisé pour la production d’électricité – Objectifs de politique environnementale – Critères d’appréciation »

I. Introduction

1. La directive 2003/96/CE ( 2 ), relative à la taxation des produits énergétiques et de l’électricité, prévoit, à son article 14, paragraphe 1, sous a), l’exonération de la taxation pour les produits énergétiques et l’électricité utilisés pour produire de l’électricité ainsi que de l’électricité utilisée pour maintenir la capacité de produire de l’électricité. Cette disposition énonce également que, à titre dérogatoire, les États membres peuvent taxer ces produits pour des raisons ayant trait à la
protection de l’environnement et sans avoir à respecter les niveaux minima de taxation prévus par cette directive.

2. À quelles conditions la taxation du charbon utilisé pour la production d’électricité, telle que prévue par une législation nationale, peut être considérée comme ayant été instaurée « pour des raisons ayant trait à la protection de l’environnement », au sens de l’article 14, paragraphe 1, sous a), de la directive 2003/96 ? Telle est, en substance, la question posée par l’Audiencia Nacional (Cour centrale, Espagne).

3. La demande de décision préjudicielle a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Endesa Generación SA (ci-après « Endesa ») au Tribunal Económico Administrativo Central (tribunal économico-administratif central, Espagne) au sujet d’un avis d’imposition relatif à l’application de la taxe espagnole sur le charbon en ce qui concerne le charbon consommé par une centrale thermique pour produire de l’énergie électrique.

II. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

1. La directive 2003/96

4. L’article 1er de la directive 2003/96 énonce :

« Les États membres taxent les produits énergétiques et l’électricité conformément à la présente directive. »

5. L’article 2 de cette directive prévoit :

« 1.   Aux fins de la présente directive, on entend par “produits énergétiques” les produits :

[...]

b) relevant des codes NC [ ( 3 )] 2701, 2702 et 2704 à 2715 inclus ;

[...]

5.   Les codes de la nomenclature combinée visés dans la présente directive sont ceux figurant dans le règlement (CE) no 2031/2001 de la Commission, du 6 août 2001, modifiant l’annexe I du règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun [ ( 4 )].

[...] »

6. L’article 4 de ladite directive dispose :

« 1.   Les niveaux de taxation que les États membres appliquent aux produits énergétiques et à l’électricité visés à l’article 2 ne peuvent être inférieurs aux niveaux minima prévus par la présente directive.

2.   Aux fins de la présente directive, on entend par “niveau de taxation” le montant total d’impôts indirects (à l’exception de la [taxe sur la valeur ajoutée (TVA)]) perçu, calculé directement ou indirectement sur la quantité de produits énergétiques et d’électricité au moment de la mise à la consommation. »

7. L’article 10 de la même directive est libellé comme suit :

« 1.   À partir du 1er janvier 2004, les niveaux minima de taxation applicables à l’électricité sont fixés conformément à l’annexe I, tableau C.

2.   Au-dessus des niveaux minima de taxation visés au paragraphe 1, les États membres auront la possibilité de déterminer l’assiette fiscale applicable, à condition qu’ils respectent la directive 92/12/CEE [ ( 5 )]. »

8. L’article 14, paragraphe 1, sous a), de la directive 2003/96 énonce :

« Outre les dispositions générales de la directive [92/12] concernant les utilisations exonérées de produits imposables, et sans préjudice d’autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent les produits suivants de la taxation, selon les conditions qu’ils fixent en vue d’assurer l’application correcte et claire de ces exonérations et d’empêcher la fraude, l’évasion ou les abus :

a) les produits énergétiques et l’électricité utilisés pour produire de l’électricité et l’électricité utilisée pour maintenir la capacité de produire de l’électricité. Toutefois, les États membres peuvent taxer ces produits pour des raisons ayant trait à la protection de l’environnement et sans avoir à respecter les niveaux minima de taxation prévus par la présente directive. Dans ce cas, la taxation de ces produits n’entre pas en ligne de compte dans le niveau minimum de taxation de
l’électricité visé à l’article 10. »

2. La directive 2008/118/CE

9. L’article 1er de la directive 2008/118/CE ( 6 ) qui, en vertu de son article 47, a abrogé et remplacé la directive 92/12 avec effet au 1er avril 2010, énonce :

« 1.   La présente directive établit le régime général des droits d’accise frappant directement ou indirectement la consommation des produits suivants, ci-après dénommés “produits soumis à accise” :

a) les produits énergétiques et l’électricité relevant de la directive [2003/96] ;

[...]

2.   Les États membres peuvent, à des fins spécifiques, prélever des taxes indirectes supplémentaires sur les produits soumis à accise, à condition que ces impositions respectent les règles de taxation communautaires applicables à l’accise ou à la taxe sur la valeur ajoutée pour la détermination de la base d’imposition, le calcul, l’exigibilité et le contrôle de l’impôt, ces règles n’incluant pas les dispositions relatives aux exonérations.

3.   Les États membres peuvent prélever des taxes sur :

a) les produits autres que les produits soumis à accise ;

[...]

Toutefois, ces prélèvements ne peuvent pas entraîner de formalités liées au passage des frontières dans le cadre des échanges entre États membres. »

B.   Le droit espagnol

10. La Ley 22/2005 por la que se incorporan al ordenamiento jurídico español diversas directivas comunitarias en materia de fiscalidad de productos energéticos y electricidad y del régimen fiscal común aplicable a las sociedades matrices y filiales de estados miembros diferentes, y se regula el régimen fiscal de las aportaciones transfronterizas a fondos de pensiones en el ámbito de la Unión Europea (loi 22/2005 portant transposition dans l’ordre juridique espagnol de plusieurs directives
communautaires en matière de fiscalité des produits énergétiques et de l’électricité et concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et aux filiales établies dans des États membres différents, et réglementant le régime fiscal des contributions transfrontalières à des fonds de pension dans le cadre de l’Union européenne), du 18 novembre 2005 ( 7 ) (ci-après la « loi 22/2005 »), a instauré en Espagne une taxe sur le charbon (ci-après la « taxe sur le charbon »). À cette fin, la
Ley 38/1992 de Impuestos Especiales (loi 38/1992 sur les impôts spéciaux), du 28 décembre 1992 ( 8 ), a été modifiée par l’introduction d’un titre III, intitulé « Accises sur le charbon », comprenant notamment les articles 75 à 84 de cette loi (ci-après la « loi 38/1992 »).

