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20/01/2022 | CJUE | N°C-328/20

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Commission européenne contre République d'Autriche., 20/01/2022, C-328/20


 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JEAN RICHARD DE LA TOUR

présentées le 20 janvier 2022 ( 1 )

Affaire C‑328/20

Commission européenne

contre

République d’Autriche

« Manquement d’État – Coordination des systèmes de sécurité sociale – Règlement (CE) no 883/2004 – Articles 4, 7 et 67 – Libre circulation des travailleurs – Règlement (UE) no 492/2011 – Article 7 – Égalité de traitement – Prestations familiales – Avantages sociaux et fiscaux – Adaptation du montant de

s prestations et des avantages en fonction du niveau des prix dans l’État de résidence des enfants »

I. Introduction

1. P...

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JEAN RICHARD DE LA TOUR

présentées le 20 janvier 2022 ( 1 )

Affaire C‑328/20

Commission européenne

contre

République d’Autriche

« Manquement d’État – Coordination des systèmes de sécurité sociale – Règlement (CE) no 883/2004 – Articles 4, 7 et 67 – Libre circulation des travailleurs – Règlement (UE) no 492/2011 – Article 7 – Égalité de traitement – Prestations familiales – Avantages sociaux et fiscaux – Adaptation du montant des prestations et des avantages en fonction du niveau des prix dans l’État de résidence des enfants »

I. Introduction

1. Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en mettant en place :

1) un mécanisme d’adaptation relatif à l’allocation familiale et au crédit d’impôt pour enfant à charge pour les travailleurs dont les enfants résident en permanence dans un autre État membre, la République d’Autriche a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu :

– des articles 4, 7 et 67 du règlement (CE) no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, sur la coordination des systèmes de sécurité sociale ( 2 ), ainsi que

– de l’article 7, paragraphe 2, du règlement (UE) no 492/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2011, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de l’Union ( 3 ), et,

2) pour les travailleurs migrants dont les enfants résident en permanence dans un autre État membre, un mécanisme d’adaptation relatif au bonus familial « plus », au crédit d’impôt pour ménage à revenu unique, au crédit d’impôt pour foyer monoparental et au crédit d’impôt pour pension alimentaire, la République d’Autriche a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011.

2. La Commission considère, en substance, que, en l’état du droit de l’Union, celui-ci ne reconnaît pas aux États membres une marge d’appréciation pour adapter le montant des prestations familiales versées par eux sur le niveau des prix de l’État de résidence de l’enfant concerné et que cette adaptation ainsi que celle de certains avantages fiscaux accordés aux familles sont discriminatoires et ne peuvent être considérées comme constituant une mesure nécessaire et proportionnée.

3. Dans les présentes conclusions, j’expliquerai les raisons pour lesquelles je considère que les griefs soutenus par la Commission sont fondés.

II. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

1.   Le règlement no 883/2004

4. Les considérants 8, 12 et 16 du règlement no 883/2004 énoncent :

« (8) Le principe général de l’égalité de traitement est d’une importance particulière pour les travailleurs qui ne résident pas dans l’État membre où ils travaillent, y compris les travailleurs frontaliers.

[...]

(12) Compte tenu de la proportionnalité, il convient de veiller à ce que le principe d’assimilation des faits ou événements ne donne pas lieu à des résultats objectivement injustifiés ou à un cumul de prestations de même nature pour la même période.

[...]

(16) À l’intérieur de [l’Union européenne], il n’est en principe pas justifié de faire dépendre les droits en matière de sécurité sociale du lieu de résidence de l’intéressé ; toutefois, dans des cas spécifiques, notamment pour des prestations spéciales qui ont un lien avec l’environnement économique et social de l’intéressé, le lieu de résidence pourrait être pris en compte. »

5. L’article 1er, sous z), de ce règlement dispose :

« Aux fins du présent règlement :

[...]

z) le terme “prestations familiales” désigne toutes les prestations en nature ou en espèces destinées à compenser les charges de famille, à l’exclusion des avances sur pensions alimentaires et des allocations spéciales de naissance ou d’adoption visées à l’annexe I. »

6. L’article 3, paragraphe 1, sous j), du règlement no 883/2004 prévoit :

« Le présent règlement s’applique à toutes les législations relatives aux branches de sécurité sociale qui concernent :

[...]

j) les prestations familiales. »

7. L’article 4 du règlement no 883/2004, intitulé « Égalité de traitement », dispose :

« À moins que le présent règlement n’en dispose autrement, les personnes auxquelles le présent règlement s’applique bénéficient des mêmes prestations et sont soumises aux mêmes obligations, en vertu de la législation de tout État membre, que les ressortissants de celui-ci. »

8. L’article 5 du règlement no 883/2004, intitulé « Assimilation de prestations, de revenus, de faits ou d’événements », est libellé comme suit :

« À moins que le présent règlement n’en dispose autrement et compte tenu des dispositions particulières de mise en œuvre prévues, les dispositions suivantes s’appliquent :

a) si, en vertu de la législation de l’État membre compétent, le bénéfice de prestations de sécurité sociale ou d’autres revenus produit certains effets juridiques, les dispositions en cause de cette législation sont également applicables en cas de bénéfice de prestations équivalentes acquises en vertu de la législation d’un autre État membre ou de revenus acquis dans un autre État membre ;

b) si, en vertu de la législation de l’État membre compétent, des effets juridiques sont attribués à la survenance de certains faits ou événements, cet État membre tient compte des faits ou événements semblables survenus dans tout autre État membre comme si ceux-ci étaient survenus sur son propre territoire. »

9. L’article 7 du règlement no 883/2004, intitulé « Levée des clauses de résidence », prévoit :

« À moins que le présent règlement n’en dispose autrement, les prestations en espèces dues en vertu de la législation d’un ou de plusieurs États membres ou du présent règlement ne peuvent faire l’objet d’aucune réduction, modification, suspension, suppression ou confiscation du fait que le bénéficiaire ou les membres de sa famille résident dans un État membre autre que celui où se trouve l’institution débitrice. »

10. L’article 67 du règlement no 883/2004, intitulé « Membres de la famille résidant dans un autre État membre », dispose :

« Une personne a droit aux prestations familiales conformément à la législation de l’État membre compétent, y compris pour les membres de sa famille qui résident dans un autre État membre, comme si ceux-ci résidaient dans le premier État membre. Toutefois, le titulaire d’une pension a droit aux prestations familiales conformément à la législation de l’État membre compétent pour sa pension. »

2.   Le règlement no 492/2011

11. Au chapitre I du règlement no 492/2011, l’article 7, paragraphes 1 et 2, figurant dans la section 2, intitulée « De l’exercice de l’emploi et de l’égalité de traitement », dispose :

« 1.   Le travailleur ressortissant d’un État membre ne peut, sur le territoire des autres États membres, être, en raison de sa nationalité, traité différemment des travailleurs nationaux, pour toutes conditions d’emploi et de travail, notamment en matière de rémunération, de licenciement et de réintégration professionnelle ou de réemploi s’il est tombé au chômage.

2.   Il y bénéficie des mêmes avantages sociaux et fiscaux que les travailleurs nationaux. »

B. Le droit autrichien

1.   Le FLAG

12. Conformément à l’article 1er du Bundesgesetz betreffend den Familienlastenausgleich durch Beihilfen (loi fédérale relative à la compensation des charges familiales par des allocations) ( 4 ), du 24 octobre 1967, les prestations prévues sont « octroyées en vue d’une compensation des charges dans l’intérêt de la famille ».

13. L’article 2, paragraphes 1 et 8, du FLAG dispose :

« (1)   Les personnes qui ont leur domicile ou leur résidence habituelle sur le territoire fédéral ont droit aux allocations familiales

a) pour les enfants mineurs ;

[...]

(8)   Les personnes n’ont droit aux allocations familiales que si leur centre d’intérêts se situe sur le territoire fédéral. Le centre d’intérêts d’une personne se situe dans l’État avec lequel celle-ci a les rapports personnels et économiques les plus étroits. »

14. Aux termes de l’article 4 du FLAG :

« (1)   Les personnes qui ont droit à une prestation équivalente accordée par un autre État n’ont pas droit aux allocations familiales.

(2)   Les ressortissants autrichiens qui sont exclus du droit aux allocations familiales en vertu du paragraphe 1 ou de l’article 5, paragraphe [4], bénéficient d’un versement compensatoire si le montant de la prestation équivalente accordée par un autre État, à laquelle lesdits ressortissants autrichiens ou une autre personne ont droit (article 5, paragraphe [4]), est inférieur aux allocations familiales qui, en l’absence de la prestation équivalente précitée, devraient leur être octroyées en
vertu de la présente loi fédérale.

(3)   Le versement compensatoire correspond à la différence entre la prestation équivalente accordée par un autre État et les allocations familiales qui devraient être octroyées en vertu de la présente loi fédérale.

[...]

(6)   Les versements compensatoires sont considérés comme étant des allocations familiales au sens de la présente loi fédérale, mais les dispositions relatives au montant des allocations familiales ne s’appliquent pas aux versements compensatoires.

[...] »

15. L’article 5, paragraphes 3 et 4, du FLAG est libellé comme suit :

« (3)   Il n’y a pas de droit aux allocations familiales pour les enfants qui résident de manière permanente à l’étranger.

(4)   Il n’y a pas de droit aux allocations familiales pour les enfants pour lesquels il y a un droit au versement d’une prestation équivalente accordée par un autre État. Cela n’exclut pas l’octroi d’un versement compensatoire (article 4, paragraphe 2). »

16. L’article 8 du FLAG dispose :

« (1)   Le montant des allocations familiales dû à une personne est déterminé en fonction du nombre et de l’âge des enfants pour lesquels les allocations familiales sont octroyées.

(2)   Le montant mensuel des allocations familiales s’élève à

[...]

3. à compter du 1er janvier 2018

a) 114 euros pour chaque enfant à compter du début du mois calendaire de naissance,

b) 121,90 euros pour chaque enfant à compter du début du mois calendaire au cours duquel il accomplit sa troisième année,

c) 141,50 euros pour chaque enfant à compter du début du mois calendaire au cours duquel il accomplit sa dixième année,

d) 165,10 euros pour chaque enfant à compter du début du mois calendaire au cours duquel il accomplit sa dix-neuvième année.

(3)   Les allocations familiales augmentent par mois, pour chaque enfant,

[...]

3. à compter du 1er janvier 2018, si elles sont

a) accordées pour deux enfants, de 7,10 euros,

b) accordées pour trois enfants, de 17,40 euros,

c) accordées pour quatre enfants, de 26,50 euros,

d accordées pour cinq enfants, de 32 euros,

e) accordées pour six enfants, de 35,70 euros,

f) accordées pour sept enfants ou plus, de 52 euros.

(4)   Les allocations familiales augmentent par mois, pour chaque enfant lourdement handicapé,

[...]

3. de 155,9 euros à compter du 1er janvier 2018.

[...]

(8)   Pour chaque enfant qui, au cours d’une année calendaire, a déjà accompli ou qui accomplit sa sixième année et qui n’a pas encore accompli sa seizième année, les allocations familiales augmentent de 100 euros à compter [du mois] de septembre de la présente année calendaire. »

17. L’article 8a du FLAG prévoit :

« (1)   Les montants des allocations familiales (article 8) pour les enfants qui résident en permanence sur le territoire d’un autre État membre de l’Union [...], d’une autre partie à l’accord sur l’Espace économique européen [du 2 mai 1992 ( 5 )] ou de la Suisse sont déterminés sur la base du rapport entre le niveau des prix comparés publié par l’Office statistique de l’Union européenne [Eurostat] pour chacun des États membres de l’Union [...], pour chacune des parties à l’accord [EEE] et pour
la Suisse et celui de l’Autriche.

(2)   Les montants des allocations familiales visés au paragraphe 1 sont applicables à compter du 1er janvier 2019 sur la base des valeurs au sens du paragraphe 1, publiées le 1er juin 2018. Par la suite, ces montants sont adaptés tous les deux ans sur la base des valeurs publiées à la date du 1er juin de l’année précédente.

(3)   Le Bundesministers für Frauen, Familien und Jugend [ministre fédéral des Femmes, de la Famille et de la Jeunesse, Autriche] publie, au moyen d’un règlement pris conjointement avec le Bundesministers für Finanzen [ministre fédéral des Finances, Autriche], les bases de calcul et les montants visés aux paragraphes 1 et 2, ainsi que les montants visés à l’article 33, paragraphe 3, point 2, du [Bundesgesetz über die Besteuerung des Einkommens natürlicher Personende (loi fédérale relative à
l’imposition du revenu des personnes physiques) ( 6 ), du 7 juillet 1988 ( 7 )]. »

18. L’article 53 du FLAG dispose :

« (1)   Dans le cadre de la présente loi fédérale, les ressortissants des parties à l’accord [EEE] sont, dans la mesure où cela résulte de l’accord précité, assimilés aux ressortissants autrichiens. Dans ce contexte, la résidence permanente d’un enfant dans un État de l’Espace économique européen [EEE] doit, conformément aux dispositions communautaires, être assimilée à une résidence permanente d’un enfant en Autriche.

[...]

(4)   Le paragraphe 1, seconde phrase, ne s’applique pas pour ce qui concerne l’article 8a, paragraphes 1 à 3.

(5)   L’article 26, paragraphe 3, du Bundesabgabenordnung [code fédéral des impôts] [...] s’applique aux prestations visées dans la présente loi fédérale jusqu’au 31 décembre 2018. À partir du 1er janvier 2019, l’article 26, paragraphe 3, du code fédéral des impôts ne s’applique, en ce qui concerne les prestations prévues par la présente loi fédérale, qu’aux personnes ayant leur lieu d’affectation à l’étranger et agissant pour le compte d’une collectivité territoriale, ainsi qu’à leurs conjoints
et à leurs enfants. »

2.   L’EStG

19. L’article 33 de l’EStG prévoit :

« [...]

(2)   Les crédits d’impôt doivent être déduits du [montant de l’impôt] résultant de l’application du paragraphe 1 dans l’ordre suivant :

1. le bonus familial “plus” visé au paragraphe 3a ; il n’y a pas lieu de déduire le bonus familial “plus” dans la mesure où il excède l’impôt dû sur le revenu imposable en vertu du paragraphe 1 ;

2. les crédits d’impôt visés aux paragraphes 4 à 6.

(3)   Les contribuables qui bénéficient d’allocations familiales en vertu du [FLAG] ont droit, parallèlement au versement des allocations familiales, à un crédit d’impôt de 58,40 euros par mois pour chaque enfant. Il en va autrement dans les cas suivants :

1. Aucun crédit d’impôt n’est accordé pour des enfants qui résident de manière permanente en dehors d’un État membre de l’Union [...], d’un État de l’[EEE] ou de la Suisse.

2. S’agissant d’enfants qui résident en permanence sur le territoire d’un autre État membre de l’Union [...], d’une autre partie à l’accord [EEE] ou de la Suisse, le montant du crédit d’impôt pour enfant à charge est déterminé sur la base du rapport entre le niveau des prix comparés publié par [Eurostat] pour chacun des États membres de l’Union, pour chacune des parties à l’accord [EEE] et pour la Suisse et celui de l’Autriche :

a) À compter du 1er janvier 2019, le montant des crédits d’impôt pour enfant à charge est adapté sur la base des valeurs publiées le 1er juin 2018. Par la suite, le montant des crédits d’impôt pour enfant à charge est adapté tous les deux ans sur la base des valeurs publiées à la date du 1er juin de l’année précédente.

b) Le montant des crédits d’impôt pour enfant à charge est publié conformément à l’article 8a, paragraphe 3, du [FLAG].

[...]

(3a)   Un enfant bénéficiant de l’allocation familiale au titre du [FLAG] et résidant en permanence dans un État membre de l’Union [...] ou sur le territoire d’une autre partie à l’accord [EEE] ou en Suisse a droit, sur demande, à un bonus familial “plus” conformément aux dispositions suivantes :

1. Le montant du bonus familial “plus” est de

a) 125 euros par mois calendaire jusqu’à la fin du mois au cours duquel l’enfant accomplit sa dix-huitième année,

b) 41,68 euros par mois calendaire après la fin du mois au cours duquel l’enfant accomplit sa dix-huitième année.

2. Par dérogation au point 1, pour les enfants qui résident en permanence sur le territoire d’un autre État membre de l’Union [...], d’une autre partie à l’accord [EEE] ou de la Suisse, le montant du bonus familial “plus” ainsi que des crédits d’impôt visés au paragraphe 4 est déterminé sur la base du rapport entre le niveau des prix comparés publié par [Eurostat] pour chacun des États membres de l’Union [...], pour chacune des parties à l’accord [EEE] et pour la Suisse et celui de l’Autriche :

a) À compter du 1er janvier 2019, le montant du bonus familial “plus” et des crédits d’impôt visés au paragraphe 4 est adapté sur la base des valeurs publiées à la date du 1er juin 2018. Par la suite, ce montant est adapté tous les deux ans sur la base des valeurs publiées à la date du 1er juin de l’année précédente.

b) Le ministre fédéral des Finances est tenu de publier, par voie de règlement, les bases de calcul et les montants au plus tard le 30 septembre suivant la date de référence visée au point a) [ ( 8 )].

[...]

