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22/12/2022 | CJUE | N°C-404/21

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, WP contre Istituto nazionale della previdenza sociale et Repubblica italiana., 22/12/2022, C-404/21


 ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

22 décembre 2022 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Personnel de la Banque centrale européenne (BCE) – Transfert de droits à pension acquis dans un régime national de pensions au régime de pension de la BCE – Article 4, paragraphe 3, TUE – Principe de coopération loyale – Conditions d’emploi de la BCE – Article 8 de l’annexe III bis – Absence d’une disposition du droit national ou d’un accord conclu entre l’État membre concerné et la BCE »

Dans l’affaire C‑404/21,

ayant po

ur objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunale ordinario di A...

 ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

22 décembre 2022 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Personnel de la Banque centrale européenne (BCE) – Transfert de droits à pension acquis dans un régime national de pensions au régime de pension de la BCE – Article 4, paragraphe 3, TUE – Principe de coopération loyale – Conditions d’emploi de la BCE – Article 8 de l’annexe III bis – Absence d’une disposition du droit national ou d’un accord conclu entre l’État membre concerné et la BCE »

Dans l’affaire C‑404/21,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunale ordinario di Asti (tribunal ordinaire d’Asti, Italie), par décision du 13 janvier 2021, parvenue à la Cour le 30 juin 2021, dans la procédure

WP

contre

Istituto nazionale della previdenza sociale,

Repubblica italiana,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. E. Regan, président de chambre, MM. D. Gratsias (rapporteur), M. Ilešič, I. Jarukaitis et Z. Csehi, juges,

avocat général : M. P. Pikamäe,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

– pour WP, par Mes A. Dal Ferro, R. Ponchione, A. Rela et C. Zerbaro, avvocati,

– pour l’Istituto nazionale della previdenza sociale, par Mes A. Coretti, C. d’Aloisio et L. Maritato, avvocati,

– pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. G. Rocchitta, avvocato dello Stato,

– pour le gouvernement hellénique, par Mme M. Tassopoulou, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement espagnol, par Mme M. J. Ruiz Sánchez, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna, en qualité d’agent,

– pour le gouvernement portugais, par Mme P. Barros da Costa, M. L. Barroso, Mmes S. Jaulino et M. J. Ramos, en qualité d’agents,

– pour la Commission européenne, par Mme S. Delaude, MM. G. Gattinara, B.-R. Killmann et B. Mongin, en qualité d’agents,

– pour la Banque centrale européenne (BCE), par Mme B. Ehlers, M. F. Malfrère, Mmes A. Pizzolla et C. Zilioli, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 7 juillet 2022,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 4, paragraphe 3, TUE, des articles 45 et 48 TFUE, de l’article 11 de l’annexe VIII du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») ainsi que de l’article 8 de l’annexe III bis de la décision de la Banque centrale européenne (BCE), du 9 juin 1998, relative à l’adoption des conditions d’emploi du personnel de la Banque centrale européenne, telle que modifiée le 31 mars 1999 (JO 1999, L 125,
p. 32).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant WP à l’Istituto nazionale della previdenza sociale (Institut national de la prévoyance sociale, Italie) (ci‑après l’« INPS ») ainsi qu’à la Repubblica italiana (République italienne) au sujet du transfert au régime de pension de la Banque centrale européenne (BCE) de l’équivalent actuariel correspondant aux droits à pension constitués en faveur du requérant au principal dans le cadre du Fondo Pensioni Lavoratori Dipendenti (fonds de
pension des travailleurs salariés) de l’INPS.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

Le protocole sur le SEBC et la BCE

3 L’article 36, paragraphe 1, du protocole (no 4) sur les statuts du Système européen de banques centrales et de la Banque centrale européenne (JO 2016, C 202, p. 230, ci-après le « protocole sur le SEBC et la BCE »), dispose :

« Le conseil des gouverneurs [de la BCE] arrête, sur proposition du directoire, le régime applicable au personnel de la BCE. »

Le protocole sur les privilèges et immunités

4 L’article 14 du protocole (no 7) sur les privilèges et immunités de l’Union européenne (JO 2016, C 202, p. 266, ci-après le « protocole sur les privilèges et immunités ») énonce :

« Le Parlement européen et le Conseil [de l’Union européenne], statuant par voie de règlements conformément à la procédure législative ordinaire et après consultation des institutions concernées, fixent le régime des prestations sociales applicables aux fonctionnaires et autres agents de l’Union [européenne]. »

5 En vertu de son article 22, premier alinéa, le protocole sur les privilèges et immunités s’applique également à la BCE, aux membres de ses organes et à son personnel, sans préjudice des dispositions du protocole sur le SEBC et la BCE.