11. L’article 75, paragraphe 1, de la loi 38/1992 énonce :

« Aux fins de cette taxe, sont considérés comme du charbon les produits relevant des codes 2701, 2702, 2704, 2708, 2713 et 2714 de la nomenclature tarifaire et statistique établie par le règlement (CEE) no 2658/87 du Conseil [ ( 9 )] [...] »

12. L’article 77, paragraphe 1, de cette loi prévoit :

« Est soumise à accise la mise à la consommation de charbon dans son champ d’application territorial. »

13. L’article 79, paragraphe 3, sous a), de ladite loi disposait :

« Sont exonérées d’accise les opérations constituant une mise à la consommation de charbon lorsqu’elles impliquent l’utilisation du charbon aux fins suivantes :

a) production d’électricité et cogénération d’électricité et de chaleur. »

14. L’article 83, paragraphe 1, de la même loi est libellé comme suit :

« La base d’imposition de l’accise est constituée par le rendement énergétique du charbon qui fait l’objet des opérations taxables, exprimé en gigajoules (GJ). »

15. L’article 84 de la loi 38/1992 énonçait :

« Le taux d’accise s’élève à 0,15 euro par gigajoule. »

16. La loi 38/1992 a été modifiée par la Ley 15/2012 de medidas fiscales para la sostenibilidad energética (loi 15/2012 portant mesures fiscales en vue d’une utilisation durable de l’énergie), du 27 décembre 2012 ( 10 ) (ci-après la « loi 15/2012 »). Aux termes du préambule de cette dernière loi :

« I) La présente loi vise à harmoniser notre système fiscal avec une utilisation [de l’énergie] plus efficace et respectueuse de l’environnement et de la durabilité, qui sont les valeurs inspirant cette réforme de la fiscalité, ledit système s’inscrivant ainsi dans le prolongement des principes de base régissant la politique fiscale, énergétique et, naturellement, environnementale de l’Union européenne.

Dans la société actuelle, l’influence toujours plus importante de la production et de la consommation d’énergie sur la durabilité environnementale requiert un cadre normatif et réglementaire garantissant à tous les agents le bon fonctionnement du modèle énergétique et qui, en outre, contribue à préserver notre riche patrimoine environnemental.

La présente loi est essentiellement fondée sur l’article 45 de la Constitution, qui institue la protection de notre environnement comme l’un des principes directeurs des politiques sociales et économiques. Par conséquent, l’un des axes de cette réforme fiscale est l’internalisation des coûts environnementaux découlant de la production d’énergie électrique et du stockage de combustible nucléaire usé et de déchets radioactifs. La présente loi doit ainsi servir de stimulant afin d’améliorer nos
niveaux d’efficacité énergétique, tout en permettant d’assurer une meilleure gestion des ressources naturelles et de continuer à progresser dans le nouveau modèle de développement durable, tant du point de vue économique et social qu’environnemental.

La présente réforme contribue en outre à l’intégration des politiques environnementales dans notre système fiscal, qui permet tant des prélèvements environnementaux spécifiques que la possibilité d’incorporer le facteur environnemental dans d’autres prélèvements préexistants.

Les valeurs et les objectifs qui sous-tendent la présente loi ont vocation à être transversaux et doivent par conséquent être un axe essentiel de la cohérence des mesures sectorielles, particulièrement lorsque celles-ci affectent le secteur de l’énergie, qui a une telle importance économique et environnementale pour le pays.

À cette fin, la présente loi instaure trois nouveaux impôts : l’impôt sur la valeur de production de l’énergie électrique, l’impôt sur la production de combustible nucléaire usé et sur les déchets radioactifs résultant de la génération d’énergie électrique nucléaire, et l’impôt sur le stockage de combustible nucléaire usé et de déchets radioactifs dans des installations centralisées. Elle crée une redevance sur l’utilisation des eaux intérieures pour la production d’énergie électrique. Elle
modifie les taux d’imposition établis pour le gaz naturel et le charbon, en supprimant, en outre, les exonérations prévues pour les produits énergétiques utilisés dans la production d’énergie électrique et dans la cogénération d’électricité et de chaleur utile.

[...]

IV) [...] [L]a loi révise le traitement fiscal applicable aux différents produits énergétiques utilisés pour la production d’électricité. Les activités de production d’électricité à partir de combustibles fossiles constituent des sources majeures d’émissions de gaz à effet de serre, de sorte que, d’un point de vue fiscal, il a été considéré que cette forme de production d’électricité devait être taxée de manière plus appropriée, en fonction des externalités qu’elle produit.

Sur cette base, certaines exonérations prévues à l’article 51, paragraphe 2, sous c), et à l’article 79, paragraphe 3, sous a), de la loi 38/1992 sont supprimées, conformément aux dispositions de l’article 14, paragraphe 1, sous a), de la directive [2003/96], qui permet aux États membres de taxer à ces fins les produits énergétiques utilisés pour produire de l’électricité, et de l’article 15, paragraphe 1, sous c), de ladite directive en ce qui concerne la production combinée de chaleur et
d’électricité.

Dans le même sens, pour appliquer un traitement analogue à la production d’électricité à partir de sources d’énergie fossile, le taux de taxation du charbon est relevé et, dans le même temps, des taux spécifiques frappant les fiouls et les gazoles destinés à la production d’énergie électrique ou à la cogénération d’électricité et de chaleur utile sont introduits.

[...] »

17. La loi 15/2012 a ainsi supprimé l’article 79, paragraphe 3, sous a), de la loi 38/1992 et a modifié l’article 84 de cette dernière loi comme suit :

« Le taux d’accise est fixé à 0,65 euro par gigajoule. » ( 11 )

18. Selon la décision de renvoi, la loi 15/2012 a maintenu les exonérations de la taxe sur les hydrocarbures en ce qui concerne la production d’électricité dans les centrales électriques, ou la production d’électricité ou la cogénération d’électricité et de chaleur, dans les centrales combinées pour les combustibles inclus dans le champ d’application de cette loi, parmi lesquels figurent le gaz naturel et le diesel ( 12 ). Par ailleurs, comme cela est énoncé dans son préambule, cette loi a créé
trois nouveaux impôts, à savoir l’impôt sur la valeur de production de l’énergie électrique, l’impôt sur la production de combustible nucléaire usé et sur les déchets radioactifs résultant de la génération d’énergie électrique nucléaire, et l’impôt sur le stockage de combustible nucléaire usé et de déchets radioactifs dans des installations centralisées.

19. La seconde disposition additionnelle de la loi 15/2012, intitulée « Coûts du système électrique », était libellée comme suit :

« Chaque année, les lois de finances générales de l’État affectent au financement des coûts du système électrique prévus à l’article 16 de la Ley 54/1997 del Sector Eléctrico (loi 54/1997 sur le secteur électrique), du 27 novembre 1997 [ ( 13 )], un montant équivalent à la somme de :

a) l’estimation des montants annuellement perçus revenant à l’État au titre des prélèvements et des redevances inclus dans la présente loi ;

b) le produit estimé de la vente aux enchères des droits d’émissions de gaz à effet de serre, avec un maximum de 500 millions d’euros. » ( 14 )

III. Le litige au principal, les questions préjudicielles et la procédure devant la Cour

20. Endesa est une entreprise dont l’activité consiste à produire de l’énergie électrique en consommant, notamment, du charbon. Elle acquiert ce dernier par l’intermédiaire d’une société liée, à savoir Carboex SA, laquelle, sur le plan fiscal, a déclaré bénéficier de l’exonération de la taxe sur le charbon pour les lots de charbon achetés qui sont destinés à la revente, la consommation constituant le fait générateur de cette taxe.

