La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/10/2021 | CJUE | N°C-489/20

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, UB contre Kauno teritorinė muitinė., 06/10/2021, C-489/20


 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. EVGENI TANCHEV

présentées le 6 octobre 2021 ( 1 )

Affaire C‑489/20

UB

contre

Kauno teritorinė muitinė

partie intervenante :

Muitinės departamentas prie Lietuvos Respublikos finansų ministerijos

[demande de décision préjudicielle formée par le Lietuvos vyriausiasis administracinis teismas (Cour administrative suprême de Lituanie)]

« Renvoi préjudiciel – Code des douanes de l’Union – Marchandises de contrebande saisies puis confis

quées après leur entrée sur le territoire douanier de l’Union – Extinction de la dette douanière – Conséquences pour la perception des droi...

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. EVGENI TANCHEV

présentées le 6 octobre 2021 ( 1 )

Affaire C‑489/20

UB

contre

Kauno teritorinė muitinė

partie intervenante :

Muitinės departamentas prie Lietuvos Respublikos finansų ministerijos

[demande de décision préjudicielle formée par le Lietuvos vyriausiasis administracinis teismas (Cour administrative suprême de Lituanie)]

« Renvoi préjudiciel – Code des douanes de l’Union – Marchandises de contrebande saisies puis confisquées après leur entrée sur le territoire douanier de l’Union – Extinction de la dette douanière – Conséquences pour la perception des droits d’accise et de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) »

1. La présente demande de décision préjudicielle, introduite par le Lietuvos vyriausiasis administracinis teismas (Cour administrative suprême de Lituanie), porte principalement sur l’interprétation de l’arrêt de la Cour du 29 avril 2010, Dansk Transport og Logistik ( 2 ). Plus précisément, elle concerne l’extinction d’une dette douanière à l’égard de marchandises illégalement importées dans l’Union, ayant été saisies par les autorités douanières non pas à un bureau de douane ou dans la zone franche
lors de leur introduction sur le territoire douanier de l’Union, mais alors qu’elles étaient transportées par route dans l’État membre concerné après avoir franchi illégalement la frontière d’un État membre à la frontière de l’Union ( 3 ), ayant dépassé le premier bureau de douane situé à l’intérieur du territoire douanier de l’Union sans y avoir été présentées ( 4 ).

2. Toutefois, l’arrêt Dansk Transport og Logistik concernait le scénario classique de la découverte de telles marchandises par les autorités douanières lors de leur introduction sur le territoire douanier de l’Union, soit au premier bureau de douane depuis l’entrée, soit dans la zone franche. Par conséquent, la question se pose de savoir si les principes développés dans l’arrêt Dansk Transport og Logistik relatifs à l’extinction d’une dette douanière compte tenu de la saisie et de la confiscation
subséquente de telles marchandises sont applicables à l’affaire au principal.

3. Deuxièmement, et corrélativement, le problème en cause est régi par l’article 124, paragraphe 1, sous e), du règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 9 octobre 2013, établissant le code des douanes de l’Union ( 5 ), alors qu’à l’époque de l’arrêt Dansk Transport og Logistik, pareille situation était régie par l’article 233, premier alinéa, sous d), du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire ( 6 ). Le
libellé de l’article 124, paragraphe 1, sous e), du code des douanes de l’Union n’est pas identique à celui de l’article 233, premier alinéa, sous d), du code des douanes communautaire. Cet élément est donc également pertinent pour déterminer si la dette douanière en cause au principal s’est éteinte par leur saisie alors qu’elles étaient transportées par route sur le territoire d’un État membre.

4. Deux autres questions découlent de ce qui précède. Le prélèvement des droits d’accise sur les produits importés est régi par les articles 2, sous b), et 7 de la directive 2008/118/CE du Conseil, du 16 décembre 2008, relative au régime général d’accise et abrogeant la directive 92/12/CEE ( 7 ). La perception de la TVA relative aux biens importés est régie par l’article 2, paragraphe 1, sous d), et l’article 70 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun
de taxe sur la valeur ajoutée ( 8 ). Si la dette douanière en cause dans l’affaire au principal relève en fait de l’article 124, paragraphe 1, sous e), du code des douanes de l’Union, les accises et la TVA sont-elles toujours exigibles ?

5. Je suis parvenu à la conclusion que, bien que la dette douanière soit éteinte dans l’affaire au principal, aussi bien les accises que la TVA demeurent exigibles, et ce pour les raisons détaillées dans les présentes conclusions. L’analyse qui suit respecte les règles établies par la jurisprudence selon lesquelles les compétences pour le recouvrement des droits de douane, des droits d’accise et de la TVA doivent être analysées séparément ( 9 ).

I. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union

6. L’article 79 du code des douanes de l’Union s’intitule « Dette douanière née en raison d’une inobservation ». Il prévoit notamment, à son paragraphe 1, sous a) :

« Une dette douanière naît à l’importation, dans la mesure où les marchandises sont passibles de droits à l’importation, par suite de l’inobservation :

a) [...] d’une des obligations définies dans la législation douanière applicable à l’introduction de marchandises non Union dans le territoire douanier de l’Union [...] »

7. L’article 124 du code des douanes de l’Union, intitulé « Extinction », dispose, à son paragraphe 1, sous e) :

« [...] la dette douanière à l’importation ou à l’exportation s’éteint de l’une des manières suivantes :

[...]

e) lorsque des marchandises passibles de droits à l’importation ou à l’exportation sont saisies et simultanément ou ultérieurement confisquées. »

8. L’article 198 du code des douanes de l’Union, intitulé « Mesures à prendre par les autorités douanières », dispose, à son paragraphe 1, sous a) :

« Les autorités douanières prennent toutes les mesures nécessaires, y compris la confiscation et la vente ou la destruction, pour régler la situation des marchandises [...] :

a) lorsqu’une des obligations prévues par la législation douanière en ce qui concerne l’introduction de marchandises non Union sur le territoire douanier de l’Union n’a pas été satisfaite ou que les marchandises ont été soustraites à la surveillance douanière. »

9. L’article 2, sous b), de la directive sur l’accise énonce :

« Les produits soumis à accise sont soumis aux droits d’accise au moment :

[...]

b) de leur importation sur le territoire de la Communauté. »

10. Aux termes de l’article 7 de la directive sur l’accise :

« 1.   Les droits d’accise deviennent exigibles au moment de la mise à la consommation et dans l’État membre où celle-ci s’effectue.