Le statut

6 Aux termes de son article 1er, le statut s’applique aux fonctionnaires de l’Union.

7 L’article 1er bis, paragraphe 1, du statut énonce :

« Est fonctionnaire de l’Union au sens du présent statut toute personne qui a été nommée dans les conditions prévues à ce statut dans un emploi permanent d’une des institutions de l’Union par un acte écrit de l’autorité investie du pouvoir de nomination de cette institution. »

8 L’annexe VIII du statut, intitulé « Modalités du régime de pension », dispose à son article 11, paragraphe 2 :

« Le fonctionnaire qui entre au service de l’Union après avoir :

– cessé ses activités auprès d’une administration, d’une organisation nationale ou internationale

ou

– exercé une activité salariée ou non salariée,

a la faculté, entre le moment de sa titularisation et le moment où il obtient le droit à une pension d’ancienneté au sens de l’article 77 du statut, de faire verser à l’Union le capital, actualisé jusqu’à la date du transfert effectif, représentant les droits à pension qu’il a acquis au titre des activités visées ci-dessus.

En pareil cas, l’autorité investie du pouvoir de nomination de l’institution où le fonctionnaire est en service détermine, par voie de dispositions générales d’exécution, compte tenu du traitement de base, de l’âge et du taux de change à la date de la demande de transfert, le nombre d’annuités qu’elle prend en compte d’après le régime de pension de l’Union au titre de la période de service antérieur sur la base du capital transféré, déduction faite du montant qui représente la revalorisation du
capital entre la date de la demande de transfert et celle du transfert effectif.

De cette faculté, le fonctionnaire ne pourra faire usage qu’une seule fois par État membre et par fonds de pension. »

Le RAA

9 L’article 1er du régime applicable aux autres agents de l’Union (ci‑après le « RAA ») dispose :

« Le présent régime s’applique à tout agent engagé par contrat par l’Union. Cet agent a la qualité :

– d’agent temporaire,

– d’agent contractuel,

– [...] »

10 En vertu de l’article 39, paragraphe 2, et de l’article 109, paragraphe 2, du RAA, l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut s’applique par analogie, respectivement, aux agents temporaires et aux agents contractuels.

Les conditions d’emploi de la BCE

11 Sur le fondement, notamment, de l’article 36, paragraphe 1, du protocole sur le SEBC et la BCE, le conseil des gouverneurs de la BCE a adopté, par décision du 9 juin 1998, modifiée le 31 mars 1999, les conditions d’emploi du personnel de la Banque centrale européenne (JO 1999, L 125, p. 32). Dans leur version applicable au litige au principal (ci-après les « conditions d’emploi de la BCE »), ces conditions d’emploi disposent, à leur article 9, sous c) :

« Aucun droit national spécifique ne régit ces conditions d’emploi. La BCE appliquera (i) les principes généraux de droit communs aux États membres, (ii) les principes généraux du droit de l’Union et (iii) les règles figurant dans les règlements et directives de l’Union concernant la politique sociale adressées aux États membres. Chaque fois que cela sera nécessaire, ces actes juridiques seront mis en œuvre par la BCE. Les recommandations de l’Union dans le domaine de la politique sociale seront
dûment prises en considération. Aux fins de l’interprétation des droits et obligations prévus par les présentes conditions d’emploi, il sera tenu compte des principes consacrés par les règlements, les règles et la jurisprudence applicables au personnel d’autres institutions de l’Union. »

12 L’article 8, sous a), de l’annexe III bis des conditions d’emploi de la BCE énonce :

« La BCE conclut des accords et convient de mesures appropriées avec d’autres régimes de retraite, d’autres organisations et gouvernements qu’elle détermine, aux fins de l’acceptation du transfert de sommes d’argent vers le [régime de pension de la BCE], pour les membres ayant achevé leur période d’essai à la BCE. »

Le droit italien

13 L’article 1er de la legge n. 29 – Ricongiunzione dei periodi assicurativi dei lavoratori ai fini previdenziali (loi no 29, portant reconnaissance des périodes d’assurance des travailleurs ouvrant droit à pension), du 7 février 1979 (GURI no 40, du 9 février 1979, p. 1317), dispose :

« Le travailleur salarié du secteur public ou du secteur privé qui est ou a été affilié à des formes obligatoires de prévoyance équivalentes au régime général obligatoire d’assurance invalidité, vieillesse et survivants des travailleurs salariés géré par l’INPS ou qui ont donné lieu à l’exclusion ou à la dispense de cette affiliation a la faculté, aux fins de l’attribution et de la détermination du montant d’une pension unique, de demander à tout moment le regroupement de toutes les périodes de
cotisation obligatoire, volontaire et fictive auprès des susdites formes de prévoyance au moyen de l’affiliation au régime général obligatoire d’assurance et de la constitution, dans le cadre de ce dernier, de droits à pension correspondants. À cette fin, le ou les gestionnaires des régimes de provenance transfèrent au gestionnaire du régime général obligatoire d’assurance le montant des cotisations qu’ils détiennent [...] »