21. À la suite d’un contrôle fiscal au titre de l’exercice 2013 concernant la centrale thermique Litoral de Almería (Espagne), qui appartient à Endesa, l’inspection des impôts a considéré que la base imposable de la taxe sur le charbon devait être déterminée en fonction du pouvoir calorifique supérieur du charbon, indépendamment de l’énergie effectivement utilisée pour la production d’électricité. Elle a fait valoir que les lots de charbon visés avaient été acquis par Endesa pour être consommés aux
fins de la production d’électricité, ce qui a eu pour effet la réalisation du fait générateur et l’exigibilité de cette taxe. En outre, un contrôle des obligations formelles en matière de déclaration de stocks a été effectué. En conséquence, l’inspection des impôts a émis un avis d’imposition à l’encontre d’Endesa fixant une imposition majorée, augmentée des intérêts de retard pour les montants restant dus.

22. Le 7 avril 2016, Endesa a introduit une réclamation administrative auprès du Tribunal Económico Administrativo Central (tribunal économico-administratif central) en contestant, premièrement, la détermination de la taxe sur le charbon sur la base du pouvoir calorifique supérieur du charbon, deuxièmement, la taxation de 268717,98 tonnes de charbon que Carboex avait déclarées comme étant exonérées pour ce qui concerne l’année 2011 au motif qu’elles étaient destinées à la revente et ont ensuite été
utilisées par Endesa pour la production d’électricité, troisièmement, la détermination des stocks comptables au 31 décembre 2012 et, quatrièmement, la conformité de cette taxe au droit de l’Union s’agissant de consommations destinées à la production d’énergie électrique.

23. Par décision du 28 mars 2019, le Tribunal Económico Administrativo Central (tribunal économico-administratif central) a considéré qu’il n’y avait pas lieu de tenir compte du pouvoir calorifique inférieur du charbon pour déterminer la base d’imposition de la taxe sur le charbon. Il a observé que le fait de taxer des lots de charbon précédemment déclarés comme étant exonérés de la taxe sur le charbon car destinés à la revente ne constituait pas une double imposition, dès lors que l’acheteur les
destinait à l’autoconsommation pour la production d’électricité, celle-ci constituant le fait générateur de cette taxe. Ce tribunal a également considéré que l’erreur alléguée dans la déclaration des stocks de charbon n’avait pas été démontrée. Par ailleurs, il ne s’est pas prononcé sur la conformité au droit de l’Union de la loi 15/2012, qui a supprimé l’exonération de la taxe sur le charbon pour la consommation de charbon destiné à la production d’électricité.

24. Endesa a introduit un recours contentieux administratif devant l’Audiencia Nacional (Cour centrale), la juridiction de renvoi, contre cette décision du Tribunal Económico Administrativo Central (tribunal économico-administratif central), en soulevant des griefs identiques à ceux qu’elle avait invoqués devant ce tribunal et en demandant que la Cour soit saisie à titre préjudiciel en ce qui concerne la disposition de la loi 15/2012 ayant supprimé l’exonération de la taxe sur le charbon pour la
consommation de charbon destiné à la production d’électricité.

25. La juridiction de renvoi indique qu’elle est parvenue à la conclusion que, si la législation espagnole fixe un taux d’accise fondé sur l’énergie thermique générée par la consommation de charbon, mesurée en gigajoules, il n’y a pas lieu de tenir uniquement compte de l’énergie qui est effectivement utilisée pour la production d’électricité. En outre, le fait générateur de la taxe sur le charbon interviendrait lorsque la société concernée acquiert du charbon auprès de sa société liée afin de
l’utiliser pour produire de l’électricité. Par ailleurs, il n’existerait pas de preuve de l’existence d’une erreur dans la déclaration des stocks.

26. Partant, selon cette juridiction, les demandes d’Endesa visant à ne pas payer le montant liquidé de la taxe sur le charbon ne peuvent être satisfaites qu’en remettant en cause la conformité de cette taxe, qui grève la consommation du charbon utilisé pour la production d’électricité, avec la réglementation de l’Union restructurant le régime de taxation des produits énergétiques et de l’électricité. En effet, si ladite taxe n’a pas de finalité environnementale, au sens de l’article 14,
paragraphe 1, sous a), de la directive 2003/96, la législation espagnole en cause serait dès lors incompatible avec le droit de l’Union et devrait être écartée, ce qui priverait l’avis d’imposition concerné de base légale.

27. À cet égard, la juridiction de renvoi éprouve de sérieux doutes quant à la conformité de la taxation de la consommation du charbon utilisé pour produire de l’électricité avec la directive 2003/96 au motif que, pour qu’une taxe ait une finalité spécifique au sens de l’article 14, paragraphe 1, sous a), de cette directive, elle ne peut avoir une finalité exclusivement budgétaire, à savoir celle de financer les coûts du système électrique espagnol. Cette finalité budgétaire découlerait du fait que
la seconde disposition additionnelle de la loi 15/2012 dispose expressément qu’un montant équivalent à la somme de l’estimation des montants annuellement perçus revenant à l’État au titre des prélèvements et des redevances inclus dans cette loi est affecté par les lois de finances générales de l’État au financement des coûts du système électrique.

28. En outre, la structure de la taxe sur le charbon ne refléterait pas l’objectif environnemental annoncé dans le préambule de la loi 15/2012 et le produit de cette taxe ne serait pas destiné à réduire l’impact sur l’environnement de l’utilisation du charbon pour la production d’électricité. Selon la juridiction de renvoi, le fait que l’utilisation à cette fin d’un produit énergétique très polluant soit taxée ne semble pas répondre à l’exigence selon laquelle une taxe doit poursuivre une finalité
spécifique, compte tenu du fait qu’il s’agit d’un marché marginaliste de tarification du marché de l’électricité et que les centrales thermiques fonctionnant au charbon ne sont pas exclues de la rémunération de l’activité de production d’électricité, ce qui contribue à la durabilité économique et financière de celles-ci.

29. C’est dans ces conditions que l’Audiencia Nacional (Cour centrale) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) La législation espagnole qui prévoit la taxation du charbon destiné à la production d’électricité et qui, bien qu’elle prétende avoir pour objectif la protection de l’environnement, n’intègre pas cette finalité dans la structure de la taxe et affecte le produit de son prélèvement au financement des coûts du système électrique est-elle conforme à l’article 14, paragraphe 1, sous a), de la directive [2003/96] ?

2) Peut-on considérer que la structure de la taxe reflète l’objectif environnemental en ce que les taux d’accise sont fixés en fonction du pouvoir calorifique du charbon utilisé pour la production d’électricité ?

3) L’objectif environnemental est-il atteint par le simple fait que des taxes soient prélevées sur certains produits énergétiques non renouvelables et non sur l’utilisation de ceux qui sont considérés comme moins nocifs pour l’environnement ? »

30. Des observations écrites ont été présentées à la Cour par Endesa, le gouvernement espagnol et la Commission européenne.

IV. Analyse

31. Par ses questions préjudicielles, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 14, paragraphe 1, sous a), de la directive 2003/96 doit être interprété en ce sens qu’une législation nationale prévoyant la taxation du charbon utilisé pour la production d’électricité répond à la condition selon laquelle la taxe doit être instaurée « pour des raisons ayant trait à la protection de l’environnement » lorsque, dans la situation où le législateur
national a invoqué pour l’adoption de cette taxe l’objectif de protection de l’environnement, une finalité environnementale n’est pas intégrée dans la structure de ladite taxe, dont le taux est fixé en fonction du pouvoir calorifique du charbon, le produit de la même taxe est affecté au financement des coûts du système électrique national et l’utilisation d’autres produits énergétiques considérés comme moins nocifs pour l’environnement n’est pas taxée.