2.   Aux fins de la présente directive, on entend par “mise à la consommation”:

[...]

d) l’importation, y compris l’importation irrégulière, de produits soumis à accise, sauf si les produits soumis à accise sont placés, immédiatement après leur importation, sous un régime de suspension de droits.

[...] »

11. L’article 2, paragraphe 1, sous d), de la directive TVA énonce :

« Sont soumises à la TVA les opérations suivantes :

[...]

d) les importations de biens. »

12. L’article 70 de la directive TVA énonce :

« Le fait générateur intervient et la taxe devient exigible au moment où l’importation de biens est effectuée. »

B.   Le droit lituanien

13. L’article 93, intitulé « Extinction de l’obligation fiscale », paragraphe 2, point 3, du Lietuvos Respublikos mokesčių administravimo įstatymas (loi de la République de Lituanie sur l’administration de la fiscalité) (dans sa version issue de la loi no IX‑2112, du 13 avril 2004) énonçait que, « [s]’agissant des impôts administrés par l’administration douanière, l’obligation fiscale s’éteint [...] également [...] si les marchandises sont saisies lors de leur introduction irrégulière et
simultanément ou ultérieurement confisquées ».

14. D’après la décision de renvoi, la position du législateur national a évolué en ce qui concerne le moment auquel s’éteint l’obligation de payer l’accise et la TVA à l’importation ; en effet, l’article 93, paragraphe 2, de la loi de la République de Lituanie sur l’administration de la fiscalité a été abrogé au 1er janvier 2017 et les dispositions suivantes, adoptées notamment au regard du code des douanes de l’Union, sont entrées en vigueur :

– l’article 20, paragraphe 2, du Lietuvos Respublikos akcizų įstatymas (loi de la République de Lituanie sur les accises) (dans sa version issue de la loi no XII-2696, du 3 novembre 2016), qui dispose que l’obligation de payer les droits d’accise à l’administration des douanes s’éteint, mutatis mutandis, dans les cas prévus à l’article 124, paragraphe 1, sous d) à g), du code des douanes de l’Union ;

– l’article 121, paragraphe 2, du Lietuvos Respublikos pridėtinės vertės mokesčio įstatymas (loi de la République de Lituanie relative à la taxe sur la valeur ajoutée) (dans sa version issue de la loi no XII-2697, du 3 novembre 2016), qui précise que l’obligation de payer la TVA à l’importation à l’administration des douanes s’éteint, mutatis mutandis, dans les cas prévus à l’article 124, paragraphe 1, sous d) à g), du code des douanes de l’Union.

II. Les faits à l’origine du litige, la procédure au principal et les questions préjudicielles

15. Le requérant devant la juridiction de renvoi, agissant en groupe avec d’autres personnes, a organisé l’importation illégale (contrebande) de produits soumis à accise sur le territoire lituanien depuis la Biélorussie, le 22 septembre 2016, en un endroit isolé. Six mille paquets de cigarettes (ci-après les « marchandises en cause ») ont été lancés par-dessus la frontière et récupérés. Le même jour, le véhicule transportant ces marchandises sur le territoire national a été arrêté par des
gardes-frontières et les cigarettes découvertes à bord du véhicule ont été saisies le 22 septembre 2016.

16. Par ordonnance pénale du 23 janvier 2017, le Vilniaus apygardos teismas (tribunal régional de Vilnius, Lituanie) a, dans le cadre d’une procédure pénale, reconnu le requérant coupable d’une infraction pénale et l’a condamné au paiement d’une amende de 16947 euros. Cette juridiction a également prononcé la confiscation des marchandises en cause et a ordonné leur destruction, qui a eu lieu un an après leur saisie effectuée le 22 septembre 2016 ( 10 ).

17. Le service des douanes de Kaunas (Lituanie) a, au regard de cette ordonnance pénale, constaté par la décision litigieuse que le requérant était (in solidum avec d’autres personnes) redevable de la dette douanière et débiteur d’une dette fiscale de 10237 euros au titre des droits d’accise et de 2679 euros au titre de la TVA à l’importation, les intérêts de retard s’élevant respectivement à 1674 et à 438 euros. Conformément à l’article 124, paragraphe 1, sous e), du code des douanes de l’Union,
cette administration fiscale locale n’a pas calculé ni inscrit au rôle le montant des droits de douane à l’importation à charge du requérant, ayant considéré que la dette douanière s’était éteinte.

18. Par décision no 1A-199, du 9 mai 2018, la décision du bureau des douanes de Kaunas a été confirmée.

19. Le requérant a introduit un recours devant le Vilniaus apygardos administracinis teismas (tribunal administratif régional de Vilnius, Lituanie) et a notamment fait valoir, en substance, que, compte tenu de l’existence de la cause d’extinction de la dette douanière visée à l’article 124, paragraphe 1, sous e), du code des douanes de l’Union, son obligation de payer les accises et la TVA à l’importation sur les marchandises en cause, illégalement introduites sur le territoire douanier de l’Union,
s’éteignait également. Ce raisonnement du requérant se fondait, notamment, sur l’interprétation donnée par la Cour dans son arrêt Dansk Transport og Logistik.