5. L’article 26, paragraphe 3, seconde phrase, du code fédéral des impôts ne s’applique pas. Font exception les conjoints et enfants de contribuables ayant leur lieu d’affectation à l’étranger qui travaillent pour le compte d’une collectivité territoriale.

[...]

(4)   En outre, lorsque l’enfant réside en permanence dans un État membre de l’Union [...] ou sur le territoire d’une autre partie à l’accord [EEE] ou en Suisse, les crédits d’impôt suivants sont applicables :

1. Les personnes assurant seules le revenu du ménage ont droit à un crédit d’impôt pour ménage à revenu unique. Celui-ci s’élève à un montant annuel de :

– 494 euros pour un enfant (article 106, paragraphe 1),

– 669 euros pour deux enfants (article 106, paragraphe 1).

Ce montant est majoré de 220 euros par an pour le troisième enfant et pour chaque enfant supplémentaire respectivement (article 106, paragraphe 1).

[...]

2. Les parents isolés ont droit à un crédit d’impôt pour foyer monoparental. Celui-ci s’élève à un montant annuel de :

– 494 euros pour un enfant (article 106, paragraphe 1),

– 669 euros pour deux enfants (article 106, paragraphe 1).

Ce montant est majoré de 220 euros par an pour le troisième enfant et pour chaque enfant supplémentaire respectivement (article 106, paragraphe 1). Les parents isolés sont des contribuables qui vivent avec au moins un enfant (article 106, paragraphe 1) pendant plus de six mois par année civile sans être en communauté avec un partenaire ou conjoint.

3. Les contribuables qui ont des obligations alimentaires pour un enfant ont droit à un crédit d’impôt pour pension alimentaire de 29,20 euros par mois [...]

4. Par dérogation aux points 1 à 3, le montant des crédits d’impôt pour les enfants qui résident en permanence sur le territoire d’un autre État membre de l’Union [...], d’une autre partie à l’accord [EEE] ou de la Suisse est déterminé conformément au paragraphe 3a, point 2. Lorsque le contribuable a droit à un crédit d’impôt pour plusieurs enfants et que ceux-ci se trouvent dans des pays différents, il faut d’abord prendre en considération les enfants plus âgés ouvrant droit à la prestation
avant d’envisager les plus jeunes.

5. L’article 26, paragraphe 3, seconde phrase, du code fédéral des impôts ne s’applique pas. Font exception les conjoints et enfants de contribuables ayant leur lieu d’affectation à l’étranger qui travaillent pour le compte d’une collectivité territoriale.

[...]

(7)   Si l’impôt sur le revenu dû en vertu du paragraphe 1 est inférieur à 250 euros et si le crédit d’impôt pour ménage à revenu unique ou le crédit d’impôt pour foyer monoparental est applicable, les dispositions suivantes s’appliquent, lorsqu’il y a un enfant (article 106, paragraphe 1) :

1. La différence entre 250 euros et l’impôt visé au paragraphe 1 doit être remboursée sous la forme d’un supplément pour enfant.

2. Lorsque l’enfant réside en permanence dans un autre État membre de l’Union [...] ou sur le territoire d’une autre partie à l’accord [EEE] ou en Suisse, le montant de 250 euros est remplacé par le montant résultant de l’application du paragraphe 3a, point 2.

[...]

Ce montant est majoré, pour chaque enfant supplémentaire (article 106, paragraphe 1), d’un montant de 250 euros ou du montant qui le remplace.

1. Si l’impôt sur le revenu résultant des paragraphes 1 et 2 est inférieur à zéro, il y a lieu de procéder au versement du crédit d’impôt pour ménage à revenu unique ou du crédit d’impôt pour foyer monoparental.

[...] »

3.   Le code fédéral des impôts

20. L’article 26 du code fédéral des impôts dispose :

« (1)   Une personne possède un domicile au sens des dispositions fiscales là où elle occupe un logement dans des conditions qui permettent de conclure qu’elle conservera et utilisera ce logement.

(2)   Une personne possède sa résidence habituelle au sens des dispositions fiscales là où elle réside dans des conditions indiquant qu’elle ne séjourne pas seulement temporairement dans ce lieu ou dans ce pays. [...]

(3)   Les ressortissants autrichiens ayant un contrat de travail avec un organisme public et dont le lieu d’affectation se situe à l’étranger (fonctionnaires à l’étranger) sont traités comme des personnes ayant leur résidence habituelle au lieu où se situe le service qui octroie la rémunération. Il en va de même pour leurs conjoints, dans la mesure où les époux forment un foyer permanent d’habitation, et pour leurs enfants mineurs faisant partie de ce foyer. »

III. La procédure précontentieuse

21. Par lettre de mise en demeure du 25 janvier 2019, la Commission a appelé l’attention de la République d’Autriche sur les préoccupations que soulevait la mise en place, depuis le 1er janvier 2019, d’un mécanisme d’adaptation du montant des prestations familiales ainsi que des avantages sociaux et fiscaux accordés par la République d’Autriche aux travailleurs ayant des enfants, en fonction du niveau général des prix dans l’État membre où ceux-ci résident en permanence.

22. La Commission a considéré qu’une adaptation du montant de la prestation familiale en fonction du lieu de résidence de l’enfant était contraire aux articles 7 et 67 du règlement no 883/2004, selon lesquels les prestations en espèces ne peuvent faire l’objet d’aucune réduction du fait qu’un membre de la famille, comme un enfant, réside dans un autre État membre. En outre, ce sont essentiellement des travailleurs d’autres États membres, et non des travailleurs autrichiens, qui sont concernés par
l’adaptation des prestations et avantages octroyés par la République d’Autriche en faveur des enfants. Une telle discrimination indirecte est, selon la Commission, contraire au principe de l’égalité de traitement énoncé à l’article 4 du règlement no 883/2004 et à l’article 7 du règlement no 492/2011.

23. Dans sa réponse à la lettre de mise en demeure du 25 mars 2019, la République d’Autriche a fait valoir que :

– le droit de l’Union prévoit des mécanismes comparables à celui qu’elle a mis en œuvre ;

– dès lors que l’article 67 du règlement no 883/2004 ne prescrit pas que le montant des prestations versées pour les enfants résidant dans un autre État membre doit correspondre à celui versé pour les enfants résidant en Autriche, l’adaptation du montant de la prestation familiale en fonction du lieu de résidence de l’enfant est autorisée, et

– il n’existe pas de discrimination indirecte aux motifs que l’adaptation des montants forfaitaires des prestations ou de l’avantage en fonction du niveau des prix pratiqués au lieu de résidence de l’enfant est objectivement justifiée et résulte de la cohérence de l’allègement comparable des charges pour tous les travailleurs.

24. N’étant pas satisfaite de cette réponse, la Commission a émis, le 26 juillet 2019, un avis motivé dans lequel elle a maintenu, en substance, sa position. Elle a précisé qu’il n’existe pas de référence pertinente en droit de l’Union et a relevé le fait que les montants accordés sont forfaitaires, sans adaptation en fonction du niveau de prix dans les différentes régions de l’Autriche selon la résidence permanente de l’enfant. Ainsi, une différence de niveau des prestations et des avantages
octroyés en faveur des enfants appliquée pour ceux qui résident dans un autre État membre constitue une discrimination indirecte parce qu’elle frappe plus durement les travailleurs migrants que les travailleurs autrichiens. Le caractère forfaitaire des montants de ces prestations et des avantages démontrerait qu’ils ne dépendent pas des coûts réels liés à l’entretien d’un enfant et qu’ils ne garantissent donc pas une répartition plus équitable des charges supportées par les familles pour
subvenir aux besoins des enfants.

25. Par lettre du 24 octobre 2019, la République d’Autriche a répondu à cet avis motivé en indiquant que les montants des prestations familiales ainsi que les avantages sociaux et fiscaux en cause ne seraient pas simplement forfaitaires, mais qu’ils correspondraient aux besoins réels. En outre, le fait que les prestations et les avantages en cause soient accordés sous la forme de montants forfaitaires ne s’opposerait pas à leur adaptation en fonction du niveau des prix sur le lieu de résidence des
enfants. Une telle adaptation ne constituerait pas une inégalité de traitement, mais garantirait que le travailleur qui reçoit les prestations et les avantages bénéficie en toute hypothèse d’un allègement identique des charges, quel que soit le lieu de séjour effectif de l’enfant. À supposer qu’une discrimination indirecte existe, celle-ci serait justifiée, notamment, par l’objectif d’équilibre des dépenses du système de sécurité sociale ainsi que par l’objectif de prise en considération de la
capacité contributive des bénéficiaires.

26. N’étant pas convaincue par cette réponse, la Commission a introduit le présent recours en application de l’article 258 TFUE.

IV. Les conclusions des parties

27. Par sa requête, la Commission demande à la Cour de :

– constater que, en mettant en place un mécanisme d’adaptation relatif à l’allocation familiale et au crédit d’impôt pour enfant à charge pour les travailleurs dont les enfants résident en permanence dans un autre État membre, la République d’Autriche a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu :

– des articles 7 et 67 du règlement no 883/2004 ainsi que

– de l’article 4 du règlement no 883/2004 et de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011 ;

– constater que, en mettant en place, pour les travailleurs migrants dont les enfants résident en permanence dans un autre État membre, un mécanisme d’adaptation relatif au bonus familial « plus », au crédit d’impôt pour ménage à revenu unique, au crédit d’impôt pour foyer monoparental et au crédit d’impôt pour pension alimentaire, la République d’Autriche a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011, et

– condamner la République d’Autriche aux dépens.

28. La République d’Autriche demande à la Cour de :

– rejeter le recours, et

– condamner la Commission aux dépens.

29. Par décisions du président de la Cour, la République tchèque (6 novembre 2020), la République de Croatie (20 novembre 2020), la République de Pologne (19 novembre 2020), la Roumanie (12 novembre 2020), la République de Slovénie (22 octobre 2020) et la République slovaque (22 octobre 2020) ont été autorisées à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.

30. Par décision du président de la Cour, le Royaume de Danemark (20 novembre 2020) a été autorisé à intervenir au soutien des conclusions de la République d’Autriche.

31. Par ordonnance du président de la Cour du 18 décembre 2020, l’Autorité de surveillance AELE et le Royaume de Norvège ont été autorisés à intervenir au soutien des conclusions, respectivement, de la Commission et de la République d’Autriche.

32. La Commission conclut ses observations relatives aux mémoires en intervention en ce sens que les mémoires de la République tchèque, de la République de Croatie, de la République de Pologne, de la Roumanie, de la République de Slovénie, de la République slovaque et de l’Autorité de surveillance AELE corroborent intégralement ses arguments, tandis que l’argumentation développée dans les mémoires en intervention du Royaume de Danemark et du Royaume de Norvège n’est pas de nature à les infirmer.

33. Dans ses observations relatives aux mémoires en intervention, la République d’Autriche précise qu’elle souscrit pleinement aux observations du Royaume de Danemark ainsi que du Royaume de Norvège et relève que les parties intervenantes au soutien de la Commission n’invoquent aucun argument nouveau. Elle maintient intégralement ses conclusions, telles que formulées dans son mémoire en défense et reprises dans son mémoire en duplique.

V. Analyse

34. La Commission formule deux griefs au soutien de son recours fondé sur le constat que, en s’écartant du montant forfaitaire fixé par la loi, la République d’Autriche prévoit une adaptation du montant de l’allocation familiale et du crédit d’impôt pour enfant à charge ainsi que divers autres avantages fiscaux, à savoir le bonus familial « plus », le crédit d’impôt pour ménage à revenu unique, le crédit d’impôt pour foyer monoparental et le crédit d’impôt pour pension alimentaire, en fonction du
niveau des prix dans l’État membre ( 9 ) où réside en permanence l’enfant ouvrant droit à ces prestations.

35. Le premier grief est tiré de la violation des articles 7 et 67 du règlement no 883/2004. Le second grief est tiré de la violation du principe de l’égalité de traitement prévu à l’article 4 du règlement no 883/2004 et à l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011.

A. Sur le premier grief tiré de la violation des articles 7 et 67 du règlement no 883/2004

1.   Argumentation des parties

a)   La Commission

36. Par son premier grief, la Commission conclut à la violation par la République d’Autriche des obligations qui lui incombent en vertu des articles 7 et 67 du règlement no 883/2004 en ce que la réglementation de cet État membre prévoit l’adaptation de l’allocation familiale et du crédit d’impôt pour enfant à charge pour les travailleurs qui sont affiliés au régime de sécurité sociale autrichien, mais dont les enfants résident dans un autre État membre.

37. La Commission expose que :

– la République d’Autriche octroie aux personnes qui travaillent en Autriche, pour leurs enfants, la prestation familiale et l’avantage social que constituent l’allocation familiale et le crédit d’impôt pour enfant à charge, sous la forme de montants forfaitaires uniformes ;

– selon les justificatifs fournis par la République d’Autriche et contrairement à l’opinion exprimée par le Royaume de Danemark et le Royaume de Norvège, ces montants sont fixés par le législateur autrichien seulement en fonction de l’âge des enfants ainsi que de leur nombre, indépendamment de leurs besoins réels et donc de leur environnement social, et

– depuis le 1er janvier 2019, les règles autrichiennes prévoient que ces prestations de l’État doivent être adaptées en fonction du niveau général des prix dans l’État membre où l’enfant réside en permanence.

38. La Commission fait valoir que :

– il est constant que l’allocation familiale et le crédit d’impôt pour enfant à charge, qui sont des prestations en espèces versées par l’État destinées à alléger les charges découlant de l’entretien des enfants, constituent des prestations familiales au sens de l’article 1er, sous z), et de l’article 3, paragraphe 1, sous j), du règlement no 883/2004 ;

– ces prestations sont octroyées en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire des besoins personnels des enfants, sur la base d’une situation légalement définie ( 10 ). Selon le libellé de l’article 8, paragraphe 1, du FLAG, les allocations familiales sont calculées en fonction du nombre et de l’âge des enfants, tout comme les crédits d’impôt accordés conformément aux conditions fixées à l’article 33, paragraphes 3, 3a, 4, 7 et 8 de l’EStG ;

– si la République d’Autriche affirme que le législateur autrichien a pris comme point de départ les dépenses types nécessaires pour assurer l’entretien des enfants, elle n’a pas apporté la preuve de l’existence d’un rapport entre le niveau de l’allocation familiale autrichienne et le coût standard de l’entretien d’un enfant ;

– tel est également le cas des suppléments accordés pour frais de scolarité et pour enfants lourdement handicapés, pour lesquels la République d’Autriche ne démontre pas non plus, concernant ces montants forfaitaires, qu’ils sont liés à l’environnement social des enfants, d’autant plus qu’elle indique que ces frais sont basés sur l’obligation scolaire en Autriche et non sur celle prévue dans l’État membre dans lequel l’enfant est scolarisé. Ainsi, la majoration pour les frais de scolarité ne
dépend pas de la fréquentation effective de l’école, mais uniquement de l’âge de l’enfant ;

– en revanche, la pension alimentaire qu’un parent doit verser en espèces à un enfant en vertu du droit privé autrichien est calculée de manière concrète et individuelle en fonction des conditions de vie des parents et des besoins de l’enfant ;

– le montant des prestations familiales ne peut dépendre de la résidence des membres de la famille ( 11 ) du travailleur dans l’État membre prestataire, ainsi que le prévoient expressément l’article 7 du règlement no 883/2004, en cas de réduction ou de modification des prestations, et l’article 67 de ce règlement, tel qu’interprété par la Cour dans l’arrêt du 18 septembre 2019, Moser ( 12 ) ;

– les dispositions de ces articles 7 et 67 ont été prises après que la Cour a rendu l’arrêt du 15 janvier 1986, Pinna ( 13 ), interprétant l’article 73 du règlement (CEE) no 1408/71 ( 14 ), auquel l’article 67 du règlement no 883/2004 a succédé en en reprenant en substance le contenu. Il en résulterait, à la lumière des conclusions de l’avocat général Mancini dans cette affaire ( 15 ), qu’il n’est pas permis d’adapter le niveau des prestations familiales au seul motif que des membres de la
famille résident dans un autre État membre ;

– l’article 67 de ce règlement ne contient aucune indication justifiant d’appliquer différemment l’article 7 dudit règlement, à la différence de l’article 63 et de l’article 70, paragraphe 3, du même règlement concernant respectivement des prestations de chômage et des prestations spéciales en espèces à caractère non contributif ;

– l’objectif poursuivi par le législateur de l’Union est d’éviter de dissuader le travailleur provenant d’un autre État membre d’exercer son droit à la libre circulation, ainsi qu’il a été exposé par la Cour dans l’arrêt Pinna, et

– en prévoyant un mécanisme d’adaptation des prestations familiales, qui aboutit à la modification de leur niveau en fonction de l’État membre dans lequel les enfants résident, la République d’Autriche ne traite pas ces prestations comme si les membres de la famille résidaient en Autriche.

39. À cet égard, la Commission soutient, en réponse à l’argument du Royaume de Danemark, selon lequel l’article 5, sous b), du règlement no 883/2004 plaiderait également en faveur de la légalité d’une adaptation des prestations familiales au lieu de résidence de l’enfant, que, au contraire, la même fiction de la résidence dans l’État membre compétent au sens de cette disposition y figure lorsque celui-ci doit tenir compte de faits ou d’événements survenus dans un autre État membre, confirmant par là
même son interprétation des articles 7 et 67 de ce règlement.