32. Aux fins de répondre à ces questions, il convient, à titre liminaire, de rappeler la jurisprudence de la Cour relative à la faculté des États membres de taxer les produits énergétiques utilisés pour produire de l’électricité au titre de la directive 2003/96.

33. À cet égard, en vertu de l’article 4, paragraphe 1, de cette directive, les États membres doivent taxer les produits énergétiques relevant de son champ d’application, à savoir les carburants, les combustibles et l’électricité, en leur appliquant des niveaux de taxation qui ne peuvent être inférieurs aux niveaux minima qu’elle prévoit ( 15 ). L’article 4, paragraphe 2, de ladite directive définit le niveau de taxation que les États membres appliquent aux produits concernés comme étant le montant
total d’impôts indirects (à l’exception de la TVA) perçu, calculé directement ou indirectement sur la quantité de produits énergétiques et d’électricité au moment de la mise à la consommation.

34. Comme la Cour l’a énoncé, en prévoyant un régime de taxation harmonisé des produits énergétiques et de l’électricité, la directive 2003/96 vise à promouvoir le bon fonctionnement du marché intérieur dans le secteur de l’énergie, en évitant, notamment, les distorsions de concurrence ( 16 ). À cette fin, s’agissant, en particulier, de l’électricité, le législateur de l’Union a fait le choix, ainsi qu’il ressort, notamment, de la page 5 de l’exposé des motifs de la proposition de directive du
Conseil restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques ( 17 ), d’imposer aux États membres, conformément à l’article 1er de la directive 2003/96, la taxation de l’électricité distribuée, les produits énergétiques utilisés pour la production de celle-ci devant, corrélativement, être exonérés de la taxation, et cela dans le but d’éviter une double taxation de l’électricité ( 18 ).

35. Ainsi, l’article 14, paragraphe 1, sous a), première phrase, de cette directive prévoit que les États membres sont tenus d’exonérer les produits énergétiques et l’électricité utilisés, notamment, pour produire de l’électricité ( 19 ). Dès lors que l’article 14, paragraphe 1, de ladite directive énonce de manière limitative les exonérations obligatoires s’imposant aux États membres dans le cadre de la taxation des produits énergétiques et de l’électricité, ses dispositions ne sauraient être
interprétées de manière extensive, sous peine de priver la taxation harmonisée instituée par la même directive de tout effet utile ( 20 ).

36. L’article 14, paragraphe 1, sous a), première phrase, de la directive 2003/96, en ce qu’il impose aux États membres l’exonération obligatoire des produits énergétiques utilisés pour produire de l’électricité, prévoit une obligation précise et inconditionnelle, de telle sorte que cette disposition confère aux particuliers le droit de s’en prévaloir directement devant les juridictions nationales ( 21 ).

37. Par ailleurs, la directive 2003/96 vise également à encourager des objectifs de politique environnementale ( 22 ). Ces objectifs se traduisent par la faculté conférée aux États membres de taxer les produits énergétiques utilisés pour la production d’électricité. À cet égard, lorsque le législateur de l’Union a entendu permettre aux États membres de déroger au régime d’exonération obligatoire instauré par cette directive, il l’a prévu de manière explicite, notamment à l’article 14, paragraphe 1,
sous a), deuxième phrase, de ladite directive, selon lequel ceux-ci peuvent taxer les produits énergétiques utilisés pour produire de l’électricité « pour des raisons ayant trait à la protection de l’environnement » ( 23 ). Partant, la directive 2003/96 n’exclut pas tout risque de double taxation ( 24 ), les États membres ayant la possibilité d’ajouter à la taxe sur l’électricité une taxe supplémentaire sur les combustibles indésirables du point de vue de l’environnement ( 25 ). Néanmoins, par
parallélisme avec la jurisprudence citée au point 35 des présentes conclusions, l’article 14, paragraphe 1, sous a), deuxième phrase, de cette directive ne saurait être interprété de manière extensive, sous peine de priver la taxation harmonisée instituée par ladite directive de tout effet utile.

38. En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que la loi 22/2005, qui a transposé dans l’ordre juridique espagnol la directive 2003/96, a introduit la taxe sur le charbon. À cette fin, la loi 38/1992, telle que modifiée, disposait notamment, à son article 79, paragraphe 2, qu’étaient exonérées d’accise les opérations constituant une mise à la consommation de charbon lorsqu’elles impliquent l’utilisation du charbon aux fins, notamment, de la production d’électricité ainsi que de la
cogénération d’électricité et de chaleur. Cette disposition a été supprimée par la loi 15/2012, laquelle a invoqué des motifs tirés de la protection de l’environnement, avec la conséquence que la taxe sur le charbon est devenue applicable à l’utilisation du charbon pour la production d’électricité et la cogénération d’électricité et de chaleur. Par ailleurs, la loi 15/2012 a augmenté le montant de la taxe sur le charbon, laquelle est passée de 0,15 euro à 0,65 euro par gigajoule.

39. En ce sens, comme cela est mentionné explicitement dans le préambule de la loi 15/2012, le Royaume d’Espagne a entendu mettre en œuvre la faculté prévue à l’article 14, paragraphe 1, sous a), deuxième phrase, de la directive 2003/96, en vue d’introduire, par dérogation au régime d’exonération institué par la première phrase de cette disposition, un régime de taxation « pour des raisons ayant trait à la protection de l’environnement » en ce qui concerne le charbon utilisé pour la production
d’électricité. Cet État membre a ainsi prévu une double taxation de l’électricité, à savoir, d’une part, du charbon utilisé pour la production d’électricité et, d’autre part, de l’électricité distribuée.

40. Dans ce contexte, la juridiction de renvoi cherche à savoir si l’application de la taxe sur le charbon au charbon utilisé pour la production d’électricité est conforme à l’article 14, paragraphe 1, sous a), deuxième phrase, de la directive 2003/96 en ce que cette taxe a bien été instaurée pour des raisons ayant trait à la protection de l’environnement. À cet égard, cette juridiction s’est référée à la jurisprudence de la Cour relative à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118, aux
termes duquel les États membres peuvent, à des fins spécifiques, prélever des taxes indirectes supplémentaires sur les produits soumis à accise, à condition que ces impositions respectent les règles de taxation de l’Union applicables à l’accise ou à la TVA. Ladite juridiction se demande si la taxe sur le charbon poursuit une « finalité spécifique », laquelle serait exigée de façon identique dans le cadre de l’application de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118 et dans celle de
l’article 14, paragraphe 1, sous a), deuxième phrase, de la directive 2003/96.

41. Au regard des interrogations de la juridiction de renvoi, j’estime utile de rappeler la jurisprudence de la Cour relative à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118, avant d’examiner si celle-ci peut être appliquée par analogie à l’article 14, paragraphe 1, sous a), deuxième phrase, de la directive 2003/96.