20. Par jugement du 30 octobre 2018, le Vilniaus apygardos administracinis teismas (tribunal administratif régional de Vilnius) a rejeté le recours du requérant comme étant dépourvu de fondement. Cette juridiction a notamment considéré que les causes d’extinction de l’obligation de payer les droits d’accise et/ou la TVA à l’importation ne relèvent pas du code des douanes de l’Union et, en refusant d’apprécier les arguments du requérant relatifs à l’interprétation donnée dans l’arrêt Dansk Transport
og Logistik, elle a notamment relevé que cet arrêt avait été rendu aux fins de l’interprétation du code des douanes communautaire, dont les dispositions n’étaient pas pertinentes en l’espèce, étant donné que c’est le code des douanes de l’Union qui était en vigueur.

21. Le requérant a interjeté appel devant le Lietuvos vyriausiasis administracinis teismas (Cour administrative suprême de Lituanie) qui, dans ces circonstances, a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) Convient-il d’interpréter l’article 124, paragraphe 1, sous e), du [code des douanes de l’Union], en ce sens que la dette douanière s’éteint lorsque, comme c’est le cas en l’espèce, des marchandises de contrebande sont saisies, et ultérieurement confisquées, alors qu’elles ont déjà été introduites, illégalement, [sur] le territoire douanier de l’Union (mises à la consommation) ?

2) En cas de réponse affirmative à la première question, convient-il d’interpréter l’article 2, sous b), et l’article 7, paragraphe 1, de la [directive sur l’accise], ainsi que l’article 2, paragraphe 1, sous d), et l’article 70 de la [directive TVA], en ce sens que l’obligation de payer l’accise et/ou la TVA ne s’éteint pas dans le cas où, comme dans la présente affaire, des marchandises de contrebande sont saisies, et ultérieurement confisquées, alors qu’elles ont déjà été introduites,
illégalement, [sur] le territoire douanier de l’Union (mises à la consommation), même si la dette douanière s’éteint pour la cause prévue à l’article 124, paragraphe 1, sous e), du [code des douanes de l’Union] ? »

22. Des observations écrites ont été présentées devant la Cour par le gouvernement lituanien, le gouvernement italien et la Commission européenne. Il n’y a pas eu d’audience.

III. Analyse

A.   Réponse à la première question préjudicielle

23. Il convient de répondre à la première question préjudicielle que l’article 124, paragraphe 1, sous e), du code des douanes de l’Union, doit être interprété en ce sens que la dette douanière s’éteint dans une situation où des marchandises importées illégalement sont saisies, et ultérieurement confisquées, après qu’elles ont déjà été introduites illégalement sur le territoire douanier de l’Union.

24. Il en va ainsi pour les raisons suivantes.

25. Il est constant qu’une dette douanière est née dans l’affaire au principal. En vertu de l’article 79, paragraphe 1, sous a), du code des douanes de l’Union, « [u]ne dette douanière naît à l’importation [...] par suite de l’inobservation [...] d’une des obligations définies dans la législation douanière applicable à l’introduction de marchandises non Union dans le territoire douanier de l’Union [...] ». L’article 139, paragraphe 1, du code des douanes de l’Union est intitulé « Présentation en
douane des marchandises » et dispose que « [l]es marchandises introduites sur le territoire douanier de l’Union sont présentées en douane immédiatement après leur arrivée au bureau de douane désigné ou à tout autre lieu désigné ou agréé par les autorités douanières ou dans la zone franche par l’une des personnes ci-après : a) la personne qui a introduit les marchandises sur le territoire douanier de l’Union ; b) la personne au nom ou pour le compte de laquelle agit la personne qui a introduit
les marchandises sur le territoire douanier de l’Union ; c) la personne qui a pris en charge le transport des marchandises après leur introduction sur le territoire douanier de l’Union » ( 11 ).

26. La jurisprudence de la Cour relative au code des douanes communautaire a établi que l’obligation de « présentation » a pour but « d’assurer que les autorités douanières ont été informées non seulement du fait que des marchandises sont arrivées, mais aussi de toutes les données pertinentes concernant le type d’article ou de produit dont il s’agit ainsi que de la quantité de ces marchandises. En effet, ce sont ces renseignements qui vont permettre l’identification correcte de celles-ci aux fins de
leur classement tarifaire et, le cas échéant, du calcul des droits à l’importation » ( 12 ). La circonstance que certaines marchandises soient dissimulées dans des caches du véhicule dans lequel elles sont transportées n’a pas pour effet de les soustraire à cette obligation ( 13 ).

27. La présence, sur le territoire douanier de l’Union, de marchandises non Union comporte le risque que ces marchandises finissent par être intégrées, sans être dédouanées, dans le circuit économique des États membres ( 14 ). Ainsi, l’imposition de droits de douane est justifiée lorsque, par exemple, la disparition de la marchandise présente un risque d’intégration dans le circuit économique de l’Union ( 15 ).

28. Il importe cependant de relever qu’un tel risque est minime dans la procédure au principal, dès lors que les marchandises ont été saisies le jour de leur introduction, bien qu’elles soient préalablement passées à l’intérieur du territoire douanier de l’Union sans y avoir été présentées ( 16 ). Comme je l’ai déjà indiqué, même si cette situation a donné naissance à une dette douanière (voir point 25 des présentes conclusions), l’introduction illégale et la naissance de la dette ayant lieu
simultanément ( 17 ), la brièveté du laps de temps pendant lequel les marchandises ont dépassé le premier bureau de douane situé à l’intérieur du territoire douanier de l’Union sans y avoir été présentées ( 18 ) et le fait d’avoir été transportées sur le seul territoire lituanien ont entraîné la disparition du risque d’intégration dans le circuit économique de l’Union pour ainsi dire dès l’instant où les marchandises ont été illégalement introduites ( 19 ). En fait, la Commission soutient dans
ses observations écrites que seules les marchandises effectivement impliquées dans la chaîne économique de l’Union donnent naissance à une dette douanière ( 20 ).