14 L’article 18 de la legge n. 115 – Disposizioni per l’adempimento degli obblighi derivanti dall’appartenenza dell’Italia all’Unione europea – Legge europea 2014 (loi no 115, portant dispositions pour l’exécution des obligations résultant de l’appartenance de l’Italie à l’Union européenne – Loi européenne 2014), du 29 juillet 2015 (GURI no 178, du 3 août 2015, p. 1), dispose :

« 1.   À compter du 1er janvier 2016, les citoyens de l’Union européenne [...] qui sont ou ont été affiliés au régime général obligatoire d’assurance invalidité, vieillesse et survivants des travailleurs salariés [...] ont la possibilité de cumuler les périodes d’assurance accomplies dans le cadre de ces régimes d’assurance avec les périodes d’assurance accomplies auprès d’organisations internationales.

2.   Le cumul visé au paragraphe 1 peut être demandé, si cela est nécessaire pour obtenir le droit à une pension de vieillesse, d’invalidité ou de survie, à condition que la durée totale des périodes d’assurance accomplies sous la législation italienne soit d’au moins cinquante-deux semaines et que les périodes à cumuler ne se superposent pas.

3.   Le cumul des périodes d’assurance peut être effectué sur demande de l’intéressé, à présenter à l’institution italienne de sécurité sociale auprès de laquelle il a accompli des périodes d’assurance. Dans le cas où un ancien salarié d’une organisation internationale acquiert le droit aux prestations prévues par la législation italienne sans qu’il soit nécessaire de cumuler les périodes d’assurance accomplies auprès de l’organisation internationale, l’institution italienne de sécurité sociale
calcule la pension exclusivement sur la base des périodes d’assurance accomplies dans le cadre du régime de pension italien. Dans le cas où un ancien salarié d’une organisation internationale n’acquiert le droit aux prestations prévues par la législation italienne que moyennant le cumul des périodes d’assurance accomplies auprès de l’organisation internationale, l’institution italienne de sécurité sociale prend en considération les périodes d’assurance accomplies dans le cadre du régime de
pension de l’organisation internationale, à l’exception de celles qui ont fait l’objet d’un remboursement, comme si elles avaient été accomplies sous la législation italienne, et calcule le montant de la prestation exclusivement sur la base des périodes d’assurance accomplies sous la législation italienne.

4.   Les prestations de retraite liquidées conformément au présent article sont considérées comme des pensions pour tout ce qui concerne les effets découlant de l’application de la législation italienne.

5.   Les périodes d’emploi auprès d’une organisation internationale peuvent, dans la mesure où elles ne donnent pas droit à une prestation de retraite à la charge du fonds de pension de cette organisation internationale, être rachetées dans le cadre du régime de pension italien conformément à la législation régissant le rachat des périodes d’emploi accomplies à l’étranger. Le droit de rachat est exercé, notamment par les survivants du salarié de l’organisation internationale, dans les conditions
prévues par les règles de l’institution italienne de sécurité sociale à laquelle le rachat est demandé.

[...] »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

15 WP est membre du personnel de la BCE depuis le 1er mars 2012. Entre le 1er août 1982 et le 24 février 2012, en tant que salarié travaillant dans le secteur privé en Italie, des cotisations obligatoires en sa faveur ont été versées au fonds de pension des travailleurs salariés de l’INPS.

16 Le 12 décembre 2016, WP a demandé à l’INPS le transfert, au régime de pension de la BCE, de l’équivalent actuariel correspondant aux droits à pension constitués en sa faveur dans le cadre de ce fonds de pension ou, à titre subsidiaire, du capital actualisé résultant des cotisations de retraite versées audit fonds de pension, tous deux calculés en application des règles régissant les pensions dans le cadre de ce même fonds.

17 L’INPS a rejeté la demande de WP, au motif qu’il n’était pas possible de procéder au transfert demandé en l’absence d’une mesure législative spécifique ou d’un accord bilatéral conclu entre la BCE et la République italienne. Le 28 novembre 2017, WP a introduit un recours administratif contre le rejet de sa demande, lequel a été déclaré irrecevable par décision du 11 avril 2018.

18 Par requête introduite devant le Tribunale ordinario di Asti (tribunal ordinaire d’Asti, Italie), la juridiction de renvoi, WP a, en substance, demandé, à titre principal, à ce qu’il soit constaté que l’INPS et/ou la République italienne étaient tenus d’adopter toutes les mesures nécessaires aux fins du transfert au régime de pension de la BCE de l’équivalent actuariel calculé en application des règles régissant les pensions dans le cadre du fonds de pension des travailleurs salariés de l’INPS,
correspondant aux droits à pension constitués en sa faveur à la date de la présentation de ladite demande, ainsi qu’à ce que l’INPS et/ou la République italienne soient condamnés à adopter toutes les mesures nécessaires aux fins de ce transfert. À titre subsidiaire, WP a demandé à ce qu’il soit constaté et déclaré que l’INPS et/ou la République italienne sont tenus de transférer au régime de pension de la BCE l’équivalent actuariel correspondant aux droits à pension constitués en sa faveur dans
le cadre du fonds de pension des travailleurs salariés de l’INPS, à titre de réparation du préjudice subi, et à ce que l’INPS et/ou la République italienne soient condamnés, par conséquent, à transférer au régime de pension de la BCE le montant correspondant à cet équivalent, à titre de réparation du préjudice subi.

