La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/09/2022 | CJUE | N°C-292/21

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Administración General del Estado e.a. contre Asociación para la Defensa de los Intereses Comunes de las Autoescuelas (AUDICA) et Ministerio Fiscal., 15/09/2022, C-292/21


 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NICHOLAS EMILIOU

présentées le 15 septembre 2022 ( 1 )

Affaire C‑292/21

Administración General del Estado,

Confederación Nacional de Autoescuelas (CNAE),

UTE CNAE-ITT-FORMASTER-ECT

contre

Asociación Unión para la Defensa de los Intereses Comunes de las Autoescuelas (AUDICA),

Ministerio Fiscal

[demande de décision préjudicielle formée par le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne)]

« Renvoi préjudiciel – Marché intérieur 

– Directive 2006/123/CE – Cours de sensibilisation et de rééducation routière aux fins de récupérer des points sur le permis de conduire – Art...

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NICHOLAS EMILIOU

présentées le 15 septembre 2022 ( 1 )

Affaire C‑292/21

Administración General del Estado,

Confederación Nacional de Autoescuelas (CNAE),

UTE CNAE-ITT-FORMASTER-ECT

contre

Asociación Unión para la Defensa de los Intereses Comunes de las Autoescuelas (AUDICA),

Ministerio Fiscal

[demande de décision préjudicielle formée par le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne)]

« Renvoi préjudiciel – Marché intérieur – Directive 2006/123/CE – Cours de sensibilisation et de rééducation routière aux fins de récupérer des points sur le permis de conduire – Article 2, paragraphe 2, sous d) – Champ d’application – Exclusion – “Services dans le domaine des transports” – Liberté d’établissement – Concession de service public – Conditions d’attribution de la concession de service public – Article 15 – Service d’intérêt économique général – Proportionnalité – Exigences nationales
allant au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif poursuivi »

I. Introduction

1. Par la présente demande de décision préjudicielle, le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne) s’interroge sur la compatibilité avec le droit de l’Union d’une mesure nationale en vertu de laquelle les contrats portant sur la fourniture de cours de sensibilisation et de rééducation routière visant à permettre aux conducteurs de récupérer des points sur leur permis de conduire doivent être attribués sous la forme de concessions de service public. Une seule concession de service public peut être
attribuée dans chacune des cinq zones géographiques délimitées à cet effet sur l’ensemble du territoire national (à l’exception de deux régions : la Catalogne et le Pays basque, qui sont soumises à un régime différent).Le concessionnaire retenu pour chaque zone est la seule entité habilitée à fournir de tels cours dans la zone correspondante.

2. Le litige dont cette juridiction est saisie porte, en substance, sur le point de savoir si une telle mesure est contraire aux dispositions de la directive 2006/123/CE ( 2 ), qui établit des dispositions générales facilitant l’exercice des libertés fondamentales protégées à l’article 49 TFUE (liberté d’établissement) et à l’article 56 TFUE (libre prestation des services) ( 3 ). Afin de répondre à cette question, il convient, d’abord, de déterminer si cette directive est applicable dans l’affaire
au principal.

3. En bref, pour les raisons exposées dans la suite des présentes conclusions, je propose à la Cour de répondre à cette question préliminaire par l’affirmative. Je crains cependant que la mesure nationale en cause au principal ne restreigne la libre prestation des services d’une manière qui ne respecte pas pleinement les exigences de ladite directive.

II. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

1. La directive « services »

4. Le considérant 17 de la directive « services » indique, en substance, que les services d’intérêt économique général (SIEG) entrent dans le champ d’application de cette directive sauf s’il s’agit de services dans le domaine des transports.

5. Le considérant 40 de la directive « services » précise que la notion de « raisons impérieuses d’intérêt général » à laquelle il est fait référence, notamment, à l’article 15, paragraphe 3, de cette directive, « a été élaborée par la Cour de justice dans sa jurisprudence relative aux [articles 49 et 56 TFUE] et est susceptible d’évoluer encore ». Cette notion couvre un certain nombre de justifications, y compris la sécurité routière.

6. L’article 2 de la directive « services », intitulé « Champ d’application », prévoit, à son paragraphe 1, que celle-ci s’applique aux services fournis par les prestataires ayant leur établissement dans un État membre, sous réserve de certaines exceptions visées à l’article 2, paragraphe 2, de cette directive. Conformément à l’article 2, paragraphe 2, sous d), de ladite directive, elle ne s’applique pas aux « services dans le domaine des transports [...] qui entrent dans le champ d’application du
[titre VI TFUE] ».

7. L’article 15 de la directive « services », intitulé « Exigences à évaluer », dispose :

« 1.   Les États membres examinent si leur système juridique prévoit les exigences visées au paragraphe 2 et veillent à ce que ces exigences soient compatibles avec les conditions visées au paragraphe 3. Les États membres adaptent leurs dispositions législatives, réglementaires ou administratives afin de les rendre compatibles avec ces conditions.

2.   Les États membres examinent si leur système juridique subordonne l’accès à une activité de service ou son exercice au respect de l’une des exigences non discriminatoires suivantes :

a) les limites quantitatives ou territoriales sous forme, notamment, de limites fixées en fonction de la population ou d’une distance géographique minim[ale] entre prestataires ;

[...]

d) les exigences autres que celles relatives aux matières couvertes par la directive 2005/36/CE [du Parlement européen et du Conseil, du 7 septembre 2005, relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles (JO 2005, L 255, p. 22)] ou que celles prévues dans d’autres instruments [de l’Union], qui réservent l’accès à l’activité de service concernée à des prestataires particuliers en raison de la nature spécifique de l’activité ;

[...]

3.   Les États membres vérifient que les exigences visées au paragraphe 2 remplissent les conditions suivantes :

a) non‑discrimination : les exigences ne sont pas directement ou indirectement discriminatoires en fonction de la nationalité ou, en ce qui concerne les sociétés, de l’emplacement de leur siège statutaire ;

b) nécessité : les exigences sont justifiées par une raison impérieuse d’intérêt général ;

c) proportionnalité : les exigences doivent être propres à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi, ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif et d’autres mesures moins contraignantes ne doivent pas permettre d’atteindre le même résultat.

4.   Les paragraphes 1, 2 et 3 ne s’appliquent à la législation dans le domaine des services d’intérêt économique général que dans la mesure où l’application de ces paragraphes ne fait pas échec à l’accomplissement, en droit ou en fait, de la mission particulière qui leur a été confiée.

[...] »

2. La directive 2014/23/UE ( 4 )

8. L’article 5, point 1, sous b), de la directive 2014/23/UE définit la « concession de services » comme « un contrat conclu par écrit et à titre onéreux par lequel un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices confient la prestation et la gestion de services autres que l’exécution de travaux [...] à un ou à plusieurs opérateurs économiques, la contrepartie consistant soit uniquement dans le droit d’exploiter les services qui font l’objet du contrat, soit dans ce droit accompagné
d’un prix ».

9. L’article 8 de la directive 2014/23, dans sa version applicable aux faits au principal, énonçait que celle-ci « s’applique aux concessions dont la valeur est égale ou supérieure à 5186000 [euros] ».

B.   Le droit espagnol

10. La directive « services » a été transposée en droit espagnol par la Ley 17/2009 sobre el libre acceso a las actividades de servicios y su ejercicio (loi 17/2009 relative au libre accès aux activités de services et à leur exercice), du 23 novembre 2009 ( 5 ). L’article 3 de cette loi définit le « service » comme « toute activité économique non salariée, exercée normalement contre rémunération, visée [à l’article 57 TFUE] ». L’article 5 de cette loi indique que l’accès à une activité de service
peut être soumis à autorisation lorsque trois conditions sont remplies : celles de non‑discrimination, de nécessité et de proportionnalité.

11. En vertu de la Ley 17/2005 por la que se regula el permiso y la licencia de conducción por puntos y se modifica el texto articulado de la ley sobre tráfico, circulación de vehículos a motor y seguridad vial (loi 17/2005 régissant le permis de conduire et le permis à points et modifiant la loi relative au trafic, à la circulation des véhicules à moteur et à la sécurité routière), du 19 juillet 2005 ( 6 ), le contrat portant sur la fourniture de cours aux fins de la récupération des points du
permis de conduire doit être attribué sous la forme d’une concession de service public, conformément au droit régissant les contrats attribués par les autorités publiques.

12. L’Orden INT/2596/2005 por la que se regulan los cursos de sensibilización y reeducación vial para los titulares de un permiso o licencia de conducción (arrêté INT/2596/2005 portant sur les cours de sensibilisation et de rééducation routière destinés aux titulaires d’un permis de conduire), du 28 juillet 2005 ( 7 ), met en œuvre la loi 17/2005. Le paragraphe 12 de cet arrêté prévoit que « le contrôle et l’inspection des cours de sensibilisation et de rééducation routière sont effectués
conformément aux spécifications techniques figurant dans le contrat de concession administrative ».

III. Les faits, la procédure au principal et la question préjudicielle

13. En 2014, la Dirección General de Tráfico (direction générale de la circulation, Espagne) a publié l’appel d’offres suivant : « Concession de la gestion de cours de sensibilisation et de rééducation routière pour la récupération de crédits sur le permis de conduire : cinq lots ». Ces cours ont été conçus pour les conducteurs ayant perdu des points sur leur permis de conduire à la suite de la commission d’infractions routières.