29. En outre, l’article 124, paragraphe 1, sous e), du code des douanes de l’Union dispose que « la dette douanière à l’importation ou à l’exportation s’éteint [...] lorsque des marchandises passibles de droits à l’importation ou à l’exportation sont saisies et simultanément ou ultérieurement confisquées ».

30. La différence essentielle entre l’article 124, paragraphe 1, sous e), du code des douanes de l’Union et la disposition en vigueur à la date de l’arrêt Dansk Transport og Logistik, à savoir l’article 233, premier alinéa, sous d), du code des douanes communautaire, réside dans le fait que cet article lie l’extinction de la dette douanière au moment de l’importation, alors que l’article 124, paragraphe 1, sous e), du code des douanes de l’Union ne le fait pas. L’article 233, premier alinéa,
sous d), du code des douanes communautaire énonçait :

« Sans préjudice des dispositions en vigueur relatives à la prescription de la dette douanière, ainsi qu’au non‑recouvrement du montant de la dette douanière dans le cas d’insolvabilité du débiteur constatée par voie judiciaire, la dette douanière s’éteint :

[...]

d) lorsque des marchandises pour lesquelles une dette douanière est née conformément à l’article 202 sont saisies lors de l’introduction irrégulière et simultanément ou ultérieurement confisquées. » ( 21 )

31. C’est cette disposition que la Cour a interprétée dans l’arrêt Dansk Transport og Logistik. Premièrement, la Cour a considéré que « la saisie de telles marchandises, assortie de leur confiscation simultanée ou ultérieure au sens de l’article 233, premier alinéa, sous d), du code des douanes [communautaire], ne peut se traduire par l’extinction de la dette douanière que si cette saisie a été opérée avant que lesdites marchandises aient dépassé la zone dans laquelle se trouve le premier bureau de
douane situé à l’intérieur du territoire douanier de la Communauté » ( 22 ). Et la Cour d’ajouter que « la retenue et la destruction de ces marchandises sont intervenues lors du passage de la frontière entre l’Allemagne et le Danemark, à savoir postérieurement à cette “introduction irrégulière” et non lors de celle-ci. Partant, les faits de cette affaire ne semblent pas relever de l’hypothèse énumérée à l’article 233, premier alinéa, sous d), du code des douanes [communautaire] » ( 23 ).

32. Deuxièmement, la Cour a jugé dans l’arrêt Dansk Transport og Logistik qu’« il y a lieu d’entendre par le terme “saisie” de marchandises au sens de l’article 233, premier alinéa, sous d), du code des douanes [communautaire], l’intervention des autorités compétentes pour prendre physiquement possession des marchandises, afin de les mettre en sécurité et d’empêcher matériellement leur entrée dans le circuit économique des États membres » ( 24 ). Dans la procédure au principal, tel ne fut le cas
qu’après que les marchandises importées illégalement ont dépassé le premier bureau de douane situé à l’intérieur du territoire douanier de l’Union sans y avoir été présentées ( 25 ), bien que la saisie ait eu lieu le jour même où elles ont franchi la frontière pour entrer sur le territoire de l’Union.

33. Toutefois, je suis enclin à admettre la thèse défendue par le gouvernement lituanien et la Commission dans leurs observations écrites selon laquelle le moment de la saisie des marchandises importées illégalement est sans incidence sur la détermination de l’extinction de la dette douanière au titre de l’article 124, paragraphe 1, sous e), du code des douanes de l’Union.

34. Premièrement, cette conclusion découle clairement du libellé de la disposition. Comme l’a relevé le gouvernement lituanien dans ses observations écrites, même si les dispositions du droit de l’Union éteignant les dettes douanières doivent faire l’objet d’une interprétation stricte afin de protéger les ressources propres de l’Union ( 26 ), l’article 124, paragraphe 1, sous e), du code des douanes de l’Union ne comporte tout simplement pas les termes « lors de », contrairement à l’article 233,
premier alinéa, sous d), du code des douanes communautaire ( 27 ).

35. Deuxièmement, je suis enclin à admettre la thèse défendue par le gouvernement lituanien et la Commission ( 28 ) dans leurs observations écrites selon laquelle la genèse de l’article 124, paragraphe 1, sous e), du code des douanes de l’Union conforte l’interprétation littérale de cette disposition. Le code des douanes communautaire a constitué un durcissement du droit par rapport à la mesure antérieurement en vigueur, le code des douanes de l’Union revenant à un modèle antérieur, dans lequel la
pierre angulaire de l’extinction de la dette douanière était la confiscation des marchandises en cause illégalement importées ( 29 ). Dans ce contexte ( 30 ), comme la Commission l’a suggéré dans ses observations écrites, il semblerait contraire à un choix politique clair de l’Union que le moment de la saisie des marchandises illégalement importées demeure pertinent aux fins de l’extinction de la dette douanière.

36. Troisièmement, l’objectif de l’extinction de la dette douanière peut être considéré comme étant le même au regard du code des douanes de l’Union que ce qu’il était en vertu du code des douanes communautaire. L’objectif de l’article 233, premier alinéa, sous d), du code des douanes communautaire était d’éviter l’imposition d’un droit au cas où la marchandise, quoique introduite irrégulièrement sur le territoire communautaire, n’avait pas pu être commercialisée et n’avait donc pas constitué une
menace, en matière de concurrence, pour les marchandises communautaires ( 31 ). La même finalité ressort des causes d’extinction de la dette douanière énumérées à l’article 124, paragraphe 1, du code des douanes de l’Union. Comme je l’ai mentionné au point 28 des présentes conclusions, la période pendant laquelle les marchandises en cause illégalement importées ont été en libre pratique en Lituanie fut brève, dès lors qu’elles ont été saisies le jour même où elles ont franchi la frontière.