42. Ainsi que la Cour l’a relevé, l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118, qui vise à tenir compte de la diversité des traditions fiscales des États membres en la matière et du recours fréquent aux impositions indirectes pour la mise en œuvre de politiques non budgétaires, permet aux États membres d’établir, en sus de l’accise minimale, d’autres impositions indirectes poursuivant une finalité spécifique ( 26 ). La notion de « taxes indirectes supplémentaires », au sens de cette
disposition, désigne ainsi les taxes indirectes qui frappent la consommation des produits énumérés à l’article 1er, paragraphe 1, de cette directive, autres que les « droits d’accise », au sens de cette dernière disposition, et qui sont prélevées à des fins spécifiques ( 27 ).

43. Selon la jurisprudence de la Cour, conformément à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118, les États membres peuvent prélever des taxes indirectes supplémentaires sur les produits soumis à accise à deux conditions. D’une part, de telles taxes doivent être prélevées à des fins spécifiques et, d’autre part, ces impositions doivent respecter les règles de taxation de l’Union applicables à l’accise ou à la TVA pour la détermination de la base d’imposition, ainsi que pour le calcul,
l’exigibilité et le contrôle de l’impôt, ces règles n’incluant pas les dispositions relatives aux exonérations. Ces deux conditions, qui visent à éviter les impositions indirectes supplémentaires entravant indûment les échanges, revêtent, ainsi qu’il ressort du libellé même de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118, un caractère cumulatif ( 28 ).

44. S’agissant de la première condition, il ressort de la jurisprudence constante de la Cour qu’une fin spécifique au sens de cette disposition est une finalité autre que purement budgétaire. Cependant, dès lors que toute taxe poursuit nécessairement une finalité budgétaire, la seule circonstance qu’une taxe vise un objectif budgétaire ne saurait, en tant que telle, sauf à vider l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118 de toute substance, suffire à exclure que cette taxe puisse être
considérée comme ayant également une finalité spécifique au sens de cette disposition. Ainsi, afin d’être considérée comme poursuivant une finalité spécifique, au sens de ladite disposition, une taxe doit viser, par elle-même, à assurer la finalité spécifique invoquée ( 29 ). Tel est en particulier le cas si le produit de cette taxe doit obligatoirement être utilisé afin de réduire les coûts environnementaux liés de manière spécifique à la consommation de l’électricité grevée par ladite taxe et
de promouvoir la cohésion territoriale et sociale, de telle sorte qu’il existe un lien direct entre l’utilisation des recettes et la finalité de l’imposition en question ( 30 ).

45. Toujours selon la jurisprudence constante de la Cour, si l’affectation prédéterminée du produit d’une taxe au financement de l’exercice, par les autorités d’un État membre, de compétences qui leur sont dévolues peut constituer un élément à prendre en compte afin d’identifier l’existence d’une fin spécifique, une telle affectation, qui relève d’une simple modalité d’organisation interne du budget d’un État membre, ne saurait, en tant que telle, constituer une condition suffisante, tout État
membre pouvant décider d’imposer, quelle que soit la finalité poursuivie, l’affectation du produit d’une taxe au financement de dépenses déterminées. S’il en était autrement, toute finalité pourrait être considérée comme spécifique au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118, ce qui priverait l’accise harmonisée instituée par cette directive de tout effet utile et irait à l’encontre du principe selon lequel une disposition dérogatoire, telle que cet article 1er,
paragraphe 2, doit faire l’objet d’une interprétation stricte ( 31 ).

46. Enfin, en l’absence d’un tel mécanisme d’affectation prédéterminée des recettes, une redevance frappant des produits soumis à accise ne saurait être considérée comme poursuivant une fin spécifique, au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118, que si cette redevance est conçue, en ce qui concerne sa structure, notamment la matière imposable ou le taux d’imposition, d’une manière telle qu’elle influence le comportement des contribuables dans un sens permettant la réalisation
de la fin spécifique invoquée, par exemple en taxant fortement les produits considérés afin de décourager leur consommation ( 32 ) ou en encourageant l’utilisation d’autres produits dont les effets sont moins nocifs pour l’environnement ( 33 ).

47. Eu égard à cette jurisprudence de la Cour, il me paraît important de bien distinguer, d’une part, les taxes imposées dans le cadre de la directive 2003/96 et, d’autre part, les taxes indirectes supplémentaires sur les produits soumis à accise mentionnées à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118. Comme l’énonce l’article 1er, paragraphe 1, de cette dernière directive, celle-ci établit le régime général des droits d’accise frappant directement ou indirectement la consommation de
certains produits soumis à accise, au nombre desquels figurent les « produits énergétiques et l’électricité relevant de la directive [2003/96] ». En d’autres termes, les produits énergétiques, lorsqu’ils relèvent de la directive 2003/96, sont soumis à la taxation dans les conditions prévues par cette directive, les États membres pouvant établir, en sus de cette taxation, d’autres impositions indirectes poursuivant une finalité spécifique, au titre de l’article 1er, paragraphe 2, de la
directive 2008/118.

48. En l’occurrence, il n’est pas contesté que la taxe sur le charbon relève de la directive 2003/96. Ainsi, la juridiction de renvoi a souligné que cette taxe a été introduite par la loi 22/2005 qui a transposé cette directive dans l’ordre juridique espagnol. Dans le même sens, le gouvernement espagnol a fait valoir que l’article 2 de ladite directive énonce que, aux fins de celle-ci, la notion de « produits énergétiques » comprend ceux relevant des codes de la nomenclature combinée NC 2701, 2702
et 2704 à 2715, qui concernent le charbon, et que l’article 75 de la loi 38/1992 dispose que les produits relevant des codes NC 2701, 2702, 2704, 2708, 2713 et 2714 sont considérés comme du charbon, avec la conséquence que la taxe sur le charbon entre dans le champ d’application de la directive 2003/96.

49. Selon la juridiction de renvoi et Endesa, les directives 2003/96 et 2008/118 fixent des exigences qui peuvent être considérées comme équivalentes pour la taxation des produits énergétiques soumis à accise en ce que les raisons ayant trait à la protection de l’environnement, au sens de la première directive, constitueraient l’une des finalités spécifiques visées par la seconde directive. Je ne suis pas d’accord avec cette interprétation. En effet, ainsi que cela a été souligné au point 47 des
présentes conclusions, le régime de taxation établi par ces directives présente des différences, le premier étant obligatoire et le second facultatif, soumis au respect de certaines conditions. À cet égard, il importe de constater que le libellé de l’article 14, paragraphe 1, sous a), deuxième phrase, de la directive 2003/96 ne fait pas mention de la nécessité de l’existence de « fins spécifiques ». Dès lors, à mon sens, la jurisprudence de la Cour portant sur la « finalité spécifique » que doit
poursuivre une taxe indirecte supplémentaire sur les produits soumis à accise, au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118, ne peut être appliquée par analogie à une taxe relevant de l’article 14, paragraphe 1, sous a), deuxième phrase, de la directive 2003/96. Cette analyse est parfaitement cohérente avec la jurisprudence de la Cour relative à l’article 1er, paragraphe 3, de la directive 2008/118, qui subordonne la possibilité pour les États membres de prélever des taxes
sur des produits autres que ceux soumis au régime de l’accise harmonisée à la seule condition que ces prélèvements n’entraînent pas de formalités liées au passage des frontières dans le cadre des échanges entre États membres. En effet, comme l’a relevé la Cour, à la différence de l’article 1er, paragraphe 2, de cette directive, lu à la lumière du considérant 4 ( 34 ) de celle-ci, ledit article 1er, paragraphe 3, ne prévoit pas que les taxes visées doivent être des taxes autres que l’accise
harmonisée ou qu’elles doivent poursuivre des finalités spécifiques ( 35 ).