14. Aux fins de cette procédure d’appel d’offres, le territoire national (à l’exception de la Catalogne et du Pays basque) a été divisé en cinq zones correspondant chacune à un lot. Un seul contrat était attribué pour chaque lot et devait l’être sous la forme d’une concession de service public. Le soumissionnaire retenu pour chaque lot deviendrait la seule entité habilitée à fournir les cours en cause dans la zone correspondante.

15. L’appel d’offres a été contesté par l’Asociación Unión para la Defensa de los Intereses Comunes de las Autoescuelas (Association pour la défense des intérêts communs des auto‑écoles, Espagne, ci-après l’« AUDICA ») devant le Tribunal Administrativo Central de Recursos Contractuales (tribunal administratif central chargé des recours contractuels, Espagne). L’AUDICA a soutenu que le fait que les contrats devaient être des concessions de service public était contraire à la libre prestation des
services.

16. L’Abogado del Estado [avocat de l’État (membre du corps de fonctionnaires de l’administration publique chargé de défendre l’État en justice, Espagne)], agissant pour le compte de la Dirección General de Tráfico (direction générale de la circulation), a comparu dans la procédure en tant que partie défenderesse, toute comme une union temporaire d’entreprises formée par la Confederación Nacional de Autoescuelas (CNAE) et de trois autres entités (FORMASTER, ECT et ITT) en tant que parties
codéfenderesses (ci-après l’« union temporaire d’entreprises » ou « la CNAE et autres »). Cette dernière avait été retenue dans le cadre de la procédure d’appel d’offres.

17. Par décision du 23 janvier 2015, le Tribunal Administrativo Central de Recursos Contractuales (tribunal administratif central chargé des recours contractuels) a rejeté le recours de l’AUDICA. Cette dernière a interjeté appel contre cette décision devant la chambre du contentieux administratif de l’Audiencia Nacional (Cour centrale, Espagne).

18. Par un arrêt du 28 novembre 2018, la chambre du contentieux administratif de l’Audiencia Nacional (Cour centrale) a accueilli l’appel de l’AUDICA et a annulé tant la décision du Tribunal Administrativo Central de Recursos Contractuales (tribunal administratif central chargé des recours contractuels) que l’avis de marché. Elle a considéré que la fourniture des cours en cause présentait les caractéristiques d’un SIEG, au sens de l’article 14 TFUE ( 8 ). En outre, elle a estimé que l’exigence selon
laquelle ces cours doivent être fournis sous la forme de concessions de service public était excessive et injustifiée, dès lors qu’il existait d’autres méthodes permettant aux autorités administratives d’atteindre leurs objectifs affichés, sans restreindre indûment la concurrence entre prestataires de service potentiels.

19. L’Abogado del Estado (avocat de l’État) et l’union temporaire d’entreprises ont formé un recours contre l’arrêt de la chambre du contentieux administratif de l’Audiencia Nacional (Cour centrale) devant le Tribunal Supremo (Cour suprême). Nourrissant des doutes quant à l’interprétation de plusieurs dispositions du droit de l’Union, cette juridiction a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« La règle nationale selon laquelle l’attribution des cours de sensibilisation et de rééducation routière pour la récupération de points de permis de conduire doit être effectuée au moyen d’une concession de service public est-elle compatible avec la [directive « services »] – ou, le cas échéant, avec d’autres règles ou principes du droit de l’Union européenne ? »

20. Dans la présente procédure, des observations écrites ont été déposées par la CNAE et autres, l’AUDICA, les gouvernements tchèque, espagnol et néerlandais ainsi que par la Commission européenne. Ces parties, à l’exception du gouvernement tchèque, ont également été entendues lors de l’audience qui s’est tenue le 1er juin 2022.

IV. Analyse

21. Par sa question, la juridiction de renvoi vise, en substance, à vérifier la compatibilité avec les dispositions de la directive « services » d’une mesure en vertu de laquelle les contrats portant sur la fourniture de cours de sensibilisation et de rééducation routière, destinés aux conducteurs ayant perdu des points sur leur permis de conduire à la suite de la commission d’infractions routières, doivent être attribués sous la forme de concessions de service public, seul un concessionnaire étant
autorisé à fournir de tels cours dans chacune des cinq zones géographiques préalablement délimitées sur le territoire national (à l’exception de la Catalogne et du Pays basque).

22. Comme je l’ai indiqué au point 2 des présentes conclusions, la directive « services » prévoit des dispositions générales facilitant l’exercice des libertés fondamentales consacrées aux articles 49 et 56 TFUE. Ces deux libertés portent sur différents aspects de l’exercice d’une activité économique. La liberté d’établissement, telle que définie à l’article 49 TFUE, s’applique lorsqu’un opérateur entend exercer, de manière effective, son activité économique au moyen d’une installation stable et
pour une durée indéterminée, tandis que la libre prestation des services consacrée à l’article 56 TFUE couvre toutes les prestations qui ne sont pas offertes de manière stable et continue, à partir d’un domicile professionnel dans l’État membre de destination ( 9 ). Dans ce contexte, le chapitre III de la directive « services » (articles 9 à 15) porte sur la liberté d’établissement, tandis que le chapitre IV (articles 16 à 21) de cette directive traite de la libre prestation des services.

23. D’emblée, il me paraît évident qu’une activité telle que celle en cause au principal, qui constitue un « service » au sens de l’article 4, point 1, de la directive « services » ( 10 ), se rapporte à une installation stable et qu’elle est destinée à être exercée pour une durée indéterminée. Ainsi, la compatibilité de la mesure nationale en cause avec le droit de l’Union devrait être appréciée au regard des règles relatives à la liberté d’établissement (chapitre III de la directive « services »),
plutôt que de celles relatives à la libre circulation des services (chapitre IV de cette directive), s’il est établi que celle-ci est applicable dans l’affaire au principal ( 11 ).

24. À cet égard, j’ajoute que, en vertu d’une jurisprudence constante de la Cour, toute mesure nationale dans un domaine qui a fait l’objet d’une harmonisation complète à l’échelle de l’Union doit être appréciée au regard non pas des dispositions du droit primaire, mais de celles de cette mesure d’harmonisation ( 12 ). En ce qui concerne le chapitre III de la directive « services », la Cour a déjà jugé que les articles 9 à 14 de cette directive procédaient à une harmonisation exhaustive concernant
les services relevant de leur champ d’application ( 13 ). À mon sens, il en va de même s’agissant de l’article 15 de ladite directive, qui relève également de ce chapitre ( 14 ). Partant, s’il est établi que la directive « services » s’applique dans la présente affaire, il suffirait, selon moi, que la compatibilité de la mesure nationale en cause au principal soit appréciée exclusivement au regard de ces dispositions, sans qu’il soit également nécessaire d’analyser la question au regard de
l’article 49 TFUE ( 15 ).

25. Cela étant, je relève que la juridiction de renvoi nourrit des doutes à deux égards quant à l’applicabilité dans l’affaire au principal de la directive « services » et, en particulier, de ses articles 9 à 13 ( 16 ).

26. Premièrement, elle demande à la Cour de clarifier la question de savoir si la fourniture des cours en cause, bien que constituant un « service », est néanmoins exclue du champ d’application matériel de la directive « services », au motif qu’elle relève de la catégorie des « services dans le domaine des transports », au sens de l’article 2, paragraphe 2, sous d), de cette directive, de sorte que la compatibilité de la mesure nationale en cause devrait être appréciée exclusivement au regard de
l’article 49 TFUE (et que ladite directive, y compris son chapitre III, n’est pas applicable dans l’affaire au principal) ( 17 ).

27. Deuxièmement, la juridiction de renvoi s’interroge sur le point de savoir si, même s’il était établi que la fourniture des cours en cause ne constitue pas un « service dans le domaine des transports », le fait que les contrats portant sur la fourniture de ces cours revêtent la forme de concessions de service public devrait impliquer leur exclusion de certaines dispositions de la directive « services », à savoir de ses articles 9 à 13. Les concessions de service public ne figurent pas parmi les
exclusions prévues à l’article 2, paragraphe 2, de la directive « services ». Toutefois, le considérant 57 de cette directive indique, en substance, que les dispositions relatives aux régimes d’autorisation (à savoir les articles 9 à 13 de ladite directive) ne « concernent pas » la conclusion de contrats pour la fourniture de services qui relèvent déjà des règles relatives aux marchés publics contenues dans d’autres instruments du droit de l’Union dérivé, tels que la directive 2014/23.

28. Dans la section suivante, j’examinerai successivement chacune de ces deux problématiques (section A). J’expliquerai d’abord pourquoi j’estime que la directive « services », y compris ses articles 9 à 13, est applicable dans la présente affaire. J’indiquerai ensuite les raisons qui me conduisent à penser qu’une mesure telle que celle en cause au principal est incompatible avec les exigences énoncées au chapitre III (liberté d’établissement) de cette directive (section B).

A.   L’applicabilité de la directive « services »

1. Sur l’exclusion concernant les « services dans le domaine des transports »

29. L’article 2, paragraphe 2, sous d), de la directive « services » prévoit que sont exclus du champ d’application matériel de cette directive les « services dans le domaine des transports [...] [au sens du titre VI TFUE] ». En effet, conformément à l’article 58, paragraphe 1, TFUE, la libre prestation des services en matière de transports est spécifiquement régie par le titre VI TFUE ( 18 ). Dès lors, la directive « services » ne saurait réglementer la libre prestation des services dans ce
domaine ( 19 ).