19 La juridiction de renvoi indique qu’il convient d’établir si les dispositions du droit de l’Union, en particulier l’article 4, paragraphe 3, TUE, les articles 45 et 48 TFUE, l’article 11 de l’annexe VIII du statut et l’article 8 de l’annexe III bis des conditions d’emploi de la BCE, doivent être interprétées en ce sens qu’un employé de la BCE peut demander le transfert au régime de pension de celle‑ci des droits à pension qu’il a acquis auprès d’une institution de sécurité sociale d’un État
membre, et ce indépendamment de l’adoption d’une règle nationale de transposition ou de la conclusion entre la BCE et l’État membre ou l’institution nationale de sécurité sociale concernés d’un accord spécifique définissant les modalités de mise en œuvre de ce transfert.

20 À cet égard, elle considère qu’il pourrait être déduit a contrario de l’arrêt du 4 juillet 2013, Gardella (C‑233/12, EU:C:2013:449, points 28 à 30), que, en vertu du droit de l’Union, il existe, dans le cas d’un employé de la BCE, un droit au transfert au régime de pension de la BCE des droits à pension constitués par celui-ci en tant que salarié ayant travaillé dans un État membre, dès lors que, à la différence de l’Office européen des brevets (OEB) concerné par cet arrêt, la BCE est une
institution de l’Union. En outre, l’article 8 de l’annexe III bis des conditions d’emploi de la BCE n’exigerait pas que l’institution de sécurité sociale nationale donne son autorisation pour la réalisation d’un tel transfert.

21 Toutefois, la juridiction de renvoi estime également qu’il pourrait être déduit de l’arrêt du 5 décembre 2013, Časta (C‑166/12, EU:C:2013:792, points 30 à 32), qu’il est nécessaire, pour l’État membre concerné, d’adopter une règle spécifique déterminant le montant du capital correspondant aux droits à pension acquis dans le cadre du régime national de pensions à transférer au régime de pension de l’Union et que, en l’absence d’une telle règle, il ne saurait être recouru aux critères de calcul
prévus par la législation interne ou par des accords conclus entre l’institution nationale concernée et d’autres organes de l’Union.

22 C’est dans ces conditions que le Tribunale ordinario di Asti (tribunal ordinaire d’Asti) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) Les articles 45 et 48 TFUE, l’article 4 TUE, l’article 11 de l’annexe VIII du [statut] et l’article 8 de l’annexe III bis des [conditions d’emploi de la BCE] doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils font obstacle à une législation nationale ou à une pratique administrative nationale qui ne permettent pas à un travailleur d’un État membre qui a accumulé des cotisations auprès de l’institution nationale de sécurité sociale et qui travaille actuellement auprès d’une institution de l’Union
telle que la BCE de transférer au régime de pension de cette dernière institution les cotisations de retraite inscrites à son crédit dans le cadre du régime de prévoyance de son État d’origine ?

2) En fonction notamment de la réponse à la première question, le transfert des cotisations doit-il être rendu possible même en l’absence d’un acte législatif interne de mise en œuvre ou d’un accord spécifique entre l’État membre d’origine du travailleur ou son institution de retraite, d’une part, et l’institution de l’Union, d’autre part ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

23 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 4, paragraphe 3, TUE, les articles 45 et 48 TFUE, l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut et l’article 8, sous a), de l’annexe III bis des conditions d’emploi de la BCE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation ou à une pratique administrative d’un État membre qui ne permet pas à un membre du personnel de la BCE de transférer au régime de pension de celle‑ci un
montant correspondant aux droits à pension qu’il a acquis auprès du régime de pension de cet État membre.

24 S’agissant des articles 45 et 48 TFUE, il ressort, certes, de la jurisprudence constante de la Cour qu’un ressortissant de l’Union, indépendamment de son lieu de résidence et de sa nationalité, qui fait usage du droit à la libre circulation des travailleurs et qui a exercé une activité professionnelle dans un État membre autre que celui dont il est originaire, relève du champ d’application de l’article 45 TFUE, également dans l’hypothèse où il est employé par une institution de l’Union, telle que
la BCE (voir, en ce sens, arrêt du 4 juillet 2013, Gardella, C‑233/12, EU:C:2013:449, point 25 et jurisprudence citée).