37. Pour ces raisons, il convient de répondre à la première question préjudicielle dans le sens exposé au point 23 des présentes conclusions.

B.   Réponse à la seconde question préjudicielle

38. Il convient de répondre à la seconde question préjudicielle que l’article 2, sous b), et l’article 7, paragraphe 1, de la directive sur l’accise, ainsi que l’article 2, paragraphe 1, sous d), et l’article 70 de la directive TVA doivent être interprétés en ce sens que l’obligation de payer l’accise et la TVA ne s’éteint pas dans le cas où, comme dans la présente affaire, des marchandises de contrebande sont saisies, et ultérieurement confisquées, alors qu’elles ont déjà été introduites,
illégalement, sur le territoire douanier de l’Union, même si la dette douanière s’éteint pour la cause prévue à l’article 124, paragraphe 1, sous e), du code des douanes de l’Union.

1. Les droits d’accise

39. Il convient de rappeler qu’il ressort de l’article 7, paragraphe 1, de la directive sur l’accise que les droits d’accise deviennent exigibles au moment de la mise à la consommation et dans l’État membre où celle‑ci s’effectue ( 32 ). L’importation est un fait générateur de l’imposition ( 33 ), l’article 2, sous b), de la directive sur l’accise disposant que « les produits soumis à accise sont soumis aux droits d’accise au moment [...] de leur importation sur le territoire de la Communauté ».
Selon une jurisprudence constante de la Cour, les marchandises soumises à l’accise doivent être considérées comme étant entrées sur le territoire de l’Union à partir du moment où celles-ci ont dépassé la zone dans laquelle se trouve le premier bureau de douane situé à l’intérieur du territoire douanier de l’Union ( 34 ). Dans l’arrêt Dansk Transport og Logistik, la Cour a jugé que « les marchandises de contrebande ayant fait l’objet d’une [...] importation irrégulière sont considérées comme
mises à la consommation » ( 35 ), et que l’obligation de payer l’accise subsiste même si les marchandises soumises à l’accise sont saisies puis détruites ( 36 ).

40. Cette conclusion n’est pas contredite par l’article 7, paragraphe 2, sous d), de la directive sur l’accise, qui énonce qu’« on entend par “mise à la consommation” : [...] l’importation, y compris l’importation irrégulière, de produits soumis à accise, sauf si les produits soumis à accise sont placés, immédiatement après leur importation, sous un régime de suspension de droits » ( 37 ).

41. Comme la Commission l’a relevé dans ses observations écrites, le considérant 9 de la directive sur l’accise énonce que « l’accise étant une taxe à la consommation, aucun droit ne peut être perçu sur des produits soumis à accise qui ont, dans certaines circonstances, été détruits ou irrémédiablement perdus ».

42. Ainsi, je souscris aux observations écrites des gouvernements lituanien et italien, ainsi qu’à celles de la Commission, selon lesquelles les droits d’accise dans l’affaire au principal ne sauraient être considérés comme ayant été suspendus, en particulier au regard de la définition donnée par le législateur de l’Union à l’article 7, paragraphe 2, sous d), de la directive sur l’accise. Aucune disposition de cette directive n’envisage l’extinction des droits d’accise sous l’angle de l’introduction
irrégulière de marchandises dans l’Union suivie de leur saisie et de leur destruction ( 38 ), ou en cas d’extinction de la dette douanière.

2. La TVA

43. Selon une jurisprudence constante de la Cour, les droits à l’importation n’incluent pas la TVA à percevoir pour l’importation de biens ( 39 ). En vertu de l’article 2, paragraphe 1, sous d), de la directive TVA, les importations de biens sont soumises à la TVA. L’article 70 de cette directive pose pour principe que le fait générateur intervient et la taxe devient exigible au moment où l’importation de biens est effectuée ( 40 ).

44. La TVA étant par nature une taxe sur la consommation, elle s’applique aux biens et aux services qui entrent dans le circuit économique de l’Union et qui peuvent faire l’objet d’une consommation ( 41 ).

45. Selon une jurisprudence constante de la Cour, « une dette de TVA pourrait s’ajouter à la dette douanière si le comportement illicite qui a engendré cette dernière permettait de présumer que les marchandises concernées sont entrées dans le circuit économique de l’Union et ont pu faire l’objet de consommation, déclenchant ainsi le fait générateur de la TVA » ( 42 ). Cette présomption peut être renversée lorsqu’un bien a été introduit dans le circuit économique de l’Union sur le territoire d’un
autre État membre ( 43 ), mais ces circonstances ne sont pas celles de l’affaire au principal. Les marchandises illégalement importées sont entrées dans le circuit économique de l’Union dans un seul État membre, à savoir la Lituanie ( 44 ).

46. La Cour a jugé que, « dans la mesure où une marchandise totalement détruite ou irrémédiablement perdue pendant qu’elle se trouvait placée sous le régime du transit communautaire externe ne peut intégrer le circuit économique de l’Union et, partant, ne peut sortir de ce régime, elle ne peut être considérée comme étant “importée”, au sens de l’article 2, paragraphe 1, sous d), de la directive TVA, ni être soumise à la TVA » ( 45 ).

47. Toutefois, l’affaire au principal ne constitue pas un cas de destruction de marchandises illégalement importées, étant donné que celle-ci n’est intervenue qu’un an après leur saisie et encore uniquement sur décision judiciaire.