30. La notion de « services dans le domaine des transports » n’est pas expressément définie par la directive « services » ni par le titre VI TFUE ( 20 ). Toutefois, la Cour a interprété cette notion comme couvrant « non seulement tout acte physique de déplacement de personnes ou de biens d’un endroit à un autre au moyen d’un véhicule, d’un aéronef ou d’un vaisseau aquatique », mais aussi « tout service intrinsèquement lié à un tel acte » ( 21 ).

31. Il ressort de cette jurisprudence que le simple fait qu’un service soit lié d’une manière ou d’une autre à un transport ne suffit pas pour qu’il relève du champ d’application de l’article 2, paragraphe 2, sous d), de la directive « services » ( 22 ). Il importe plutôt de déterminer l’objet principal du service en cause ( 23 ). En effet, il convient d’établir une distinction entre les services intrinsèquement liés à l’acte physique de déplacer des personnes ou des biens d’un endroit à un autre
par un moyen de transport (tels que les taxis et les ambulances ainsi que les services portuaires ( 24 )), étant donné qu’ils ont principalement pour objet le transport de produits ou de personnes et les services qui leur sont accessoires, car leur finalité première est différente ( 25 ).

32. Cette dernière catégorie comprend les services de location de voitures, les agences de voyage et les services aux consommateurs dans le domaine du tourisme, y compris les guides touristiques ( 26 ). Elle inclut également des services tels que les services de bord, de nettoyage ou de restauration fournis dans des trains qui, bien que revêtant un caractère accessoire au service de transport de voyageurs par train, ne sont pas intrinsèquement liés à ce dernier ( 27 ). De tels services ne sont pas
exclus du champ d’application matériel de la directive « services » ( 28 ).

33. Dans ses conclusions dans les affaires jointes Trijber et Harmsen ( 29 ), l’avocat général Szpunar a expliqué que la raison d’être de l’inclusion des services de location de voitures ou de guides touristiques dans le champ d’application matériel de la directive « services » était que leur objet principal avait été, respectivement, pour les destinataires de ces services, de louer des véhicules et d’apprendre quelque chose sur un monument ou un lieu déterminé, et non de se procurer un moyen de
transport. De même, il a conclu que les services d’auto‑école ont pour objet principal d’enseigner la conduite à l’élève et non pas de le transporter ( 30 ).

34. À mon avis, les services en cause au principal relèvent également de cette catégorie. En effet, tout comme ces services d’auto-école, l’objet principal des cours de sensibilisation et de rééducation routière est de former le destinataire à une conduite prudente et responsable, et non pas de le transporter.

35. Dans ces conditions, je partage l’avis de la Commission, du gouvernement tchèque et de l’AUDICA, selon lequel les cours en cause ne doivent pas être considérés comme relevant de la catégorie des « services dans le domaine des transports ». Ces cours ne devraient donc pas être exclus du champ d’application matériel de la directive « services » sur le fondement de l’article 2, paragraphe 2, sous d), de celle-ci ( 31 ).

36. Mon opinion à cet égard n’est pas altérée, premièrement, par l’argument du gouvernement néerlandais selon lequel les cours en cause devraient être considérés comme des « services dans le domaine des transports », au sens de l’article 2, paragraphe 2, sous d), de la directive « services », au motif qu’ils sont intrinsèquement liés à la détention d’un permis de conduire, condition juridique préalable à la circulation d’un véhicule. Je conviens avec ce gouvernement que, dans au moins un arrêt, à
savoir l’arrêt Grupo Itevelesa e.a. ( 32 ), la Cour paraît avoir adopté un critère juridique plus large que celui que j’ai indiqué aux points 30 et 31 des présentes conclusions et avoir inclus dans la notion de « services dans le domaine des transports » des services qui sont des « conditions préalables » à l’acte physique de déplacement d’un véhicule. Sur la base de cette définition, elle a conclu que la notion de « services dans le domaine des transports » comprenait les contrôles techniques
des véhicules à moteur, effectués en tant que condition préalable et indispensable à l’exercice de l’activité principale que constitue le transport ( 33 ), faute de quoi cette activité pourrait être illégale.

37. Cela étant, je ne pense pas, même à la lumière de cet arrêt, que le fait qu’un service soit lié, ni, d’ailleurs, « intrinsèquement lié », à la détention d’un permis de conduire, devrait être déterminant quant à la question de savoir s’il convient de considérer ce service comme un « service dans le domaine des transports ». À mon avis, l’obtention ou la conservation d’un permis de conduire diffèrent des contrôles techniques effectués sur un véhicule. Elles concernent la méthode juridique par
laquelle une personne peut se procurer un moyen de transport ( 34 ) et, en tant que telles, elles sont liées à la personne, plutôt qu’au véhicule lui-même, alors que l’activité des centres de contrôle technique des véhicules consiste à effectuer directement des contrôles sur le véhicule (en tant que condition juridique préalable au déplacement physique de ce véhicule).

38. Dans ces conditions, je suis d’avis que la situation en cause au principal diffère de celle qui a conduit à l’arrêt Grupo Itevelesa e.a. ( 35 ). La solution juridique adoptée dans cet arrêt ne devrait dès lors pas s’appliquer dans la présente affaire.

39. Deuxièmement, je ne suis pas convaincu par l’argument du gouvernement espagnol selon lequel la notion de « services dans le domaine des transports » devrait être interprétée au regard de l’article 91, paragraphe 1, TFUE. Selon ce gouvernement, les cours en cause sont des « services dans le domaine des transports » parce qu’ils constituent des « mesures permettant d’améliorer la sécurité des transports » au sens de cette disposition. Toutefois, il me semble assez évident que l’article 91,
paragraphe 1, TFUE vise à établir une liste des différents aspects qui s’inscrivent dans le « cadre d’une politique commune des transports » (tel que visé à l’article 90 TFUE) et, dans ce contexte, à préciser les différentes mesures que le législateur de l’Union peut adopter (afin de réglementer, entre autres, les « services dans le domaine des transports »). Contrairement à ce que soutient le gouvernement espagnol, cette disposition n’a donc pas pour objet de définir les « services dans le
domaine des transports ».

40. En tout état de cause, je pense que l’interprétation proposée par le gouvernement espagnol, selon laquelle toute mesure visant à améliorer la sécurité des transports concerne nécessairement un « service dans le domaine des transports », est très éloignée de l’interprétation retenue par la Cour dans sa jurisprudence, qui, comme je l’ai expliqué dans les présentes conclusions, se concentre sur la question de savoir si le service en cause a pour « objet principal » le déplacement de personnes ou de
biens.

41. Après avoir apporté ces précisions et expliqué la raison pour laquelle je pense que la fourniture des cours en cause ne relève pas de l’exclusion visée à l’article 2, paragraphe 2, sous d), de la directive « services » (« services dans le domaine des transports »), je m’efforcerai à présent de dissiper les doutes de la juridiction de renvoi quant au point de savoir si le fait que ces cours doivent être fournis au moyen d’une concession de services publics a une incidence sur l’applicabilité des
articles 9 à 13 de la directive « services ».

2. Sur les conséquences du fait que les cours en cause doivent être fournis au moyen d’une concession de service public

42. Je rappelle que l’article 9, paragraphe 3, de la directive « services » prévoit, en substance, que les articles 9 à 13 de cette directive « ne s’applique[nt] pas aux aspects des régimes d’autorisation qui sont régis directement ou indirectement par d’autres instruments [de l’Union] », tels que la directive 2014/23 ( 36 ). Par conséquent, si les cours en cause dans la procédure au principal devaient relever du champ d’application de la directive 2014/23, ils seraient exclus de celui des
articles 9 à 13 de la directive « services ». Toutefois, selon moi, ils resteraient soumis au reste des dispositions pertinentes de cette directive ( 37 ) (c’est-à-dire toutes les dispositions pertinentes autres que les articles 9 à 13 de ladite directive) ( 38 ).

43. J’observe que, pour que la directive 2014/23 s’applique, plusieurs conditions cumulatives doivent être remplies.

44. Premièrement, le service en cause doit revêtir la forme d’une « concession » ( 39 ). La « concession de services », au sens de cette directive, est définie comme un « contrat conclu par écrit et à titre onéreux par lequel un ou plusieurs pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices confient la prestation et la gestion de services [...] à un ou à plusieurs opérateurs économiques, la contrepartie consistant soit uniquement dans le droit d’exploiter les services qui font l’objet du contrat,
soit dans ce droit accompagné d’un prix » ( 40 ). La Cour a précisé qu’un tel contrat est caractérisé, notamment, par une situation dans laquelle, d’une part, un droit d’exploitation d’un service déterminé est transféré par un adjudicateur à un concessionnaire et, d’autre part, ce dernier dispose d’une certaine liberté économique pour déterminer les conditions d’exploitation de ce droit, tout en étant largement exposé aux risques liés à cette exploitation ( 41 ).

45. Dans la présente affaire, l’ensemble des parties et des intéressés ainsi que la juridiction de renvoi sont d’avis que les cours en cause doivent être fournis en vertu d’une concession de service public (une pour chaque zone géographique), de sorte que la situation dans la procédure au principal concerne des concessions de services publics au sens de la directive 2014/23. Je souscris à cette position. En effet, il résulte des points 13 et 14 des présentes conclusions que les contrats en cause au
principal portent sur la fourniture d’un service particulier et qu’ils visent à transférer le droit de fournir les cours en cause (ainsi que, apparemment, les risques liés à l’exploitation de ce service) de l’adjudicateur à chaque concessionnaire.