25 Toutefois, la Cour a jugé qu’il ne saurait être déduit de l’article 45 TFUE, lu à la lumière de l’article 48 TFUE, l’obligation, pour un État membre, de prévoir la faculté pour un membre du personnel d’une organisation internationale de transférer le capital représentant ses droits à pension acquis préalablement au régime de pension de cette organisation internationale ni l’obligation de conclure une convention internationale à cet effet (arrêt du 4 juillet 2013, Gardella, C‑233/12,
EU:C:2013:449, point 35).

26 En effet, l’article 48, premier alinéa, TFUE prévoit que le Parlement et le Conseil adoptent, dans le domaine de la sécurité sociale, « les mesures nécessaires pour l’établissement de la libre circulation des travailleurs, en instituant notamment un système permettant d’assurer aux travailleurs migrants » la « totalisation, pour l’ouverture et le maintien du droit aux prestations, ainsi que pour le calcul de celles‑ci, de toutes périodes prises en considération par les différentes législations
nationales ».

27 Un tel système de totalisation de périodes a été mis en place par le règlement (CEE) no 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) no 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996 (JO 1997, L 28, p. 1), puis par le règlement (CE) no 883/2004 du Parlement
européen et du Conseil, du 29 avril 2004, portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO 2004, L 166, p. 1).

28 Il en ressort ainsi que le traité FUE ainsi que le règlement no 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement no 118/97, et le règlement no 883/2004 n’ont pas prévu ni ne prévoient de règles concernant le transfert du capital représentant les droits à pension déjà acquis, mais sont fondés sur le principe de la totalisation des périodes, comme cela ressort de l’article 48 TFUE tel que mis en œuvre par ces règlements (voir, en ce sens, arrêt du 4 juillet 2013, Gardella,
C‑233/12, EU:C:2013:449, point 33).

29 En conséquence, une personne dans la situation du requérant au principal ne saurait se fonder sur les articles 45 et 48 TFUE et lesdits règlements pour être autorisée à demander le transfert au régime de pension de la BCE des droits à pension qu’il a acquis auprès de l’INPS.

30 Le fait, évoqué par la juridiction de renvoi, que, à la différence de l’OEB, dont il était question dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 4 juillet 2013, Gardella (C‑233/12, EU:C:2013:449), la BCE soit une institution de l’Union ne saurait justifier une interprétation différente.

31 En effet, si la Cour a certes rappelé, au point 29 de l’arrêt du 4 juillet 2013, Gardella (C‑233/12, EU:C:2013:449), que l’OEB n’est pas une institution ou un organe de l’Union, ce rappel visait uniquement à expliciter le motif pour lequel la faculté, accordée en vertu du statut, de transférer au régime de pension de l’Union le capital représentant les droits à pension acquis au titre des activités antérieures ne saurait être étendue aux fonctionnaires de l’OEB et aux relations entre ce dernier
et un État membre.

32 Or, à l’instar des membres du personnel de l’OEB, le statut, et en particulier l’article 11 de l’annexe VIII de celui‑ci, ne s’applique pas aux membres du personnel de la BCE.

33 En effet, les membres du personnel de la BCE n’ont pas été nommés fonctionnaires de l’Union dans les conditions prévues à l’article 1er bis, paragraphe 1, du statut, de telle sorte que, ainsi qu’il ressort de la lecture combinée de cette disposition et de l’article 1er du statut, celui-ci ne leur est pas applicable.

34 Les membres du personnel de la BCE ne sont pas non plus engagés par contrats conclus avec l’Union, si bien que, conformément à l’article 1er du RAA, celui-ci ne leur est pas applicable. Ils sont engagés par la BCE, laquelle, comme le prévoit l’article 282, paragraphe 3, première phrase, TFUE, est dotée de sa propre personnalité juridique, distincte de celle de l’Union.

35 Le régime qui s’applique au personnel de la BCE est arrêté par le conseil des gouverneurs de celle‑ci, conformément à l’article 36 du protocole sur le SEBC et la BCE et est, à présent, fixé dans les conditions d’emploi de la BCE.

36 Ces conditions prévoient, certes, à l’article 8, sous a), de l’annexe III bis, que la BCE conclut des accords et convient de mesures appropriées avec, notamment, d’autres régimes de retraite ou des gouvernements, aux fins du transfert de sommes d’argent au régime de pension de la BCE, pour les membres du personnel de celle‑ci qui ont achevé leur période d’essai à la BCE.

37 Toutefois, cette disposition ne saurait imposer aux États membres l’obligation de conclure de tels accords et de consentir au transfert, au régime de pension de la BCE, des droits à pension acquis auprès de son régime national de pensions par un membre du personnel de la BCE.

38 À la différence du statut qui, en tant que règlement obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre, oblige également les États membres dans toute la mesure où leur concours est nécessaire à sa mise en œuvre (voir, en ce sens, arrêt du 20 octobre 1981, Commission/Belgique, 137/80, EU:C:1981:237, points 8 et 9), les conditions d’emploi de la BCE n’ont pas été adoptées par un acte législatif et, par conséquent, ne sauraient, par elles‑mêmes, créer des obligations
à la charge des États membres.