40. En outre, s’agissant de la décision des chefs d’État ou de gouvernement, réunis au sein du Conseil européen, concernant un nouvel arrangement pour le Royaume-Uni dans l’Union européenne ( 16 ), dont la République d’Autriche se prévaut parce que cette décision prévoyait que la Commission présenterait une proposition visant à modifier le règlement no 883/2004 afin de permettre aux États membres d’indexer les prestations sociales pour les enfants qui résident dans un État membre autre que celui où
réside le travailleur, la Commission souligne, d’une part, que, en raison du retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord de l’Union, ce règlement n’a pas été modifié. D’autre part, elle est d’avis qu’il ne résulte pas de l’analyse d’impact de la modification de ce règlement, citée par la République d’Autriche, en ce que l’une des options envisagées consistait en une adaptation des prestations familiales exportées en fonction du niveau de vie de l’État membre de résidence des
enfants ( 17 ), qu’une telle indexation était conforme au droit de l’Union en vigueur, dès lors qu’y figurent des réserves à cet égard ( 18 ) et qu’elle n’a pas retenu cette option.

b)   La République d’Autriche

41. En premier lieu, s’agissant des allocations familiales, la République d’Autriche expose que, selon l’article 1er du FLAG, l’octroi d’allocations familiales vise à mettre en place une compensation des charges dans l’intérêt de la famille et que l’augmentation de leur montant, prévue à l’article 8, paragraphe 2, du FLAG, en fonction de l’âge de l’enfant dont dépend le niveau de dépenses correspond à cet objectif. Elle rappelle que le FLAG a regroupé en une aide unique différentes aides aux
familles qui avaient été accordées dès les premières années de l’après-Seconde Guerre mondiale, initialement sous forme de prestations en nature, pour soutenir les familles de manière ciblée.

42. La République d’Autriche souligne, en se fondant sur les dispositions de l’article 8 du FLAG, que :

– les allocations familiales ont toujours été calculées sur la base du critère des dépenses types nécessaires pour assurer des moyens de subsistance aux enfants en Autriche ;

– leur montant est forfaitaire sans qu’il soit nécessaire de prouver des dépenses concrètes ;

– ce système repose sur l’idée selon laquelle les « coûts de base » engendrés par un enfant en Autriche sont toujours les mêmes pour tous les parents, et

– le fait que les prestations soient calculées en fonction des besoins réels de l’enfant et des coûts d’entretien étroitement liés à son environnement économique et social ( 19 ) ressort, d’une part, « par principe », de ce que leur montant augmente selon l’âge des enfants ( 20 ), et spécialement, en septembre, pour la rentrée scolaire pendant toute la durée de l’obligation de scolarité, ainsi qu’en cas de lourd handicap des enfants. D’autre part, leur montant est diminué lorsqu’un enfant âgé de
19 ans dispose de revenus d’un certain niveau.

43. La République d’Autriche précise que le montant des allocations familiales, correspondant aux coûts moyens de subsistance ou aux besoins de base, a été augmenté en fonction du niveau des salaires et des prix ainsi que de l’inflation. À l’inverse, il a pu être diminué pour des raisons budgétaires étatiques.

44. En qui concerne le financement et les conditions d’octroi des allocations familiales, la République d’Autriche explique que :

– les dépenses relatives aux allocations familiales sont supportées par l’Ausgleichsfonds für Familienbeihilfen (fonds de compensation pour les allocations familiales, Autriche) ( 21 ) ;

– les ressources de ce fonds proviennent notamment ( 22 ) des cotisations versées par les employeurs ( 23 ), qui emploient sur le territoire fédéral des travailleurs ( 24 ) ;

– les travailleurs indépendants versent, uniquement en tant qu’employeurs, ces cotisations, calculées non pas sur la base de leurs revenus, mais en fonction des salaires versés à leurs salariés ;

– ce type de cotisation est conçu comme une sorte de taxe spéciale, calculée sur la base de la somme des salaires de tous les travailleurs ( 25 ), qu’ils élèvent ou non des enfants, et

– contrairement aux cotisations de sécurité sociale, aucune déduction n’est opérée sur le salaire brut de chaque travailleur, et le versement des allocations familiales n’est pas lié à l’exercice d’une activité professionnelle en Autriche, conformément à l’article 2, paragraphe 1, du FLAG, ni au montant des cotisations de l’employeur ou des travailleurs indépendants et non salariés.

45. En deuxième lieu, s’agissant du crédit d’impôt pour enfant à charge, la République d’Autriche expose que, conformément à l’article 33, paragraphe 3, de l’EStG, le contribuable bénéficiant d’allocations familiales sur la base du FLAG a droit, pour chacun de ses enfants, à un crédit d’impôt pour enfant à charge de 58,40 euros, versé en même temps que les allocations familiales. D’un point de vue économique, le crédit d’impôt pour enfant à charge possède donc le caractère d’une majoration des
allocations familiales. Contrairement à ces dernières, le crédit d’impôt pour enfant à charge n’est toutefois pas financé par des ressources du fonds de compensation pour les allocations familiales, mais par les recettes fiscales générales.

46. En revanche, le bonus familial « plus » et les autres avantages fiscaux ( 26 ) en cause ne constituent pas une contribution à l’entretien des enfants, mais une compensation, par un allègement de la charge fiscale, du fait que, à revenus égaux, les contribuables exerçant une activité professionnelle qui ont des enfants ont une capacité contributive inférieure à celle de contribuables exerçant une activité professionnelle qui n’en ont pas. Cette capacité est évaluée en considération des besoins
matériels de base (ou besoins moyens) pour l’entretien d’un enfant, comprenant des activités indispensables à la vie de celui-ci.

47. La République d’Autriche explique son choix d’adapter le montant des prestations familiales et des avantages fiscaux ( 27 ) en cause, en fonction de l’État de résidence de l’enfant, sur la base des niveaux de prix comparés publiés par Eurostat, en raison de la finalité notamment des allocations familiales et du crédit d’impôt pour enfant à charge, qui est de rembourser aux parents une partie des frais qu’ils doivent typiquement supporter aux fins de l’entretien de leur enfant, ainsi que du fait
que ces frais dépendent, par essence, du niveau de prix du lieu de la résidence permanente.

48. Or, l’augmentation de la liberté de circulation des travailleurs au sein de l’Union et l’exportation indifférenciée des allocations familiales et du crédit d’impôt pour enfant à charge qui en a résulté, indépendamment de l’État dans lequel les enfants pour lesquels les prestations étaient accordées avaient leur résidence permanente, ont abouti à des distorsions croissantes dans le système de ces prestations. Si l’enfant vivait dans un État membre à faible pouvoir d’achat, l’effet du soutien
dépassait l’allègement visé ( 28 ). À l’inverse, si l’enfant vivait dans un État membre avec un pouvoir d’achat plus élevé, l’allègement restait en deçà de la mesure visée.

49. En troisième lieu, en réponse au premier grief de la Commission, la République d’Autriche estime que le mécanisme d’adaptation du montant de l’allocation familiale et du crédit d’impôt pour enfant à charge, pour tous les travailleurs qu’ils soient autrichiens ou non, n’est pas interdit par les articles 7 et 67 du règlement no 883/2004.

50. La République d’Autriche soutient que :

– seul l’article 67 du règlement no 883/2004 est applicable en l’occurrence, en ce qu’il contient des dispositions spécifiques relatives à l’exportation de prestations familiales pour les membres de la famille qui résident dans un autre État membre, tandis que l’article 7 de ce règlement a pour objet toutes les prestations de sécurité sociale qu’il régit ;

– le libellé de cet article 67 ne s’oppose pas à la prise en compte de la nature concrète, de la finalité ainsi que des modalités de la prestation familiale concernée et le Royaume de Norvège soutient, à juste titre, que l’obligation d’exporter dans tous les cas des montants absolus irait à l’encontre de cette disposition ainsi que de l’article 7 du règlement no 883/2004, et

– le montant des allocations familiales et du crédit d’impôt pour enfant à charge ne dépend pas, du point de vue de sa valeur, de la résidence de l’enfant en Autriche, dès lors que ces prestations visent à compenser une partie des coûts d’entretien des enfants qui dépendent du niveau des prix du lieu de vie de ceux-ci.

51. À cet égard, la République d’Autriche se réfère également :

– au considérant 16 du règlement no 883/2004 qui précise que, dans le cas de prestations ayant un lien avec l’environnement économique et social de l’intéressé, le lieu de résidence peut être pris en compte ( 29 ) ;

– à l’arrêt du 15 mars 2001, Offermanns ( 30 ), dont il résulterait que l’expression « compenser les charges de famille » vise notamment une contribution publique au budget familial destinée à alléger les charges découlant de l’entretien des enfants, ce qui aurait pour effet de démontrer que les prestations familiales ont un lien direct avec les coûts exposés pour l’entretien d’un enfant et peuvent dès lors être ajustées pour tenir compte des coûts effectifs ;

– aux conclusions de l’avocat général Slynn dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Lenoir ( 31 ), et au point 16 de cet arrêt dans lequel la Cour a jugé, s’agissant d’une aide versée sous forme de somme forfaitaire en début d’année scolaire, que le règlement no 1408/71 ne s’opposait pas à ce qu’un bénéficiaire de prestations familiales, ressortissant d’un État membre et demeurant sur le territoire d’un autre État membre, ne puisse pas réclamer le paiement par les organismes sociaux de son
pays d’origine des allocations de rentrée scolaire, si elles étaient calculées non pas exclusivement en fonction du nombre et de l’âge des enfants, mais en considération de l’environnement économique et social et, partant, de la résidence des intéressés, ainsi que

– à l’arrêt Moser, spécialement aux points 53 et 54, dont il résulterait que l’objectif ( 32 ) de la réglementation nationale est déterminant. Dès lors qu’il s’agissait, en l’espèce, de procurer une prestation de remplacement du revenu professionnel pendant une période de garde d’enfant, la Cour a jugé qu’il convenait de se référer aux conditions de rémunération réelles dans l’État d’emploi pour calculer le montant du paiement différentiel pour une prestation familiale, devant être accordé en
vertu de l’article 68 du règlement no 883/2004.

52. Ainsi, la République d’Autriche considère, premièrement, que la Commission ne peut soutenir, en se référant aux arrêts Lenoir et Moser, que des prestations octroyées sous forme de montant forfaitaire, à la différence de celles accordées directement par rapport à la situation réelle des bénéficiaires, ne sauraient en aucun cas être adaptées. À cet égard, la République d’Autriche est d’avis que les prestations en cause sont comparables à celles qui ont fait l’objet de l’arrêt Lenoir. Elle soutient
que les coûts d’achat d’articles de nécessité courante, qui sont, non uniquement, mais aussi en lien avec la rentrée scolaire, sont également remboursés forfaitairement dans le cadre des allocations familiales qu’elle verse. En outre, celle-ci souligne que la prise en considération de l’objectif de la prestation en cause dans l’arrêt Moser est transposable en l’occurrence.

53. Concrètement, la République d’Autriche fait valoir que les allocations familiales adaptées au pouvoir d’achat dans l’État membre de résidence des enfants en vertu du mécanisme d’adaptation sont encore dans un certain nombre d’États membres ayant un coefficient inférieur à 100 % toujours – pour partie, même considérablement – supérieures à la prestation prévue au lieu de résidence des enfants. Elle donne les deux exemples suivants concernant la somme versée à une famille avec un seul enfant,
nouveau-né : si le montant des allocations familiales en Hongrie était en 2020 de 12200 forints hongrois (HUF) par mois, soit l’équivalent d’environ 34 euros, les allocations familiales adaptées et le crédit d’impôt pour enfant à charge versés par la République d’Autriche s’élevaient à 99,13 euros, soit près du triple. De même, si les allocations familiales en Slovaquie s’élevaient en 2020 à environ 24,95 euros par mois, les allocations familiales adaptées et le crédit d’impôt pour enfant à
charge s’élevaient à 122,57 euros, soit près de cinq fois le montant de l’allocation slovaque ( 33 ).

54. Deuxièmement, la République d’Autriche est d’avis que la Commission ne peut se référer à l’arrêt Pinna, dès lors qu’il portait sur une réglementation nationale excluant l’octroi de prestations familiales, ce qui la différencie du mécanisme d’adaptation du montant des prestations versées qu’elle a institué.

55. Elle ajoute que, compte tenu de l’objet de la réglementation française en cause dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, la Cour n’a justement pas repris à son compte les considérations de l’avocat général Mancini ( 34 ) concernant des réglementations prévoyant une adaptation des prestations exportées. En outre, cet avis ne peut être transposé en ce qui concerne les allocations familiales autrichiennes, au motif qu’elles tiennent compte du coût de la vie et que ni les allocations familiales
ni le crédit d’impôt pour enfant à charge ne sont « un élément complémentaire du salaire de base » ( 35 ) – dès lors qu’ils sont accordés indépendamment d’un éventuel revenu professionnel.

56. Troisièmement, s’agissant de l’argument de la Commission tiré de ce que le nouvel arrangement pour le Royaume-Uni n’est jamais entré en vigueur ( 36 ), la République d’Autriche relève que, néanmoins, l’engagement envers le Royaume‑Uni visait à tenir compte des différents niveaux de prix dans l’Union ainsi que, de surcroît – contrairement aux réglementations devant être appréciées dans le cadre du recours en manquement –, de l’importance des prestations octroyées pour des enfants dans l’État de
résidence. Elle constate également que, dans ses conclusions, au point 2, le Conseil européen a retenu que les dispositions qu’il avait prises étaient « pleinement compatibles avec les traités » ( 37 ) et que la Commission a considéré que l’option retenue ne violerait pas l’article 48 TFUE ( 38 ).

57. À cet égard, la République d’Autriche souligne que, si une adaptation du règlement no 883/2004 a, certes, été envisagée, tel n’était pas le cas pour le règlement no 492/2011. Elle en déduit que l’article 7 de ce règlement – tout comme l’article 4 du règlement no 883/2004 – ne contient pas de principe de non‑discrimination allant au‑delà de celui qui est consacré par le droit primaire.

58. En conclusion, la République d’Autriche souligne qu’une modification du règlement no 883/2004 n’aurait pas été nécessaire pour les cas dans lesquels un État membre adapte, en cas d’exportation, conformément à des règles objectives, « vers le haut » ou « vers le bas », une prestation familiale qui a un lien avec l’environnement économique et social de l’État membre et que tel est le cas de sa réglementation, laquelle devant, par conséquent, être distinguée des mesures envisagées en 2016 pour le
Royaume-Uni.

2.   Appréciation

59. Le recours en manquement exercé par la Commission a pour objet la réglementation autrichienne qui prévoit, depuis le 1er janvier 2019, l’adaptation du montant de certaines prestations familiales ainsi que des avantages sociaux et fiscaux, à la hausse ou à la baisse, en fonction du niveau général des prix dans l’État membre où résident en permanence les enfants ouvrant droit à ces prestations, sur la base du rapport entre les niveaux des prix comparés publiés par Eurostat pour chacun des États
membres de l’Union et celui de la République d’Autriche ( 39 ).

60. Le premier grief de ce recours, tiré de la violation des articles 7 et 67 du règlement no 883/2004, porte sur les allocations familiales et le crédit d’impôt pour enfant à charge.

61. Selon l’article 3, paragraphe 1, sous j), du règlement no 883/2004, ce règlement est applicable à toutes les législations relatives aux branches de sécurité sociale qui concernent les prestations familiales.

62. En l’occurrence, il est constant que les prestations autrichiennes en cause constituent des « prestations familiales » au sens de l’article 1er, sous z), dudit règlement, cette expression désignant toutes les prestations en nature ou en espèces destinées à compenser les charges de famille, à l’exclusion des avances sur pensions alimentaires et des allocations spéciales de naissance ou d’adoption visées à l’annexe I du même règlement ( 40 ).

63. Par conséquent, ainsi que le soutient la Commission, à juste titre, ces prestations sont soumises à la règle générale énoncée à l’article 7 du règlement no 883/2004, intitulé « Levée des clauses de résidence », relative notamment au montant des prestations en espèces, dès lors que cet article prévoit que celles-ci ne peuvent pas faire l’objet d’une réduction ou d’une modification du fait que le bénéficiaire ou les membres de sa famille résident dans un État membre autre que celui où se trouve
l’institution débitrice.

64. Cette règle est la réitération du principe de l’exportabilité des prestations de sécurité sociale, posé à l’article 48, premier alinéa, sous b), TFUE. Fixer le montant de ces prestations en fonction de la résidence des membres de la famille constitue donc une atteinte au droit de circuler librement conféré aux citoyens de l’Union ( 41 ).

65. Certes, l’article 7 du règlement no 883/2004 prévoit des réserves expressément admises dans celui-ci ( 42 ). Cependant, l’article 67 de ce règlement ne figure pas parmi celles-ci. Au contraire, ainsi que le font valoir la Commission et la majorité des États membres intervenus au soutien de celle-ci, cette disposition vient décliner, dans le chapitre 8 dudit règlement, consacré aux prestations familiales, le principe de l’absence d’incidence de la résidence des membres de la famille dans un État
membre qui n’est pas celui qui octroie ces prestations.