46. Deuxièmement, la concession doit avoir fait l’objet d’une offre ou été attribuée après le 17 avril 2014, sous peine d’être exclue du champ d’application temporel de la directive 2014/23 ( 42 ). Il appartient aux juridictions nationales d’apprécier si, sur la base des éléments dont elles disposent, cette exigence est remplie ( 43 ). Indépendamment de cette question, je relève que le gouvernement espagnol ainsi que la CNAE et autres sont d’avis que la directive 2014/23 ne s’applique pas ratione
temporis pour une autre raison (différente). En effet, ils font valoir que le délai de transposition de la directive 2014/23 en droit national était le mois de février 2016 et que les concessions en cause au principal ont fait l’objet d’une offre avant l’expiration de ce délai, à une date à laquelle le régime juridique national précédemment applicable était encore en vigueur et cette directive n’avait pas été intégrée dans le droit national.

47. À cet égard, je rappelle que la Cour a déjà constaté, dans une affaire de marchés publics dans laquelle une offre avait été exclue de la procédure de passation d’un marché avant la date d’expiration du délai de transposition de la directive pertinente et avant que celle-ci n’ait été intégrée dans le droit national, qu’il serait « contraire au principe de sécurité juridique » d’appliquer ladite directive, étant donné que la décision à l’encontre de laquelle est alléguée une violation du droit de
l’Union avait été prise avant cette date ( 44 ).

48. Je pense qu’un raisonnement similaire peut s’appliquer dans la présente affaire. Je serais dès lors enclin à partager l’avis du gouvernement espagnol et de la CNAE et autres (sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi) selon lequel la directive 2014/23 ne s’applique pas ratione temporis à une situation telle que celle en cause au principal, étant donné que le délai de transposition de cette directive n’avait pas encore expiré et qu’elle n’avait pas été effectivement intégrée dans
le droit national au moment des faits pertinents.

49. Troisièmement, le contrat de concession doit avoir une valeur égale ou supérieure à un certain montant ( 45 ). À l’époque des faits, cette valeur était fixée à 5186000 euros ( 46 ). Il appartient, là encore, à la juridiction nationale de vérifier si cette condition est remplie, sur la base des informations qui lui sont présentées. Toutefois, je relève que, selon les informations fournies par la CNAE et autres, le gouvernement espagnol et la Commission, lors de l’audience, la valeur du contrat en
cause au principal semble être inférieure à ce seuil. Le gouvernement espagnol a expliqué que, au moment de sa publication, la valeur du contrat était de 1285000 euros. Ce montant est nettement inférieur au seuil de 5186000 euros.

50. À la lumière de ces éléments, il me semble que, dès lors que les contrats portant sur la fourniture des cours en cause : i) ont été conclus avant l’expiration du délai de transposition de la directive 2014/23 et ii) ont une valeur inférieure au seuil fixé par cette directive, ils sont exclus tant du champ d’application temporel que matériel de cet instrument. Il s’ensuit, selon moi, que l’application des articles 9 à 13 de la directive « services » à une situation telle que celle en cause au
principal ne devrait pas être écartée au motif qu’une telle situation est régie par la directive 2014/23.

51. Cela étant dit, il me reste à vérifier si les conditions pour que les articles 9 à 13 de la directive « services » s’appliquent dans une situation telle que celle en cause au principal sont remplies. À cet égard, j’observe que ces dispositions s’appliquent à un type particulier de procédure, à savoir celles qui peuvent être qualifiées de « régimes d’autorisation ». Ainsi, je vais examiner si la procédure en cause au principal peut être considérée comme relevant de cette catégorie.

52. Sur ce point, je rappelle que, tel que le définit l’article 4, point 6, de la directive « services », un « régime d’autorisation » désigne toute procédure qui a pour effet d’obliger un prestataire ou un destinataire à faire une démarche auprès d’une autorité compétente en vue d’obtenir un acte formel ou une décision implicite relative à l’accès à une activité de service ou à son exercice.

53. En outre, le considérant 39 de la directive « services » indique que la notion de « régime d’autorisation » recouvre les procédures administratives par lesquelles sont octroyées des concessions ( 47 ) (à l’exception des procédures qui, contrairement à celle examinée dans l’affaire au principal, relèvent du champ d’application de la directive 2014/23) ( 48 ).

54. Comme je l’ai déjà constaté au point 45 des présentes conclusions, l’affaire au principal concerne des concessions de service public attribuées par les autorités publiques compétentes en ce qui concerne la fourniture de cours de sensibilisation et de rééducation routière destinés aux conducteurs ayant perdu des points sur leur permis de conduire. Ces concessions constituent des actes formels devant être obtenus par les prestataires de service, auprès des autorités nationales compétentes, afin
qu’ils puissent exercer leur activité économique ( 49 ). Selon moi, elles peuvent, dès lors, être qualifiées d’« autorisations », au sens des dispositions de la directive « services ».

55. Par conséquent, je considère que les articles 9 à 13 de la directive « services » sont applicables dans l’affaire au principal ( 50 ).

3. Conclusion relative à l’applicabilité de la directive « services »

56. Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le chapitre III de la directive « services », y compris ses articles 9 à 13, s’applique à la situation en cause dans la procédure au principal. Les concessions de service public en cause au principal relèvent d’un « régime d’autorisation » au sens de ces dispositions. En outre, elles ne portent pas sur des « services dans le domaine des transports » relevant de l’exclusion visée à l’article 2, paragraphe 2, sous d), de cette
directive.

B.   L’appréciation de la compatibilité

57. S’agissant à présent de l’appréciation de la compatibilité d’une mesure nationale telle que celle en cause au principal avec les dispositions de la directive « services », j’expliquerai pourquoi j’estime qu’une telle mesure impose une restriction à la liberté d’établissement des prestataires qui n’est pas compatible avec les exigences du chapitre III (articles 9 à 15) de cette directive.

58. Avant de procéder à un examen approfondi de ces questions, je souhaite formuler deux remarques préliminaires.

59. En premier lieu, je souhaite souligner que, lors de l’audience, les parties et les intéressés ont débattu du point de savoir si les services en cause au principal comportent un « élément transfrontalier », au sens de la jurisprudence relative à l’article 49 TFUE ( 51 ). À cet égard, je souhaite uniquement indiquer que, même s’il est bien établi que les dispositions du traité relatives aux libertés fondamentales « ne sont pas applicables à des activités dont l’ensemble des éléments pertinents se
cantonnent à l’intérieur d’un seul État membre » ( 52 ), il y a eu un débat quant au point de savoir si l’existence d’un élément transfrontalier était également requise pour que la Cour réponde à une question portant sur l’interprétation de la directive « services » ( 53 ). Toutefois, la Cour a désormais mis un terme à ce débat et précisé que les dispositions du chapitre III de la directive « services » doivent être interprétées en ce sens qu’elles s’appliquent également à une situation dont
tous les éléments pertinents se cantonnent à l’intérieur d’un seul État membre ( 54 ). Ainsi, l’existence d’un élément transfrontalier n’est pas requise aux fins d’apprécier la compatibilité d’une mesure telle que celle en cause au principal avec les dispositions du chapitre III de la directive « services ».

60. Par conséquent, j’estime que, dans une situation telle que celle en cause au principal, il est possible d’apprécier la compatibilité d’une mesure avec les dispositions du chapitre III de la directive « services », même s’il était établi qu’une telle mesure concerne une situation purement interne, ce qu’il appartient aux juridictions nationales de vérifier ( 55 ).

61. En second lieu, je souhaite apporter quelques précisions concernant l’articulation entre les articles 9 à 13 et l’article 15 de la directive « services ». À cet égard, je relève que l’article 9 de cette directive empêche les États membres de recourir à des « régimes d’autorisation », sauf si ces régimes ne sont pas discriminatoires, justifiés par une raison impérieuse d’intérêt général et proportionnés à cet objectif d’intérêt général. Cet ensemble de critères est repris à l’article 10,
paragraphe 2, de la directive « services » et également résumé à l’article 10, paragraphe 4, de cette directive, qui a été interprété par la Cour ( 56 ), en ce sens que les régimes d’autorisation doivent, de manière générale, permettre aux prestataires d’exercer leur activité sur l’ensemble du territoire national, à moins qu’une limitation à une partie spécifique de ce territoire ne soit pas discriminatoire, soit justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général et proportionnée. Ces trois
conditions sont également explicitement visées à l’article 15, paragraphe 3, de ladite directive.

62. Les articles 9 à 13 de la directive « services » traitent spécifiquement des conditions à remplir par un régime national d’autorisation, alors que son article 15, paragraphe 3, porte sur la compatibilité avec cette directive d’exigences nationales, notamment les limites territoriales et quantitatives, imposées plus généralement aux prestataires de services. Toutefois, il est clair qu’il existe un certain chevauchement entre ces différentes dispositions. En effet, la Cour a jugé, en substance,
qu’un « régime d’autorisation » qui impose une « limitation territoriale » aux prestataires de services souhaitant exercer leur activité économique et qui est incompatible avec l’article 15, paragraphe 3, de ladite directive, serait également exclu par l’article 10, paragraphe 4, de la même directive ( 57 ), et inversement.

63. Dans la présente affaire, les parties et les intéressés ont centré leurs observations et leurs mémoires sur la question de la compatibilité d’une mesure telle que celle en cause au principal avec l’article 15, paragraphe 3, de la directive « services ». Dans les sections qui suivent, je me concentrerai donc sur la question de la conformité d’une telle mesure aux exigences de cette disposition.