39 En effet, la BCE ne peut arrêter des actes législatifs que dans la mesure nécessaire à l’accomplissement des missions mentionnées à l’article 132, paragraphe 1, premier tiret, TFUE, lesquelles n’ont aucun rapport avec le régime de pension de son personnel.

40 Le fait que le protocole sur les privilèges et immunités s’applique également à la BCE, comme le prévoit son article 22, premier alinéa, ne saurait justifier une conclusion différente. En effet, si l’article 14 de ce protocole prévoit que le Parlement et le Conseil, statuant par voie de règlements, fixent le régime des prestations sociales applicables aux fonctionnaires et autres agents de l’Union, il n’en demeure pas moins qu’aucun règlement n’a été adopté, en vertu de cette disposition, pour
prévoir le transfert, au régime de pension de la BCE, des droits à pension acquis par les membres du personnel de celle‑ci auprès des régimes de pension des États membres.

41 Ne saurait pas davantage conduire à une conclusion différente l’article 9, sous c), des conditions d’emploi de la BCE, qui prévoit que, aux fins de l’interprétation des droits et des obligations prévus par ces conditions, il sera tenu compte des principes consacrés par les règlements, les règles et la jurisprudence applicables au personnel d’autres institutions de l’Union.

42 En effet, ainsi qu’il a été relevé au point 37 du présent arrêt, lesdites conditions ne créent aucune obligation à la charge des États membres qui pourrait faire l’objet d’une telle interprétation.

43 Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que, en l’état actuel du droit de l’Union, à défaut d’accord conclu entre la BCE et l’État membre concerné, cet État membre n’est pas tenu de prévoir la faculté, pour un membre du personnel de la BCE, de demander le transfert au régime de pension de celle-ci des droits à pension qu’il a acquis auprès du régime de pension dudit État membre. Il en ressort, ainsi, que, à défaut d’un tel accord entre la BCE et l’État membre concerné, le droit
de l’Union ne prévoit pas, en son état actuel, un droit subjectif pour un membre du personnel de la BCE de demander le transfert au régime de pension de celle-ci des droits à pension qu’il a acquis auprès du régime de pension dudit État membre.

44 Il convient, cependant, de relever, ainsi que M. l’avocat général l’a rappelé au point 62 de ses conclusions, qu’il ressort des observations soumises à la Cour que la BCE a, déjà en 2005, demandé aux autorités italiennes la conclusion d’un accord en vue du transfert au régime de pension de la BCE des droits à pension acquis par les membres du personnel de celle‑ci auprès du régime de pension italien. À cette fin, la BCE a transmis à l’INPS un projet d’un tel accord. Toutefois, aucun accord n’a
été conclu, la République italienne n’ayant pas pris les mesures nécessaires pour sa conclusion.

45 Dans ces conditions, afin de fournir une réponse utile à la juridiction de renvoi, il y a lieu d’examiner les éventuelles obligations, découlant du droit de l’Union, à la charge d’un État membre qui se voit proposer par la BCE la conclusion d’un accord portant sur le transfert de droits à pension.

46 Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que l’article 4 TUE, visé par la première question préjudicielle, consacre, à son paragraphe 3, le principe de coopération loyale entre l’Union et ses États membres, en vertu duquel les États membres doivent, notamment, faciliter l’accomplissement par l’Union de sa mission et s’abstenir de toute mesure susceptible de mettre en péril la réalisation des objectifs de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 30 novembre 2021, LR Ģenerālprokuratūra, C‑3/20,
EU:C:2021:969, point 95).

47 Or, l’impossibilité de faire transférer au régime de pension d’une institution de l’Union les droits à pension acquis dans le régime de pension d’un État membre pourrait rendre plus difficile le recrutement, par cette institution, de personnel ayant une certaine ancienneté en provenance de cet État membre, étant donné que le passage de l’intéressé au service de ladite institution pourrait, à défaut d’un tel transfert, priver celui-ci, en tout ou en partie, des droits à pension auxquels il aurait
droit s’il n’avait pas accepté d’entrer au service d’une institution de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du 20 octobre 1981, Commission/Belgique, 137/80, EU:C:1981:237, point 19, et du 4 février 2021, Ministre de la Transition écologique et solidaire et Ministre de l’Action et des Comptes publics, C‑903/19, EU:C:2021:95, point 34 ainsi que jurisprudence citée).

48 Par ailleurs, ainsi que M. l’avocat général l’a rappelé au point 63 de ses conclusions, presque tous les États membres de l’Union économique et monétaire ont conclu, parfois depuis longtemps, des accords avec la BCE pour autoriser le transfert, au régime de pension de celle‑ci, des droits à pension acquis par les membres du personnel de la BCE auprès de leurs régimes nationaux.