48. En outre, selon une jurisprudence constante de la Cour, la TVA à l’importation et les droits de douane présentent des traits essentiels comparables en ce qu’ils prennent naissance du fait de l’importation dans l’Union et de l’introduction consécutive des marchandises dans le circuit économique des États membres. Ce parallélisme est confirmé par le fait que l’article 71, paragraphe 1, second alinéa, de la directive TVA autorise les États membres à lier le fait générateur et l’exigibilité de la
TVA à l’importation à ceux des droits de douane ( 46 ). L’importation constitue donc la pierre angulaire de la détermination de l’exigibilité de la TVA et elle a indubitablement eu lieu dans l’affaire au principal.

49. Par ailleurs, il est de jurisprudence constante que, « lorsque les marchandises ont été saisies et simultanément ou ultérieurement confisquées après avoir quitté le premier bureau de douane situé à l’intérieur du territoire douanier de la Communauté, par les autorités [...], le fait générateur de la TVA a déjà eu lieu et la TVA est de ce fait devenue exigible » ( 47 ).

50. Enfin, il est par ailleurs de jurisprudence constante que la seule présence, sur le territoire douanier de l’Union, de marchandises non Union comporte le risque que ces marchandises finissent par être intégrées sans être dédouanées dans le circuit économique des États membres ( 48 ). C’est l’impératif qui fonde le prélèvement de la TVA sur les marchandises illégalement importées. Ce risque s’est concrétisé une fois les marchandises entrées sur le territoire lituanien au-delà de la première zone
douanière de leur lieu d’importation. Cette solution est conforme aux objectifs principaux du régime commun de TVA de l’Union, qu’a rappelés le gouvernement lituanien dans ses observations écrites, et qui consistent à garantir la libre concurrence et la neutralité fiscale sans entraver la libre circulation des biens et des services, en l’absence de disposition de la directive TVA qui éteindrait l’obligation de payer la TVA en cas d’extinction d’une dette douanière.

IV. Conclusion

51. Je propose donc de répondre de la manière suivante aux questions posées par le Lietuvos vyriausiasis administracinis teismas (Cour administrative suprême de Lituanie) :

1) Il convient d’interpréter l’article 124, paragraphe 1, sous e), du règlement (UE) no 952/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 9 octobre 2013, établissant le code des douanes de l’Union en ce sens que la dette douanière s’éteint lorsque des marchandises illégalement importées sont saisies, et ultérieurement confisquées, alors qu’elles ont déjà été introduites, illégalement, sur le territoire douanier de l’Union.

2) Il convient d’interpréter l’article 2, sous b), et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2008/118/CE du Conseil, du 16 décembre 2008, relative au régime général d’accise et abrogeant la directive 92/12/CEE, ainsi que l’article 2, paragraphe 1, sous d), et l’article 70 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, en ce sens que l’obligation de payer l’accise et/ou la TVA ne s’éteint pas dans le cas où des
marchandises de contrebande sont saisies, et ultérieurement confisquées, alors qu’elles ont déjà été introduites, illégalement, sur le territoire douanier de l’Union, même si la dette douanière s’éteint pour la cause prévue à l’article 124, paragraphe 1, sous e), du règlement no 952/2013.

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

( 1 ) Langue originale : l’anglais.

( 2 ) C‑230/08, ci-après l’« arrêt Dansk Transport og Logistik », EU:C:2010:231.

( 3 ) Voir également, par exemple, arrêt du 5 mars 2015, Prankl (C‑175/14, EU:C:2015:142).

( 4 ) Arrêts du 7 mars 2019, Suez II (C‑643/17, EU:C:2019:179, point 47 et jurisprudence citée), ainsi que Dansk Transport og Logistik, point 50.

( 5 ) JO 2013, L 269, p. 1 (ci-après le « code des douanes de l’Union »).

( 6 ) JO 1992, L 302, p. 1 (ci-après le « code des douanes communautaire »).

( 7 ) JO 2009, L 9, p. 12 (ci-après la « directive sur l’accise »). La directive 92/12/CEE du Conseil du 25 février 1992 relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accise (JO 1992, L 76, p. 1) était la mesure pertinente en vigueur à l’époque de l’arrêt Dansk Transport og Logistik. Voir, notamment, article 4, article 5, paragraphes 1 et 2, ainsi qu’articles 6, 7, 8 et 9 de la directive 92/12.

( 8 ) JO 2006, L 347, p. 1 (ci-après la « directive TVA »). À l’époque de l’arrêt Dansk Transport og Logistik, la perception de la TVA relative aux biens importés était régie par l’article 6, paragraphe 1, l’article 7 et l’article 10, paragraphe 3, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme (JO 1977, L 145,
p. 1), telle que modifiée par la directive 1999/85/CE du Conseil, du 22 octobre 1999 (JO 1999, L 277, p. 34) (ci-après la « sixième directive »).

( 9 ) Arrêt du 3 mars 2021, Hauptzollamt Münster (Lieu de naissance de la TVA) (C‑7/20, EU:C:2021:161, point 23 et jurisprudence citée).

( 10 ) D’après les observations écrites de la Commission.

( 11 ) Aux termes de l’article 5, point 33, du code des douanes de l’Union, on entend par « “présentation en douane”: la notification aux autorités douanières de l’arrivée des marchandises au bureau de douane ou en tout autre lieu désigné ou agréé par ces autorités douanières et de leur disponibilité aux fins des contrôles douaniers ».

( 12 ) Arrêt du 2 avril 2009, Elshani (C‑459/07, EU:C:2009:224, point 22 et jurisprudence citée). Sur l’acheminement au bureau de douane ou à la zone franche concernés et le calcul des droits, voir, récemment, arrêt du 7 mars 2019, Suez II (C‑643/17, EU:C:2019:179, points 45 et 46).

( 13 ) Arrêt du 2 avril 2009, Elshani (C‑459/07, EU:C:2009:224, point 23 et jurisprudence citée).