66. À cet égard, la Cour a encore rappelé très récemment que l’article 67 du règlement no 883/2004 vise à empêcher qu’un État membre puisse faire dépendre l’octroi ou le montant de prestations familiales de la résidence des membres de la famille du travailleur dans l’État membre prestataire ( 43 ).

67. Par conséquent, je suis d’avis que, compte tenu de la règle de la fiction de la résidence du travailleur dans l’État membre dans lequel il a exercé son droit à la libre circulation ainsi que de la résidence de l’ensemble de sa famille ( 44 ), énoncée à l’article 67 du règlement n o 883/2004, qui assure l’égalité de traitement des travailleurs migrants, il n’est pas admissible, sans modification de cette disposition ( 45 ), qu’un État membre introduise dans sa réglementation une exception au
principe de la stricte équivalence du montant des prestations familiales en considérant que cette exigence peut être satisfaite uniquement en valeur, conformément à l’objectif poursuivi par le législateur national, à savoir celui de compenser les charges de famille.

68. Cette analyse est corroborée, d’une part, par l’économie générale du règlement no 883/2004 dont l’article 68 prévoit des règles de priorité destinées à éviter le cumul injustifié des prestations lorsque, pour la même période et pour les mêmes membres de la famille, des prestations sont prévues par la législation de plus d’un État membre ( 46 ) ainsi que, d’autre part, par l’article 60 du règlement (CE) no 987/2009 ( 47 ), cité par l’Autorité de surveillance AELE et la République tchèque, qui
définit la procédure pour l’application des articles 67 et 68 du règlement no 883/2004. À cet égard, la Cour a rappelé que l’objectif poursuivi est de garantir au bénéficiaire de prestations versées par plusieurs États membres un montant total identique au montant de la prestation la plus favorable qui lui est due en vertu de la législation d’un seul de ces États ( 48 ). Ce système repose sur l’idée générale selon laquelle, si un travailleur migrant paie des contributions sociales et des impôts
dans un État membre, il doit pouvoir bénéficier des mêmes allocations que les ressortissants nationaux ( 49 ). Ledit système serait privé d’effet si l’un des États membres avait le droit d’adapter le montant des prestations en fonction du lieu de résidence du bénéficiaire.

69. Des arguments contraires à cette interprétation sont tirés par la République d’Autriche, soutenue par le Royaume de Danemark et le Royaume de Norvège, des arrêts Pinna ( 50 ), Lenoir ( 51 ) et Moser ( 52 ). Ils me paraissent devoir être écartés en raison de l’évolution du contenu des règlements applicables en matière de sécurité sociale et de la portée de ces arrêts.

70. En premier lieu, il convient de souligner que le principe de l’exportabilité des prestations familiales a été retenu par la Cour dans l’arrêt Pinna, puis dans l’arrêt Lenoir qui y fait référence ( 53 ). Il peut même être relevé à la lecture des arguments des parties rappelés par la Cour dans l’arrêt Pinna ( 54 ) que le litige ayant donné lieu à cet arrêt avait pour objet la différence quant aux montants ou au taux des prestations selon l’État dans lequel résidaient les membres de la famille
concernés, ce qui avait pour effet de remettre en cause les droits acquis du travailleur conformément à la loi à laquelle il était soumis et, partant, à l’objectif d’assurer la libre circulation des travailleurs.

71. En deuxième lieu, selon moi, l’exception admise dans l’arrêt Lenoir en cas d’octroi de prestations qui sont étroitement liées à l’environnement social ( 55 )a une portée limitée.

72. En effet, il y a lieu de replacer cette décision dans le cadre juridique sur la base duquel elle a été rendue, à savoir l’article 1er, sous u), du règlement no 1408/71, qui opérait une distinction entre les allocations familiales – cette expression désignant les prestations périodiques en espèces accordées exclusivement en fonction du nombre et, le cas échéant, de l’âge des membres de la famille – et les prestations familiales – cette expression désignant toutes les prestations en nature ou en
espèces destinées à compenser les charges de famille à l’exclusion des allocations spéciales de naissance mentionnées à l’annexe I ( 56 ).

73. En outre, ainsi que la République de Pologne l’a souligné, la dérogation au principe de l’exportabilité des prestations de sécurité sociale admise par la Cour dans l’arrêt Lenoir a été étendue à d’autres prestations spéciales à caractère non contributif ( 57 ).

74. Or, d’une part, dans le règlement no 883/2004, à l’article 1er, sous z), le législateur de l’Union n’a pas repris une telle distinction entre les diverses prestations destinées aux familles. D’autre part, à titre d’exception au principe général énoncé à l’article 7 de ce règlement relatif aux clauses de résidence, le critère de l’environnement économique et social a été admis uniquement pour les prestations entrant dans le champ d’application matériel de l’article 70 dudit règlement ( 58 ).

75. En troisième lieu, s’agissant de l’arrêt Moser, qui justifierait, selon la République d’Autriche et le Royaume de Norvège, de retenir que l’objectif de la prestation concernée est déterminant, je suis d’avis que l’interprétation de la Cour n’est pas transposable. En effet, l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt portait sur une allocation de garde d’enfant, qui, dans sa variante liée au revenu, constituait une prestation de remplacement du revenu professionnel. Son montant dépendait expressément
de celui du revenu antérieur, ce qui a justifié que la Cour procède à une interprétation conforme à l’objectif de compenser la perte de salaire en retenant que le montant de l’allocation devait être calculé en fonction du salaire effectif. Ainsi, la solution retenue par la Cour dans ledit arrêt n’est pas fondée sur la possibilité d’adapter une prestation familiale à l’environnement économique et social selon le lieu de résidence de son bénéficiaire.

76. En l’occurrence, la référence à l’arrêt Moser n’est, a fortiori, pas pertinente pour justifier de l’adaptation du montant de prestations familiales lorsque celui-ci ne dépend pas de coûts réels et est déterminé en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire des besoins personnels des bénéficiaires, sur la base d’une situation légalement définie ( 59 ).

77. En effet, j’observe, à l’instar de la Commission et des États membres intervenus à son soutien, qu’il ressort des éléments du dossier soumis à la Cour que les allocations familiales octroyées par la République d’Autriche correspondent à la définition qui en était donnée par le règlement no 1408/71, à savoir qu’il s’agit des prestations périodiques en espèces accordées à la famille du bénéficiaire exclusivement en fonction du nombre et, le cas échéant, de l’âge des membres de la famille.

78. À cet égard, je relève, premièrement, que, selon le libellé de l’article 8 du FLAG, le montant des allocations familiales dû à une personne est déterminé en fonction du nombre et de l’âge des enfants pour lesquels ces allocations familiales sont octroyées. Deuxièmement, aucune précision n’est apportée sur le lien entre le montant de cette prestation et le niveau réel des prix sur la base desquels il est calculé ( 60 ). La République d’Autriche ne peut donc se borner à soutenir que le fait que le
montant de cette prestation augmente avec l’âge montre que celle-ci est « par principe » liée aux coûts de l’entretien de l’enfant.

79. D’une manière générale, il ne ressort pas de la réglementation nationale en cause quels sont précisément les frais courants qui servent de base à la fixation du montant forfaitaire des prestations familiales ( 61 ), ni quels autres éléments que celui de l’âge ou du nombre d’enfants pourraient justifier leur augmentation, ni selon quelles proportions. Dans ces conditions, la Commission est fondée à soutenir que ne sont pas prises en considération les dépenses effectives ( 62 ) liées à des besoins
précis, ce qui est corroboré par l’uniformité des montants sur l’ensemble du territoire autrichien sans considération des variations liées au niveau des prix en Autriche.

80. Ainsi, pour l’ensemble des motifs exposés précédemment, je propose à la Cour de juger que le premier grief soulevé par la Commission est fondé.

B. Sur le second grief tiré de la violation du principe de l’égalité de traitement prévu à l’article 4 du règlement no 883/2004 et à l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011

1.   Argumentation des parties

a)   La Commission

81. Par son second grief, la Commission conclut à la violation par la République d’Autriche du principe de l’égalité de traitement prévu, d’une part, à l’article 4 du règlement no 883/2004 et à l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011 en ce que la réglementation de cet État membre met en œuvre l’adaptation de l’allocation familiale ainsi que du crédit d’impôt pour enfant à charge et, d’autre part, à l’article 7, paragraphe 2, de ce dernier règlement en ce que la réglementation dudit État
membre prévoit l’adaptation du bonus familial « plus », du crédit d’impôt pour ménage à revenu unique, du crédit d’impôt pour foyer monoparental et du crédit d’impôt pour pension alimentaire, en fonction du lieu de résidence de l’enfant.

82. La Commission expose que :

– l’article 4 du règlement no 883/2004 a pour objet d’assurer, conformément à l’article 45, paragraphe 2, TFUE, au profit des travailleurs concernés, l’égalité en matière de sécurité sociale sans distinction de nationalité, en supprimant toute discrimination à cet égard résultant des législations nationales des États membres ( 63 ) ;

– l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011 concrétise également le principe de l’égalité de traitement énoncé à l’article 45, paragraphe 2, TFUE, qui protège les travailleurs migrants non seulement des discriminations directes, fondées sur la nationalité, mais encore de toutes formes indirectes de discrimination, et

– cette disposition recouvre tous les avantages, tant sociaux que fiscaux, qui, liés ou non à un contrat d’emploi, sont généralement reconnus aux travailleurs nationaux en raison, principalement, de leur qualité objective de travailleurs ou du simple fait de leur résidence ordinaire sur le territoire national ( 64 ).

83. La Commission fait valoir que :

– l’allocation familiale et le crédit d’impôt pour enfant à charge sont à la fois des prestations familiales soumises au principe de l’égalité de traitement, énoncé à l’article 4 du règlement no 883/2004, et des avantages sociaux, régis par l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011 ( 65 ) ;

– le bonus familial « plus », le crédit d’impôt pour ménage à revenu unique, le crédit d’impôt pour foyer monoparental et le crédit d’impôt pour pension alimentaire, qui sont accordés par la République d’Autriche aux personnes qui travaillent sur son territoire, pour leurs enfants, indépendamment des besoins réels de ceux-ci et donc de leur environnement social, constituent des avantages fiscaux, dès lors qu’ils réduisent le montant de l’impôt sur le revenu. Dans la mesure où, dans le cas où
aucun impôt n’est dû, le crédit d’impôt pour ménage à revenu unique et celui pour foyer monoparental sont versés sous la forme d’un supplément pour enfant, il est présumé que le bénéficiaire est également assujetti à l’impôt en Autriche. Ces crédits d’impôt sont donc aussi soumis au principe de l’égalité de traitement énoncé à l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011, et

– l’adaptation, depuis le 1er janvier 2019, du montant forfaitaire des prestations familiales ainsi que des avantages sociaux et fiscaux, en fonction du seul critère du lieu de résidence des enfants, affecte essentiellement les travailleurs migrants dont les membres de la famille résident en dehors de l’État membre prestataire, ce que la République d’Autriche ne conteste pas.

84. À cet égard, la Commission relève que :

– d’après les travaux préparatoires de la loi instituant ce mécanisme d’adaptation de ces prestations et avantages, la République d’Autriche poursuivait un objectif de réduction des dépenses budgétaires de l’État en présumant que le nombre d’enfants résidant dans des États membres où le niveau des prix est inférieur à celui existant en Autriche est plus grand que le nombre d’enfants résidant dans des États membres où le niveau des prix est supérieur à celui existant en Autriche, et

– en effet, il ressort de la réglementation autrichienne que, s’agissant des États membres limitrophes de la République d’Autriche, le coefficient d’adaptation est, pour la République tchèque, de 0,619, pour l’Allemagne, de 0,974, pour l’Italie, de 0,948, pour la Hongrie, de 0,562, pour la Slovénie, de 0,79, et pour la Slovaquie, de 0,641. C’est seulement dans le cas de la Suisse et du Liechtenstein que l’adaptation aboutit à un montant plus élevé ou au même montant forfaitaire qu’en Autriche.

85. La Commission ajoute que, cependant, la réglementation autrichienne exclut les cas dans lesquels les enfants de la famille d’un fonctionnaire autrichien ont suivi celui-ci lorsqu’il a été détaché dans un autre État membre dans le cadre d’une mission de service, en traitant les prestations comme s’ils résidaient en Autriche.

86. Or, selon cette institution, au regard des critères d’appréciation de la comparabilité des situations fixées par la Cour ( 66 ), celle des travailleurs frontaliers qui vivent avec leurs enfants ne serait pas différente de celles des fonctionnaires autrichiens détachés. S’ils sont désavantagés en étant affectés dans des États membres dans lesquels le coût de la vie est supérieur à celui de la République d’Autriche, leur nombre est bien inférieur à celui des travailleurs migrants. La Commission
est également d’avis que les différences juridiques internationales, européennes et nationales invoquées par cet État membre sont inopérantes.

87. La Commission en conclut que la République d’Autriche crée une discrimination indirecte au détriment des travailleurs migrants, qu’aucun objectif légitime ne semble pouvoir justifier.

88. En réponse aux arguments de la République d’Autriche selon laquelle, en premier lieu, la discrimination ne serait pas constituée au motif que le principe de l’égalité de traitement exige que le montant des avantages financiers pour l’entretien d’un enfant dus à un travailleur corresponde à celui de ses dépenses au lieu de résidence de cet enfant ( 67 ), la Commission observe que les prestations familiales ainsi que les avantages sociaux et fiscaux en cause ne sont pas calculés, de manière
générale, en fonction du niveau réel des prix dans ce lieu et que leur montant forfaitaire est uniforme, sur tout le territoire national, malgré la disparité du pouvoir d’achat dans les différentes unités régionales. À cet égard, elle relève que l’explication donnée par le Royaume de Danemark, au soutien de celle de la République d’Autriche, selon laquelle cette uniformité résulterait du calcul du montant des allocations familiales et du crédit d’impôt pour enfant à charge par référence à la
catégorie de personnes ayant le revenu le plus bas, n’est fondée sur aucun élément fourni par la République d’Autriche.

89. La Commission précise également qu’il est difficile de concevoir comment cet État membre peut soutenir que les prestations familiales ainsi que les avantages sociaux et fiscaux qu’elle accorde ont un lien réel avec les dépenses exposées pour les enfants tout en considérant qu’elle doit procéder, par exemple, à l’égard de l’Allemagne et de l’Italie, à une adaptation de ces prestations et avantages pour une différence de pouvoir d’achat de seulement 2,6 % et de 5,2 %, bien inférieure à celle,
existant à l’intérieur de la République d’Autriche, de 8 % entre l’État fédéré de Vienne et celui de Basse-Autriche, dont il n’est pas tenu compte ( 68 ).

90. La Commission ajoute que le mécanisme d’adaptation prévu en Autriche mis en œuvre selon le lieu de résidence de l’enfant n’est pas comparable aux coefficients correcteurs appliqués aux rémunérations et aux aides financières prévues dans les actes de l’Union aux motifs qu’ils dépendent du lieu d’affectation du fonctionnaire de l’Union ou du lieu où ces aides doivent être versées et que les allocations familiales autrichiennes sont versées au travailleur migrant pour ses enfants et non pour
lui-même.

91. La Commission relève, en outre, que le Royaume de Danemark ne peut soutenir à la fois que des situations différentes doivent être traitées différemment et que les États membres ne sont pas tenus d’adapter le montant des allocations lorsque le pouvoir d’achat est plus élevé dans l’État membre de résidence des enfants.

92. S’agissant, en deuxième lieu, de la justification par la République d’Autriche de l’existence d’une éventuelle discrimination, qui serait tirée de l’objectif poursuivi consistant à se prémunir d’un risque d’atteinte à l’équilibre financier du système de sécurité sociale ( 69 ), la Commission rappelle que ce risque doit être grave ( 70 ). Or, elle relève qu’il ressort du rapport du Rechnungshof (Cour des comptes, Autriche), invoqué par la République d’Autriche elle-même au cours de la procédure
précontentieuse pour étayer cette prétendue justification, que, premièrement, le soutien du budget national au financement des prestations familiales est devenu nécessaire à la suite de l’augmentation des montants forfaitaires et de la réduction concomitante des sources de financement des prestations familiales ( 71 ).

93. Deuxièmement, la part des prestations familiales destinées aux enfants résidant dans un autre État membre que la République d’Autriche correspond à environ 6 % de l’ensemble des versements.

94. Troisièmement, si l’octroi de ces prestations a des répercussions sur le financement des prestations familiales, c’est principalement en raison de l’absence de contrôles appropriés des conditions d’octroi de ces prestations par les autorités autrichiennes ( 72 ).

95. Quatrièmement, l’adaptation des prestations familiales en fonction du niveau des prix de l’État membre concerné par rapport à celui de la République d’Autriche rend plus difficile la gestion de ces prestations, d’un point de vue technique et économique, en raison du système de paiement du complément différentiel par rapport aux prestations familiales servies dans l’État membre de résidence de l’enfant. Ce système, institué par l’article 68, paragraphe 2, du règlement no 883/2004, est applicable
dans les trois quarts des cas de versement de prestations familiales pour des enfants résidant dans d’autres États membres.