64. À cet égard, je commencerai par indiquer les raisons pour lesquelles j’estime que cette mesure constitue une exigence au sens de l’article 15, paragraphe 2, de la directive « services », qui limite la liberté d’établissement (sous-section 1). J’examinerai ensuite si une telle limite est i) non discriminatoire, ii) justifiée par une « raison impérieuse d’intérêt général » et iii) proportionnée, conformément aux trois conditions imposées par l’article 15, paragraphe 3, de la directive
« services ». J’expliquerai pourquoi il existe, à mon sens, des raisons de douter qu’une telle mesure satisfait à l’exigence de « proportionnalité » (sous-section 2). J’ajouterai également quelques mots sur le fait que les cours en cause présentent les caractéristiques d’un SIEG (sous-section 3).

1. Sur l’existence d’une limite (article 15, paragraphe 2, de la directive « services »)

65. Afin d’apprécier la compatibilité d’une mesure telle que celle en cause au principal, à la lumière des critères figurant à l’article 15, paragraphe 3, de la directive « services », il convient, tout d’abord, de déterminer si une telle mesure relève de l’une des catégories d’« exigences » énumérées à l’article 15, paragraphe 2, de cette directive, lues à la lumière de l’article 4, point 7, de ladite directive, qui prévoit, notamment, que « toute obligation, interdiction, condition ou limite
prévue dans les dispositions législatives, réglementaires ou administratives des États membres ou découlant de la jurisprudence » doit être considérée comme une « exigence » aux fins de la directive « services ».

66. Sur la base des éléments du dossier, il me semble que la critique principale de l’AUDICA, quant à la mesure en cause au principal, ne concerne pas uniquement le fait que les contrats portant sur la fourniture des services en cause doivent être attribués sous la forme de concessions de service public ; elle porte plutôt principalement sur le fait qu’un seul concessionnaire est autorisé à fournir les services en cause dans chacune des cinq zones géographiques préalablement délimitées sur
l’ensemble du territoire national (à l’exclusion de la Catalogne et du Pays basque).

67. À cet égard, je relève que l’article 15, paragraphe 2, sous a), de la directive « services » qualifie expressément les « limites quantitatives ou territoriales » à l’exercice d’une activité de services, d’« exigences », au sens de l’article 4, point 7, de cette directive, qui affectent la liberté d’établissement des prestataires de services ( 58 ).

68. Ainsi que le précise cette disposition, de telles restrictions existent, notamment, lorsqu’une mesure nationale impose des limites quant au nombre d’opérateurs autorisés à s’établir dans un État membre déterminé (ou dans une région donnée à l’intérieur d’un État membre) (limites quantitatives), ou lorsqu’elle impose le respect d’une distance géographique minimale entre prestataires (limites territoriales) ( 59 ). La Cour a précisé qu’une « limitation territoriale » est également présente dans
une situation dans laquelle une réglementation nationale limite, à tous égards, un agrément professionnel à un secteur géographique déterminé ( 60 ) ou interdit le commerce dans certaines zones géographiques ( 61 ).

69. Dans la présente affaire, la juridiction de renvoi indique (et l’ensemble des parties et des intéressés conviennent) que, en application de la mesure en cause au principal, le territoire espagnol (à l’exception de la Catalogne et du Pays basque) est divisé en cinq zones, une seule entité (le soumissionnaire retenu lors de la procédure d’attribution de la concession de service public) étant habilitée à fournir des cours de sensibilisation et de rééducation routière pour chaque zone ( 62 ). Cette
entité exerce un contrôle exclusif sur la zone pour laquelle elle est titulaire d’une concession de services publics, tandis qu’il est effectivement interdit aux autres prestataires d’assurer les services en cause dans la même zone.

70. Même si une mesure telle que celle en cause au principal n’empêche pas un prestataire de services de participer à la procédure d’attribution de concessions de service public pour la fourniture de cours de sensibilisation et de rééducation routière sur le marché, elle limite malgré tout le nombre de prestataires pouvant exercer ce droit (un dans chacune des cinq zones géographiques préalablement délimitées) et le lieu d’exercice.

71. Il s’ensuit qu’une telle mesure constitue, selon moi, à la fois une limite quantitative et une limite territoriale, au sens de l’article 15, paragraphe 2, sous a), de la directive « services » ( 63 ). En tant que telle, elle restreint la liberté d’établissement et ne sera autorisée que si elle satisfait aux conditions visées à l’article 15, paragraphe 3, de cette directive, que je vais à présent aborder.

2. Sur les conditions devant être satisfaites pour que la limite soit autorisée (article 15, paragraphe 3, de la directive « services »)

72. L’article 15, paragraphe 3, de la directive « services » énumère trois conditions devant être satisfaites pour qu’une « limite » soit autorisée. Plus précisément, cette disposition exige qu’une telle limite : i) ne soit pas discriminatoire en fonction de la nationalité [article 15, paragraphe 3, sous a), de cette directive] ; ii) soit nécessaire (c’est-à-dire justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général) [article 15, paragraphe 3, sous b), de ladite directive], et iii) soit
proportionnée [article 15, paragraphe 3, sous c), de la même directive].

73. Dans la présente affaire, la question de savoir si les deux premières conditions sont remplies ne me semble pas présenter de grandes difficultés.

74. En effet, il me semble clair, en premier lieu, qu’une limite telle que celle en cause au principal s’applique sans discrimination en fonction de la nationalité [article 15, paragraphe 3, sous a), de la directive « services »] (première condition).

75. En second lieu, j’estime qu’une telle limite est justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général au sens de l’article 15, paragraphe 3, sous b), de la directive « services », lu à la lumière de l’article 4, point 8, de cette directive (deuxième condition).

76. À cet égard, je relève que la justification fournie par les autorités espagnoles devant la juridiction de renvoi, pour permettre à une seule entité de fournir les services en cause dans chacune des cinq zones géographiques délimitées, est qu’une telle limite est nécessaire afin de garantir l’accessibilité des cours de sensibilisation et de rééducation routière sur l’ensemble du territoire pertinent. Selon les autorités espagnoles, en facilitant l’accès géographique aux cours de sensibilisation
et de rééducation routière, une mesure telle que celle en cause au principal contribue à la rééducation effective des conducteurs qui ont commis des infractions routières. Ainsi, globalement, elle renforce la sécurité routière.

77. Or, en vertu de l’article 4, point 8, de la directive « services », lu à la lumière du considérant 40 de celle-ci, la « sécurité routière » figure parmi les raisons impérieuses d’intérêt général susceptibles de justifier des restrictions à la liberté d’établissement. À mon avis, une mesure telle que celle en cause au principal, dont l’objectif est d’améliorer la sécurité routière, satisfait donc à la deuxième condition prévue à l’article 15, paragraphe 3, sous b), de ladite directive.

78. La question de savoir si une telle mesure satisfait à la troisième condition [celle imposée par l’article 15, paragraphe 3, sous c), de la directive « services »] (proportionnalité) est plus complexe. À cet égard, je rappelle que, pour remplir cette condition, deux exigences doivent être satisfaites. Premièrement, la mesure doit être appropriée, c’est‑à‑dire, selon le libellé de l’article 15, paragraphe 3, sous c), de la directive « services », être propre à garantir la réalisation de l’objectif
poursuivi. Deuxièmement, la mesure ne doit pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif. S’il existe un choix entre différentes mesures permettant d’atteindre l’objectif en cause, le moyen à retenir devrait être le moins restrictif de la liberté d’établissement garantie par la directive ( 64 ).

79. Selon une jurisprudence constante de la Cour, il appartient en dernier ressort au juge national, qui est seul compétent pour apprécier les faits du litige au principal, de déterminer si une mesure satisfait à ces deux exigences ( 65 ). Toutefois, afin de fournir des réponses utiles à la juridiction de renvoi, la Cour peut lui donner des indications tirées du dossier de l’affaire au principal ainsi que des observations écrites et orales qui lui ont été soumises, de nature à permettre à cette
juridiction de statuer ( 66 ).

80. S’agissant de la première exigence, je rappelle que la Cour a considéré à plusieurs reprises que des mesures qui constituent une limite territoriale étaient propres à garantir la réalisation de l’objectif poursuivi, lorsqu’elles ont pour objet de s’adapter aux besoins de la population, de couvrir l’ensemble du territoire ou de prendre en compte des régions géographiquement isolées ou autrement désavantagées ( 67 ).

81. À la lumière de cette jurisprudence, je partage l’avis de la CNAE et autres et du gouvernement espagnol selon lequel, dès lors qu’une mesure telle que celle en cause au principal garantit qu’il existe au moins un opérateur chargé d’exercer l’activité dans chacune des cinq zones situées sur l’ensemble du territoire pertinent, elle contribue à garantir l’accès des conducteurs à des centres de formation sur l’intégralité du territoire pertinent, y compris dans les zones défavorisées ou moins
attractives. Une telle mesure est donc propre à atteindre l’objectif poursuivi (qui est d’améliorer la « sécurité routière » en facilitant l’accès aux centres de formation pour les conducteurs ayant perdu des points sur leur permis de conduire).

82. S’agissant de la seconde exigence (autrement dit, le point de savoir si une mesure telle que celle en cause au principal va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif poursuivi), je dois toutefois admettre que je nourris des doutes.

83. En effet, dans le cadre du litige au principal, l’ensemble du territoire espagnol, à l’exclusion de la Catalogne et du Pays basque, n’est divisé qu’en cinq zones. Il ne peut y avoir qu’un seul prestataire dans chacune de ces cinq zones. Globalement, cela implique qu’un maximum de cinq prestataires peut fournir les services en cause.