( 14 ) Arrêt du 15 juillet 2010, DSV Road (C‑234/09, EU:C:2010:435, point 31 et jurisprudence citée).

( 15 ) Arrêt du 15 mai 2014, X (C‑480/12, EU:C:2014:329, point 35 et jurisprudence citée), concernant l’interprétation de l’article 203 du code des douanes de l’Union.

( 16 ) Arrêt du 2 avril 2009, Elshani (C‑459/07, EU:C:2009:224, points 24 et 25). Voir également arrêts Dansk Transport og Logistik, point 48, et du 7 mars 2019, Suez II (C‑643/17, EU:C:2019:179, point 47).

( 17 ) Arrêt du 2 avril 2009, Elshani (C‑459/07, EU:C:2009:224, point 27). Ce principe a été développé dans le cadre de l’interprétation de l’article 202 du code des douanes communautaire.

( 18 ) Arrêts du 7 mars 2019, Suez II (C‑643/17, EU:C:2019:179, point 47 et jurisprudence citée), ainsi que Dansk Transport og Logistik, point 50.

( 19 ) Voir la situation factuelle qui se présentait dans l’arrêt du 15 mai 2014, X (C‑480/12, EU:C:2014:329). Cette affaire portait sur l’interprétation de l’article 203 du code des douanes de l’Union.

( 20 ) Par ailleurs, dans ses observations écrites, le gouvernement italien soutient que la seule raison de pouvoir considérer la dette douanière comme étant éteinte dans la procédure au principal était qu’il n’avait pas été possible de les commercialiser. À défaut, la dette demeure.

( 21 ) Mise en italique par mes soins.

( 22 ) Arrêt Dansk Transport og Logistik, point 53.

( 23 ) Arrêt Dansk Transport og Logistik, point 59. Voir également, notamment, arrêt du 2 avril 2009, Elshani (C‑459/07, EU:C:2009:224, points 33 et 34) : « C’est, en effet, aux bureaux de douane, placés stratégiquement aux points d’entrée situés aux frontières extérieures, que les autorités sont le mieux à même d’exercer un contrôle intensif des marchandises entrant dans le territoire douanier de la Communauté, afin d’éviter tant la concurrence déloyale faite aux producteurs communautaires que la
perte de recettes fiscales qu’impliquent les importations frauduleuses. Il s’ensuit que la saisie de marchandises introduites [sur] le territoire douanier de la Communauté en violation des formalités prévues aux articles 38 à 41 du code des douanes [communautaire], qui a lieu au-delà du premier bureau de douane situé à l’intérieur de ce territoire et qui intervient pratiquement par hasard, n’est pas susceptible d’entraîner l’extinction de la dette douanière au sens de l’article 233, premier alinéa,
sous d), du code des douanes [communautaire] ».

( 24 ) Arrêt Dansk Transport og Logistik, point 61.

( 25 ) Arrêts du 7 mars 2019, Suez II (C‑643/17, EU:C:2019:179, point 47 et jurisprudence citée), ainsi que Dansk Transport og Logistik, point 50.

( 26 ) Arrêt du 17 février 2011, Berel e.a. (C‑78/10, EU:C:2011:93, point 46 et jurisprudence citée).

( 27 ) Il n’existe pas de divergences entre les versions en langue anglaise et, par exemple, en langues bulgare, tchèque, allemande, espagnole, française, italienne, polonaise, portugaise, slovaque et suédoise de l’article 124, paragraphe 1, sous e), du code des douanes de l’Union.

( 28 ) La Commission se réfère, outre à la genèse, à l’introduction explicative du code des douanes modernisé du 23 février 2005 (TAXUD/447/2004 Rev. 2), qui énonce que l’objectif de la révision de l’article 233 du code des douanes communautaire était de supprimer la condition supplémentaire « avant qu’il en ait été donné mainlevée » afin que la dette douanière s’éteigne, notamment quand les marchandises concernées sont saisies.

( 29 ) Ce que M. l’avocat général Mengozzi a exposé en détail aux points 64 à 66 de ses conclusions dans l’affaire Elshani (C‑459/07, EU:C:2008:596) : « La réglementation de l’extinction de la dette douanière à la suite d’une saisie et d’une confiscation de marchandises de contrebande, contenue à l’article 233, premier alinéa, sous d), du code des douanes [communautaire], constitue un durcissement du régime prévu à cet égard, jusqu’à l’entrée en vigueur du code des douanes, par le règlement (CEE)
no 2144/87 [du Conseil, du 13 juillet 1987, relatif à la dette douanière (JO 1987, L 201, p. 15)]. Ce règlement prévoyait en effet, à l’article 8, paragraphe 1, sous b), l’extinction de la dette douanière dans tous les cas de confiscation de la marchandise » (point 64) ; « De son côté, le règlement [CE] no 450/2008 [du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, établissant le code des douanes communautaire (code des douanes modernisé) (JO 2008, L 145, p. 1)], qui contient le nouveau code
des douanes devant prochainement entrer en vigueur, repropose, à l’article 86, la ligne “douce” déjà contenue dans le règlement no 2144/87, en établissant notamment que la dette douanière s’éteint “lorsque des marchandises passibles de droits à l’importation ou à l’exportation sont confisquées” [paragraphe 1, sous d)], “lorsque des marchandises passibles de droits à l’importation ou à l’exportation sont saisies et simultanément ou ultérieurement confisquées” [sous e)], ainsi que “lorsque des
marchandises passibles de droits à l’importation ou à l’exportation sont détruites sous surveillance douanière ou abandonnées au profit de l’État” [sous f)]. Également dans le nouveau code des douanes, donc, le moment auquel surviennent la saisie et/ou la confiscation n’est pas pertinent aux fins de l’extinction de la dette douanière » (point 65) ; « Dès lors que le code des douanes actuellement en vigueur se présente, sous l’angle de l’extinction de la dette douanière pour des marchandises de
contrebande, comme une réglementation particulièrement rigoureuse insérée du point de vue chronologique, entre deux réglementations beaucoup moins rigides, il nous semble qu’interpréter l’article 233, premier alinéa, sous d), du code des douanes [communautaire] de manière fortement restrictive conduirait, selon toute probabilité, à forcer la logique interne de l’ordre communautaire et la volonté que l’on est en droit de prêter au législateur » (point 66).