96. S’agissant, en troisième lieu, de la justification de l’existence d’une discrimination invoquée par la République d’Autriche, à titre subsidiaire, tirée de l’objectif de garantir l’équivalence en valeur du soutien et de l’allégement financiers en Autriche avec les autres États membres en fonction de la résidence de l’enfant, la Commission fait valoir que cette justification ne constitue pas une raison impérieuse d’intérêt général reconnue et repose sur des arguments relatifs à l’absence
d’inégalité de traitement et à la cohérence du mécanisme d’adaptation qui sont, en outre, contredits par l’exception à ce mécanisme en faveur des fonctionnaires autrichiens détachés.

97. Par ailleurs, la Commission, soutenue par la République slovaque, est d’avis que la République d’Autriche, en considérant qu’elle devait réagir à des distorsions dans le système résultant de ce que le soutien financier des travailleurs migrants dépassait le niveau d’allègement de leurs dépenses, semble perdre de vue le fait que les travailleurs originaires d’autres États membres contribuent au financement du système social et fiscal autrichien de la même manière que les travailleurs autrichiens,
quel que soit le lieu de résidence de leurs enfants. La Commission souligne que le revenu que ces travailleurs perçoivent en Autriche en contrepartie de leur prestation économique est pris en compte à hauteur égale, à la fois pour le calcul de la cotisation versée par les employeurs pour le financement des allocations familiales et pour le calcul de l’impôt.

b)   La République d’Autriche

1) S’agissant de la discrimination indirecte de travailleurs migrants du fait d’une application d’un critère de référence lié au lieu de résidence des enfants

i) Sur l’absence de discrimination indirecte

98. Selon la République d’Autriche, le mécanisme d’adaptation n’aboutit pas à une inégalité de traitement de situations identiques, mais garantit que des situations différentes soient également traitées de manière différente. La République d’Autriche rappelle que l’objectif poursuivi par le législateur autrichien par l’octroi d’avantages sociaux et fiscaux aux parents qui ont des enfants à charge est de leur permettre de supporter une partie de leurs dépenses engagées pour l’entretien de leurs
enfants. Il conduit à devoir distinguer la situation des travailleurs avec des enfants résidant à l’étranger de celle des travailleurs avec des enfants résidant en Autriche, qui ne sont pas matériellement comparables en raison des différences de coût de la vie dans les États membres et, par conséquent, du niveau de dépenses à achats équivalents.

99. Elle fait également remarquer, à l’instar du Royaume de Danemark, que, selon la position du Comité européen des droits sociaux, chargé de veiller à la mise en œuvre de la charte sociale européenne ( 73 ) et de cette charte modifiée du 3 mai 1996, l’exigence de non‑discrimination pour ce qui est des prestations de sécurité sociale en vertu de l’article 12, paragraphe 4, de ladite charte ne s’oppose pas à leur ajustement, si l’enfant réside dans un État connaissant des coûts de la vie nettement
inférieurs ( 74 ).

100. La République d’Autriche constate que la garantie du même pouvoir d’achat selon le coût de la vie dans différents États est également mise en œuvre non seulement par un coefficient correcteur pour la rémunération des fonctionnaires de l’Union, y compris les allocations familiales, lorsqu’elles sont dues à une autre personne que ces fonctionnaires ( 75 ), ce qui conduit à tenir compte du lieu de résidence des enfants, mais aussi par un classement des pays participant au programme Erasmus+ en
trois catégories pour adapter le montant de la subvention des étudiants pour leurs frais de séjour et de déplacement ( 76 ).

101. La République d’Autriche renvoie, en outre, aux conclusions du Conseil, du 9 octobre 2020, sur le renforcement de la protection du revenu minimum pour lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale dans le contexte de la pandémie de COVID-19 et au-delà ( 77 ). Elle relève que, en se référant à la recommandation 92/441/CEE du Conseil, du 24 juin 1992, portant sur les critères communs relatifs à des ressources et prestations suffisantes dans les systèmes de protection sociale ( 78 ), le Conseil
a identifié, parmi trois principes essentiels, celui de l’« [a]déquation », qui le conduit à considérer que « les besoins essentiels devraient être couverts de manière adéquate par des prestations de revenu minimum qui tiennent compte du niveau de vie et des niveaux de prix [...] nationaux dans les États membres concernés ».

102. S’agissant des arguments de la Commission tirés de l’absence d’uniformité des pouvoirs d’achat sur le territoire autrichien, la République d’Autriche fait valoir, d’abord, que les différences de pouvoir d’achat sont très réduites comparativement à celles existant dans les États membres ( 79 ) et qu’une adaptation selon les régions devrait également être prévue dans ces États. Les difficultés qui seraient engendrées par un tel système justifieraient le recours au calcul par Eurostat d’une valeur
moyenne par État, qui présente l’avantage d’être un critère objectif qui évite de s’interroger sur les cas dans lesquels de faibles différences de pouvoir d’achat existent, par exemple, en Allemagne ou en Italie.

103. La République d’Autriche considère, ensuite, que, selon la jurisprudence de la Cour, serait légale une telle référence à des montants uniformes et approximatifs ( 80 ) tout comme le choix du critère de la différence du coût de la vie ( 81 ). À cet égard, elle se réfère également aux conclusions de l’avocate générale Kokott dans l’affaire Hosse ( 82 ) selon lesquelles « on pourrait éventuellement reconnaître à l’État prestataire le droit d’adapter la prestation en cas d’écart manifeste au niveau
des prix dans l’État du domicile du bénéficiaire, dans la mesure où le règlement no 1408/71 ne s’y oppose pas. En aucun cas, cet argument ne saurait cependant aboutir à un refus total du bénéfice de la prestation à la personne concernée ».

104. Enfin, la République d’Autriche fait remarquer que l’Union se réfère aux régions qui n’appartiennent en aucun cas à plus d’un État membre, et ce, notamment, dans le cadre de l’appréciation de l’éligibilité au soutien régional dont le but est précisément de promouvoir la cohésion et, de ce fait, d’harmoniser les conditions de vie au sein de l’Union ( 83 ). Elle considère que, si l’argumentation défendue par la Commission dans la présente procédure était exacte, l’on ne pourrait que difficilement
qualifier d’approprié le fait que les régions de Burgenland (Autriche), de Bratislava (Slovaquie) et de Transdanubie occidentale (Hongrie) – avec les communes directement adjacentes de Deutsch Jahrndorf (Autriche), Rusovce (Slovaquie) et Rajka (Hongrie) – aient des droits très différents à des ressources du soutien régional de l’Union, alors qu’elles sont directement frontalières entre elles.

ii) Sur la justification objective d’une discrimination indirecte, à titre subsidiaire

105. En premier lieu, la République d’Autriche soutient que la Commission a cité des documents qui ne justifient pas qu’elle poursuivait un objectif spécifique de réalisation d’économies et que son analyse est infirmée par les travaux préparatoires de la réglementation nationale ( 84 ) et, notamment, par l’évaluation de ses conséquences en termes d’efficacité ( 85 ).

106. En deuxième lieu, s’agissant des allocations familiales et du crédit d’impôt pour enfant à charge, la République d’Autriche rappelle, d’une part, que, selon la jurisprudence constante de la Cour ( 86 ), il appartient aux États membres d’organiser leurs systèmes de sécurité sociale respectifs et que, dans ce cadre, elle a modifié le mode de calcul des prestations, en fonction du coût de la vie réel, à la hausse ou à la baisse, afin de répondre aux objectifs de prise en charge d’une partie des
frais typiquement liés à l’entretien des enfants et d’équité du système social en valeur. D’autre part, la République d’Autriche renvoie à la jurisprudence des juridictions civiles autrichiennes relative à la pension alimentaire pour des enfants vivant à l’étranger. Cette pension alimentaire est calculée en fonction des conditions de vie moyennes du débiteur d’aliments et du pouvoir d’achat dans le pays dans lequel l’enfant vit. Sur cette base, les besoins du bénéficiaire d’aliments sont
concrètement et individuellement mis en relation avec les conditions de vie des parents. Elle fait valoir également que le constat de ce que les allocations familiales ne couvrent que les besoins essentiels ne modifie en rien leur fonction de soutien ( 87 ), dès lors que ces prestations poursuivent, en principe, le même objectif que la pension alimentaire, à savoir couvrir les frais habituellement supportés par les parents pour l’entretien de leur enfant et qu’il est sans incidence que le
niveau d’abstraction soit, par nature, légèrement plus élevé dans le cas d’une prestation étatique bénéficiant à tous les enfants que lors de l’évaluation individuelle de la pension alimentaire d’un parent pour un enfant précis.

107. En troisième lieu, s’agissant du bonus familial « plus » et des autres crédits d’impôt, la République d’Autriche fait valoir que le mécanisme d’adaptation garantit que les dépenses réelles soient prises en compte de manière équitable et que tous les contribuables exerçant une activité professionnelle, qui ont des enfants, soient traités de manière égale en ce qui concerne leur capacité contributive.

108. À cet égard, elle se réfère à nouveau au principe de la capacité contributive ( 88 ) en vertu duquel les charges engendrées par les enfants doivent être fiscalement prises en compte dans une mesure appropriée. Ce principe trouverait son fondement en droit de l’Union dans le domaine de la fiscalité directe et constituerait un principe général du droit fiscal au sein de l’Union. Ainsi, dans l’arrêt du 15 septembre 2011, Schulz-Delzers et Schulz ( 89 ), la Cour aurait jugé que la comparabilité de
deux situations de fait en rapport avec des indemnités accordées pour des expatriations « fai[sai]t défaut à la lumière de l’objectif poursuivi par l’application d’un barème d’imposition progressif qui est nécessairement fondé [...] sur une appréciation de la capacité contributive de l’assujetti opérée sur le fondement des conditions de vie sur le territoire de l’État membre concerné ».

109. En quatrième lieu, elle affirme que, dès lors que le mécanisme d’adaptation des prestations familiales et des avantages fiscaux en cause garantit qu’un soutien ou un allègement de même valeur est accordé, il ne va pas au‑delà de ce qui est nécessaire à la réalisation de l’objectif poursuivi.

110. S’agissant des arguments de la Commission tirés du rapport de la Cour des comptes, la République d’Autriche fait observer que :

– du fait que l’octroi des crédits d’impôt en fonction de la situation familiale est lié au crédit d’impôt pour enfant à charge et, de ce fait, aux allocations familiales pour le versement desquelles il est nécessaire de constater dans quel État l’enfant concerné a son lieu de résidence, la dépense administrative supplémentaire résultant du mécanisme d’adaptation en fonction de l’État de résidence est très limitée, et

– il a été constaté que le nombre d’enfants résidant dans d’autres États membres pour lesquels il existe un droit à allocations familiales est passé de 1500 pour l’année 2002 à environ 130000 pour l’année 2016 et que l’examen des cas présentant un caractère d’extranéité « ont été contrôlés plus souvent que des situations nationales en raison de la qualification du risque ».

111. Quant à l’argument de la Commission selon lequel, pour environ les trois quarts des enfants qui résident dans d’autres États membres, la République d’Autriche n’effectue que des paiements différentiels ( 90 ), celle-ci fait remarquer que même ces paiements, y compris le crédit d’impôt pour enfant à charge, restent, dans de nombreux cas, plus importants que les prestations primaires dans l’État de résidence de l’enfant.

112. Quant à l’argument général de la Commission, soutenu également par la République de Croatie, la République de Pologne et la République de Slovénie, tiré de ce qu’il serait inéquitable que des travailleurs paient des impôts en Autriche ainsi que des cotisations prélevées sur leurs salaires et participent ainsi au financement des prestations litigieuses, pour finalement ne les percevoir que sous la forme de prestations adaptées en valeur pour leurs enfants résidant dans un autre État membre, la
République d’Autriche estime que l’assiette de calcul des cotisations patronales est indifférente et qu’aucun rapport n’existe entre une éventuelle obligation fiscale et le droit aux prestations versées par l’État. À l’inverse, si l’obligation fiscale du travailleur devait avoir une influence sur l’exportation des prestations de sécurité sociale, alors la règle énoncée à l’article 70 du règlement no 883/2004 serait contraire au droit de l’Union.

2) S’agissant de la discrimination indirecte de travailleurs migrants du fait des réglementations applicables aux fonctionnaires à l’étranger

i) Sur l’absence de discrimination indirecte

113. La République d’Autriche fait valoir que l’argument de la Commission au soutien de l’existence d’une discrimination indirecte ne peut concerner que la situation des fonctionnaires autrichiens à l’étranger dont les enfants ont également déménagé et que celle-ci n’est pas comparable à celle des travailleurs migrants pour des motifs juridiques et matériels. D’une part, les fonctionnaires à l’étranger seraient soumis à un régime spécial d’exonération du régime de sécurité sociale et fiscal de
l’État d’accueil en vertu des articles 33, 34 et 37 de la convention de Vienne sur les relations diplomatiques ( 91 ) ainsi que des articles 48 et 49 de la convention de Vienne sur les relations consulaires ( 92 ).

114. De plus, la spécificité de la situation des fonctionnaires à l’étranger se retrouverait également dans le droit de l’Union, à l’article 45, paragraphe 4, TFUE ainsi qu’à l’article 11, paragraphe 3, sous b), et à l’article 13, paragraphe 4, du règlement no 883/2004 ( 93 ), dont il résulterait que les fonctionnaires à l’étranger n’ont pas, dans les États d’accueil, de droit à des allocations familiales ni, par conséquent, à des paiements différentiels ou à des prestations supplémentaires liées à
leur situation familiale.

115. Enfin, en vertu du droit autrichien, les fonctionnaires à l’étranger sont considérés comme exerçant leur activité sur le territoire national pour le régime de la sécurité sociale et le traitement de leur situation d’un point de vue fiscal. En outre, en matière civile, ils relèvent toujours du for général autrichien.

116. D’autre part, s’agissant des différences matérielles, les fonctionnaires à l’étranger, soumis à un régime de mutations régulières, conservent, en règle générale, leur domicile et le centre de leurs intérêts en Autriche.

117. Par ailleurs, selon la République d’Autriche, s’il devait être considéré que la situation des fonctionnaires à l’étranger est comparable à celle des travailleurs migrants, il en résulterait que les premiers, en étant exclus de l’application du mécanisme d’adaptation, sont, si on les considère dans leur globalité, non pas favorisés, mais désavantagés. Il devrait être tenu compte du fait que la majeure partie des fonctionnaires à l’étranger de la République d’Autriche, détachés dans d’autres
États membres ainsi que dans des parties à l’accord EEE et en Suisse, se trouve dans des États dans lesquels le coût de la vie est supérieur à celui en Autriche.

118. À cet égard, la Commission ne peut arguer d’un nombre plus important de travailleurs migrants affectés par le mécanisme d’adaptation par rapport aux fonctionnaires autrichiens détachés sans démontrer, conformément à la jurisprudence de la Cour ( 94 ), que la proportion de travailleurs migrants concernés est supérieure à celle des fonctionnaires placés dans la même situation défavorable.

ii) Sur la justification objective d’une discrimination indirecte, à titre subsidiaire

119. Si la Cour devait considérer que les réglementations applicables aux fonctionnaires à l’étranger constituent une discrimination indirecte, la République d’Autriche fait valoir comme justification, en tant que raison impérieuse d’intérêt général, le devoir de sollicitude de l’État vis‑à‑vis de ces fonctionnaires, corrélé à leur obligation de loyauté à son égard. Après avoir relevé que la Commission ne remet pas en cause le fondement de cette justification dans le cadre du recours en manquement,
la République d’Autriche se réfère, à cet égard, à certaines décisions de la Cour relatives au principe de sollicitude portant sur des activités exercées par des agents au sein des institutions de l’Union et dans l’administration publique des États membres ( 95 ).

120. Selon la République d’Autriche, elle fait preuve, en sa qualité d’employeur, d’une sollicitude accrue à l’égard de ses fonctionnaires exerçant leurs activités sur le territoire national et à l’étranger en soumettant ces derniers à un système cohérent, gérable d’un point de vue pratique, fondé sur le droit international, qui les soumet au droit national de l’État d’origine en partant du principe que toutes les conséquences juridiques sont liées à leur domicile dans cet État. Elle fait également
observer que l’application du mécanisme d’adaptation à l’intérieur de l’Union, mais non à l’extérieur de cette dernière, serait en contradiction avec le devoir de sollicitude de la République d’Autriche à l’égard de ses fonctionnaires dont elle doit garantir l’égalité de traitement.

iii) À titre subsidiaire, sur un éventuel argument tiré de l’absence de cohérence du mécanisme d’adaptation

121. À titre liminaire, la République d’Autriche relève que, dans le cadre de l’avis motivé, la Commission n’a contesté les réglementations applicables aux fonctionnaires à l’étranger que sous l’angle d’une discrimination indirecte. Elle fait valoir que, si, dans le cadre de son argumentation développée au soutien de sa requête, la Commission devait également lui reprocher l’absence de cohérence des réglementations faisant l’objet du recours instaurant un mécanisme d’adaptation, cet argument devrait
être rejeté comme étant irrecevable, conformément à la jurisprudence de la Cour ( 96 ).

122. Si toutefois cet argument devait être examiné, la République d’Autriche reprend les éléments de sa réponse portant sur le fait que les réglementations applicables aux fonctionnaires à l’étranger font partie d’un système global intrinsèquement cohérent. Elle ajoute que la Cour a jugé que toute exception à une réglementation nationale n’aboutit pas à rendre celle-ci incohérente notamment si son champ d’application est particulièrement restreint et que tel est le cas en l’occurrence ( 97 ).