84. Selon moi, il s’agit d’une limitation assez importante du nombre de prestataires, alors que l’on peine à voir en quoi une division du territoire pertinent en seulement cinq (grandes) zones est le moyen le moins contraignant d’assurer une répartition géographique adéquate des centres de formation. En effet, en l’absence d’exigences supplémentaires concernant, notamment, la distance géographique minimale ou maximale entre deux centres ou le nombre de centres à exploiter en fonction de la taille de
la population, il reste tout à fait possible, selon moi, que chaque concessionnaire ne fournisse les services en cause que dans les parties les plus rentables de la zone lui ayant été attribuée, à l’exclusion des parties moins attractives de cette dernière.

85. Je comprends à partir du dossier et, en particulier, des observations écrites de l’AUDICA, que la documentation et les spécifications de l’appel d’offres (cahier des charges) contiennent effectivement de telles exigences supplémentaires, en ce qui concerne, notamment, le nombre de centres à établir dans chaque zone en fonction de la taille de la population. À mon avis, ce sont ces exigences, plutôt que la division du territoire pertinent en cinq zones et la limitation corrélative du nombre de
prestataires, qui empêchent les opérateurs de concentrer leur activité exclusivement dans des zones jugées attractives au profit des habitants de ces zones et au détriment de ceux des zones moins attractives, qui sont confrontés à un accès plus restreint à ces services ( 68 ).

86. En définitive, il me semble que, si le territoire pertinent était divisé en un plus grand nombre de zones géographiques (de plus petite taille) (et d’un nombre supérieur à cinq), non seulement cela permettrait d’assurer un accès suffisant aux cours de sensibilisation et de rééducation routière sur l’ensemble du territoire pertinent, mais, ipso facto, cela permettrait également à un plus grand nombre de concessionnaires de service public de fournir les services en cause sur l’intégralité de ce
territoire. Par conséquent, je pense qu’il existe des mesures moins contraignantes permettant d’atteindre l’objectif d’intérêt général poursuivi, au sens de l’article 15, paragraphe 3, sous c), de la directive « services ».

87. Eu égard aux considérations qui précèdent, je suis d’avis qu’une mesure telle que celle en cause au principal ne satisfait pas à la troisième condition visée à l’article 15, paragraphe 3, de la directive « services », compte tenu du fait qu’elle va au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif poursuivi.

88. Selon moi, une telle mesure devrait donc être déclarée incompatible avec cette disposition de la directive « services ». Eu égard aux considérations que j’ai exposées au point 62 des présentes conclusions, je pense qu’une telle mesure est également exclue par l’article 10, paragraphe 4, de cette directive.

89. Étant parvenu à cette conclusion, je tiens à souligner que, selon moi, il n’est pas nécessaire d’aller jusqu’à affirmer que les services en cause ne devraient pas être fournis sous la forme d’une concession de service public. En effet, j’estime qu’il est possible de conserver l’obligation pour les contrats pertinents d’être attribués sous la forme de concessions de service public en tant que principe de base, tout en permettant à plus de concessionnaires d’exercer l’activité.

90. Plus précisément, je suis d’avis que, contrairement à ce que soutient l’AUDICA, le cadre juridique mis en place pour la fourniture des cours en cause ne doit pas être semblable à celui qui existe pour celle des cours visant dans un premier temps l’obtention d’un permis de conduire, qui est soumise à un régime d’autorisation, mais ne fait pas l’objet d’une concession de service public.

91. À cet égard, je suis sensible aux arguments avancés par le gouvernement espagnol afin d’expliquer pourquoi ces deux activités devraient être traitées différemment. Le gouvernement espagnol soutient (de manière convaincante, selon moi) que les cours fournis en vue de l’obtention d’un permis de conduire sont différents, à deux égards, de ceux qui visent à permettre aux conducteurs de récupérer des points sur leur permis de conduire : premièrement, ils ne sont pas destinés à des personnes ayant
commis des infractions routières, et deuxièmement, ils ont lieu dans la période précédant un examen qui est directement organisé par les autorités publiques compétentes, ce qui implique que ces dernières peuvent, en tout état de cause, exercer leur contrôle sur la question de savoir s’il convient d’accorder le permis de conduire. Il n’existe pas d’examen équivalent pour la récupération des points du permis ayant été perdus à la suite de la commission d’infractions routières. C’est pourquoi il
est nécessaire que les autorités publiques renforcent leur contrôle sur la fourniture des cours en cause.

92. J’ajouterai que, en tout état de cause, la manière dont deux services différents peuvent être organisés au sein d’un État membre relève principalement, à mon sens, d’une problématique relative à la cohérence de la réglementation nationale. Cela n’est pas concluant quant au point de savoir si une mesure concernant uniquement l’un de ces deux services est compatible avec les conditions imposées par l’article 15, paragraphe 3, de la directive « services ».

3. Sur le critère spécifique applicable aux SIEG (article 15, paragraphe 4, de la directive « services »)

93. À titre de remarque finale, je souhaiterais expliquer pourquoi je pense que le fait que la fourniture des cours en cause puisse être qualifiée de SIEG, au sens de l’article 14 et de l’article 106, paragraphe 2, TFUE ( 69 ), n’affecte pas la conclusion à laquelle je viens de parvenir en ce qui concerne la compatibilité d’une mesure telle que celle en cause au principal avec l’article 15, paragraphe 3, de la directive « services ».

94. Sur ce point, je rappelle, premièrement, que, aux fins de la directive « services », des services ne peuvent être considérés comme des SIEG que s’ils sont fournis en application d’une « mission particulière de service public confiée au prestataire par l’État membre concerné » ( 70 ). La charge de la preuve de l’existence d’une telle « mission particulière » pèse sur les États membres. En effet, ces derniers jouissent d’une large marge d’appréciation pour définir l’étendue et l’organisation de
leurs SIEG, en tenant compte en particulier d’objectifs propres à leur politique nationale ( 71 ).

95. Deuxièmement, je relève que, si les juridictions nationales devaient considérer que la fourniture des cours en cause constitue un SIEG, un tel service relèverait alors de l’article 15, paragraphe 4, de la directive « services » ( 72 ), de sorte que la compatibilité avec le droit de l’Union de la mesure en cause au principal devrait être appréciée à la lumière de la règle spécifique figurant dans cette disposition.

96. Cette règle spécifique prévoit, en substance, que l’article 15, paragraphes 1 à 3, de cette directive ne s’appliquent à la législation relative aux SIEG que dans la mesure où cela ne fait pas échec à l’accomplissement, en droit ou en fait, de la mission particulière qui leur a été confiée ( 73 ).

97. La Cour a précisé qu’il découle du libellé même de cette disposition que les SIEG ne sont pas automatiquement exclus du champ d’application de l’article 15 de la directive « services » ( 74 ). Toutefois, elle a également jugé que, lorsque l’article 15, paragraphe 4, de cette directive s’applique, il convient d’interpréter les paragraphes 1 à 3 de cette disposition en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce qu’une mesure nationale impose une limitation à un SIEG, pour autant que cette limitation
soit : i) nécessaire à l’exercice de la mission particulière dans des conditions économiquement viables et ii) proportionnée à cet exercice ( 75 ).

98. Je comprends la première de ces deux exigences en ce sens que les conditions visées à l’article 15, paragraphes 1 à 3, de la directive « services » ne devraient pas s’appliquer lorsque cela empêcherait que la mission qualifiée de « SIEG » soit accomplie dans des conditions économiquement viables.

99. Dans la présente affaire, s’il était établi que la fourniture des cours en cause constitue un SIEG, il appartiendrait à la juridiction nationale de procéder à une telle appréciation. Cela étant, je tendrais à partager le point de vue du gouvernement tchèque selon lequel l’application de l’article 15, paragraphes 1 à 3, de la directive « services », dans la présente affaire, ne fait pas échec à l’accomplissement de la mission particulière qui a été confiée dans le cadre du litige au principal.

100. En effet, comme je l’ai indiqué au point 86 des présentes conclusions, je suis d’avis qu’une division du territoire pertinent en un plus grand nombre de zones (de plus petite taille) que les cinq zones géographiques existantes (ce qui pourrait donner lieu à une augmentation corrélative du nombre de concessionnaires sur l’ensemble du territoire pertinent) est ce qui contribuerait, en réalité, à faciliter la prestation des services en cause dans des zones moins attractives. Cela me conduit à
conclure que la division territoriale ainsi que la limite quantitative imposée par une mesure telle que celle en cause au principal ne sont pas nécessaires à l’accomplissement de la mission particulière en cause dans des conditions économiquement viables ; bien au contraire.

101. Eu égard à ces considérations, je suis d’avis que le fait que l’activité en cause au principal puisse être qualifiée de « SIEG »ne devrait avoir aucune incidence sur l’application de l’article 15, paragraphes 1 à 3, de la directive « services » dans la présente affaire.

V. Conclusion

102. En conclusion, je propose à la Cour de répondre à la question préjudicielle posée par le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne) comme suit :

1) La directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur,

doit être interprétée en ce sens que :

elle couvre, à tous égards, la fourniture de cours de sensibilisation et de rééducation routière destinés aux conducteurs ayant perdu des points sur leur permis de conduire à la suite de la commission d’infractions routières.