( 30 ) Voir, en outre, sur le rôle du contexte dans l’interprétation des dispositions, mes conclusions dans l’affaire Pinckernelle (C‑535/15, EU:C:2016:996, points 40 à 59).

( 31 ) Arrêt du 2 avril 2009, Elshani (C‑459/07, EU:C:2009:224, point 29).

( 32 ) Arrêt du 8 février 2018, Commission/Grèce (C‑590/16, EU:C:2018:77, point 40).

( 33 ) Arrêt du 28 janvier 2016, BP Europa (C‑64/15, EU:C:2016:62, point 21). Voir également arrêt Dansk Transport og Logistik, point 70.

( 34 ) Arrêt Dansk Transport og Logistik, point 72 et jurisprudence citée. La Cour est parvenue à cette conclusion à propos de l’article 5, paragraphe 1, de la directive 92/12. Néanmoins, comme la Commission le relève dans ses observations écrites, une telle conclusion est applicable à la directive sur l’accise actuellement en vigueur.

( 35 ) Arrêt Dansk Transport og Logistik, point 81.

( 36 ) Arrêt Dansk Transport og Logistik, points 80, 81 et 85.

( 37 ) Arrêt du 8 février 2018, Commission/Grèce (C‑590/16, EU:C:2018:77, point 40).

( 38 ) Comme l’a relevé la Commission dans ses observations écrites, la directive (UE) 2020/262 du Conseil, du 19 décembre 2019, établissant le régime général d’accise (JO 2020, L 58, p. 4) aligne l’extinction des droits d’accise sur celle de la dette douanière, mais cette disposition n’est pas encore en vigueur.

( 39 ) Voir, par exemple, arrêt du 2 juin 2016, Eurogate Distribution et DHL Hub Leipzig (C‑226/14 et C‑228/14, EU:C:2016:405, point 81 et jurisprudence citée). Cette affaire portait sur l’interprétation de la sixième directive, mais le même principe s’applique à la procédure au principal.

( 40 ) Arrêt du 18 mai 2017, Latvijas Dzelzceļš (C‑154/16, EU:C:2017:392, point 67 et jurisprudence citée). Voir également arrêt du 10 juillet 2019, Federal Express Corporation Deutsche Niederlassung (C‑26/18, EU:C:2019:579, point 40).

( 41 ) Arrêt du 18 mai 2017, Latvijas Dzelzceļš (C‑154/16, EU:C:2017:392, point 69 et jurisprudence citée). Le fait générateur de la TVA est l’acte de consommation. Voir, par exemple, arrêt du 2 juin 2016, Eurogate Distribution et DHL Hub Leipzig (C‑226/14 et C‑228/14, EU:C:2016:405, point 65). Voir, plus récemment, arrêts du 1er juin 2017, Wallenborn Transports (C‑571/15, EU:C:2017:417, point 54), et du 10 juillet 2019, Federal Express Corporation Deutsche Niederlassung (C‑26/18, EU:C:2019:579,
point 44).

( 42 ) Arrêt du 3 mars 2021, Hauptzollamt Münster (Lieu de naissance de la TVA) (C‑7/20, EU:C:2021:161, point 30 et jurisprudence citée).

( 43 ) Arrêt du 3 mars 2021, Hauptzollamt Münster (Lieu de naissance de la TVA) (C‑7/20, EU:C:2021:161, point 31 et jurisprudence citée).

( 44 ) Voir arrêt du 3 mars 2021, Hauptzollamt Münster (Lieu de naissance de la TVA) (C‑7/20, EU:C:2021:161).

( 45 ) Arrêt du 18 mai 2017, Latvijas Dzelzceļš (C‑154/16, EU:C:2017:392, point 71).

( 46 ) Arrêt du 3 mars 2021, Hauptzollamt Münster (Lieu de naissance de la TVA) (C‑7/20, EU:C:2021:161, point 29 et jurisprudence citée).

( 47 ) Arrêt Dansk Transport og Logistik, point 94. Voir également arrêts du 1er juin 2017, Wallenborn Transports (C‑571/15, EU:C:2017:417, point 54), et du 2 juin 2016, Eurogate Distribution et DHL Hub Leipzig (C‑226/14 et C‑228/14, EU:C:2016:405, point 65). Bien que cette constatation ait été faite dans le contexte de la sixième directive, elle est également pertinente dans la procédure au principal et s’agissant de la directive TVA.

( 48 ) Arrêt du 15 mai 2014, X (C‑480/12, EU:C:2014:329, point 36 et jurisprudence citée). Mise en italique par mes soins.


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : C-489/20
Date de la décision : 06/10/2021
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Renvoi préjudiciel – Code des douanes de l’Union – Extinction de la dette douanière – Marchandises introduites illégalement sur le territoire douanier de l’Union – Saisie et confiscation – Directive 2008/118/CE – Droits d’accise – Directive 2006/112/CE – Taxe sur la valeur ajoutée – Fait générateur – Exigibilité.

Droits d'accise

Libre circulation des marchandises

Fiscalité

Union douanière

Taxe sur la valeur ajoutée


Parties
Demandeurs : UB
Défendeurs : Kauno teritorinė muitinė.

Composition du Tribunal
Avocat général : Tanchev

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2021:824

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award