2.   Appréciation

a)   Sur l’existence d’une discrimination indirecte

123. S’agissant des fondements du second grief invoqué par la Commission, qui ne sont pas contestés, il peut être rappelé que la Cour a jugé que :

– la notion d’« avantage social », au sens de l’article 7 du règlement no 492/2011, comprend tous les avantages sociaux et fiscaux qui, liés ou non à un contrat d’emploi, sont généralement reconnus aux travailleurs nationaux, en raison principalement de leur qualité objective de travailleur ou du simple fait de leur résidence sur le territoire national, dont l’extension aux travailleurs ressortissants d’autres États membres apparaît dès lors comme apte à faciliter leur mobilité à l’intérieur de
l’Union ainsi que, de ce fait, leur intégration dans l’État membre d’accueil ( 98 ), et

– l’article 7, paragraphe 2, de ce règlement peut être applicable à des avantages sociaux qui relèvent en même temps du domaine d’application spécifique du règlement no 883/2004 ( 99 ).

124. En l’occurrence, l’allocation familiale et le crédit d’impôt pour enfant à charge sont à la fois des prestations familiales soumises au principe de l’égalité de traitement prévu à l’article 4 du règlement no 883/2004 et des avantages sociaux entrant dans le champ d’application de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011, tandis que le bonus familial « plus », le crédit d’impôt pour ménage à revenu unique, le crédit d’impôt pour foyer monoparental et le crédit d’impôt pour pension
alimentaire sont soumis au principe de l’égalité de traitement énoncé à l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011.

125. À cet égard, il résulte de la jurisprudence de la Cour que :

– le principe de l’égalité de traitement, tel qu’affirmé à l’article 4 du règlement no 883/2004 ( 100 ), conformément notamment à l’article 45, paragraphe 2, TFUE, prohibe non seulement les discriminations ostensibles, fondées sur la nationalité des bénéficiaires des régimes de sécurité sociale, mais encore toutes formes dissimulées de discrimination qui, par application d’autres critères de distinction, aboutissent en fait au même résultat ( 101 ) ;

– cette interdiction résulte également de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011 ( 102 ), qui est l’expression particulière, dans le domaine spécifique de l’octroi d’avantages sociaux, de la règle de l’égalité de traitement consacrée à l’article 45, paragraphe 2, TFUE ( 103 ), et

– cet article 7, paragraphe 2, doit être interprété de la même façon que l’article 45 TFUE ( 104 ).

126. Par conséquent, l’interprétation de l’article 4 du règlement no 883/2004 et de l’article 7 du règlement no 492/2011, en ce qu’ils visent à assurer la libre circulation des travailleurs, doit être coordonnée.

127. S’agissant de l’articulation de ces deux règlements dont les champs d’application se recoupent ( 105 ), la Cour a relevé la portée générale du règlement no 492/2011 en ce qui concerne la liberté de circulation des travailleurs ( 106 ). Elle a ainsi réitéré la solution adoptée à l’occasion de l’examen d’un recours en manquement fondé par la Commission à la fois sur la violation du règlement no 1408/71 du fait de la fixation d’un critère de résidence pour l’exportabilité de prestations de maladie
et sur la faculté de justifier le choix de ce critère, au regard de l’article 7 du règlement (CEE) no 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de la Communauté ( 107 ). Dès lors, l’application de l’article 4 du règlement no 883/2004 pourrait être réservée aux situations qui ne sont pas couvertes par le règlement no 492/2011, quand bien même le règlement no 883/2004 contient des dispositions particulières interdisant les clauses de
résidence, spécialement à l’article 7 ( 108 ).

128. La République d’Autriche soutient, à titre principal, que le mécanisme d’adaptation pour les prestations familiales ainsi que pour les avantages sociaux et fiscaux n’aboutit pas à une inégalité de traitement. Elle fait valoir, pour l’essentiel, d’une part, que, l’objectif des prestations et avantages étant soit de rembourser une partie des frais supportés par les parents pour l’entretien des enfants, soit d’alléger leurs charges fiscales, les situations des travailleurs avec des enfants ne
résidant pas en Autriche et ceux qui y résident ne sont pas comparables en raison des différences de niveaux de vie entre les États membres. D’autre part, en application du mécanisme d’adaptation, les travailleurs migrants obtiennent le soutien dont ils ont besoin en fonction du coût de la vie dans l’État de résidence de l’enfant.

129. Cependant, ainsi que la Cour l’a jugé, les conditions imposées par le droit national doivent être considérées comme indirectement discriminatoires lorsque, bien qu’applicables indépendamment de la nationalité, elles affectent essentiellement les travailleurs migrants ou que la grande majorité des personnes concernées sont des travailleurs migrants, lorsqu’elles sont applicables sans distinction, mais peuvent être plus facilement satisfaites par les travailleurs nationaux que par les
travailleurs migrants, ou lorsqu’elles risquent de jouer, en particulier, au détriment de ces derniers ( 109 ).

130. En l’occurrence, il résulte du critère lié à la résidence des enfants fixé par la réglementation autrichienne que la réduction du montant des prestations familiales ainsi que des avantages sociaux et fiscaux affecte essentiellement les travailleurs migrants, dès lors que leurs enfants sont plus particulièrement susceptibles de résider dans un autre État membre ( 110 ). En outre, il ressort très clairement des tableaux qui fixent les coefficients d’adaptation des montants ( 111 ) des prestations
concernant les États frontaliers de la République d’Autriche que, en raison des différences de niveaux de vie existant dans la majorité de ces États par rapport à la République d’Autriche, les travailleurs qui ont exercé leur liberté de circulation depuis ces États sont en grande majorité ceux qui percevront des prestations ainsi que des avantages sociaux et fiscaux d’un moindre montant que celui octroyé en Autriche. Or, selon les données du rapport de la Cour des comptes produit par la
Commission ( 112 ) et invoqué par la République d’Autriche, environ 50 % des paiements en 2016 concernaient des enfants résidant en Hongrie ainsi qu’en Slovaquie et 40 % de ces paiements concernaient des enfants résidant en République tchèque, en Pologne, en Roumanie, ainsi qu’en Slovénie.

131. Cette analyse est corroborée par les explications du gouvernement autrichien relatives aux estimations des effets de l’adaptation relative au bonus familial « plus » ( 113 ). Ces éléments sont à rapprocher du constat de la Cour des comptes selon laquelle le nombre d’enfants bénéficiaires a été multiplié par six entre les années 2004 et 2016 parallèlement à l’ouverture du marché du travail autrichien ( 114 ).

132. À mon sens, ces seuls éléments suffisent à établir, sans avoir à examiner les arguments surabondants discutés par les parties, que la distinction opérée dans la réglementation autrichienne quant au montant des prestations exportables selon le lieu de résidence des enfants dans les État membres affecte davantage les travailleurs migrants et constitue une discrimination indirecte fondée sur la nationalité qui ne peut être admise que si elle est objectivement justifiée ( 115 ).

133. À ma connaissance, la Cour n’a pas fait expressément référence à cette condition à l’occasion de l’application de l’article 4 du règlement no 883/2004. Cependant, l’unique décision de la Cour portant sur l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 1408/71 qui énonçait en termes analogues le principe de l’égalité de traitement est, à mon avis, transposable ( 116 ). En outre, je relève que la Cour a procédé à l’interprétation de l’article 67 du règlement no 883/2004, qui vise à ce qu’un
travailleur ne soit pas dissuadé d’exercer son droit à la libre circulation ( 117 ), en combinaison avec l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011, et a vérifié sur ce seul fondement les justifications invoquées par la juridiction de renvoi. J’en déduis que le choix par un État membre d’un critère de résidence applicable aux prestations familiales est également justifiable en raison de la règle de l’interprétation coordonnée de l’article 4 du règlement no 883/2004 et de l’article 7,
paragraphe 2, du règlement no 492/2011, résultant de leur fondement commun, à savoir l’article 45 TFUE, fixant l’objectif de garantir la libre circulation des travailleurs ( 118 ).

b)   Sur la justification de la discrimination indirecte

134. Selon une jurisprudence constante de la Cour relative à l’application de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011, pour être justifiée, la discrimination indirecte doit être propre à garantir la réalisation d’un objectif légitime et ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif ( 119 ).

135. La Commission soutient, à juste titre, que la République d’Autriche n’avance aucun motif qui soit susceptible de justifier la discrimination indirecte engendrée par le mécanisme d’adaptation du montant des prestations ainsi que des avantages sociaux et fiscaux qu’elle a institué.

136. En effet, dans le cadre du présent recours, la République d’Autriche fait valoir, d’une part, avec l’appui en substance du Royaume de Danemark et du Royaume de Norvège, que l’adaptation du montant des prestations vise à s’assurer que le soutien et l’allègement consécutif des charges familiales correspondent en valeur à ceux octroyés en Autriche ( 120 ).

137. Or, premièrement, il doit, à mon sens, être à nouveau relevé que les prestations octroyées sont forfaitaires ( 121 ) et ne tiennent pas compte des besoins réels de l’enfant. À cet égard, je partage également le point de vue de la Roumanie selon lequel la République d’Autriche ne peut utiliser les mêmes arguments pour contester l’existence d’une discrimination et la justifier.

138. Deuxièmement, il résulte clairement de la démonstration chiffrée de la Commission ( 122 ), qui n’est pas remise en cause par la République d’Autriche, que cette correspondance en valeur n’est pas assurée sur le territoire autrichien ( 123 ) et qu’il n’existe en proportion aucune cohérence entre les différences de coût de la vie constatées en Autriche et les coefficients appliqués dans certains États membres ( 124 ). En outre, ainsi que le souligne la République slovaque, au sein de ces États
membres des disparités peuvent exister ( 125 ), ce qui démontre l’importance du lieu dans lequel les achats sont effectués si un système de correspondance avec le niveau des prix devait être admis.

139. L’argument de la République d’Autriche selon lequel les écarts de pouvoir d’achat sont nettement plus importants, spécialement avec la Bulgarie ( 126 ), ce qui vient également compenser les effets du mécanisme d’adaptation, n’est pas de nature à remettre en cause l’ensemble de ces constatations.

140. Par conséquent, l’objectif visant à s’assurer que le soutien et l’allègement consécutif des charges familiales correspondent en valeur à ceux octroyés en Autriche n’est, selon moi, pas de nature à justifier la discrimination indirecte en cause.

141. D’autre part, la République d’Autriche soutient que l’objectif supérieur du mécanisme d’adaptation du montant des avantages sociaux et fiscaux est l’établissement ou le rétablissement de la fonction de soutien ainsi que de l’équité du système social.

142. À l’instar de la Commission, je relève, premièrement, qu’il résulte du rapport de la Cour des comptes ( 127 ) que l’adaptation des prestations familiales en fonction du niveau des prix de l’État membre concerné par rapport à la République d’Autriche est de nature à engendrer des coûts supplémentaires, quand bien même cet impact est minimisé par la République d’Autriche. Or, ces coûts doivent nécessairement être supportés par l’ensemble de ceux qui cotisent au budget de l’État. Dans ce contexte,
il me paraît opportun de préciser qu’il est également indiqué dans ce rapport ( 128 ), ainsi que la Commission et la République de Pologne le soulignent, que la raison qui pourrait mettre en péril l’équilibre financier du système de sécurité sociale n’est pas le versement de prestations aux travailleurs dont les enfants résident en dehors de la République d’Autriche, qui représente environ 6 % ( 129 ) des dépenses au titre des prestations familiales, mais l’absence de contrôle approprié en ce
qui concerne l’octroi de ces prestations.

143. Deuxièmement, je partage les avis exprimés par la Commission ( 130 ) ainsi que par l’Autorité de surveillance AELE et la République de Slovénie, selon lesquels il est primordial de rappeler que les règles protectrices de la liberté de circulation des travailleurs au sein de l’Union et de l’EEE ( 131 ), dont l’égalité de traitement, s’appuient sur un système global dans lequel, d’une part, la législation applicable en matière de sécurité sociale est, en général, la législation de l’État membre
dans lequel l’intéressé exerce son activité salariée ou non salariée ( 132 ) et, d’autre part, les travailleurs migrants contribuent au financement des politiques sociales de l’État membre d’accueil par les cotisations tant sociales que fiscales versées au titre de l’activité qu’ils y exercent ( 133 ), ce qui justifie l’égalité des prestations octroyées ou des avantages consentis ( 134 ).

144. En l’occurrence, je constate, à l’instar de la République tchèque, de la République de Croatie et de la République de Pologne, que, d’un point de vue purement économique, dès lors que les allocations familiales autrichiennes sont financées par des cotisations des employeurs calculées sur la base du montant total des salaires des travailleurs, un travailleur migrant participe de ce fait, de la même manière qu’un travailleur national, à la détermination du montant des sommes versées par son
employeur.

145. En outre, s’agissant du bonus familial « plus » et des autres crédits d’impôt en cause, la République d’Autriche a exposé que ces avantages étaient financés par l’impôt sur le revenu des travailleurs, ce qui invalide également toute justification du choix par le législateur autrichien de l’absence de réciprocité par un objectif d’équité sociale.

146. Dès lors, je suis d’avis que la différence de traitement selon le lieu de résidence de l’enfant du travailleur concerné n’est ni appropriée ni nécessaire en vue d’établir ou de rétablir la fonction de soutien ainsi que l’équité du système social.

147. Pour l’ensemble des motifs exposés précédemment, je considère que la réglementation autrichienne relative à l’adaptation du montant des prestations familiales ainsi que des avantages sociaux et fiscaux pour les personnes travaillant en Autriche dont les enfants résident dans un autre État membre est contraire au principe de l’égalité de traitement énoncé tant à l’article 4 du règlement no 883/2004 qu’à l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011.

148. Par conséquent, je propose à la Cour de juger que le second grief soulevé par la Commission est fondé.

VI. Sur les dépens

149. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Dans la mesure où la Cour devrait, à mon sens, faire droit aux conclusions de la Commission, la République d’Autriche doit être condamnée aux dépens.

150. Conformément à l’article 140, paragraphes 1 et 2, du règlement de procédure, selon lequel les États membres, les États parties à l’accord EEE, autres que les États membres, ainsi que l’Autorité de surveillance AELE qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens, la République tchèque, le Royaume de Danemark, la République de Croatie, la République de Pologne, la Roumanie, la République de Slovénie et la République slovaque ainsi que le Royaume de Norvège et l’Autorité de
surveillance AELE supporteront leurs propres dépens.

VII. Conclusion

151. Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de statuer comme suit :

1) En mettant en place un mécanisme d’adaptation relatif à l’allocation familiale et au crédit d’impôt pour enfant à charge pour les travailleurs dont les enfants résident en permanence dans un autre État membre, la République d’Autriche a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu :

– des articles 7 et 67 du règlement (CE) no 883/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, ainsi que

– de l’article 4 du règlement no 883/2004 et de l’article 7, paragraphe 2, du règlement (UE) no 492/2011 du Parlement européen et du Conseil, du 5 avril 2011, relatif à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur de l’Union.

2) En mettant en place, pour les travailleurs migrants dont les enfants résident en permanence dans un autre État membre, un mécanisme d’adaptation relatif au bonus familial « plus », au crédit d’impôt pour ménage à revenu unique, au crédit d’impôt pour foyer monoparental et au crédit d’impôt pour pension alimentaire, la République d’Autriche a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 492/2011.

3) La République d’Autriche est condamnée aux dépens.

4) La République tchèque, le Royaume de Danemark, la République de Croatie, la République de Pologne, la Roumanie, la République de Slovénie et la République slovaque ainsi que le Royaume de Norvège et l’Autorité de surveillance AELE supporteront leurs propres dépens.

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( 1 ) Langue originale : le français.

( 2 ) JO 2004, L 166, p. 1, et rectificatif JO 2004, L 200, p. 1.

( 3 ) JO 2011, L 141, p. 1.

( 4 ) BGBl. 376/1967, ci-après le « FLAG ».

( 5 ) JO 1994, L 1, p. 3, ci-après l’« accord EEE ».

( 6 ) BGBl. 400/1988, ci‑après l’« EStG ».

( 7 ) L’adaptation de l’allocation familiale et du crédit d’impôt pour enfant à charge a été mise en place, avec effet au 1er janvier 2019, par le Verordnung der Bundesministerin für Frauen, Familien und Jugend und des Bundesministers für Finanzen über die Anpassung der Familienbeihilfe und des Kinderabsetzbetrages in Bezug auf Kinder, die sich ständig in einem anderen Mitgliedstaat der EU oder einer Vertragspartei des Europäischen Wirtschaftsraumes oder der Schweiz aufhalten (règlement du ministre
fédéral des Femmes, de la Famille et de la Jeunesse et du ministre fédéral des Finances relatif à l’adaptation de l’allocation familiale et du crédit d’impôt pour enfant à charge en ce qui concerne les enfants résidant en permanence dans un autre État membre de l’Union [...] ou dans une partie à l’accord [EEE] ou en Suisse), du 10 décembre 2018 (BGBl. II, 318/2018), disponible à l’adresse Internet suivante :
https://www.ris.bka.gv.at/GeltendeFassung.wxe?Abfrage=Bundesnormen&Gesetzesnummer=20010489&FassungVom=2019-07-08, adopté sur la base du Bundesgesetz, mit dem das Familienlastenausgleichsgesetz 1967, das Einkommensteuergesetz 1988 und das Entwicklungshelfergesetz geändert werden (loi fédérale portant modification du [FLAG], de [l’EStG] et de la loi sur le statut des coopérants), du 4 décembre 2018 (BGBl. I, 83/2018).