2) L’article 15, paragraphe 1, paragraphe 2, sous a), et paragraphe 3, de la directive 2006/123

doit être interprété en ce sens que :

il s’oppose à une réglementation nationale en vertu de laquelle : i) la fourniture de ces cours est configurée comme une concession de service public ; ii) cette fourniture est subordonnée à la condition qu’un seul opérateur puisse fournir de tels cours dans une zone géographique spécifique, et iii) le nombre global de prestataires ne dépasse pas le nombre de zones géographiques délimitées par l’autorité compétente, lorsque cette réglementation va au-delà de ce qui est nécessaire pour
atteindre l’objectif de sécurité routière. Il appartient à la juridiction nationale de statuer sur ce point.

3) L’article 15, paragraphe 4, de la directive 2006/123

doit être interprété en ce sens que :

il ne s’oppose pas à une telle réglementation nationale lorsque les missions relatives à la fourniture desdits cours sont qualifiées de « missions liées à un service d’intérêt économique général », pour autant que la restriction imposée soit nécessaire et proportionnée à l’accomplissement de ces missions dans des conditions économiquement viables. Il appartient à la juridiction nationale de procéder à une telle appréciation.

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur (JO 2006, L 376, p. 36, ci-après la « directive “services” »).

( 3 ) Voir article 1er, paragraphe 1, et considérants 5 à 7 de la directive « services ».

( 4 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l’attribution de contrats de concession (JO 2014, L 94, p. 1).

( 5 ) BOE no 283, du 24 novembre 2009, p. 99570.

( 6 ) BOE no 172, du 20 juillet 2005, p. 25781.

( 7 ) BOE no 190, du 10 août 2005, p. 28083.

( 8 ) L’article 14 TFUE prévoit, en substance, que l’Union et ses États membres veillent à ce que les SIEG fonctionnent sur la base de principes et dans des conditions qui leur permettent d’accomplir leurs missions.

( 9 ) Voir arrêt du 23 février 2016, Commission/Hongrie (C‑179/14, EU:C:2016:108, points 148 à 150). Voir également considérant 77 de la directive « services ».

( 10 ) Cette disposition définit le terme « service » comme « toute activité économique non salariée, exercée normalement contre rémunération, telle que visée à l’[article 57 TFUE] ». Cet article indique, en outre, que les « services » comprennent notamment des activités de caractère industriel, des activités de caractère commercial, des activités artisanales, les activités des professions libérales. Voir, également, pour plus de détails quant à la manière dont ce terme doit être interprété dans le
contexte de l’application de la directive « services », considérants 33 et 34 de cette directive.

( 11 ) J’observe que, en se référant principalement aux dispositions du chapitre III (articles 9 à 15) de la directive « services », la juridiction de renvoi paraît elle-même considérer que la présente affaire relève des règles relatives à l’établissement plutôt que de celles relatives aux services [voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Szpunar dans l’affaire Hiebler (C‑293/14, EU:C:2015:472, points 21 et 22)].

( 12 ) Voir, à cet égard, arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558, point 59 et jurisprudence citée).

( 13 ) Voir, à cet égard, arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558, point 61 et jurisprudence citée). Voir également arrêt du 11 juin 2020, KOB (C‑206/19, EU:C:2020:463, point 32).

( 14 ) À cet égard, je renvoie aux conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire Commission/Hongrie (C‑179/14, EU:C:2015:619, points 69 à 73). Je souhaite également souligner que, comme l’avocat général Szpunar l’a observé dans ses conclusions dans les affaires jointes Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:122, point 41), la Cour s’est limitée, dans au moins deux arrêts, à donner une interprétation des articles 10, 11 et 15 de la directive « services » sans se prononcer sur les
dispositions du traité FUE [voir arrêts du 1er octobre 2015, Trijber et Harmsen (C‑340/14 et C‑341/14, EU:C:2015:641), et du 23 décembre 2015, Hiebler (C‑293/14, EU:C:2015:843)].

( 15 ) En tout état de cause, il me paraît évident que, si une mesure devait être considérée comme incompatible avec l’article 15 de la directive « services », cette mesure serait tout aussi incompatible avec l’article 49 TFUE. Par exemple, les motifs de justification fournis par l’article 52 TFUE (pour les « restrictions » imposées, entre autres, à la liberté d’établissement protégée par l’article 49 TFUE) figurent tous en tant que « raisons impérieuses d’intérêt général », au sens de l’article 15,
paragraphe 3, de cette directive (lu à la lumière de l’article 4, point 8, de celle-ci).

( 16 ) Je note que, dans la présente demande de décision préjudicielle, la juridiction de renvoi mentionne également le fait que la fourniture des cours en cause peut être un SIEG. J’aborderai cette notion à la section B ci-dessous. À ce stade, il suffit d’indiquer que, même si la fourniture des cours en cause était considérée comme un SIEG, celle-ci relèverait toujours du champ d’application de la directive « services » (voir, à cet égard, considérant 17, article 1er, paragraphes 2 et 3, et
article 15, paragraphe 4, de cette directive).

( 17 ) À cet égard, je remarque que, alors que « les services dans le domaine des transports » sont explicitement exclus du champ d’application matériel de la même directive, ils ne sont pas exclus du champ d’application de l’article 49 TFUE. En effet, la Cour a explicitement indiqué que les dispositions du traité FUE en matière de liberté d’établissement « s’appliqu[ai]ent directement au transport » [voir arrêt du 22 décembre 2010, Yellow Cab Verkehrsbetrieb (C‑338/09, EU:C:2010:814, point 33)].
Par conséquent, si l’activité en cause dans la procédure au principal devait être considérée comme « un service dans le domaine des transports », la compatibilité de la mesure en cause devrait être appréciée à la lumière de l’article 49 TFUE.

( 18 ) En ce sens, l’article 2, paragraphe 2, sous d), de la directive « services » reproduit effectivement la règle consacrée à l’article 58, paragraphe 1, TFUE [voir, à cet égard, arrêt du 15 octobre 2015, Grupo Itevelesa e.a. (C‑168/14, EU:C:2015:685, point 44)].

( 19 ) « Les services dans le domaine des transports » obéissent plutôt à un ensemble de règles distinctes qui sont couvertes par le titre VI TFUE [voir, à cet effet, conclusions de l’avocat général Szpunar dans les affaires jointes Trijber et Harmsen (C‑340/14 et C‑341/14, EU:C:2015:505, point 28)].

( 20 ) Voir, à cet effet, conclusions de l’avocat général Szpunar dans les affaires jointes Trijber et Harmsen (C‑340/14 et C‑341/14, EU:C:2015:505, point 29).

( 21 ) Voir arrêts du 15 octobre 2015, Grupo Itevelesa e.a. (C‑168/14, EU:C:2015:685, point 46), et du 20 décembre 2017, Asociación Profesional Elite Taxi (C‑434/15, EU:C:2017:981, point 41).

( 22 ) À cet égard, je souscris entièrement aux conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire Grupo Itevelesa e.a. (C‑168/14, EU:C:2015:351, point 28).

( 23 ) Voir arrêt du 1er octobre 2015, Trijber et Harmsen (C‑340/14 et C‑341/14, EU:C:2015:641, point 51).

( 24 ) Voir considérant 21 de la directive « services ».

( 25 ) Voir, à cet égard, avis 2/15 (Accord de libre-échange avec Singapour), du 16 mai 2017 (EU:C:2017:376, point 61). Voir également, à cet effet, conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire Grupo Itevelesa e.a. (C‑168/14, EU:C:2015:351, point 31).

( 26 ) Voir considérant 33 de la directive « services ».

( 27 ) Voir arrêt du 19 décembre 2019, Dobersberger (C‑16/18, EU:C:2019:1110, point 26).

( 28 ) Je relève que, aux termes du considérant 21 de la directive « services », les « services dans le domaine des transports » comprennent, mais sans s’y limiter, « les services de transport tels que les transports urbains, les taxis et les ambulances ainsi que les services portuaires ». Toutefois, je considère que cela ne suffit pas pour conférer à l’article 2, paragraphe 2, sous d), de cette directive un champ d’application trop large.

( 29 ) C‑340/14 et C‑341/14, EU:C:2015:505, points 36 à 38.

( 30 ) Conformément au Manuel relatif à la mise en œuvre de la directive « services », l’exclusion visée à l’article 2, paragraphe 2, sous d), de cette directive ne s’étend pas aux « services d’auto‑école, aux services de déménagement, aux services de location de voitures, aux services funéraires ou aux services de photographies aériennes », ni aux « activités commerciales dans les ports ou les aéroports tels que les boutiques et les restaurants » (voir Manuel relatif à la mise en œuvre de la
directive « services », Office des publications officielles des Communautés européennes, 2007, p. 11, disponible en français à l’adresse suivante : https://op.europa.eu/fr/publication-detail/-/publication/a4987fe6-d74b-4f4f-8539-b80297d29715).

( 31 ) De toute évidence, il appartient à la juridiction nationale de vérifier cette constatation [voir arrêt du 1er octobre 2015, Trijber et Harmsen (C‑340/14 et C‑341/14, EU:C:2015:641, point 54)].

( 32 ) Arrêt du 15 octobre 2015 (C‑168/14, EU:C:2015:685).

( 33 ) Voir arrêt du 15 octobre 2015, Grupo Itevelesa e.a. (C‑168/14, EU:C:2015:685, points 47 et 50). Par conséquent, la Cour a considéré que l’activité des centres de contrôle technique des véhicules était exclue du champ d’application de la directive « services » (voir point 52 de cet arrêt).

( 34 ) À cet égard, voir conclusions de l’avocat général Wahl dans l’affaire Grupo Itevelesa e.a. (C‑168/14, EU:C:2015:351, point 31).

( 35 ) Voir arrêt du 15 octobre 2015, Grupo Itevelesa e.a. (C‑168/14, EU:C:2015:685).