49 Dans une telle situation, ainsi que M. l’avocat général l’a, en substance, relevé au point 58 de ses conclusions, les membres du personnel de la BCE ayant acquis des droits à pension auprès du régime d’un État membre qui n’a pas encore conclu un tel accord avec la BCE se trouveraient, sans justification apparente, dans une situation moins favorable que leurs collègues ressortissants d’un État membre qui a conclu avec la BCE un tel accord, ce qui serait de nature à leur infliger un traitement
inégal et à nuire, ainsi, au bon fonctionnement de cette institution.

50 Il convient de noter, en l’occurrence, que, en ce qui concerne le transfert au régime de pension de la BCE des droits à pension que les employés de la BCE ont acquis auprès d’une institution de sécurité sociale d’un État membre, la BCE a manifesté l’intérêt de conclure des accords prévoyant précisément un tel transfert.

51 Au regard des considérations exposées aux points 47 à 50 du présent arrêt, il convient de conclure que le principe de coopération loyale, consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE, implique, pour un État membre, l’obligation de concourir avec la BCE en vue de conclure un accord sur le transfert, au régime de pension de cette dernière, des droits à pension acquis par les membres de son personnel auprès du régime de pension de cet État membre.

52 Certes, comme M. l’avocat général l’a relevé au point 60 de ses conclusions, le principe de coopération loyale ne saurait être interprété en ce sens qu’il oblige l’État membre à accepter tel quel un projet d’accord éventuellement soumis par la BCE. Il n’en reste pas moins que l’État membre doit participer activement et de bonne foi aux négociations avec la BCE visant à conclure avec celle-ci un accord après l’ouverture des négociations, en vue d’éliminer les éventuels obstacles existants, y
compris en ce qui concerne la détermination d’une méthode appropriée pour le calcul du montant équivalent aux droits à transférer.

53 Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de répondre à la première question que les articles 45 et 48 TFUE, l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut et l’article 8, sous a), de l’annexe III bis des conditions d’emploi de la BCE doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas, à défaut d’accord conclu entre la BCE et l’État membre concerné, à une réglementation ou à une pratique administrative de cet État membre qui ne permet pas à un
membre du personnel de la BCE de transférer au régime de pension de celle‑ci un montant correspondant aux droits à pension qu’il a acquis auprès du régime de pension dudit État membre. Toutefois, l’article 4, paragraphe 3, TUE exige, en vertu du principe de coopération loyale consacré à cette disposition, qu’un État membre qui se voit proposer par la BCE la conclusion d’un accord au titre de cet article 8, sous a), de l’annexe III bis, portant sur le transfert, au régime de pension de la BCE, des
droits à pension acquis par les membres du personnel de celle‑ci auprès du régime de pension de cet État membre, participe activement et de bonne foi aux négociations visant à conclure avec celle-ci un tel accord après l’ouverture des négociations.

Sur la seconde question

54 Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si le droit de l’Union doit être interprété en ce sens qu’il autorise la juridiction d’un État membre saisie par un membre du personnel de la BCE à ordonner le transfert au régime de pension de celle‑ci des droits à pension acquis par l’intéressé auprès du régime de pension de cet État membre, même en l’absence d’une disposition du droit national ou d’un accord, conclu entre l’État membre concerné et la BCE, prévoyant un tel
transfert.

55 Il y a lieu de relever, à cet égard, que, selon la jurisprudence de la Cour, la faculté de faire transférer des droits à pension, prévue à l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut, revêt le caractère d’un droit subjectif, conféré par le statut et susceptible d’être invoqué tant à l’égard des États membres qu’à l’égard des institutions de l’Union (arrêt du 14 juin 1990, Weiser, C‑37/89, EU:C:1990:254, point 12 et jurisprudence citée).

56 Toutefois, il ressort des points 32 et 43 du présent arrêt, d’une part, que l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut ne s’applique pas aux membres du personnel de la BCE et, d’autre part, que le transfert, au régime de pension de la BCE des droits à pension acquis par un membre du personnel de celle-ci auprès du régime de pension d’un État membre, présuppose la conclusion d’un accord entre la BCE et cet État membre.

57 Il s’ensuit que, à défaut de conclusion d’un tel accord entre la BCE et l’État membre concerné, une juridiction de cet État membre, saisie par un membre du personnel de la BCE ayant acquis des droits à pension auprès du régime de pension dudit État membre, ne saurait ordonner le transfert desdits droits au régime de pension de la BCE.

58 Néanmoins, il ressort de la réponse à la première question qu’il existe une obligation, découlant du principe de coopération loyale consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE, pour un État membre, sollicité par la BCE en vue de conclure un accord portant sur le transfert de droits à pension, de participer activement et de bonne foi aux négociations avec la BCE de manière à parvenir à un accord.