( 8 ) L’adaptation du bonus familial « plus » ainsi que des crédits d’impôt pour ménage à revenu unique, foyer monoparental et pension alimentaire a été mise en place, avec effet au 1er janvier 2019, par le Verordnung des Bundesministers für Finanzen über die Anpassung des Familienbonus Plus, des Alleinverdiener-, Alleinerzieher- und Unterhaltsabsetzbetrages sowie des Kindermehrbetrages in Bezug auf Kinder, die sich ständig in einem anderen Mitgliedstaat der EU oder einer Vertragspartei des
Europäischen Wirtschaftsraumes oder der Schweiz aufhalten (règlement du ministre fédéral des Finances sur l’adaptation du bonus familial « plus » et des crédits d’impôt pour ménage à revenu unique, foyer monoparental et pension alimentaire en ce qui concerne les enfants résidant en permanence dans un autre État membre de l’Union [...] ou dans une partie à l’accord [EEE] ou en Suisse), du 27 septembre 2018 (BGBl. II, 257/2018), disponible à l’adresse Internet suivante :
https://www.ris.bka.gv.at/GeltendeFassung.wxe?Abfrage=Bundesnormen&Gesetzesnummer=20010319, adopté sur la base du Jahressteuergesetz 2018 (loi fiscale annuelle de 2018), du 14 août 2018 (BGBl. I, 62/2018), modifiant notamment l’EStG.

( 9 ) Voir, s’agissant des coefficients appliqués selon les États membres concernés, notes en bas de page 7 et 8, ainsi que point 84, deuxième tiret, des présentes conclusions à titre d’illustration de la diversité de ces coefficients pour les États membres frontaliers de la République d’Autriche.

( 10 ) La Commission se réfère à l’arrêt du 2 avril 2020, Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) [C‑802/18, ci-après l’« arrêt Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) , EU:C:2020:269, points 38 et 39, ainsi que jurisprudence citée].

( 11 ) La Commission a également réaffirmé sa position en réponse à l’argument contraire soutenu par le Royaume de Norvège tiré d’un exemple de remboursement du coût d’une poussette à hauteur de 50 % de son prix par une prestation familiale, dont le montant pourrait être différent selon les États membres (voir aussi note en bas de page 20 des présentes conclusions). La Commission a souligné que, dans un tel cas, pour un travailleur migrant, le montant de l’allocation dépend du prix de ses dépenses.
Or, le mécanisme d’adaptation autrichien repose sur la présomption que celles-ci sont engagées au lieu dans lequel l’enfant réside et méconnaît l’environnement économique et social de l’enfant qui réside dans un autre État membre que celui dans lequel son parent travaille. Par conséquent, en reprenant le même exemple, il n’est pas admissible que la prise en charge des frais d’achat par deux travailleurs d’une poussette d’une valeur de 100 euros soit de 50 euros si l’enfant réside en Autriche et d’un
montant différent si celui-ci n’y réside pas, alors que la dépense est identique.

( 12 ) C‑32/18, ci-après l’« arrêt Moser , EU:C:2019:752, point 36 et jurisprudence citée. En se référant également aux points 10 et 54 de cet arrêt, la Commission a ajouté que c’est précisément parce que le montant de l’allocation de garde d’enfant autrichienne dépendait expressément de celui du revenu professionnel antérieur effectivement perçu qu’il était possible de calculer son montant en fonction de l’environnement économique et social du bénéficiaire.

( 13 ) 41/84, ci-après l’« arrêt Pinna , EU:C:1986:1. Voir, en particulier, point 25 de cet arrêt.

( 14 ) Règlement du Conseil du 14 juin 1971 relatif à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté (JO 1971, L 149, p. 2). La Commission précise qu’il résulte de l’arrêt du 27 septembre 1988, Lenoir (313/86, ci-après l’« arrêt Lenoir , EU:C:1988:452, points 9, 11 et 16), qu’il n’est pas possible d’adapter les « prestations périodiques en espèces accordées exclusivement en fonction du nombre et, le cas
échéant, de l’âge des membres de la famille » à l’environnement économique et social.

( 15 ) Conclusions de l’avocat général Mancini dans l’affaire Pinna (41/84, non publiées, EU:C:1985:215, point 7).

( 16 ) Voir annexe I, section D, point 2, sous a), de l’extrait des conclusions du Conseil européen des 18 et 19 février 2016 (JO 2016, C 69 I, p. 1).

( 17 ) Voir point 56 des présentes conclusions.

( 18 ) La Commission se réfère à l’analyse d’impact SWD(2016) 460 final/2, partie 1/6, p. 135, point 7.3.2.

( 19 ) La République d’Autriche ainsi que le Royaume de Norvège estiment que le lien des prestations familiales avec le coût de la vie est confirmé dans le rapport FreSsco, intitulé « Assessment of the impact of amendments to the EU social security coordination rules on export of family benefits », figurant en annexe VI à l’analyse d’impact citée en note en bas de page 18 des présentes conclusions, partie 3/6, point 1.7.2, p. 44. La République d’Autriche souligne que celui-ci montre, en particulier,
que les prestations familiales sont, en principe, ajustées, l’ajustement reposant toujours sur le taux d’inflation.

( 20 ) La République d’Autriche souligne que le critère du nombre d’enfants et de leur âge n’est pas à lui seul déterminant pour apprécier la nature de la prestation et les caractéristiques concrètes prises en compte. À égard, elle considère qu’est « éloquent » l’exemple suivant donné par le Royaume de Norvège : « L’État membre A a appris par les statistiques qu’une poussette coûte en moyenne 100 euros et qu’un remboursement de 50 % s’élève donc à 50 euros. Pour éviter le système inutilement
fastidieux de remboursement, cet État décide de verser la prestation d’emblée sous la forme d’un montant forfaitaire de 50 euros, assorti d’une règle d’indexation corrigeant l’augmentation des prix des poussettes pour bébés. En outre, pour garantir que l’objectif et la fonction de la prestation soient atteints quel que soit le lieu de résidence des enfants, ce qui était le cas de manière automatique dans le cadre du précédent système de remboursement, le législateur ajoute un mécanisme d’indexation
pour corriger les coûts réels d’achat des poussettes pour bébés dans les différents États membres. » Voir, à cet égard, note en bas de page 11 des présentes conclusions.

( 21 ) Voir article 39, paragraphe 1, du FLAG.

( 22 ) La République d’Autriche indique que, en outre, le fonds de compensation pour les allocations familiales est alimenté essentiellement par un montant fixe de l’impôt sur le revenu, des quotes‑parts de l’impôt sur les sociétés et de l’impôt sur le revenu, ainsi que par des contributions d’exploitations agricoles et sylvicoles et des compensations de différents ministères fédéraux. Voir article 39, paragraphe 2, sous b) à h), du FLAG.

( 23 ) Voir article 39, paragraphe 2, sous a), du FLAG.

( 24 ) Voir article 41, paragraphe 1, du FLAG.

( 25 ) Voir article 41, paragraphe 3, du FLAG.

( 26 ) Voir point 34 des présentes conclusions.

( 27 ) Voir point 83, premier et deuxième tirets, des présentes conclusions.

( 28 ) Voir, à titre d’illustration, point 53 des présentes conclusions.

( 29 ) Selon la République d’Autriche, le considérant 16 du règlement no 883/2004 ne se rapporterait pas à l’article 70 de ce règlement au motif que celui-ci a pour objet d’exclure de la règle de l’exportabilité des prestations spéciales financées par l’impôt assurant un revenu de substitution ou une protection spéciale aux personnes handicapées qui sont expressément dues au lieu de résidence de leurs bénéficiaires.

( 30 ) C‑85/99, EU:C:2001:166, point 41, portant sur l’interprétation de l’article 1er, sous u), i), du règlement no 1408/71 relatif aux prestations familiales à distinguer des allocations familiales qui étaient définies au point ii) de cette disposition. Voir, également, point 72 des présentes conclusions. La règle d’exportation des prestations familiales, énoncée à l’article 73, paragraphe 1, de ce règlement, ne s’appliquait pas à ces prestations.

( 31 ) Conclusions de l’avocat général Slynn dans l’affaire Lenoir (313/86, non publiées, EU:C:1988:87).

( 32 ) S’associant au mémoire en intervention du Royaume de Norvège, la République d’Autriche fait également valoir que l’article 67 du règlement no 883/2004 et la jurisprudence de la Cour confirment qu’il doit être tenu compte de la nature concrète, de la finalité et des modalités des prestations, ainsi que, par exemple, du fait qu’il s’agit d’une prestation axée sur les besoins de l’enfant ou calculée par rapport aux revenus des parents. Par conséquent, une obligation d’exporter dans tous les cas
des prestations en montants absolus irait à l’encontre des dispositions de l’article 67 – ainsi que de l’article 7 – du règlement no 883/2004.

( 33 ) Pour souligner, également, l’importance de l’adaptation au regard du niveau des prix au Danemark où les prix à la consommation sont les plus élevés de l’Union, celui-ci prend pour exemple une comparaison avec la Bulgarie, qui a les prix à la consommation les moins élevés de l’Union. Ainsi, dans le cas d’un travailleur, citoyen de l’Union, ayant un enfant de l’âge d’un an, l’allocation mensuelle danoise serait dix fois plus élevée que celle prévue en Bulgarie. Avec une adaptation en fonction
du niveau des prix en Bulgarie (environ indice 40 si l’on se réfère à un niveau 100 pour le Danemark), l’allocation danoise représenterait quatre fois le montant de l’allocation bulgare.

( 34 ) Conclusions de l’avocat général Mancini dans l’affaire Pinna (41/84, non publiées, EU:C:1985:215).

( 35 ) Conclusions de l’avocat général Mancini dans l’affaire Pinna (41/84, non publiées, EU:C:1985:215, point 7). Italique ajouté par mes soins.

( 36 ) Voir point 40 des présentes conclusions.

( 37 ) Italique ajouté dans le mémoire en défense de la République d’Autriche.

( 38 ) La République d’Autriche se réfère à la « Déclaration de la Commission européenne sur l’indexation des allocations familiales exportées vers un État membre autre que celui où le travailleur réside », qui figure à l’annexe V de ces conclusions (voir note en bas de page 16 des présentes conclusions), ainsi qu’à l’analyse d’impact citée à la note en bas de page 18 des présentes conclusions, point 7.3.2, p. 135.

( 39 ) Ce mécanisme s’applique également entre la République d’Autriche et chacune des parties à l’accord EEE ainsi que la Suisse.

( 40 ) À cet égard, la Cour a rappelé que les termes « compenser les charges de famille » doivent être interprétés en ce sens qu’ils visent, notamment, une contribution publique au budget familial, destinée à alléger les charges découlant de l’entretien des enfants. Voir arrêt Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (point 38 et jurisprudence citée).

( 41 ) Voir arrêts du 19 juillet 2012, Reichel-Albert (C‑522/10, EU:C:2012:475, point 38), et Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (point 69).

( 42 ) Voir, notamment, article 70 du règlement no 883/2004, traitant des prestations spéciales en espèces à caractère non contributif.

( 43 ) Voir arrêts du 25 novembre 2021, Finanzamt Österreich (Allocations familiales pour coopérant) (C‑372/20, EU:C:2021:962, point 76), et Moser (point 36 et jurisprudence citée). À rapprocher de l’arrêt Pinna (point 9), ainsi que de l’arrêt du 5 octobre 1995, Imbernon Martínez (C‑321/93, EU:C:1995:306, point 22).

( 44 ) Voir arrêts du 7 juin 2005, Dodl et Oberhollenzer (C‑543/03, EU:C:2005:364, point 45) ; du 22 octobre 2015, Trapkowski (C‑378/14, EU:C:2015:720, point 35), ainsi que Moser (points 37 et 38, ainsi que jurisprudence citée). Dans cet arrêt, la Cour a confirmé que l’article 67 du règlement no 883/2004 est applicable à un travailleur qui travaille dans un État membre autre que celui dont la législation lui est applicable. Voir, également, article 5, sous b), de ce règlement, consacrant le principe
d’assimilation des faits, dans lequel figure aussi l’expression « comme si », ainsi que arrêt du 12 mars 2020, Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail d’Alsace-Moselle (C‑769/18, EU:C:2020:203, points 42 à 44).

( 45 ) Je relève, à cet égard, l’absence de modification intervenue depuis le projet envisagé en faveur du Royaume-Uni au cours de l’année 2016. Voir points 40 et 56 des présentes conclusions.

( 46 ) Voir, pour le rappel des modalités de la règle de non-cumul des prestations lorsque des prestations sont dues par plus d’un État membre à un même titre, arrêt Moser (point 41).

( 47 ) Règlement du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 fixant les modalités d’application du règlement (CE) no 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO 2009, L 284, p. 1).

( 48 ) Voir arrêt Moser (points 42 et 46).

( 49 ) Voir arrêt du 10 juillet 2019, Aubriet (C‑410/18, EU:C:2019:582, point 33 et jurisprudence citée).

( 50 ) Voir point 54 des présentes conclusions.

( 51 ) Voir point 51, troisième tiret, des présentes conclusions.

( 52 ) Voir point 51, quatrième tiret, des présentes conclusions.

( 53 ) Voir arrêts Pinna (point 21) et Lenoir (point 14).

( 54 ) Voir arrêt Pinna (points 10, 11 et 14).

( 55 ) Voir arrêt Lenoir (point 16).

( 56 ) Voir arrêts Lenoir (point 9), pour un rappel de l’historique législatif, et Pinna (points 9 et 18).

( 57 ) Voir arrêts du 6 juillet 2006, Kersbergen-Lap et Dams-Schipper (C‑154/05, EU:C:2006:449, point 33 et jurisprudence citée), ainsi que du 18 décembre 2007, Habelt e.a. (C‑396/05, EU:C:2007:810, point 81).

( 58 ) Voir considérant 16 du règlement no 883/2004. Il est, à cet égard, logique que le législateur de l’Union ait retenu ce critère en raison de l’objet des prestations, à savoir assurer un revenu minimum de subsistance qui ne peut être déterminé qu’en fonction de l’environnement économique et social au lieu de résidence.

( 59 ) Voir arrêt Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (points 36 et 37).

( 60 ) Il est à noter que le rapport FreSsco dont s’est prévalue la République d’Autriche à la suite du Royaume de Norvège (voir note en bas de page 19 des présentes conclusions), s’agissant de la situation dans les années 2016 et 2017, ne contient aucune précision en ce sens et ne fait état que d’un ajustement en fonction du taux d’inflation.

( 61 ) Il en est de même de l’allocation de scolarité ou de celle liée au handicap de l’enfant, ainsi qu’il résulte des éléments soumis à l’appréciation de la Cour. Voir point 38, quatrième tiret, et point 42, quatrième tiret, des présentes conclusions.

( 62 ) Voir note en bas de page 11 des présentes conclusions. L’exemple donné par le Royaume de Norvège démontre à cet égard que, précisément, n’est pas pris en compte le niveau de dépense réel en fonction du lieu d’achat. Il en est de même de la variété des facteurs qui devraient être pris en compte dans la situation des migrants, dont des charges financières supplémentaires du fait notamment de l’absence de l’un des parents, ainsi que l’a souligné la Roumanie.

( 63 ) La Commission se réfère à l’arrêt du 22 juin 2011, Landtová (C‑399/09, EU:C:2011:415, point 42 et jurisprudence citée).

( 64 ) La Commission se réfère à l’arrêt du 12 mai 1998, Martínez Sala (C‑85/96, EU:C:1998:217, point 25).

( 65 ) La Commission se réfère à l’arrêt Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (point 45 et jurisprudence citée).

( 66 ) La Commission se réfère à l’arrêt du 12 décembre 2019, Instituto Nacional de la Seguridad Social (Complément de pension pour les mères) (C‑450/18, EU:C:2019:1075, point 45 et jurisprudence citée).

( 67 ) Voir point 98 des présentes conclusions.

( 68 ) Voir note en bas de page 79 des présentes conclusions.

( 69 ) Voir, s’agissant de cet argument soutenu dans le cadre de la procédure précontentieuse, point 25 des présentes conclusions.

( 70 ) La Commission renvoie à l’arrêt du 28 avril 1998, Kohll (C‑158/96, EU:C:1998:171, point 41).

( 71 ) La Commission se réfère au rapport de la Cour des comptes intitulé « Familienbeihilfe – Ziele und Zielerreichung, Kosten und Kontrollsystem » (Allocation familiale – objectifs et réalisation des objectifs, coûts et système de contrôle), ci-après le « rapport de la Cour des comptes », disponible à l’adresse Internet suivante : https://www.rechnungshof.gv.at/rh/home/home/Familienbeihilfe.pdf (points 6.1 et 6.3, p. 25 à 27).

( 72 ) La Commission se réfère au rapport de la Cour des comptes (point 15.1, p. 42 à 45, point 19.2, p. 53, et point 23 à 29, p. 59 à 69).