( 36 ) Cette conclusion découle également du considérant 57 de la directive « services » qui indique, en substance, que les dispositions relatives aux régimes d’autorisation de ladite directive (articles 9 à 13) ne sauraient s’appliquer à des concessions de services publics pouvant, notamment, relever de la directive 2014/23 [voir arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558, point 45)]. Inversement, le considérant 14 de la directive 2014/23 indique que « les
autorisations ou les licences » ne doivent pas avoir le statut de « concessions » au sens de cette directive et qu’elles restent soumises aux dispositions de la directive « services ».

( 37 ) Contrairement à ce que la CNAE et autres ont soutenu lors de l’audience, j’estime que la directive 2014/23 et la directive « services »ne s’excluent pas mutuellement dans l’ensemble.

( 38 ) Inversement, si les cours en cause n’étaient pas couverts par la directive 2014/23, les articles 9 à 13 de la directive « services » pourraient s’appliquer à la situation en cause dans la procédure au principal, à condition toutefois, que la mesure nationale en cause puisse être considérée comme un « régime d’autorisation » au sens de ces dispositions (à cet égard, voir points 51 à 55 des présentes conclusions).

( 39 ) Voir article 1er, paragraphe 1, de la directive 2014/23.

( 40 ) Voir article 5, point 1, sous b), de la directive 2014/23.

( 41 ) Voir, à cet effet, arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558, point 46 et jurisprudence citée).

( 42 ) Voir article 54, second alinéa, de la directive 2014/23.

( 43 ) J’observe que l’ensemble des parties et des intéressés dans la présente affaire semblent convenir que l’appel d’offres dans la procédure au principal a été publié au mois de novembre 2014, après la date limite du 17 avril 2014.

( 44 ) Voir arrêt du 15 octobre 2009, Hochtief et Linde-Kca-Dresden (C‑138/08, EU:C:2009:627, point 30).

( 45 ) Voir considérant 23 de la directive 2014/23.

( 46 ) Voir article 8, paragraphe 1, de la directive 2014/23.

( 47 ) Voir, en ce sens, arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558, point 39).

( 48 ) Dans cette mesure, je n’approuve donc pas l’argument de la CNAE et autres selon lequel le fait que les cours en cause doivent être fournis au moyen d’une « concession »fait obstacle à l’applicabilité de la directive « services ».

( 49 ) Il s’agissait également du facteur déterminant dans l’arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558, point 41). Voir, également, point 6.1.1 (p. 24) du Manuel relatif à la mise en œuvre de la directive « services » (mentionné à la note en bas de page 30 des présentes conclusions).

( 50 ) Par souci d’exhaustivité, je souhaite ajouter que, dans le cas où ni la directive 2014/23 ni les articles 9 à 13 de la directive « services » ne devaient s’appliquer dans l’affaire en cause, les autorités publiques seraient tenues, selon moi, de respecter les règles fondamentales du traité FUE, en général, et le principe de non‑discrimination, en particulier [voir arrêt du 14 juillet 2016, Promoimpresa e.a. (C‑458/14 et C‑67/15, EU:C:2016:558, point 64 et jurisprudence citée)]. En d’autres
termes, les conditions entourant l’attribution d’un contrat de concession de service public dans la procédure au principal devraient respecter l’article 49 TFUE.

( 51 ) Voir, notamment, arrêt du 11 mars 2010, Attanasio Group (C‑384/08, EU:C:2010:133, point 23).

( 52 ) Voir, notamment, arrêt du 22 décembre 2010, Omalet (C‑245/09, EU:C:2010:808, point 12 et jurisprudence citée).

( 53 ) Voir, à titre d’exemple, à l’appui de l’approche selon laquelle une telle exigence n’existe pas, conclusions de l’avocat général Szpunar dans les affaires jointes Trijber et Harmsen (C‑340/14 et C‑341/14, EU:C:2015:505, points 49 à 57).

( 54 ) Voir arrêt du 30 janvier 2018, X et Visser (C‑360/15 et C‑31/16, EU:C:2018:44, point 110). Ce n’est pas le cas pour la libre prestation de services (voir point 102 de cet arrêt).

( 55 ) Voir, à cet effet, arrêt du 1er octobre 2015, Trijber et Harmsen (C‑340/14 et C‑341/14, EU:C:2015:641, point 41). Dans cet arrêt, la Cour a estimé que le fait que la juridiction de renvoi avait constaté, dans sa décision de renvoi, que le régime en cause pouvait gêner l’accès au marché de tous les prestataires, y compris ceux originaires d’autres États membres, suffisait pour que les situations visées par les questions préjudicielles soient considérées comme n’étant pas purement internes.

( 56 ) Voir arrêt du 23 décembre 2015, Hiebler (C‑293/14, EU:C:2015:843, point 53).

( 57 ) Voir arrêt du 23 décembre 2015, Hiebler (C‑293/14, EU:C:2015:843, points 55 et suiv.).

( 58 ) Voir arrêt du 23 décembre 2015, Hiebler (C‑293/14, EU:C:2015:843, point 51).

( 59 ) Voir article 15, paragraphe 2, sous a), de la directive « services » ainsi que les explications fournies dans le Manuel relatif à la mise en œuvre de la directive « services » (point 6.3.1, p. 35) (voir référence à la note en bas de page 30 des présentes conclusions).

( 60 ) Voir arrêt du 23 décembre 2015, Hiebler (C‑293/14, EU:C:2015:843, points 48 et 49).

( 61 ) Voir arrêt du 30 janvier 2018, X et Visser (C‑360/15 et C‑31/16, EU:C:2018:44, point 131).

( 62 ) Selon la CNAE et autres, dans le contexte de la procédure au principal, le soumissionnaire retenu pour chacune des cinq zones est, en fait, la même entité.

( 63 ) À mon sens, il est possible que la mesure en cause dans la procédure au principal puisse également être qualifiée d’« exigenc[e] [...] qui réserv[e] l’accès à l’activité de service concernée à des prestataires particuliers en raison de la nature spécifique de l’activité » en cause [voir article 15, paragraphe 2, sous d), de la directive « services »], étant donné que, comme l’AUDICA le soutient, une telle mesure vise effectivement à créer cinq monopoles (un dans chaque zone).

( 64 ) Voir arrêt du 1er octobre 2015, Trijber et Harmsen (C‑340/14 et C‑341/14, EU:C:2015:641, point 70 et jurisprudence citée).

( 65 ) Voir arrêt du 1er octobre 2015, Trijber et Harmsen (C‑340/14 et C‑341/14, EU:C:2015:641, point 71).

( 66 ) Voir arrêt du 1er octobre 2015, Trijber et Harmsen (C‑340/14 et C‑341/14, EU:C:2015:641, point 55).

( 67 ) Voir, à cet effet, arrêts du 1er juin 2010, Blanco Pérez et Chao Gómez (C‑570/07 et C‑571/07, EU:C:2010:300, point 70), et du 26 septembre 2013, Ottica New Line (C‑539/11, EU:C:2013:591, points 36 et 37), concernant des limites territoriales à l’établissement de magasins d’optique et de pharmacies. Voir, également, arrêt du 23 décembre 2015, Hiebler (C‑293/14, EU:C:2015:843, point 60), concernant des restrictions analogues à l’exercice de la profession de ramoneur.

( 68 ) Voir, par analogie, arrêt du 1er juin 2010, Blanco Pérez et Chao Gómez (C‑570/07 et C‑571/07, EU:C:2010:300, point 73).

( 69 ) Conformément à cette disposition, les SIEG « sont soumi[s] aux règles des traités, [...] dans les limites où l’application de ces règles ne fait pas échec à l’accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie ».

( 70 ) Voir considérant 70 de la directive « services ».

( 71 ) Voir considérant 70 de la directive « services ». Dans le cadre de cette directive, cette marge d’appréciation a été réaffirmée en droit de l’Union à l’article 1er, paragraphe 3, second alinéa, de ladite directive, qui indique que cette même directive ne porte pas atteinte à la faculté des États membres de définir, conformément au droit de l’Union, ce qu'ils entendent par « services d'intérêt économique général ».

( 72 ) Voir point 7 des présentes conclusions.

( 73 ) Voir également considérant 72 de la directive « services ».

( 74 ) Voir arrêt du 7 novembre 2018, Commission/Hongrie (C‑171/17, EU:C:2018:881, point 62).

( 75 ) Voir, à cet effet, arrêt du 23 décembre 2015, Hiebler (C‑293/14, EU:C:2015:843, point 73).


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : C-292/21
Date de la décision : 15/09/2022
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Renvoi préjudiciel – Directive 2006/123/CE – Services dans le marché intérieur – Article 2, paragraphe 2, sous d) – Champ d’application matériel – Service dans le domaine des transports – Fourniture de cours de sensibilisation et de rééducation routière pour la récupération de points de permis de conduire – Concession de service public – Article 15 – Exigences – Répartition du territoire pertinent en cinq lots – Limite quantitative et territoriale d’accès à l’activité concernée – Raisons impérieuses d’intérêt général – Justification – Sécurité routière – Proportionnalité – Service d’intérêt économique général.

Droit d'établissement

Libre prestation des services

Marché intérieur - Principes


Parties
Demandeurs : Administración General del Estado e.a.
Défendeurs : Asociación para la Defensa de los Intereses Comunes de las Autoescuelas (AUDICA) et Ministerio Fiscal.

Composition du Tribunal
Avocat général : Emiliou

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2022:694

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award