50. Partant, dans le cadre de l’article 14, paragraphe 1, sous a), deuxième phrase, de la directive 2003/96, il n’y a pas lieu, notamment, de vérifier s’il existe un lien direct entre l’utilisation des recettes et la finalité de l’imposition en question ( 36 ). Il convient uniquement d’examiner les motifs de la taxe concernée, à savoir si elle a été effectivement instaurée « pour des raisons ayant trait à la protection de l’environnement », ces raisons constituant une notion autonome du droit de
l’Union. À cet égard, je suis d’avis qu’il est néanmoins possible de s’inspirer de la jurisprudence de la Cour relative à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118 en considérant qu’une taxe participe à la protection de l’environnement si elle est conçue, en ce qui concerne sa structure, notamment la matière imposable ou le taux d’imposition, d’une manière telle qu’elle influence le comportement des contribuables dans un sens permettant d’assurer une meilleure protection de
l’environnement, par exemple en taxant fortement les produits considérés afin de décourager leur consommation ou en encourageant l’utilisation d’autres produits dont les effets sont moins nocifs pour l’environnement ( 37 ).

51. Une telle interprétation est corroborée par le règlement (UE) no 651/2014 ( 38 ), relatif aux catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur ( 39 ). Aux termes de l’article 44, paragraphe 1, de ce règlement, les régimes d’aides sous forme de réductions de taxes environnementales qui remplissent les conditions fixées par la directive 2003/96 sont compatibles avec le marché intérieur au sens de l’article 107, paragraphe 3, TFUE et sont exemptés de l’obligation de notification prévue à
l’article 108, paragraphe 3, TFUE, pour autant que certaines conditions soient remplies. Or, l’article 2, point 119, dudit règlement définit une « taxe environnementale » comme une « taxe dont la base imposable spécifique a manifestement un effet négatif sur l’environnement ou qui vise à taxer certaines activités, certains biens ou certains services de manière que les prix de ces derniers incluent les coûts environnementaux et/ou à ce que les fabricants et les consommateurs soient orientés vers
des activités qui respectent davantage l’environnement ».

52. En l’espèce, la juridiction de renvoi cherche à savoir si la taxation de la consommation du charbon utilisé pour la production d’électricité, telle que prévue par la législation nationale, est conforme à la directive 2003/96. À cet égard, il convient de relever que, lorsque la Cour est saisie d’un renvoi préjudiciel visant à déterminer si une imposition a été instaurée par un État membre pour des raisons ayant trait à la protection de l’environnement, au sens de l’article 14, paragraphe 1,
sous a), deuxième phrase, de cette directive, sa fonction consiste davantage à éclairer la juridiction nationale sur les critères dont la mise en œuvre permettra à cette dernière de déterminer si cette imposition poursuit effectivement une telle finalité qu’à procéder elle-même à cette évaluation, et ce d’autant plus qu’elle ne dispose pas nécessairement de tous les éléments indispensables à cet égard ( 40 ).

53. Dans cette perspective, premièrement, la juridiction de renvoi souligne que la législation espagnole, en prévoyant la taxation du charbon utilisé pour la production d’électricité, prétend avoir pour objectif la protection de l’environnement. Endesa, quant à elle, estime que cette justification n’est qu’apparente, en vue de respecter le droit de l’Union, alors que le véritable objectif de la loi 15/2012 était exclusivement d’augmenter les recettes fiscales. À ce propos, je note que, dans sa
décision, la juridiction de renvoi a cité une partie du préambule de cette loi ( 41 ), dont il ressort que le législateur espagnol a entendu, par l’adoption de celle-ci, protéger l’environnement. Le Royaume d’Espagne a ainsi motivé l’adoption de la taxe sur le charbon par « des raisons ayant trait à la protection de l’environnement ». Néanmoins, ainsi qu’il a été énoncé au point 50 des présentes conclusions, encore faut-il, pour se conformer à l’article 14, paragraphe 1, sous a), deuxième
phrase, de la directive 2003/96, que la taxe concernée assure effectivement une meilleure protection de l’environnement.

54. Deuxièmement, la juridiction de renvoi considère, en se référant à la seconde disposition additionnelle de la loi 15/2012, que la taxe sur le charbon a une finalité exclusivement budgétaire, à savoir celle de financer les coûts du système électrique espagnol. Un tel argument se rattache à l’interprétation de la notion de « fins spécifiques », au sens de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118. Cependant, ainsi que cela a été mentionné aux points 49 et 50 des présentes conclusions,
il n’y a pas lieu d’appliquer cette notion dans le cadre de l’article 14, paragraphe 1, sous a), deuxième phrase, de la directive 2003/96 et, notamment, de vérifier s’il existe un lien direct entre l’utilisation des recettes et la finalité de la taxe sur le charbon. J’ajoute que le gouvernement espagnol a fait valoir que cette seconde disposition additionnelle ne fait pas référence à la taxe sur le charbon et que les impôts visés par ladite disposition sont les trois nouveaux impôts instaurés
par la loi 15/2012 ( 42 ). Par conséquent, selon ce gouvernement, en tout état de cause, la taxe sur le charbon ne relèverait pas de la seconde disposition additionnelle de cette loi.

55. Troisièmement, la juridiction de renvoi soutient que la structure de la taxe sur le charbon ne reflète pas l’objectif environnemental annoncé dans le préambule de la loi 15/2012 en ce que le taux de cette taxe est fixé en fonction du pouvoir calorifique du charbon utilisé pour la production d’électricité. À cet égard, je tiens à souligner que l’article 10, paragraphe 1, de la directive 2003/96 dispose que, à partir du 1er janvier 2004, les niveaux minima de taxation applicables à l’électricité
sont fixés conformément à l’annexe I, tableau C, de cette directive, pour la consommation professionnelle et non professionnelle. Or, s’agissant de la houille et du coke, plusieurs versions linguistiques de ce tableau C, intitulé « Niveaux minima de taxation applicables aux combustibles et à l’électricité », à savoir, notamment, les versions en langue allemande, estonienne, anglaise, croate, lettone, lituanienne, hongroise, maltaise, polonaise, roumaine et slovène, font explicitement référence
au « pouvoir calorifique brut » de la houille et du coke. Dès lors, même si la version en langue espagnole dudit tableau C ne fait pas mention de ce pouvoir calorifique, le fait que le législateur espagnol ait pris comme référence celui-ci pour la taxation de l’utilisation du charbon ne remet pas en cause le fait que la taxe sur le charbon puisse avoir été adoptée pour des raisons ayant trait à la protection de l’environnement.