59 Si la juridiction compétente de l’État membre concerné considère que les autorités compétentes de cet État membre, en raison de leur indifférence quant à l’ouverture de négociations avec la BCE en vue de conclure un accord portant sur le transfert, au régime de pension de cette dernière, des droits à pension acquis par les membres de son personnel auprès du régime de pension dudit État membre, n’ont pas respecté cette obligation, il lui incombe, dans le respect des principes d’équivalence et
d’effectivité tels qu’ils ressortent de la jurisprudence de la Cour (voir, notamment, arrêt du 26 juin 2019, Craeynest e.a., C‑723/17, EU:C:2019:533, point 54), de prendre toute mesure efficace prévue par les règles procédurales nationales applicables afin que ces autorités participent activement et de bonne foi aux négociations avec la BCE en vue de conclure un tel accord.

60 Au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la seconde question que le droit de l’Union doit être interprété en ce sens qu’il n’autorise pas la juridiction d’un État membre saisie par un membre du personnel de la BCE à ordonner le transfert au régime de pension de celle‑ci des droits à pension acquis par l’intéressé auprès du régime de pension de cet État membre, en l’absence d’une disposition du droit national ou d’un accord, conclu entre l’État membre
concerné et la BCE, prévoyant un tel transfert. En revanche, lorsque, en raison de la violation, par cet État membre, de son obligation, découlant du principe de coopération loyale consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE, de participer activement et de bonne foi aux négociations avec la BCE en vue de conclure un accord portant sur le transfert de droits à pension, ce membre du personnel de la BCE se trouve dans l’impossibilité de faire transférer, au régime de pension de la BCE, les droits à
pension qu’il a acquis auprès du régime de pension dudit État membre, cette disposition exige qu’une telle juridiction prenne toutes les mesures prévues par les règles procédurales nationales afin d’assurer le respect de cette obligation par l’autorité compétente nationale.

Sur les dépens

61 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :

  1) Les articles 45 et 48 TFUE, l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut des fonctionnaires de l’Union européenne et l’article 8, sous a), de l’annexe III bis de la décision de la Banque centrale européenne, du 9 juin 1998, relative à l’adoption des conditions d’emploi du personnel de la Banque centrale européenne, telle que modifiée le 31 mars 1999,

doivent être interprétés en ce sens que :

ils ne s’opposent pas, à défaut d’accord conclu entre la Banque centrale européenne (BCE) et l’État membre concerné, à une réglementation ou à une pratique administrative de cet État membre qui ne permet pas à un membre du personnel de la BCE de transférer au régime de pension de celle‑ci un montant correspondant aux droits à pension qu’il a acquis auprès du régime de pension dudit État membre. Toutefois, l’article 4, paragraphe 3, TUE exige, en vertu du principe de coopération loyale consacré
à cette disposition, qu’un État membre qui se voit proposer par la BCE la conclusion d’un accord au titre de cet article 8, sous a), de l’annexe III bis, portant sur le transfert, au régime de pension de la BCE, des droits à pension acquis par les membres du personnel de celle‑ci auprès du régime de pension de cet État membre, participe activement et de bonne foi aux négociations visant à conclure avec celle-ci un tel accord après l’ouverture des négociations.

  2) Le droit de l’Union doit être interprété en ce sens qu’il n’autorise pas la juridiction d’un État membre saisie par un membre du personnel de la Banque centrale européenne (BCE) à ordonner le transfert au régime de pension de celle‑ci des droits à pension acquis par l’intéressé auprès du régime de pension de cet État membre, en l’absence d’une disposition du droit national ou d’un accord, conclu entre l’État membre concerné et la BCE, prévoyant un tel transfert. En revanche, lorsque, en raison
de la violation, par cet État membre, de son obligation, découlant du principe de coopération loyale consacré à l’article 4, paragraphe 3, TUE, de participer activement et de bonne foi aux négociations avec la BCE en vue de conclure un accord portant sur le transfert de droits à pension, ce membre du personnel de la BCE se trouve dans l’impossibilité de faire transférer, au régime de pension de la BCE, les droits à pension qu’il a acquis auprès du régime de pension dudit État membre, cette
disposition exige qu’une telle juridiction prenne toutes les mesures prévues par les règles procédurales nationales afin d’assurer le respect de cette obligation par l’autorité compétente nationale.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : l’italien.


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : C-404/21
Date de la décision : 22/12/2022
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par le Tribunale Ordinario di Asti.

Renvoi préjudiciel – Personnel de la Banque centrale européenne (BCE) – Transfert de droits à pension acquis dans un régime national de pensions au régime de pension de la BCE – Article 4, paragraphe 3, TUE – Principe de coopération loyale – Conditions d’emploi de la BCE – Article 8 de l’annexe III bis – Absence d’une disposition du droit national ou d’un accord conclu entre l’État membre concerné et la BCE.

Principes, objectifs et mission des traités

Libre circulation des travailleurs

Sécurité sociale des travailleurs migrants

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : WP
Défendeurs : Istituto nazionale della previdenza sociale et Repubblica italiana.

Composition du Tribunal
Avocat général : Pikamäe
Rapporteur ?: Gratsias

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2022:1023

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