( 73 ) Signée à Turin le 18 octobre 1961.

( 74 ) La République d’Autriche cite le document du Conseil de l’Europe, intitulé « Digest of the case law of the European Committee of Social Rights », décembre 2018, p. 141, disponible à l’adresse Internet suivante : https://rm.coe.int/digest-2018-parts-i-ii-iii-iv-en/1680939f80.

( 75 ) La République d’Autriche vise l’article 64 et l’article 67, paragraphe 4, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne ainsi que le quatrième considérant du règlement (CE, CECA, Euratom) no 2594/98 du Conseil, du 27 novembre 1998, modifiant le règlement (CEE, Euratom, CECA) no 259/68 fixant le statut des fonctionnaires des Communautés européennes ainsi que le régime applicable aux autres agents de ces Communautés (JO 1998, L 325, p. 1). À cet égard, elle se réfère à l’argument du
Royaume de Danemark, selon lequel la Cour a souligné, dans l’arrêt du 8 mai 2014, Wiering (C‑347/12, EU:C:2014:300), qui concernait encore le règlement no 1408/71, que c’est l’enfant qui est le destinataire des allocations familiales. L’adaptation de telles allocations serait donc conforme à l’interprétation qui a déjà été donnée du principe de l’égalité de traitement.

( 76 ) La République d’Autriche se réfère au document de la Commission intitulé « Erasmus+ Programme Guide », version 2 (2020), du 26 février 2020, p. 45, disponible à l’adresse Internet suivante : https://erasmus-plus.ec.europa.eu/sites/default/files/2021-09/erasmus_programme_guide_2020_v2_en.pdf.

( 77 ) Document 11721/2/20 REV 2, disponible à l’adresse Internet suivante : https://data.consilium.europa.eu/doc/document/ST-11721-2020-REV-2/fr/pdf.

( 78 ) JO 1992, L 245, p. 46.

( 79 ) La République d’Autriche a fourni l’illustration suivante : « [L]e pouvoir d’achat à Vienne ([l’État] fédér[é] avec le taux le plus faible) représente environ 92 % du pouvoir d’achat en Basse‑Autriche. En outre, les différences entre les pouvoirs d’achat par habitant au sein des circonscriptions de Basse‑Autriche sont plus importantes que les différences de pouvoir d’achat entre les [États] fédér[és] autrichiens. Voir
https://retailreport.at/sites/default/files/2019‑05/GfK%20Kaufkraft%20 C3%B4sterreich%202019.pdf. À l’inverse, le pouvoir d’achat en Bulgarie représentait, en 2019, 52 % du pouvoir d’achat moyen des 27 États membres [...], tandis que le pouvoir d’achat en Autriche représentait 113 % de celui‑ci (voir https://ec.europa.eu/eurostat/databrowser/view/tec00120/default/table?lang=de). »

( 80 ) La République d’Autriche cite l’arrêt du 24 février 2015, Sopora (C‑512/13, EU:C:2015:108, point 34).

( 81 ) La République d’Autriche cite les arrêts du 17 juillet 1963, Italie/Commission (13/63, EU:C:1963:20, titre 4), et du 18 septembre 2014, Bundesdruckerei (C‑549/13, EU:C:2014:2235, point 34).

( 82 ) C‑286/03, EU:C:2005:621, point 109. Il s’agit de la réponse de l’avocate générale Kokott à l’argument, invoqué dans le cadre de cette affaire, contre l’exportation d’une prestation, selon lequel le montant de la prestation est adapté aux coûts d’entretien et de soins dans l’État du siège de l’institution compétente.

( 83 ) Décision d’exécution de la Commission 2014/99/UE, du 18 février 2014, établissant la liste des régions éligibles à un financement du Fonds européen de développement régional et du Fonds social européen et des États membres éligibles à un financement par le Fonds de cohésion pour la période 2014‑2020 (JO 2014, L 50, p. 22).

( 84 ) Il s’agit des projets de lois qui ont donné lieu aux lois fédérales citées aux notes en bas de page 7 et 8 des présentes conclusions, ainsi que des explications du gouvernement concernant ces projets figurant dans les documents référencés sous les nos 111 et 190 des annexes aux procès-verbaux sténographiés des séances du Nationalrat (Conseil national, Autriche) concernant la XXVIe législature, disponibles, respectivement, aux adresses Internet suivantes :
https://www.parlament.gv.at/PAKT/VHG/XXVI/I/I_00111/fname_692212.pdf et https://www.parlament.gv.at/PAKT/VHG/XXVI/I/I_00190/fname_698479.pdf.

( 85 ) La République d’Autriche se réfère aux documents référencés sous les nos 111 et 190 des annexes aux procès-verbaux sténographiés des séances du Conseil national concernant la XXVIe législature, respectivement, p. 3, ainsi que p. 8 et suiv.

( 86 ) La République d’Autriche se réfère aux arrêts du 28 juin 2018, Crespo Rey (C‑2/17, EU:C:2018:511, points 45 et suiv., ainsi que jurisprudence citée), et Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (point 68).

( 87 ) À cet égard, la République d’Autriche renvoie aux explications figurant dans le document référencé sous le no 111 des annexes aux procès-verbaux sténographiés des séances du Conseil national concernant la XXVIe législature, p. 1 et suiv. (voir note en bas de page 84 des présentes conclusions).

( 88 ) Voir point 46 des présentes conclusions.

( 89 ) C‑240/10, EU:C:2011:591, point 37.

( 90 ) Voir point 95 des présentes conclusions.

( 91 ) Faite à Vienne le 18 avril 1961 et entrée en vigueur le 24 avril 1964.

( 92 ) Faite à Vienne le 24 avril 1963 et entrée en vigueur le 19 mars 1967.

( 93 ) La République d’Autriche précise que, si le travailleur migrant est affilié au régime autrichien de sécurité sociale en vertu de l’article 11, paragraphe 3, sous a), du règlement no 883/2004, le fonctionnaire autrichien, détaché dans un autre État membre, reste affilié au régime autrichien de sécurité sociale en vertu du point b) de la même disposition. Il en est de même des fonctionnaires qui ont un emploi accessoire en tant que salariés ou qui exercent une activité professionnelle en tant
qu’indépendants en vertu de l’article 13, paragraphe 4, du règlement no 883/2004.

( 94 ) La République d’Autriche se réfère à l’arrêt du 17 juin 2010, Commission/Portugal (C‑105/08, EU:C:2010:345, points 26 et suiv.).

( 95 ) La République d’Autriche cite les arrêts du 28 mai 1980, Kuhner/Commission (33/79 et 75/79, EU:C:1980:139, point 22), et du 13 juillet 2018, SQ/BEI (T‑377/17, EU:T:2018:478, point 146), ainsi que les arrêts du 22 juin 2017, Bechtel (C‑20/16, EU:C:2017:488, point 35 et jurisprudence citée), ainsi que du 12 novembre 2020, Fleig/SEAE (C‑446/19 P, non publié, EU:C:2020:918, point 67).

( 96 ) La République d’Autriche se réfère à l’arrêt du 18 décembre 2007, Commission/Espagne (C‑186/06, EU:C:2007:813, point 18 et jurisprudence citée).

( 97 ) La République d’Autriche se réfère à l’arrêt du 19 mai 2009, Commission/Italie (C‑531/06, EU:C:2009:315, points 69 et 73).

( 98 ) Voir arrêt Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (points 24 et 25, ainsi que jurisprudence citée).

( 99 ) Voir arrêt Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (points 44 et 46, ainsi que jurisprudence citée).

( 100 ) Voir, également, en tant qu’expression particulière du principe général de non‑discrimination, article 5, sous b), de ce règlement, consacrant le principe d’assimilation des faits, ainsi que l’a rappelé la Cour dans l’arrêt du 12 mars 2020, Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail d’Alsace-Moselle (C‑769/18, EU:C:2020:203, point 44).

( 101 ) Voir, par analogie, arrêt du 22 juin 2011, Landtová (C‑399/09, EU:C:2011:415, points 42 et 44, ainsi que jurisprudence citée), relatif à l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 1408/71, concrétisant le principe énoncé à l’article 39 CE, devenu l’article 45 TFUE, qui était rédigé, en substance, dans les mêmes termes que ceux de l’article 4 du règlement no 883/2004. Cependant, le champ d’application personnel de ce second règlement est différent du premier en ce qu’il n’est pas limité aux
travailleurs et aux membres de leur famille. À cet égard, très récemment, dans l’arrêt du 15 juillet 2021, A (Soins de santé publics) (C‑535/19, EU:C:2021:595, point 40), la Cour a relevé que le principe de non-discrimination en raison de la nationalité, énoncé à l’article 18, premier alinéa, TFUE, est précisé à l’article 4 du règlement no 883/2004 à l’égard des citoyens de l’Union qui se prévalent des prestations visées à l’article 3, paragraphe 1, de ce règlement. Elle a également rappelé sa
jurisprudence constante selon laquelle l’article 18, premier alinéa, TFUE, n’a vocation à s’appliquer de manière autonome que dans des situations régies par le droit de l’Union pour lesquelles le traité FUE ne prévoit pas de règles spécifiques de non-discrimination. Tel n’est pas le cas, en effet, dans le domaine de la libre circulation des travailleurs. Voir, à cet égard, notamment arrêt du 25 novembre 2021, Finanzamt Österreich (Allocations familiales pour coopérant) (C‑372/20, EU:C:2021:962,
point 68).

( 102 ) Voir arrêt Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (point 54 et jurisprudence citée).

( 103 ) Voir arrêt Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (points 24 et 70, ainsi que jurisprudence citée).

( 104 ) Voir arrêt Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (point 70 et jurisprudence citée).

( 105 ) Voir, par analogie, arrêt du 15 juillet 2021, A (Soins de santé publics) (C‑535/19, EU:C:2021:595, point 61).

( 106 ) Voir arrêt Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (point 44 et jurisprudence citée).

( 107 ) JO 1968, L 257, p. 2. Le règlement no 1612/68 a été abrogé par le règlement no 492/2011. La Cour s’est référée notamment à l’arrêt du 5 mai 2011, Commission/Allemagne (C‑206/10, EU:C:2011:283, point 39). Voir, également, points 36 et 37 de cet arrêt.

( 108 ) Voir, par analogie, arrêt du 11 septembre 2007, Hendrix (C‑287/05, EU:C:2007:494, points 51 et 52). Voir, également, arrêt Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (points 65 et 69 à 71).

( 109 ) Voir arrêts du 18 janvier 2007, Celozzi (C‑332/05, EU:C:2007:35, point 24), ainsi que du 5 décembre 2019, Bocero Torrico et Bode (C‑398/18 et C‑428/18, EU:C:2019:1050, point 41).

( 110 ) Voir arrêts du 20 juin 2013, Giersch e.a. (C‑20/12, EU:C:2013:411, point 44), et Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (point 56).

( 111 ) Voir note en bas de page 9 des présentes conclusions.

( 112 ) Voir point 15.1, illustration 6, p. 45, du rapport de la Cour des comptes.

( 113 ) Voir document référencé sous le no 190 des annexes aux procès-verbaux sténographiés des séances du Conseil national concernant la XXVIe législature, p. 2 (voir note en bas de page 84 des présentes conclusions).

( 114 ) Voir point 15.1, illustration 5, p. 44, et point 15.2, p. 45, du rapport de la Cour des comptes. À cet égard, il est précisé à la note en bas de page 34 de ce rapport que, le 1er mai 2004, la République tchèque, la République d’Estonie, la République de Chypre, la République de Lettonie, la République de Lituanie, la Hongrie, la République de Malte, la République de Pologne, la République de Slovénie et la République slovaque ont rejoint l’Union, suivis par la République de Bulgarie et par
la Roumanie le 1er janvier 2007. Dans le domaine de la libre circulation des travailleurs, la République d’Autriche a bénéficié de périodes transitoires de sept ans, de sorte que le marché du travail autrichien a été ouvert en 2011 aux États qui ont adhéré en 2004 et en 2014 aux États qui ont adhéré en 2007. La République de Croatie a rejoint l’Union le 1er juillet 2013, une ouverture au marché du travail autrichien a eu lieu en 2020.

( 115 ) Voir arrêt Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (point 56).

( 116 ) Voir arrêt du 22 juin 2011, Landtová (C‑399/09, EU:C:2011:415, points 46 à 48).

( 117 ) Voir points 66 et 67 des présentes conclusions, ainsi que, par analogie, arrêt du 7 novembre 2002, Maaheimo (C‑333/00, EU:C:2002:641, point 34).

( 118 ) Voir, à cet égard, point 127 des présentes conclusions.

( 119 ) Voir, notamment, arrêts du 14 décembre 2016, Bragança Linares Verruga e.a. (C‑238/15, EU:C:2016:949, point 44), ainsi que Caisse pour l’avenir des enfants (Enfant du conjoint d’un travailleur frontalier) (point 58 et jurisprudence citée).

( 120 ) Il est à noter que la République d’Autriche conteste l’objectif qu’elle aurait poursuivi, selon la Commission, de faire des économies budgétaires. Il résulte, en effet, des pièces produites par celle-ci une évaluation de la diminution des dépenses sans pour autant confirmer une telle intention.

( 121 ) Voir points 77 à 79 des présentes conclusions.

( 122 ) La Commission se réfère, au point 44 de sa requête, au tableau du classement des États fédérés autrichiens en 2019, disponible à l’adresse Internet suivante : https://cdn2.hubspot.net/hubfs/2405078/cms-pdfs/fileadmin/user_upload/dyna_content/de/documents/news/20190508_news_kaufkraft_dach_dfin.pdf, p. 3.

( 123 ) La Commission explique que, par exemple, le pouvoir d’achat s’élève à 104,7 % de la moyenne autrichienne en Basse-Autriche, contre seulement 97,6 % en Carinthie. Ainsi, en application de la réglementation autrichienne relative aux avantages sociaux et fiscaux en Autriche, un travailleur bénéficie, pour un enfant résidant, par exemple, dans la commune d’Arnoldstein en Carinthie, d’une contribution aux frais d’entretien de son enfant à hauteur de 100 % des montants forfaitaires qui est
supérieure de 7,1 % à celle d’un travailleur dont l’enfant réside en Basse-Autriche.

( 124 ) Dans le prolongement de l’exemple précédent, la Commission illustre les effets du mécanisme d’adaptation autrichien en précisant que les personnes travaillant en Autriche, mais dont les enfants résident à Arnoldstein en Carinthie, Tarvisio (Italie) ou Kranjska Gora (Slovénie), reçoivent chacune trois montants forfaitaires différents, soit, respectivement, 100 %, 94,8 % et 79 % du montant de la prestation. Or, le montant forfaitaire est supérieur au coût moyen de la vie en Autriche et il
convient de considérer que, dans ces trois communes adjacentes, bien qu’elles soient situées dans trois États membres différents, le coût de la vie pour les besoins quotidiens est objectivement tout à fait comparable en raison précisément de la liberté de circulation des biens et des services garantie par l’Union.

( 125 ) Par exemple, selon la République slovaque, le coût de la vie varie entre l’est du pays et la région de la ville de Bratislava, où il est même beaucoup plus élevé que dans la région de la ville de Vienne.

( 126 ) La République d’Autriche indique que le pouvoir d’achat en Bulgarie représentait, en 2019, 52 % du pouvoir d’achat moyen des 27 États membres de l’Union, tandis que le pouvoir d’achat en Autriche représentait 113 % de celui‑ci (voir note en bas de page 79 des présentes conclusions). Voir, également, point 53 des présentes conclusions.

( 127 ) Voir point 18.2, p. 51, du rapport de la Cour des comptes.

( 128 ) Voir point 23.2, p. 60 et 61, point 23.4, p. 62, ainsi que point 25, p. 62 à 65, du rapport de la Cour des comptes.

( 129 ) Voir point 15.1, tableau 8, du rapport de la Cour des comptes.

( 130 ) Voir point 97 des présentes conclusions.

( 131 ) Voir article 28, paragraphe 2, de l’accord EEE, qui interdit toute discrimination fondée sur la nationalité entre les travailleurs des États membres en ce qui concerne l’emploi, la rémunération et les autres conditions de travail, comme l’article 45, paragraphe 2, TFUE.

( 132 ) Voir considérant 17 du règlement no 883/2004.

( 133 ) Voir arrêt du 14 décembre 2016, Bragança Linares Verruga e.a. (C‑238/15, EU:C:2016:949, points 49 et 50).

( 134 ) L’Autorité de surveillance AELE a résumé ainsi le principe : « En ce qui concerne la réalisation de la libre circulation des travailleurs, le marché intérieur de l’EEE exige des prestations égales pour un travail égal. »


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : C-328/20
Date de la décision : 20/01/2022

Analyses

Manquement – Coordination des systèmes de sécurité sociale – Règlement (CE) no 883/2004 – Articles 4, 7 et 67 – Libre circulation des travailleurs – Règlement (UE) no 492/2011 – Article 7 – Égalité de traitement – Prestations familiales – Avantages sociaux et fiscaux – Adaptation des montants en fonction des niveaux de prix dans l’État de résidence des enfants.


Parties
Demandeurs : Commission européenne
Défendeurs : République d'Autriche.

Composition du Tribunal
Avocat général : Richard de la Tour

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2022:45

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