56. Quatrièmement, la juridiction de renvoi expose que le produit de la taxe sur le charbon n’est pas destiné à réduire l’impact sur l’environnement de l’utilisation du charbon pour la production d’électricité. Cependant, ainsi qu’il ressort du point 50 des présentes conclusions, une taxe participe à la protection de l’environnement si elle est conçue, en ce qui concerne sa structure, notamment la matière imposable ou le taux d’imposition, d’une manière telle qu’elle influence le comportement des
contribuables dans un sens permettant d’assurer une meilleure protection de l’environnement, par exemple en taxant fortement les produits considérés afin de décourager leur consommation ou en encourageant l’utilisation d’autres produits dont les effets sont moins nocifs pour l’environnement. Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si, en l’occurrence, tel est le cas pour la taxe sur le charbon. À cet égard, il me paraît opportun de relever que la combinaison de la suppression de
l’exonération de la taxe sur le charbon et de l’augmentation du taux d’imposition de celle-ci constitue un moyen susceptible de contribuer à décourager l’utilisation du charbon pour la production d’électricité et à promouvoir d’autres sources d’énergie moins polluantes et que, selon la Commission, dans la pratique, la suppression de cette exonération semble avoir effectivement eu une incidence sur le volume d’énergie électrique produit à partir du charbon en Espagne.

57. Cinquièmement, la juridiction de renvoi se demande si l’objectif environnemental est atteint par le simple fait que des taxes sont prélevées sur certains produits énergétiques non renouvelables et non sur l’utilisation de ceux qui sont considérés comme moins nocifs pour l’environnement. S’agissant de cette question, il ressort du point précédent des présentes conclusions que, dès lors qu’une taxe décourage la consommation d’un produit nocif pour l’environnement ou encourage l’utilisation
d’autres produits dont les effets sont moins nocifs pour l’environnement, elle participe à la protection de l’environnement. En l’occurrence, le gouvernement espagnol a estimé que le charbon constituait une énergie polluante qu’il convenait de taxer lorsqu’il est utilisé pour la production d’électricité. En ce sens, je considère que, en décourageant la consommation de charbon, dont il est constant que celui-ci est très nocif pour l’environnement ( 43 ), ce gouvernement a visé à la protection de
l’environnement, au sens de l’article 14, paragraphe 1, sous a), deuxième phrase, de la directive 2003/96.

58. Enfin, sixièmement, Endesa fait valoir que, si la taxe sur le charbon a été instaurée, le gouvernement espagnol a ensuite rétabli l’exonération des hydrocarbures utilisés dans la production d’électricité, ce qui démontrerait l’absence de réelle finalité environnementale. Cependant, selon moi, l’examen d’une taxe au regard de l’article 14, paragraphe 1, sous a), deuxième phrase, de la directive 2003/96 doit se faire au cas par cas. Dès lors que cette taxe a été établie « pour des raisons ayant
trait à la protection de l’environnement », elle entre dans le cadre de cette disposition même si, dans le même temps, d’autres produits polluants utilisés pour la production d’électricité ne sont pas taxés.

59. Eu égard à tout ce qui précède, je suis d’avis que l’article 14, paragraphe 1, sous a), de la directive 2003/96 doit être interprété en ce sens qu’une législation nationale prévoyant la taxation du charbon utilisé pour la production d’électricité répond à la condition selon laquelle la taxe doit être instaurée « pour des raisons ayant trait à la protection de l’environnement » lorsque, dans la situation où le législateur national a invoqué pour l’adoption de cette taxe l’objectif de protection
de l’environnement, une finalité environnementale n’est pas intégrée dans la structure de ladite taxe, dont le taux est fixé en fonction du pouvoir calorifique du charbon, le produit de la même taxe est affecté au financement des coûts du système électrique national et l’utilisation d’autres produits énergétiques considérés comme moins nocifs pour l’environnement n’est pas taxée.

V. Conclusion

60. Au vu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par l’Audiencia Nacional (Cour centrale, Espagne) de la manière suivante :

L’article 14, paragraphe 1, sous a), de la directive 2003/96/CE du Conseil, du 27 octobre 2003, restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l’électricité,

doit être interprété en ce sens que :

une législation nationale prévoyant la taxation du charbon utilisé pour la production d’électricité répond à la condition selon laquelle la taxe doit être instaurée « pour des raisons ayant trait à la protection de l’environnement » lorsque, dans la situation où le législateur national a invoqué pour l’adoption de cette taxe l’objectif de protection de l’environnement, une finalité environnementale n’est pas intégrée dans la structure de ladite taxe, dont le taux est fixé en fonction du pouvoir
calorifique du charbon, le produit de la même taxe est affecté au financement des coûts du système électrique national et l’utilisation d’autres produits énergétiques considérés comme moins nocifs pour l’environnement n’est pas taxée.

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( 1 ) Langue originale : le français.

( 2 ) Directive du Conseil du 27 octobre 2003 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l’électricité (JO 2003, L 283, p. 51).

( 3 ) Nomenclature combinée.

( 4 ) JO 2001, L 279, p. 1.

( 5 ) Directive du Conseil du 25 février 1992 relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accise (JO 1992, L 76, p. 1).

( 6 ) Directive du Conseil du 16 décembre 2008 relative au régime général d’accise et abrogeant la directive 92/12/CEE (JO 2009, L 9, p. 12).

( 7 ) BOE no 277, du 19 novembre 2005, p. 37821.

( 8 ) BOE no 312, du 29 décembre 1992, p. 44305.

( 9 ) Règlement du 23 juillet 1987 relatif à la nomenclature tarifaire et statistique et au tarif douanier commun (JO 1987, L 256, p. 1).

( 10 ) BOE no 312, du 28 décembre 2012, p. 88081.

( 11 ) Il ressort de la décision de renvoi que le Real Decreto-ley 9/2013 por el que se adoptan medidas urgentes para garantizar la estabilidad financiera del sistema eléctrico (décret-loi royal 9/2013 portant mesures urgentes afin de garantir la stabilité financière du système électrique), du 12 juillet 2013 (BOE no 167, du 13 juillet 2013, p. 52106) a ultérieurement introduit, à l’article 84 de la loi 38/1992, un taux d’accise réduit (0,15 euro par gigajoule) pour le charbon à usage commercial, à
condition que celui-ci ne soit pas utilisé pour des processus de cogénération et de production directe ou indirecte d’électricité.

( 12 ) Dans ses observations écrites, Endesa fait valoir que l’exonération relative aux hydrocarbures a été supprimée par la loi 15/2012 mais rétablie par le Real Decreto-Ley 15/2018 de medidas urgentes para la transición energética y la protección de los consumidores (décret-loi royal 15/2018 sur les mesures urgentes pour la transition énergétique et la protection des consommateurs), du 5 octobre 2018 (BOE no 242, du 6 octobre 2018, p. 97430).

( 13 ) BOE no 285, du 28 novembre 1997, p. 35097.

( 14 ) Cette disposition a été modifiée une première fois par la Ley 24/2013 del Sector Eléctrico (loi 24/2013 relative au secteur de l’électricité), du 26 décembre 2013 (BOE no 310, du 27 décembre 2013, p. 105198).

( 15 ) Arrêt du 31 mars 2022, Commission/Pologne (Taxation des produits énergétiques) (C‑139/20, EU:C:2022:240, point 39).

( 16 ) Voir arrêt du 14 janvier 2021, Commission/Italie (Contribution à l’achat de carburants) (C‑63/19, EU:C:2021:18, point 75 et jurisprudence citée), ainsi que mes conclusions dans l’affaire RWE Power (C‑571/21, EU:C:2022:780, points 25 et 26).

( 17 ) JO 1997, C 139, p. 14.

( 18 ) Voir arrêt du 16 octobre 2019, UPM France (C‑270/18, EU:C:2019:862, point 38 et jurisprudence citée), ainsi que mes conclusions dans l’affaire RWE Power (C‑571/21, EU:C:2022:780, point 47).

( 19 ) Arrêt du 16 octobre 2019, UPM France (C‑270/18, EU:C:2019:862, point 39 et jurisprudence citée).

( 20 ) Arrêt du 7 mars 2018, Cristal Union (C‑31/17, EU:C:2018:168, points 24 et 25 ainsi que jurisprudence citée).

( 21 ) Arrêt du 7 mars 2018, Cristal Union (C‑31/17, EU:C:2018:168, point 26 et jurisprudence citée).

( 22 ) Voir arrêt du 30 janvier 2020, Autoservizi Giordano (C‑513/18, EU:C:2020:59, point 32 et jurisprudence citée), ainsi que mes conclusions dans l’affaire RWE Power (C‑571/21, EU:C:2022:780, points 46 et 48).

( 23 ) Voir, en ce sens, arrêt du 16 octobre 2019, UPM France (C‑270/18, EU:C:2019:862, point 52 et jurisprudence citée). Je relève que la Commission a présenté, le 14 juillet 2021, une nouvelle proposition de directive du Conseil restructurant le cadre de l’Union de taxation des produits énergétiques et de l’électricité [COM(2021) 563 final]. Selon cette proposition, l’article 14 de la directive 2003/96 serait abrogé. Cependant, le nouvel article 13 de cette directive, tel qu’il est proposé,
reprendrait, en substance, le contenu actuel de l’article 14, paragraphe 1, sous a), de ladite directive.

( 24 ) Voir, en ce sens, arrêt du 7 mars 2018, Cristal Union (C‑31/17, EU:C:2018:168, point 32 et jurisprudence citée).

( 25 ) Voir, en ce sens, arrêt du 4 juin 2015, Kernkraftwerke Lippe-Ems (C‑5/14, EU:C:2015:354, point 51).

( 26 ) Ordonnance du 7 février 2022, Vapo Atlantic (C‑460/21, EU:C:2022:83, point 20 et jurisprudence citée).

( 27 ) Arrêt du 3 mars 2021, Promociones Oliva Park (C‑220/19, EU:C:2021:163, point 48 et jurisprudence citée).

( 28 ) Ordonnance du 7 février 2022, Vapo Atlantic (C‑460/21, EU:C:2022:83, points 21 et 22 ainsi que jurisprudence citée).

( 29 ) Ordonnance du 7 février 2022, Vapo Atlantic (C‑460/21, EU:C:2022:83, points 23 à 25 et jurisprudence citée).

( 30 ) Arrêt du 25 juillet 2018, Messer France (C‑103/17, EU:C:2018:587, point 38 et jurisprudence citée).

( 31 ) Ordonnance du 7 février 2022, Vapo Atlantic (C‑460/21, EU:C:2022:83, point 26 et jurisprudence citée).

( 32 ) Ordonnance du 7 février 2022, Vapo Atlantic (C‑460/21, EU:C:2022:83, point 27 et jurisprudence citée).

( 33 ) Voir, en ce sens, arrêt du 27 février 2014, Transportes Jordi Besora (C‑82/12, EU:C:2014:108, point 32). Sur l’approche suivie par la Cour s’agissant de l’interprétation de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 2008/118, voir Pitrone, F., « Defining “Environmental Taxes” : Input from the Court of Justice of the European Union », Bulletin for International Taxation, vol. 69, no 1, 2015, p. 58 à 64. Sur l’existence d’une « finalité spécifique » non budgétaire, voir conclusions de
l’avocat général Wahl dans l’affaire Transportes Jordi Besora (C‑82/12, EU:C:2013:694, points 17 à 32).

( 34 ) Aux termes de ce considérant, « [l]es produits soumis à accise peuvent faire l’objet d’autres impositions indirectes poursuivant des finalités spécifiques. Dans ce cas, toutefois, et afin de ne pas compromettre l’utilité de la réglementation communautaire relative aux impositions indirectes, il convient que les États membres respectent certains éléments essentiels de cette réglementation ».

( 35 ) Voir arrêt du 12 février 2015, Oil Trading Poland (C‑349/13, EU:C:2015:84, points 33 et 34). La Cour en a déduit que l’article 1er, paragraphe 3, de la directive 2008/118 ne s’oppose pas, en tant que tel, à ce que les États membres frappent des produits autres que ceux soumis au régime de l’accise harmonisée d’une taxe régie par des règles identiques à celles relatives à ce régime.

( 36 ) Voir jurisprudence citée au point 44 des présentes conclusions.

( 37 ) Dans le même sens, je relève que, dans mes conclusions dans l’affaire RWE Power (C‑571/21, EU:C:2022:780, point 48), j’ai indiqué, quant à l’objectif ayant trait à la protection de l’environnement, qu’il est constant que la production d’électricité à partir du lignite comporte de nombreuses obligations imposées par les règles environnementales, qui visent à faire l’usage le plus propre possible des produits énergétiques et qu’il ne saurait donc être exclu que l’exonération en cause dans cette
affaire puisse affecter la mise en œuvre de ces obligations, lorsque celles-ci impliquent le traitement du produit énergétique en utilisant de l’électricité, afin de rendre possible une production d’énergie plus verte.

( 38 ) Règlement de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité (JO 2014, L 187, p. 1).

( 39 ) Sur le lien entre la directive 2003/96 et les aides d’État visées à l’article 107 TFUE, voir Villar Ezcurra, M., et Fonseca Capdevila, E., « Parafiscal charges and contributions to general electricity networks : a legal analysis of its nature under the scope of Directive 2003/96 and the EU State aids regime », dans Weishaar, S. E., The Green Market Transition : Carbon Taxes, Energy Subsidies and Smart Instrument Mixes, Edward Elgar Publishing, Cheltenham, 2017, p. 143 à 156.

( 40 ) Voir, par analogie, ordonnance du 7 février 2022, Vapo Atlantic (C‑460/21, EU:C:2022:83, point 28 et jurisprudence citée).

( 41 ) Voir point 16 des présentes conclusions.

( 42 ) Voir point 18 des présentes conclusions.

( 43 ) Voir, notamment, troisième partie du sixième rapport d’évaluation du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), publiée au mois d’avril 2022, dont un résumé (en anglais) est consultable à l’adresse suivante : https://www.ipcc.ch/report/ar6/wg3/downloads/report/IPCC_AR6_WGIII_SummaryForPolicymakers.pdf.


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : C-833/21
Date de la décision : 02/02/2023
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Renvoi préjudiciel – Taxation des produits énergétiques et de l’électricité – Directive 2003/96/CE – Article 14, paragraphe 1, sous a) – Exonération des produits énergétiques utilisés pour produire de l’électricité – Dérogation – Taxation des produits énergétiques pour des “raisons ayant trait à la protection de l’environnement” – Portée.

Énergie

Fiscalité


Parties
Demandeurs : Endesa Generación SAU
Défendeurs : Tribunal Económico Administrativo Central.

Composition du Tribunal
Avocat général : Rantos

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2023:66

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